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CHARTE DE SAINT-QUENTIN.

« Les hommes de cette commune demeureront en«tièrement libres de leurs personnes et de leurs « biens; ni nous, ni aucun autre, ne pourrons récla«< mer d'eux quoi que ce soit, si ce n'est par juge«ment des échevins; ni nous, ni aucun autre, ne « réclamerons le droit de mainmorte sur aucun « d'entre eux.

« Quiconque sera entré dans cette commune de« meurera sauf de son corps, de son argent et de ses << autres biens.

« Si quelqu'un a commis un délit dont plainte soit « faite en présence du maire et des jurés, la maison « du malfaiteur sera démolie, s'il en a une, ou il << payera pour racheter sa maison, à la volonté du « maire et des jurés. La rançon des maisons à dé« molir servira à la réparation des murs et des forti«fications de la ville. Si le malfaiteur n'a pas de « maison, il sera banni de la ville, ou payera de son « argent pour l'entretien des fortifications.

« Quiconque aura forfait à la commune, le maire « pourra le sommer de paraître en justice; et s'il ne « se rend pas à la sommation, le maire pourra le « bannir; il ne rentrera dans la ville que par la « volonté du maire et des jurés si le malfaiteur a « une maison dans la banlieue, le maire et les gens. « de la ville pourront l'abattre; et si elle est fortifiée. « de manière à ne pouvoir être abattue par eux, nous << leur prêterons secours et main-forte.

<< Si quelqu'un meurt possédant quelque tenure, le << maire et les jurés doivent en mettre aussitôt ses

« héritiers en possession; ensuite, s'il y a lieu a « procès, la cause sera débattue.

<< Si nous faisons citer quelque bourgeois de la «< commune, le procès sera terminé par le jugement « des échevins dans l'enceinte des murs de Saint« Quentin.

<«< Partout où le maire et les jurés voudront for«<tifier la ville, ils pourront le faire sur quelque « seigneurie que ce soit.

« Nous ne pourrons refondre la monnaie, ni en faire << de neuve, sans le consentement du maire et des « jurés.

« Nous ne pourrons mettre ni ban ni assise de de<«<niers sur les propriétés des bourgeois.

« Les hommes de la ville pourront moudre leur « blé, et cuire leur pain partout où ils voudront.

« Si le maire, les jurés et la commune ont besoin << d'argent pour les affaires de la ville et qu'ils lèvent << un impôt, ils pourront asseoir cet impôt sur les hé«<ritages et l'avoir des bourgeois, et sur toutes les « ventes et profits qui se font dans la ville.

« Nous avons octroyé tout cela, sauf notre droit et « notre honneur, sauf les droits de l'église de Saint« Quentin et des autres églises, sauf le droit de nos « hommes libres, et aussi sauf les libertés par nous. << antérieurement octroyées à ladite commune1. >>

Cette charte, obtenue sans aucun trouble, du libre consentement d'un seigneur, donnait aux bourgeois

Cette

1. Recueil des Ordonnances des rois de France, t. XI, p. 270. charte est, comme la précédente, singulièrement réduite, et les articles er sout de même intervertis.

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de Saint-Quentin tous les droits civils avec les garanties essentielles de l'existence municipale; les villes voisines, entre autres celle de Laon, qui était la plus importante, ne tardèrent pas à désirer pour elles-mêmes une semblable destinée. Placés presque à égale distance de Saint-Quentin et de Noyon, les bourgeois de Laon ne pouvaient s'empêcher de tourner les yeux vers ces deux communes. L'exemple de celle de Beauvais leur plaisait moins peut-être, et, selon toute apparence, ils répugnaient à s'engager de sang-froid dans la voie des révolutions violentes; mais une sorte de fatalité les y entraîna malgré eux. Ils commencèrent par des demandes de réforme adressées avec calme, et finirent par un soulèvement accompagné de ce que les guerres civiles peuvent produire de plus atroce.

