صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

outre que cette guerre avoit été engagée contre fon avis, la faction contraire lui avoit donné l'exclusion, & avoit fait nommer pour Généraux Charès qui étoit abfolument décrié, & Lyficlès qui ne fe diftinguoit que par une téméraire & préfomptueuse audace. C'eft par le choix de tels Chefs, auquel la cabale feule a part, que fe prépare la ruine des Etats.

Les deux armées campérent près de Chéronée ville de Béotie. Philippe donna le commandement de fon aîle

gauche à fon fils Alexandre, âgé pour fors de feize ou dix-fept ans, aiant mis auprès de lui les plus habiles Officiers qu'il eût : & lui, il fe chargea de la droite. Dans l'autre armée, les Thébains formoient l'aîle droite & les Athéniens la gauche.

[ocr errors]

Au lever du foleil, on donna de part & d'autre les fignaux. Le combat fut rude & opiniâtre, & la victoire. balança lontems entre les deux partis, chacun faifant des efforts extraordinaires de courage & de bravoure. Alexandre, qui dès lors animé d'un beau feu cherchoit à fe fignaler, pour répondre à la confiance de fon pere fous les yeux de qui il combattoit, &

tag. lib.4.

faifoit le premier effai du comman-
dement, montra dans cette bataille
toute la capacité d'un vieux Général,
& le courage déterminé d'un jeune
Officier. Ce fut lui qui enfonça, après
une longue & vigourenfe réfiftance
le Bataillon facré des Thébains, qui
étoit l'élite de leur armée. Le refte
des troupes, qui étoit autour d'Ale-
xandre, animé
animé par fon exemple

[ocr errors]

acheva de la mettre en déroute. A l'aîle droite, Philippe, qui ne vouloit pas céder à fon fils, chargea vivement les Athéniens, & commença à les ébranler, & à leur faire perdre du terrain. Mais ils reprirent bientôt courage, & regagnérent leur prePolian. fra- mier pofte. Lyficlès, l'un des deux Généraux, aiant enfoncé quelques troupes du centre des Macédoniens, fe crut déja victorieux, & plein d'une téméraire confiance, il s'écria: Allons, camarades, pourfuivons-les jufques dans la Macédoine. Philippe s'apercevant que les Athéniens, au lieu de profiter de leur avantage pour prendre fa Phalange en flanc, fuivoient fes troupes avec trop d'ardeur, dit froidement: Les Athéniens ne favent pas vaincre. Auffitôt il donne ordre à fa

Phalange de fe replier fur une petite hauteur; & voiant que les Athéniens en defordre s'abandonnoient à la pourfuite de ceux qu'ils avoient enfoncés, il va fondre fur eux avec fa Phalange, & les prenant en queue & en flanc, les met en déroute. Démofthéne, plus grand homme d'Etat que grand homme de guerre, & plus capable de donner dans fes difcours de falutaires confeils que de les foutenir par un courage intrépide, prit la fuite avec les autres, & jetta bas fes armes. On prétend même que pendant qu'il fuioit, fa robe s'étant accrochée à un chardon, il crut que c'étoit quelque' ennemi qui l'arrétoit, & cria, Donnez-moi la vie. Il demeura fur la place plus de mille Athéniens, & l'on en fit prifonniers plus de deux mille, parmi lefquels fe trouva l'Orateur Démade. La perte ne fut pas

du côté des Thébains.

moindre

Philippe, après avoir érigé un trophée, & offert aux dieux un facrifice en action de graces pour la victoire qu'il venoit de remporter, diftribua des récompenfes aux Officiers & aux foldats, à chacun felon fon mérite & fon rang.

Plut. in vit.

decem orat. pag. 845.

La maniére dont il fe conduifit après le gain de la bataille, montre qu'il est bien plus aifé de vaincre des ennemis armés, que de fe vaincre foi-même, & que de furmonter fes paffions. Au fortir d'un grand repas qu'il avoit donné aux Officiers, enivré également de joie & de vin, il fe tranfporta fur le champ de bataille, & là, infultant'à tous ces morts dont la terre étoit couverte, il mit en chant le commencement d'un Décret que Démofthene avoit dreffé pour exciter les Grecs à cette guerre, & chanta en battant la mefure, Démofthene Péanien, fils de Démofthéne, a dit. Il n'y eut perfonne qui ne fût choqué de voir le Prince fe deshonorer lui-même & flétrir fa gloire par une baffeffe fi indigne d'un Roi & d'un vainqueur: mais tous gardoient le filence. L'Orateur Démade, du nombre des prifonniers, mais toujours libre, fut le feul qui ofât lui en faire fentir l'indécence. Eh Seigneur, lui dit-il, la fortune vous aiant donné le rôle d'Agamemnon, comment ne rougiffez-vous point de jouer celui de Therfite? Cette parole, pleine d'une généreufe liberté, lui ouvrit les yeux, & le fit rentrer en

lui-même. Loin de favoir mauvais gré à Démade, il l'en eftima encore davantage, lui fit toute forte d'amitiés, & le combla d'honneur.

pag. 359.

Depuis ce tems-là il parut changer entiérement d'efprit & de conduite, comme a fi, dit un historien, la converfation de Démade eût adouci fon humeur, & l'eût familiarifé avec les graces Attiques. Il renvoia libres tous les prifonniers Athéniens, fans exiger d'eux aucune rançon, & leur donna à la plupart des habits, dans la vûe de gagner par ce bon traitement, une République auffi puiffante que celle d'Athénes. En quoi, felon Polybe, il Polyb. lib. 5. remporta un second triomphe, plus glorieux pour lui & même plus avantageux que le premier. Car, dans le combat, fon courage n'avoit vaincu que ceux qui s'y trouvérent préfens: ici fa bonté & fa clémence lui gagnérent la ville entiére, & lui foumirent tous les cœurs. Il renouvella avec les Athéniens l'ancien traité d'amitié & d'alliance, & accorda la paix aux Béotiens, après avoir laiffé une bonne garnifon dans Thèbes.

2 Υπὸ τὸ Δημάδα και χάρισι Diod. θαμαληθέντα ταῖς Ατλικαῖς

« السابقةمتابعة »