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& la liberté, dont ils ufoient avec modération, avoit entr'eux égalé les plus petits aux plus grands. L'amour de la pauvreté & de la juftice faifoit leur propre caractére, & les mettoit en état de fe paffer & de rois & de loix. Le Roi leur fit un bon accueil, & les reçut fous fa protection. Il envoia un des principaux de fa Cour pour reconnoitre leur pays, & même ces autres Scythes qui habitent au-deffus du Bofphore Cimmérien.

Il avoit choifi un lieu propre à bâtir une ville fur l'Iaxarte, pour tenir en bride tant ceux qu'il avoit déja domtés, que les autres dont il fe vouloit rendre maître. Mais ce def fein fut retardé par la révolte des Sogdiens, fuivie bientôt de celle de la Bactriane. Alexandre manda Spitaméne qui lui avoit livré Beffus, le croiant fort propre à remettre ce peuple dans l'obéiffance: mais c'étoit lui qui avoit le plus contribué à ce foulévement. Le Roi, étrangement furpris de cette perfidie, fongea à en tirer vengeance d'une manière éclatante. Il alla en perfonne former le fiége de Cyropolis. C'étoit la derniére ville de l'Empire des Perfes, bâtie par le grand

grand Cyrus dont il portoit le nom
Il envoia en même tems Cratére,
avec deux autres de fes Officiers gé-
néraux, affiéger la ville des Méma-
céniens. On députa à ceux-ci cin-
quante cavaliers, pour les exhorter à
avoir recours à la clémence d'Alexan
dre. Ils furent d'abord affez bien re-
çus: mais la nuit ils furent tous égor
gés. Alexandre avoit réfolu d'épar-
gner Cyropolis en faveur de Cyrus:
car entre ceux qui ont régné fur ces
peuples, il n'y en avoit point qu'il
admirat davantage que ce Roi, &
Sémiramis, comme aiant furpaffé tous
les autres en grandeur de courage, &
en actions héroïques. Il fit donc offris
des conditions très favorables aux
affiégés, qu'une opiniâtreté aveugle
leur fit rejetter, même avec hauteur
& infolence. Aiant pris la ville d'af-
faut, il l'abandonna au pillage, & la
rafa jufqu'aux fondemens. De là il
paffa à l'autre ville, affiégée par
Cratére. Jamais place ne fe défendit
mieux. Alexandre y perdit fes meil-
leurs foldats, & lui-même fut en grand
danger de fa perfonne; car il reçut un
coup de pierre à la tête, dont il tom-
ba évanoui, aiant entiérement perdu
Tome V1.

Y

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connoiffance. En effet l'armée le pleu
ra comme mort. Mais ce Prince, que
nul danger, nul contretems ne pou
voit abbattre, preffa encore plus vi-
vement le fiége, fans attendre que fa
bleflure fût guérie, la colére four-
nifant une nouvelle flamme à fon
ardeur naturelle. Aiant donc fait faper
le mur, il fit une grande brèche, par
où il entra dans la place, qui fut mife
à feu & à fang, & ruinée de fond en
comble. Plufieurs autres villes éprou-
vérent le même fort. C'étoit ici une
troifiéme révolte de la
part des
ples de la Sogdiane, que le double
pardon qu'Alexandre leur avoit ac-
cordé ne put faire revenir à la raifon.
Ils perdirent plus de fix vingts mille
hommes dans ces différens fiéges.
Alexandre envoia après cela Méné-
déme avec trois mille hommes de pié
& huit cens chevaux à Maracande,
d'où Spitamene avoit chaffé la garni-
fon Macédonienne, & s'y étoit en-
fermé.

peu

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Pour lui, il revint camper fur l'axarte, où il ferma de murs tout l'efpace que fon armée avoit occupé, Trais lienes: & y bâtit une ville de foixante ftades de tour, qu'il nomma encore Ale

xandrie, car il en avoit déja bâti plufieurs autres. Il y fit travailler avec tant de diligence, qu'en moins de vingt jours les rempars furent élevés, & les maifons conftruites. Auffi y eutil une grande émulation entre les foldats, à qui auroit le premier fourni fa tâche, car chacun avoit la fienne: & pour peupler fa nouvelle ville, racheta tout ce qu'il put trouver de prifonniers, y établit plufieurs Macédoniens qui n'étoient plus en état de fervir, & y admit auffi plufieurs des gens du pays qui s'offrirent pour l'habiter.

il

pas

Mais le Roi des Scythes qui font au-dela de l'Iaxarte, voiant que cette ville bâtie fur le fleuve étoit un joug qu'on lui impofoit, envoia de nombreuses troupes pour la démolir, & chaffer bien loin de là celles des Macédoniens. Alexandre, qui n'avoit eu deffein d'attaquer les Scythes voiant qu'ils faifoient des courfes à fa vûe avec beaucoup d'infolence, fe trouva fort embarraffé, d'autant plus que dans le même tems il apprit que le corps de troupes qu'il avoit envoié contre Maracande, avoit été taillé en piéces prefque entiérement. Tant

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d'obftacles réunis enfemble auroient rébuté tout autre: les Sogdiens revoltés, les Bactriens de même, les Scythes qui le venoient harcéler, l'é tat où il fe trouvoit, ne pouvant ni fe tenir fur fes piés, ni monter à cheval, ni parler à fes troupes, ni don

ner ordre à rien. Pour comble de chagrin, fon armée paroiffoir déterminée à ne point tenter le paffage du fleuve à la vue des ennemis rangés fur l'autre bord. Le Roi paffa la nuit dans de grandes inquiétudes: mais fon courage le rendoit fupérieur à tout. On lui avoit annoncé des auspices malheureux: il força le Devin à en fubftituer de favorables. Au point du jour il prend fa cuiraffe, & fe vient montrer à fes foldats, qui ne l'avoient point vû encore depuis. fa derniére bleffure. Ils avoient tant de vénération pour leur Roi, que fa préfence feule diffipa d'abord toutes leurs craintes, de forte qu'ils verfoient des larmes de joie, & venoient tous lui rendre leurs refpects, & le preffer de leur faire voir l'ennemi, contre lequel ils avoient auparavant refufé d'aller. Ils travaillérent aux radeaux avec tant d'ardeur, qu'en trois jours il y en eur

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