L'histoire de la commune de Laon a cela de remarquable qu'elle présente en petit, de la manière la plus exacte, le type des grandes révolutions modernes. Au moment où l'action révolutionnaire est parvenue au dernier degré de violence, la réaction arrive, suivie d'une nouvelle série de désordres et d'excès commis en sens contraire. Enfin, quand les partis sont las de se faire une guerre désastreuse et inutile, vient l'acte de pacification, reçu avec joie des deux côtés, mais qui, au fond, n'est qu'une trêve, parce que les intérêts opposés subsistent et prolongent la lutte sous d'autres formes.

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LETTRE XVI

Histoire de la commune de Laon.

La ville de Laon était, à la fin du onzième siècle, l'une des plus importantes du royaume de France. Elle était peuplée d'habitants industrieux, et la force de sa position la faisait considérer comme une seconde capitale. De même qu'à Noyon et à Beauvais. l'évêque y exerçait la seigneurie temporelle. Ce siége épiscopal, l'un des premiers et des plus productifs d royaume, était l'objet de l'ambition des gens pui sants et riches, qui cherchaient à l'obtenir par in trigue et à prix d'argent. Sous une succession a prélats élevés par faveur et presque sans aucun me rite, qui ne songeaient qu'à faire étalage de leur pouvoir et de leur faste, et nullement à bien gouverner la ville comme magistrats et comme évêques, Laon était devenu le théâtre des plus grands dés ordres. Les nobles et leurs serviteurs exerçaien contre les bourgeois le brigandage à main armée. Les rues de la ville n'étaient point sûres la nuit, ni même le jour, et l'on ne pouvait sortir de chez soi sans courir le risque d'être arrêté, volé ou tué. Les bourgeois, à leur tour, suivant l'exemple de la classe

1. Urbi illi tanta... adversitas inoleverat, ut... ad posse, et libitum cujusque rapinis et cædibus respublica misceretur. (Guiberti de Novigent., de Vita sua, lib. III, apud ejusdem Opera omnia, ed. Luc d'Achery, 1651, p. 503.)

2. Nulli noctibus procedenti securitas præbebatur, solum restabat ut distrahi, aut capi, aut cædi. (Ibid.)

supérieure, exerçaient des violences sur les paysans qui venaient au marché de la ville, soit pour vendre, soit pour acheter. Ils les attiraient, sous différents prétextes, dans leurs maisons, et les y tenaient emprisonnés, comme faisaient les seigneurs dans leurs châteaux forts, jusqu'à ce qu'ils eussent payé rançon'. A ces excès commis par les particuliers se joignaient les exactions toujours croissantes du gouvernement épiscopal, les tailles imposées arbitrairement et les poursuites judiciaires contre les gens hors d'état de payer. Les sommes d'argent ainsi levées à force de vexations se partageaient entre les dignitaires de l'église cathédrale et les familles tobles de la ville, dont ceux-ci, pour la plupart, taient parents ou alliés.

Dans l'année 1106, lorsque cet état de désordre venait de s'aggraver encore par une vacance de deux ans dans le siége épiscopal, l'évêché de Laon fut obtenu, à force d'argent, par un certain Gaudri, Normand de naissance, et référendaire de Henri Ier, roi d'Angleterre. C'était un de ces hommes d'église qui, après la conquête de l'Angleterre par Guillaume 'le Bâtard, étaient allés faire fortune chez les Anglais, en prenant le bien des vaincus. Il avait des goûts et des mœurs militaires, était emporté et arrogant, et aimait par-dessus tout à parler de combats et de chasse, d'armes, de chevaux et de chiens. Il avait à

1. Nemo de agrariis ingrediebatur in urbem... qui non incarceratus ad redemptionem cogeretur... (Guiberti de Novigent., de Vita sua lib. III, apud ejusdem Opera omnia, ed. Luc d'Achery, 1651, p. 503.)

2. De rebus militaribus, canibus et accipitribus loqui gratum habuerat. (Ibid.)

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