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teuil dans la maifon de Defpréaux, il courut à elle & l'embraffant: Félicitez-moi, lui dit-il, voici une bourfe de mille louis que le Roi m'a donnée. Elle lui porta auffitôt des plaintes contre un de fes enfans, qui depuis deux jours ne vouloit point étudier; une autre fois, réprit-il, nous en parlerons : livrons-nous aujourd'hui à notre joie. Elle lui repréfenta qu'il devoit en arrivant faire des reprimandes à cet enfant, & continuoit fes plaintes, lorfque Defpréaux qui dans fon étonnement fe promenoit à grands pas, perdit patience, & s'écria : Quelle infenfibilité! peut-on ne pas fonger à une bourfe de mille louis. !

XII.

RACINE avoit envie d'être Courtifan; mais il ne favoit pas l'être. Le Roi le voyant un jour à la promenade avec M. de Cavoye: Voilà dit-il, deux hommes que je vois fouvent enfemble: j'en devine la raifon : Cavoye avec Racine se croit bel efprit:

Racine avec Cavoye fe croit Courti

fap.

XIII.

LE Roi aimoit à entendre lire Racine, & lui trouvoit un talent fingulier faire fentir la beauté des oupour vrages qu'il lifoit. Dans une indifpofition qu'il eut, il lui demanda de lui chercher quelque Livre propre à l'amufer. Racine propofa une des Vies de Plutarque. C'eft un Gaulois, répondit le Roi; Racine répliqua qu'il tâcheroit en lifant de changer les tours de phrase trop anciens, & de fubftituer les mots en ufage aux mots vieillis depuis Amyot ; ce que Racine exécuta avec beaucoup de fuccès.

XIV.

LORSQUE Louis XIV partit pour aller faire le fiege de Mons; il ordonna à fes deux Hiftoriens de le fuivre. Racine qui aimoit une vie plus tranquile s'en difpenfa. Le Roi à fon retour lui en fit des reproches : Je n'a

vois Sire, dit ingénieusement le Poëte, que des habits de Ville. J'en avois ordonné de campagne: mais les Vilque votre Majefté affiégeoit ont été plutôt prifes, que mes habits n'ont été faits.

les

XV.

JE mẹ fouviens, dit Valincourt, qu'étant un jour à Auteuil chez Def préaux, avec Nicole & quelques autres amis d'un mérite diftingué, nous mîmes Racine fur l'Oedipe de Sophocle. Il nous le récita tout entier, le traduifant fur le champ, & il s'émut à un tel point, que tout ce que nous étions d'Auditeurs nous éprouvâmes tous les fentimens de terreur & de compaffion, fur quoi roule cette Tragédie. J'ai vu nos meilleurs Acteurs fur le Théatre: j'ai entendu nos meilleures pieces: mais jamais rien n'approcha du trouble où me jetta ce récit; & au moment même que je vous écris, je m'imagine voir encore Racine avec fon Livre à la main, & nous tous conf ternés autour de lui.

X V I.

RACINE étant allé lire au grand Corneille fa Tragédie d'Alexandre; Corneille lui donna beaucoup de loüanges, mais en même tems lui confeilla de s'appliquer à tout autre genre de Poëfie qu'au Dramatique; Fafsurant qu'il n'y étoit pas propre. Corneille étoit incapable d'une baffe jaloufie. S'il parloit ainfi, c'eft qu'il le penfoit.

XVII.

IL revint à Racine que fon Andromaque étoit beaucoup critiquée par le Maréchal de Créqui & par le Comte d'Olonne. Le Maréchal n'avoit pas la réputation d'aimer trop les femmes, & le Comte n'avoit pas lieu de fe plaindre d'être trop aimé de la fienne. Ra cine fit là-deffus l'Epigramme fuivante qu'il adreffoit à lui-même.

La vraiffemblance eft choqueé en ta piece
Si l'on en croit & d'Olone & Créqui

Créqui dit que Pyrrhus aime trop fa maîtreffe, D'Olone, qu'Andromaque aime trop for

mari.

XVIII.

RACINE Comptoit au nombre des chofes chagrinantes, les loüanges des ignorans ; & lorfqu'il fe mettoit en -bonne humeur, il rapportoit le compliment d'un vieux Magiftrat, qui n'ayant jamais été à la Comédie, s'y laiffa entrainer par une compagnie à caufe de l'afsurance qu'elle lui donna qu'il verroit l'Andromaque. Il fut trèsattentif au fpectacle qui finiffoit par les plaideurs.En fortant il trouva l'Auteur & lui dit : Je fuis très-content Monfieur, de votre Andromaque; c'est une jolie piece. Je fuis feulement étonné qu'elle finiffe fi gaiement : j'avois d'abord eu quelque envie de pleurer, mais la vûe des petits chiens m'a fait rire.

XIX.

RACINE avoit un oncle Chanoine,

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