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mouvemens pour retrouver les malheureufes victimes de fa négligence. Il y réuffit, & ne craignit point de leur avouer la faute, dont il se sentoit coupable. Il les força enfuite d'accepter, de fes propres deniers, la fomme qu'il leur avoit fait perdre involontaire

ment.

14. Augufte avoit porté une loi, qui marquoit la maniere d'examiner & de juger les crimes d'adultere, & les peines qu'il falloit infliger à ceux qui en étoient convaincus. Quelque tems après, on accufa à son tribunal un jeune homme d'avoir eu commerce avec fa fille Livie. Dans le premier mouvement de fa colere, le Prince faute fur l'accufé, & le frappe rudement: » Souvenez-vous de votre loi, Céfar, lui cria le jeune homme. Augufte s'arrête auffi-tôt, & rentre en lui-même. Il fut fi confus de cet emportement, qui bleffoit la justice, qu'il ne prit, ce jour-là, aucune nourriture.

15. Une vieille femme, injuftement condamnée, alla trouver Philippe, roi de Macédoine, & le pria de prendre connoiffance de fa caufe. « Je n'ai pas lé

tems, ma bonne, lui dit le Monarque. Pourquoi » donc êtes-vous Roi, lui repartit la fuppliante, fi vous » n'avez pas le tems de rendre la juftice à vos fujets?» Philippe admira la généreufe liberté de cette vieille, & l'écouta.

16. Satibarzane, favori d'Artaxerxès-Mnémon, demandoit un jour à ce Prince quelque chofe d'injufte. Le Monarque apprit qu'on lui avoit promis trente mille dariqués, s'il obtenoit ce qu'il demandoit. Il fait auffitôt venir son thréforier, & lui commande de donner au courtifan la fomme qu'on lui avoit fait efpérer »Je n'en ferai pas plus pauvre, quand je vous aurai » fait ce préfent; mais je ferois moins jufte & moins » équitable, si je vous accordois ce que vous me de» mandez. »

17. Marfias, frere d'Antigonus, roi d'une partie de 'Afie, ayant un procès confidérable, pria ce Prince de vouloir bien juger l'affaire chez lui, & non pas en public, «Si nous ne faifons rien de contraire au droit

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répondit le Monarque, » il fera mieux de plaider au » tribunal, en préfence du peuple. »

18. Le règne de l'empereur Alexandre - Sévère fut celui de la juftice. Lorsqu'une charge étoit vacante, il donnoit au public les noms de ceux qu'il vouloit en revêtir, afin qu'il pût faire connoître leurs défauts. Si l'accufation étoit fauffe, les délateurs subissoient le même châtiment que les accufés, lorfque l'accufation étoit bien fondée. Ceux qui fortoient avec gloire de ces examens, l'Empereur leur fourniffoit des habits & des meubles précieux, afin qu'ils puffent foutenir avec éclat l'honneur du nom Romain, & que la difette ou la paffion ne puffent corrompre leurs ames, & leur faire abandonner les fentiers de la juftice: «Un magiftrat » la vend toujours, difoit-il, quand il a acheté le » droit de la rendre. »

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19. On demandoit à Alexandridas, l'un des plus illuftres citoyens de Spårte, pourquoi les fénateurs de Lacédémone employoient plufieurs jours à l'inftruction des affaires criminelles, qui pouvoient conduire à la mort, & pourquoi celui que l'on renvoyoit abfous, reftoit fous la puiffance de la loi ?<«< Plufieurs jours, répondit-il, » font employés à l'inftruction du procès, » parce que, fi l'on fe trompoit en prononçant une » lentence de mort, il ne refteroit aucun moyen de la » réformer; & celui qu'on décharge de l'accufation, » refte foumis à la loi, parce qu'il se peut enfuite trou»ver contre lui de nouvelles charges, qui le rendent » digne de la peine que la loi prononce.»

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20. Un chevalier, qui ne l'étoit pas moins d'indufque de nom, faifoit une dépenfe confidérable; ne fongeoit qu'au jeu & au plaifir, & fans ceffe accumuloit de nouvelles dettes, fans s'embarraffer du payement. Ses créanciers le firent enfin arrêter & mettre en prison. Ses amis fe rendirent auffi-tôt à la cour & s'intérefferent vivement pour lui auprès d'Alfonse V, roi d'Aragon, leur Souverain: ils fupplioient ce Monarque d'ordonner qu'on l'élargît, apportant pour raifon qu'il falloit du moins laiffer la liberté à cet inforuné qui avoit tout perdu. Alfonse leur répondit: «Cet

homme-là n'a pas dépensé fon bien & contracté ces dettes pour le fervice du roi ni de la patrie: il n'a >> cherché uniquement qu'à flatter fon corps ; il eft jufte » que fon corps en faffe maintenant les frais. »

21. Théodoric, roi des Goths, ne fe croyoit placé fur le thrône, que pour faire régner avec lui la juftice qu'il regardoit comme la fonction la plus facrée d'un Souverain. Il donnoit toute fon attention à choisir des magiftrats intégres & éclairés; &, s'il arrivoit qu'il fe fût trompé dans fon choix, il puniffoit févèrement leurs injuftices. Rien ne lui paroiffoit plus indigne, que d'abuser du pouvoir pour opprimer les inférieurs, & ce crime étoit irrémiffible. Il ne pardonnoit pas plus aux juges qui, foit par négligence, foit par une collufion criminelle, différoient de rendre juftice aux opprimés, & favorifoient ainfi les injuftes prétentions des perfonnes puiffantes. On en rapporte un exemple louable dans le principe, mais repréhenfible par l'excès de févérité. Pendant qu'il étoit à Rome, une veuve vint se plaindre à lui de ce qu'ayant depuis trois ans un procès, contre un fénateur nommé Formus, elle n'avoit pu encore obtenir de jugement. Il fit auffi-tôt appeller les juges. «Si vous ne terminez demain cette affaire, leur dit-il, » je vous jugerai vous-mêmes. » Le lendemain la fentence fut rendue. La veuve étant venue remercier le Prince, un cierge allumé à la main, fuivant la coutume de ce tems-là: « Où font les juges? dit Théodoric.» On les amena devant lui : «Eh! » pourquoi, leur dit-il avec indignation, avez-vous » prolongé trois ans une affaire, qui ne vous a coûté » qu'un jour de difcuffion?» Après ce reproche, il leur fit trancher la tête. Cet exemple mit en activité tous les tribunaux.

