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riches habits, & d'autres chofes précieuses, avec quatre mille talens, (douze millions) & toutes les richeffes de l'armée, que Darius, comme on la dit, en marchant contre Alexandre, y avoit laiffées. Il en falut bientôt fortir à caufe des maladies

qui fe mirent dans le camp, par l'infection des corps morts dont toute la campagne étoit couverte. Ce Prince s'avança par les plaines vers Babylone, & en quatre jours de marche il arriva à Memnis, où l'on voit dans une caverne la fameufe fontaine qui jette le bitume en fi grande quantité, qu'on tient que les murs de Babylone ont été bâtis avec ce ciment.

Il admira fur tout un gouffre, d'où couloient continuellement des ruif feaux de feu comme d'une fource inépuifable, & un torrent de naphte, qui fe débordant à caufe de fa grande abondance, faifoit un grand lac affez près de ce gouffre. Cette naphte resfemble parfaitement au bitume, mais elle a cela de plus, qu'elle eft fi promte & fi facile à s'enflammer, qu'avant que de toucher à la flamme, elle prend feu à la fimple lueur qui environne cette flamme, & embrafe tout l'air

qui eft entre deux. Les Barbares, voulant faire voir au Roi la force & la fubtilité de cette matiére, en répandirent des goutes çà & là après qu'il fut arrivé à Babylone, dans la rue qui conduifoit à fon logement. Enfuite, fe tenant au bout de la rue, ils approchérent des flambeaux des endroits où il étoit tombé de ces goutes, car il étoit déja nuit. Ces premiéres goutes aiant d'abord pris feu, en un clin d'œil la flamme eut gagné l'au tre bout, de forte que la rue entiére parut un embrafement continu.

Quand Alexandre fut près de Babylone, Mazée, qui s'y étoit retiré après la bataille d'Arbelles, fe vint rendre à lui avec fes enfans déja grands, & lui mit la ville entre les mains. Le Roi fut bien aife de fa venue: car ce n'au

roit pas été une petite entreprise que le fiège d'une ville de cette conféquence, & fi bien pourvûe de tout. Outre qu'il étoit homme de condition & vaillant, il avoit encore acquis beaucoup d'honneur dans la derniére journée, & il pouvoit, par fon exemple, engager les autres à faire comme lui. Il entra dans la ville à la tête de fon armée, comme s'il alloit au com

bat. Les murs de Babylone étoient tout bordés de monde, quoique la plûpart fuffent fortis au-devant de lui impatiens de voir leur nouveau Maître, dont la réputation l'avoit précédé de beaucoup. Bagophane, Gouverneur de la fortereffe, & gardien du tréfor, pour ne pas témoigner moins de zêle que Mazée, fit joncher les chemins de fleurs, & dreffer des deux côtés des autels d'argent, qui ne fumoient pas feulement d'encens, mais de toutes fortes de bonnes odeurs. Après lui, fuivoient les préfens qu'il devoit faire au Roi, favoir des troupeaux de bêtes, & un grand nombre de chevaux, avec des lions & des panthéres qu'on portoit dans leurs cages. Les Mages marchoient enfuite, entonnant des hymnes à leur mode: puis les Caldéens, & avec eux les Devins & les Muficiens de Babylone. Ceuxci avoient accoutumé de chanter les louanges du Roi fur leurs inftrumens, & les Caldéens d'obferver le mouvement des aftres, & la viciffitude des faifons. La cavalerie Babylonienne venoit la derniére, en un fi pompeux appareil, hommes & chevaux, qu'il paffoit toute magnificence. Le Roi

fit marcher le peuple à la queue de fon infanterie, & au milieu de fes gardes entra fur un char dans la ville, & de là au palais, comme en triomphe. Le lendemain il fe fit repréfenter tous les meubles & tout l'argent de Darius. De l'argent qu'il trouva à Babylone, il fit compter, pour récompenfe extraordinaire, à chaque cavalier Macédonien fix mines, (trois cens livres) à chaque cavalier étranger deux mines, (cent livres) à chaque fantaffin de Macédoine deux mines, & à chacun des autres deux mois de leur paie ordinaire. Il ordonna felon l'avis des Mages avec qui il eut plufieurs conférences, qu'on rebâtît les temples que Xerxès avoit démolis, & entr'autres celui de Bélus, qui eft le dieu le plus respecté à Babylone. Il donna le gouvernement de la province à Mazée, & le commandement des troupes qu'il y laiffoit à Appollodore d'Amphipolis.

Alexandre, au milieu du tumulte des guerres, confervoit toujours du goût & de la curiofité pour les fciences. Il s'entretint fouvent avec les Caldéens, adonnés de tout tems à l'étude de l'aftronomie, & qui s'é

apud fimplic

toient acquis dans cette matiére une grande réputation. Ils lui présentérent Porphyr. des obfervations aftronomiques que in lib. 2. de leurs prédéceffeurs avoient faites, qui calo. renfermoient l'efpace de 1903 ans, & remontoient par conféquent jufqu'au tems de Nemrod. Callifthéne, qui accompagnoit Alexandre, les envoia à Ariftote.

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Le Roi demeura plus lontems à Babylone qu'en aucun autre lieu; & ce féjour fit un tort confidérable à la discipline militaire de fes troupes. Le peuple, par principe même de religion, s'y livroit aux plaifirs, aux voluptés, aux débauches les plus infames, fans que les Dames, même les plus qualifiées, gardaffent aucune mefure ni aucune réserve dans leurs déréglemens, dont elles faifoient gloire, loin d'en rougir ou de les cacher. Il faut avouer que cette armée victorieuse de l'Afie, après s'être amollie de la forte & comme détrempée dans les délices de Babylone l'efpace de trente-quatre jours, fe feroit trouvée bien affoiblie pour fournir au refte de fes exploits, fi elle eût eu un ennemi en tête. Mais les recrues qui lui venoient de tems en tems, faifoient

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