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» ainfi enlevé & comme arraché d'entre les bras.

Cependant il reprenoit fes efprits, & peu à peu revenant à foi, il reconnoiffoit ceux qui étoient autour de lui; quoique fon mal ne semblât s'être relâché, qu'en ce qu'il commençoit à le fentir. Mais l'efprit étoit encore plus agité que le corps n'étoit malade: car il avoit nouvelles. que Darius pourroit bientôt arriver. Il ne ceffoit de fe plaindre de fa destinée, qui le livroit fans défenfe à fon ennemi, & lui déroboit une fi belle vi ctoire, le réduifant à mourir dans une tente d'une mort obfcure, & bien éloignée de cette gloire qu'il s'étoit promife. Aiant fait entrer fes confidens & fes médecins : » Vous voiez » mes amis, leur dit-il, dans quelle » extrémité preffante la fortune me » réduit. Il me femble entendre déja » le bruit des armes ennemies, & voir » arriver Darius. Il étoit fans doute d'intelligence avec ma mauvaise fortune, quand il écrivoit à fes * Satrapes des lettres fi pleines de Darius, qui fe croioit für de remporter la victoire contre Alexandre avoit écrit à fes Satrages des lertres, portant qu'ils chatiaf fent ce jeune fous & qu'a

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près l'avoir revétu de pour pre par dérifion, ils le lui envoiaffent piés & mains liées. Freinshem. in Q. Curt.

hauteur & de fierté à mon égard. « Mais il n'en eft pas où il pense, pourvû que l'on me traite à mon « gré. L'état de mes affaires ne fouf- « fre pas des remédes lents, ni des «< médecins timides. Une promte mort « m'eft meilleure, qu'une guérifon « tardive. Si les médecins croient <<< avoir quelque reffource pour moi « dans leurs remédes, qu'ils fachent << que je ne cherche pas tant à vivre « qu'à combattre. »

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Cette impatience précipitée du Roi allarmoit tout le monde. Les médecins, qui favoient qu'on les rendroit refponfables de l'événement, n'ofoient hazarder un reméde violent & extraordinaire, d'autant moins que Darius avoit fait publier qu'il donneroit mille talens à quiconque tueroit Trois miliona Alexandre. Philippe, un des médecins d'Alexandre, Acarnanien de nation, qui, l'aiant toujours fervi dès fon bas âge, l'aimoit tendrement, non feulement comme fon Roi, mais comme fon nourriffon, s'élevant, par affection pour fon Maître, audeffus de toutes les confidérations d'une prudence humaine, offrit de lui donner un reméde, qui ne feroit pas

fort violent, & qui ne laifferoit pas de faire un promt effet. Il demandoir trois jours pour le préparer. A cette offre, chacun trembla, excepté celui qui y étoit le plus intéreffé, que le délai feul de trois jours affligeoit dans l'impatience où il étoit de paroître à la tête de fes armées.

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Sur ces entrefaites, Alexandre reçut une lettre de Parménion, qui étoit refté en Cappadoce, celui de tous les Grands de la Cour en qui il fe fioit le plus, par laquelle il lui mandoit de fe garder de Philippe, que Darius avoit corrompu en lui promettant mille talens, & fa fœur en mariage. Cette lettre le jetta dans une grande perplexité, aiant tout le tems de pefer en lui-même les raifons de craindre & d'efpérer qui s'offroient à fon efprit. La confiance en un médecin, dont il avoit connu & éprouvé dès fa premiére enfance le tendre & fidéle attachement, l'emporta bientôt, & diffipa tous fes doutes. Il referma la lettre, & la mit fous fon chevet, fans la communiquer à perfonne.

a Ingentem animo folicitudinem litera incufferant; & quicquid in utramque partem aut me

tus aut fpes fubjecerat, fecreta æftimatione penfabat. Q. Curt.

Le jour venu, Philippe entre avec fon reméde. Alexandre, tirant la lettre de deffous fon chevet, la donne à lire à Philippe en même tems il prend la coupe, & les yeux attachés fur lui, il l'avale fans héfiter, & fans témoigner ni le moindre foupçon, ni la moindre inquiétude. Philippe, en lifant la lettre, avoit témoigné plus d'indignation que de furprife & de crainte, & la jettant fur le lit du Roi: Seigneur, lui dit-il, d'un ton ferme & affuré, votre guérifon me juftifiera bientôt du parricide dont on m'accuse. La feule grace que je vous demande, eft que vous mettiez votre efprit en repos, & que vous laiffiez opérer le reméde, fans fonger à ces avis que vous ont donné des ferviteurs pleins de zêle à la vérité, mais d'un zêle pen difcret, & tout-à-fait hors de faifon. Ces paroles ne raffurérent pas feulement le Roi, mais lui remplirent l'ame de joie & d'efpérance; & prenant Philippe par la main: Soiez vous-même en repos, lui dit-il; car je vous croi doublement inquiet: fur ma guérison d'abord, puis fur votre juftification.

Cependant la médecine le travailla de telle forte, que les accidens qui s'enfuivirent, fortifiérent l'accufation

dé Parménion. Le Roi perdit la pa role, & tomba dans de fi grandes fyncopes, qu'il n'avoit prefque plus de poux, ni d'apparence de vie. Philippe n'oublia rien de ce qui étoit de fon art pour le fecourir. Et quand il le vit revenu à lui, il fe mit à l'entretenir de chofes agréables, lui parlant tantôt de fa mere & de fes fœurs tantôt de cette grande victoire qui s'avançoit à grands pas pour couronner fes premiers triomphes. Enfin, la médecine s'étant rendue maîtreffe, & aiant répandu dans toutes les veines une vertu falutaire & vivifiante l'efprit fut le premier à reprendre fa vigueur, & le corps enfuite, beaucoup plutôt qu'on ne l'avoit efpéré. Trois jours après il fe fit voir à fon armée, qui ne pouvoit se laffer de le contempler, & qui avoit peine à croire ce qu'elle voioit, tant la grandeur du danger l'avoit confternée & abbattue. Il n'y eut point de careffe qu'elle ne fit au Médecin, chacun venant l'embraffer & lui rendre graces comme à un dieu qui avoit fauvé la vie au Prince.

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Outre la vénération que ces peuples ont naturellement pour leurs

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