22. Justin II, voulant rétablir la juftice, nomma Préfet de Conftantinople, un magiftrat intégre, plein de fermeté & de vigueur, qu'il revêtit de toute fon autorité, pour punir les coupables fans diftinétion d'état ni de rang: il déclara que les fentences du Préfet feroient exécutées fans appel, & que le Souverain ne feroit grace à perfonne, Cette déclaration fi terrible

effraya tous ceux que l'iniquité foutenoit; hormis un feul qui fe crut au-deffus de toutes les loix. Une pauvre veuve vint fe jetter aux pieds du Préfet, fe plaignant d'un officier général, qui l'avoit dépouillée de tous fes biens. Le magiftrat, par ménagement pour ce feigneur, qui étoit parent du Prince, lui écrivit pour le prier de rendre juftice, & lui fit préfenter fa lettre par la perfonne offenfée. Pour toute fatisfaction, elle ne reçut que des outrages & de mauvais traitemens. Indigné de cette infulte, le Préfet cite l'accufé devant fon tribunal celui-ci ne répond que par des railleries & des injures contre le juge & le jugement. Au lieu de comparoître, il va dîner au palais, où il étoit invité avec un grand nombre de courtifans. Le Préfet, ayant appris qu'il étoit à la table avec l'Empereur, entre dans la falle du feftin; &, adreffant la parole au Prince : Seigneur, lui dit-il, fi vous perfiften dans la réfolu» tion que vous avez annoncée, de châtier les violen»ces, je continuerai d'exécuter vos ordres; mais, fi » vous renoncez à ce deffein fi digne de vous, s'il faut » que les plus méchans des hommes foient honorés de » votre faveur & reçus à votre table, acceptez la dé» mission d'une charge inutile à vos fujets, & qui ne peut que vous déplaire. » Juftin, frappé d'une remontrance fi hardie: « Je n'ai point changé, répondi-il; pourfuivez par-tout l'injuftice: je vous l'aban» donne; fût-elle affife avec moi fur le thrône, j'en ” defcendrois pour la livrer au châtiment. » Armé de cette réponse, le magiftrat fait faifir le coupable au milieu des convives; le traîne au tribunal, écoute la plainte de la veuve; & comme cet homme, auparavant fi fuperbe, alors interdit & tremblant, ne pouvoit alléguer aucun moyen de défense, il le fait dépouiller, battre de verges, & promener fur un âne, la face tournée en arriere, par toutes les places de la ville. Ses biens furent faifis au profit de la veuve, & cet exemple arrêta pour quelque tems l'ufurpation & la violence. L'Empereur récompenfa la fermeté du Préfet, en le créant Patrice, & lui affurant fa charge pour tout le tems de fa vie.

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23. Un des domeftiques du prince Henri, fils aîné de Henri IV, roi d'Angleterre, avoit été accufé au Banc du Roi, & faifi par ordre de ce tribunal. Le jeune Prince, qui aimoit beaucoup cet homme, regarda cette entreprise comme un manque de respect pour fa perfonne, & n'ayant que trop de flatteurs autour de lui, qui enflammerent encore fon reffentiment par leurs confeils, il fe rendit lui-même au fiége de la juftice, où, fe préfentant d'un air furieux, il donne ordre aux officiers de rendre fur le champ la liberté à fon domestique. La crainte fit baiffer les yeux à tous ceux qui l'entendirent, & leur ôta l'envie de répondre. Il n'y eut que le lord, chef de justice, nommé Sir Villam Gascoigne, qui fe leva fans aucune marque d'étonnement, & qui exhorta le Prince à fe foumettre aux anciennes loix du royaume. « Ou du moins, lui » dit-il, fi vous êtes résolu de fauver votre domesti» que des rigueurs de la loi, adreffez-vous au Roi vo"tre pere, & demandez-lui grace pour le coupable.» Ce fage difcours fit fi peu d'impreffion fur le jeune Prince, qu'ayant renouvellé fes ordres avec la même chaleur, il protesta que, fi l'on différoit un moment à les fuivre, il alloit employer la violence. Le lord, chef de juftice, qui le vit difpofé férieusement à l'exécution de cette menace, leva la voix avec beaucoup de fermeté & de présence d'efprit, & lui commanda, en vertu de l'obéiffance qu'il devoit à l'autorité royale, de fe retirer à l'inftant de la cour, dont il troubloit les exercices par des procédés fi violens. C'étoit attifer, le feu, & fouffler für la flamme. La colere du Prince éclata d'une maniere terrible: il s'approcha du juge avec un air furieux, & crut peut-être l'épouvanter par ce mouvement hardi. Mais Sir Villam, fe rendant maître de lui-même, foutint parfaitement la majesté d'un fiége fur lequel il repréfentoit le Roi. «Prince, s'écria-t-il d'une voix ferme, »je tiens ici la place de » votre fouverain feigneur, de votre roi, de votre » pere: vous lui devez une double obéiffance à ces » deux titres. Je vous ordonne, en fon nom, de re» noncer à votre deffein, & de donner déformais un

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