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minué l'héritage des églises et des chevaliers'. Le prévôt de Villeneuve-le-Roi, près de Sens, se trouvait fréquemment en querelle à ce sujet avec les abbayes du voisinage. Le gouvernement de ces communes de la dernière classe était toujours subordonné à ur prévôt du roi ou du seigneur, et ne garantissait aux habitants que la jouissance de quelques droits civils. Mais c'en était assez pour engager les ouvriers ambulants, les petits marchands colporteurs et les paysans serfs de corps et de biens, à y fixer leur domicile. La charte qui octroyait le droit de bourgeoisie aux nouveaux domiciliés était rédigée et scellée par le fondateur, lorsque l'existence de la ville n'était encore qu'un projet. Illa faisait publier au loin, pour qu'elle fût connue de tous ceux qui voulaient devenir bourgeois et propriétaires de terrains moyennant un prix modique et une taille raisonnable. Voici un exemple de ces sortes de chartes:

« Moi, Henri, comte de Troyes, fais savoir à tous présents et à venir que j'ai établi les coutumes ci« dessous énoncées pour les habitants de ma Ville« neuve (près Pont-sur-Seine) entres les chaussées « des ponts de Pugny :

« Tout homme demeurant dans ladite ville payera, « chaque année, douze deniers et une mine d'avoine « pour prix de son domicile; et s'il veut avoir une << portion de terre ou de pré, il donnera par arpent

1. Quasdam etiam villas novas ædificavit, per quas plures ecclesias et milites de propriis suis hominibus ad eas confugientibus exhæreditasse non est dubium. (Fragm. histor., vitam Ludovici VII summatim complectens, apud scripi. rer. gallic. et francic., t. XII, p.286)

« quatre deniers de rente. Les maisons, vignes et « prés pourront être vendus ou aliénés à la volonté « de l'acquéreur. Les hommes résidant dans ladite << ville n'iront ni à l'ost ni à aucune chevauchée, si « je ne suis moi-même à leur tête 1. Je leur accorde, << en outre, le droit d'avoir six échevins qui admi<<nistreront les affaires communes de la ville, et <<< assisteront mon prévôt dans ses plaids. J'ai arrêté « que nul seigneur, chevalier ou autre, ne pourrait << tirer hors de la ville aucun des nouveaux habitants, « pour quelque raison que ce fus, à moins que ce der<< nier ne fût son homme de corps, ou n'eût un arriéré « de taille à lui payer.

« Fait à Provins, l'an de l'Incarnation 1175*. »

LETTRE XIV

Sur la marche de la révolution communale.

COMMUNES DU MANS ET DE CAMBRAI.

C'est dans la dernière moitié du onzième siècle que les documents historiques présentent, pour la première fois, des villes constituées en communes; mais ces documents sont trop incomplets pour qu'on puisse dire en quel pays cette grande révolution a pris nais

1 Les mots ost et chevauchée sont synonymes d'armée et campagne de guerre.

2. Recueil des Ordonnances des rois de France, t. VI, p. 319 et 320.

sance. Tantôt propagée de ville en ville, tantôt éclatant dans plusieurs lieux d'une manière simultanée, elle embrasse, dans ses développements rapides, tous les pays de langue romane, à l'exception de l'Espagne, que la conquête des Maures plaçait, pour ainsi dire, hors du mouvement européen 1. Ce mouvement avait son foyer partout où subsistaient, depuis le temps des Romains, d'anciennes villes municipales. On eût dit que la race indigène, après avoir plié pendant cinq cents ans sous les institutions de la conquête, voulait, par un effort énergique, s'en affranchir et les éloigner d'elle. Alors, il est vrai, la distinction primitive des races avait disparu, mais elle était en quelque sorte remplacée par la différence des mœurs; les pouvoirs du temps étaient marqués à l'empreinte des mœurs germaniques : le mépris pour la vie et la propriété des faibles, l'amour de la domination et de la guerre, formaient le caractère distinctif des seigneurs et des membres du haut clergé, tandis que le goût du travail et un sentiment confus de l'égalité sociale étaient, chez les habitants industrieux des villes, comme un débris de l'ancienne civilisation. Ce fut dans le mouvement national contre les keisars franks que la classe bourgeoise ou romaine (car au neuvième siècle ces deux mots étaient synonymes) puisa le germe de cette énergie qu'on la vit porter, moins de trois siècles après, dans une nouvelle révolution destinée à extirper des villes la puissance mi

