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XLVIII

Le Pape Innocent III prend sous sa protection le monastère de Prouille avec tous ses biens présents et futurs, et il confirme aux Frères et aux Sœurs la possession de ces biens.

Au Latran, 8 octobre 1215.

Innocentius, Episcopus servus servorum Dei, dilectis filiis Priori, fratribus et monialibus domus Sanctæ Mariæ de Pruliano, salutem et apostolicam benedictionem :

Justis petentium desideriis dignum est Nos facilem præbere assensum, et vota, quæ a rationis tramite non discordant, effectu prosequente complere. Eapropter, dilecti in Domino filii, vestris justis petitionibus inclinati, personas vestras et locum in quo divino estis obsequio mancipati, cum omnibus bonis, quæ in præsentiarum rationabiliter possidetis aut in futurum, præstante Domino, justis modis poteritis adipisci, sub B. Petri et nostra protectione susci pimus. Decimas autem quas apud Fanum jovis venerabilis frater noster episcopus Tolosanus"; possessiones quas apud Gardelam abbas et conventus Sauricini; apud Salcens, Villarium et Fanum jovis nobilis vir Simon comes Montisfortis;

(a) Cf. Cartul., p. 450.

(b) Cf. Cartul., pages 215, 348.

apud Fanum jovis Robertus Malovicinusa; apud Alsonam Petrus Aragon et frater ejus; apud Podium viride Lambertus; apud Lacan Petrus de Vico; apud Apamiam Guillelmus Clareti; apud Agascens Hugo de Lasci; et apud Bram Hugo de Nant; frumentum etiam censuale quod apud Palent Guido de Levi, domui vestræ, pietatis intuitu, contulerunt, alia que bona domus vestræ justo vobis titulo acquisita, sicut ea juste et pacifice possidetis, vobis et per vos eidem domui auctoritate apostolica confirmamus, et præsentis scripti patrocinio communimus.

Nulli ergo omnino hominum liceat hanc paginam nostræ protectionis et confirmationis infringere, vel ei ausu temerario contraire. Si quis autem hoc attemptare præsumpserit, indignationem omnipotentis Dei et Beatorum Petri et Pauli Apostolorum ejus, se noverit incursurum.

Datum Laterani vIII idus octobris Pontificatus nostri anno octavo decimo.

Copie Combefort, Histoire manuscrite de Prouille.
Imprimé Percin, Monum. conv. Tol. ad annum 1216.
Bullar. O. P., t. I, p. 12.

Mentionné Echard, Script. O. P., t. I, p. 12.

COMMENTAIRE

Le B. Dominique va partir pour Rome avec le vénérable évêque de Toulouse, son guide et son soutien. Il peut, en toute sécurité, entreprendre ce voyage, laissant sa double famille en une situation excellente. A Toulouse, en effet, il a mis à la tête de sa jeune colonie de Prêcheurs un « homme de grande sainteté, Bertrand de Garrigue, inexorable dans sa rigueur envers lui-même et mortifiant. sa chair avec dureté. » Frère Bertrand a comme « gravé

(a) P. 313.

(b) P. 358. (c) P. 459.

en tout lui-même l'image du B. Père dont il a été le compagnon dans ses travaux, ses veilles, ses pénitences et ses actes nombreux de vertu (1). » Il est donc capable d'imprimer cette forme de vie en chacun de ceux qui lui ont été confiés. Le temporel est également assuré les dimes assignées aux Frères, les revenus provenant du château de Casseneuil, les aumônes de chaque jour suffiront à la subsistance de tous.

A Prouille, tout pareillement est pour le mieux. Le saint a donné pour supérieur à la double communauté qui y vit dans la prière et le service du Seigneur, Frère Noël, sur qui il peut compter comme sur lui-même. L'administration des possessions du monastère reste aux mains expéri mentées de Guillaume Claret.

Par les documents contenus dans cette première partie du Cartulaire, nous connaissons la plupart de ces possessions. Il en est pourtant quelques-unes dont les actes de donation ou d'acquisition ont complètement échappé à nos investigations (2). D'autres étant indiquées dans la Bulle d'Innocent III, objet de ce commentaire, nous les signalerons rapidement ici avant de suivre l'évêque et le saint dans leur pérégrination à travers la France méri dionale et l'Italie (3).

Et d'abord, dans l'acte pontifical du 8 octobre 1215, il est fait mention d'un Guillaume Claret donnant au monastère des biens sis à Pamiers. Ce donateur n'est-il pas le préposé aux affaires temporelles de Prouille, lequel pré

(1) Cf. Mamachi, Annal. O. P., t. I, app., p. 363.

(2) Une liste ou table de plusieurs de ces actes a été trouvée par M. de Teule dans les papiers de deux érudits de notre temps, MM. de Fortia d'Urban et Rouard, ancien bibliothécaire d'Aix.

(3) Toutefois nous n'avons pu identifier, ni pour le lieu ni pour la personne, la donation attribuée à Hugues de Nant. Il en est de même de la donation de Pierre de Vic, en un lieu dit Lacan. En retour, nous publierons une donation de Pierre de Víc faite le 20 avril 1216.

cisément était de Pamiers? On se rappelle que, lors de la conférence de 1207, il s'était attaché à l'évêque Diego d'Osma et à saint Dominique. Dans les actes ultérieurs concernant Prouille, sauf dans une Bulle d'Honorius III, il n'est plus question, que nous sachions, de cette donation; n'est-ce point encore parce que Guillaume Claret l'a reprise en se reprenant lui-même misérablement vers 1224 (1)?

La Bulle de 1215 mentionne en second lieu une donation faite à Alzonne par Pierre Aragon ou d'Aragon et par son frère. Alzonne est un gros village entre Carcassonne et Prouille, et à six kilomètres environ en ligne directe du monastère. C'était jadis une place forte dont les deux frères étaient seigneurs au temps de saint Dominique. Il y cut à cette époque dans le pays plusieurs familles du nom d'Aragon : celle d'Isarn, archidiacre de Carcassonne, et celle des Pictavin, qui furent faidits pendant la croisade albigeoise. Il semble qu'on ne doit confondre ni l'une ni l'autre avec la famille de Pierre et de son frère, auxquels probablement Montfort, en récompense de leur concours, avait inféodé le château d'Alzonne (2).

Une troisième donation pieuse nous est signalée par la Bulle d'Innocent III, celle du domaine de La Gardelle, sur le territoire de Villa-Savary, donation faite aux Frères et aux Sœurs de Prouille par Bertrand de Pierrelate, abbé du monastère de Sorèze, et par ses religieux. L'abbaye de Sorèze était alors très puissante et possédait de nombreux fiefs en divers endroits de la région. Dû à un sentiment de piété, intuitu pietatis, cet acte de générosité accuse des rapports intimes entre le B. Dominique et l'abbaye que le saint eut l'occasion de visiter fréquem

(1) Cf. plus haut, p. 159, ce qui est dit de Guillaume Claret et de sa défection.

(2) Cf. Hist. Lang., t. VIII, pp. 301 et 601.- Paul Meyer, Chanson de la Croisade, t. II, p. 40. Doat, LXII, fo 35.

1

ment au cours de ses missions apostoliques. Il nous plait. à six siècles et demi de distance, d'avoir à constater en ce moment que Sorèze, par l'entremise du Père Lacordaire, est devenu de nos jours la propriété de cet Ordre que Dominique fondait au début du treizième siècle, et que son illustre disciple, le grand Prêcheur de nos temps, a choisi en ce lieu sa sépulture (1).

Il y aurait eu motif de beaucoup s'étonner si l'un des meilleurs et de plus braves compagnons de Montfort. Gui de Lévis, originaire de Lévy-Saint-Nom, près de Chevreuse, n'avait été, lui aussi, bienfaiteur de Prouille, et, de fait, par la Bulle d'octobre 1215, nous apprenons que le « preux et intrépide maréchal de la foi » a, dès le com mencement, octroyé au monastère une rente annuelle de froment à prendre en un lieu du nom de Palent 2.

(1) Sorèze est situé à une lieue de Revel (Tarn), dans une plaine fertile, au pied du versant nord de la Montagne-Noire. L'abbaye fut fondée, au commencement du neuvième siècle, par le roi Pépin. Détruit de fond en comble, en 1575, par les calvinistes qui, après avoir tout brisé, en chassèrent les religieux, le monastère fut, en 1642, relevé de ses ruines par les Bénédietins de la Congrégation de Saint-Maur, qui lui donnèrent un nouvel éclat. Après la Révolution française, un ancien Bénédietin y installa un collège dont le Père Lacordaire prit plus tard la direction. (Cf. Hist. Lang., t. IV, p. 512.-Bibl. nat., mss. 11,802, 12,697 et 12,698, 12,779, 13,819, etc.)- Le fief de La Gardelle existait jadis dans la commune actuelle de Villa-Savary, au lieu occupé par les deux domaines appelés Joffre et Barbette, et marqués ainsi sur la carte d'état-major; indication conforme à celle-ci, extraite des papiers de M. Rouhard : « 1212, l'abbé de Sorèze, Prieur de Villepinte, et le chapitre de Sorèze donnent à saint Dominique la directe qui est entre le chemin marchand et le lieu de La Gardiole confrontant au décimaire de Villenouvette et de Bram. » La charte de Pépin attribue dès le neuvième siècle au monastère de Sorèze le domaine de Villepinte. (Notes de M. de Teule.)

(2) Nous n'avons pu identifier ce lieu de Palent probablement mal écrit par le copiste qui, au dix-huitième siècle, transcrivit d'après l'original gardé à Prouille cette pièce importante.

Gui de Lévis est l'un des vassaux de Simon de Montfort venus à sa suite pour la croisade. Il tirait son surnom du lieu actuellement appelé Lévy-Saint-Nom, près de Chevreuse, dans l'Ile-de-France. On possède plusieurs chartes de donations faites à l'abbaye de Vaux-Cernay et à celle de Notre-Dame de La Roche, fondée au

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