1. Voyez, dans les Considérations sur l'histoire de France, chap. v et vi, les nouveaux aperçus que j'ai donnés sur la révolution munieipale du douzième siècle.

litaire ou féodale, et à la réduire, soit de force, soit de bon gré, à la possession des campagnes.

Si l'on compare attentivement les révolutions municipales du moyen âge aux révolutions constitutionnelles des temps modernes, on sera frappé de certaines ressemblances que ces deux grands mouvements présentent dans leur ensemble et dans leur marche. Si les réformes politiques du douzième siècle s'exécutent dans un bien plus petit cercle que celles du dix-huitième et du dix-neuvième, l'action, au moyen âge, est plus vive, et offre plus d'ensemble, parce que tous ceux qui y coopèrent sont gens de même état, n'ayant qu'un intérêt et qu'une idée. Sur le même espace de terre pour lequel une seule révolution suffit de nos jours, il en fallait des centaines au temps de l'établissement des communes. Il fallait que chaque ville se fît une destinée à part, et courût pour son propre compte toutes les chances de l'insurrection. Au reste, dans ces révolutions municipales et dans celles des grands États modernes, même variété de formes, même empire du hasard dans les circonstances accessoires, même désir de pousser la réforme jusqu'à son dernier terme, et même impuissance d'y parvenir. Sans aucun souvenir de l'histoire grecque ou romaine, les bourgeois des onzième ɑ“ douzième siècles, soit que leur ville fût sous la seigneurie d'un roi ou d'un comte, d'un évèque ou d'une abbaye, allaient droit à la république; mais la réaction du pouvoir établi les ramenait bientôt en arrière. Du balancement de ces deux forces opposées résultait pour la ville une sorte de gouvernement mixte, et c'est ce qui arriva en général dans le nord de la

France, comme le prouvent les chartes de commune. La nouvelle organisation que ces chartes sanctionnent, et qu'elles déclarent inviolable, ne tarde. guère à subir toutes les vicissitudes des constitutions modernes : elle est tour à tour modifiée, détruite et rétablie; la teneur des chartes est violée ou dépassée en sens inverse par les seigneurs et par les villes.

Observez que dans cette comparaison du mouvement communal du douzième siècle avec le mouvement constitutionnel de nos jours, j'ai spécialement en vue le caractère d'universalité et la marche pareillement progressive de ces révolutions, séparées d'ailleurs l'une de l'autre par de si énormes différences d'époque, de causes et de résultats politiques. Je ne veux établir aucune équation forcée entre les idées qui, à de si grands intervalles de temps, ont été le principe de ces deux révolutions propagées de pays en pays par une force irrésistible. Le principe des communes du moyen âge, l'enthousiasme qui fit braver à leurs fondateurs tous les dangers et toutes les misères, c'était bien celui de la liberté, mais d'une liberté toute matérielle, si l'on peut s'exprimer ainsi la liberté d'aller et de venir, de vendre et d'acheter, d'être maître chez soi, de laisser son bien à ses enfants. Dans ce premier besoin d'indépendance qui agitait les hommes au sortir du chaos où le monde omain avait été comme englouti depuis l'invasion des Barbares, c'était la sûreté personnelle, la sécurité de tous les jours, la faculté d'acquérir et de conserver, qui étaient le dernier but des efforts et des vœux. Les intelligences ne concevaient alors rien de

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