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l'esprit de ce jeune prince. Elle commenca par écarter d'auprès de lui l'eunuque Antiochus, qui, ayant été jusqu'alors son précepteur, s'occupoit plus des intrigues de cour et de ses propres intérêts, que de l'instruction de son souverain. Ensuite, n'osant confier à personne un emploi si important, elle s'en chargea elle-même. Elle jeta d'abord dans le coeur de Théodose les fondemens d'une piété solide, en le faisant instruire de la doctrine la plus pure, en l'accoutumant à prier souvent, à fréquenter les églises, à les décorer par de riches offrandes, à respecter les ministres des autels, et à honorer la vertu par-tout où elle se rencontroit. Comme les pratiques de religion ne sont pas incompatibles avec les vices du cœur, elle s'étudioit principalement à régler ses mœurs, à lui inspirer l'amour de la justice, la clémence, l'éloignement des plaisirs. Pour la culture de son esprit, elle se fit seconder par des maîtres vertueux, les plus instruits en chaque genre; et, ce qui n'est guère moins utile que d'habiles maîtres, elle lui procura des compagnons d'étude, capables d'exciter son émulation: c'étoient Paulin et Placite qui parvinrent ensuite aux premières dignités. Elle n'oublia point le soin de son extérieur. En même temps qu'elle l'appliquoit à tous les exercices convenables de son âge, elle formoit ellemême ses discours, sa démarche, sa contenance : elle lui enseignoit l'art d'ajouter du prix aux bienfaits, et d'ôter aux refus ce qu'ils ont d'amer et de rebutant. Jusqu'à ce qu'il fût en âge de gouverner, ce fut elle qui dressa les ordonnances; elle les lui faisoit signer, et lui laissoit tout l'honneur du commandement.

8. Un habitant de la province, homme riche, et qui ne connoissoit M. Rollin que de réputation, lui amena son fils pour être pensionnaire au collège de Beauvais, ne croyant pas que cela pût souffrir quelque difficulté. Le célèbre principal se défendit de le recevoir, sur ce qu'il n'avoit pas un pouce de terrain qui ne fût occupé ; et, pour l'en convaincre, il lui fit parcourir tous les logemens. Ce père, au désespoir, ne chercha point à l'exprimer par de vaines exclamations : « Je suis « venu, lui dit-il, exprès à Paris ; je partirai demain :

« je vous enverrai mon fils avec un lit. Je n'ai que <«<lui vous le mettrez dans la cour, à la cave, si « vous voulez; et de ce moment-là, je n'aurai aucune « inquiétude. » Il le fit comme il l'avoit dit. M. Rollin fut obligé de recueillir le jeune homme, et de l'établir dans son cabinet, jusqu'à ce qu'il lui eût ménagé une place ordinaire,

9. Chosroès, roi de Perse, dit le philosophe Sadi, avoit un ministre dont il étoit content, et dont il se croyoit aimé. Un jour, ce ministre vint lui demander la permission de se retirer, «Pourquoi veux-tu me quit « ter, lui dit le monarque ? J'ai fait tomber sur toi la ro«sée de ma bienfaisance; mes esclaves ne distinguent « point tes ordres des miens: je t'ai approché de mon « cœur, ne t'en éloignes jamais. » Mitrame ( ainsi s'appeloit le ministre ), le sage Mitrane répondit : « O roi ! « je t'ai servi avec zèle, et tu m'en as trop récompensé; « mais la nature m'impose aujourd'hui des devoirs sa«< crés : souffre que je les remplisse. J'ai un fils ; il n'a « que moi pour lui apprendre à te servir un jour, comme « je l'ai servi. J'y consens, dit Chosroès, mais à une «condition. Parmi les hommes de bien que tu m'as fait << connoître, il n'en est aucun qui soit aussi digne que toi << d'éclairer et de former l'ame de mon fils: finis ta car« rière par le plus grand service qu'un homme puissa <«< rendre aux autres hommes; qu'ils te doivent un bon << maître. Je connois la corruption de la cour; il ne faut « pas qu'un jeune prince la respire; prends mon fils, et << vas l'instruire avec le tien dans la retraite, au sein de « l'innocence et de la vertu. » Mitrane partit avec les deux enfans; et après cinq ou six années, il revint avec eux auprès de Chosroès, qui fut charmé de revoir son fils, mais qui ne le trouva pas égal en mérite au fils de son ministre. Il sentit cette différence avec une douleur amère: et il s'en plaignit à Mitrane. «Oroi! hui dit « le ministre, mon fils a fait un meilleur usage que le tien « des lecons que j'ai données à l'un et à l'autre : mes « soins ont été partagés également entre eux; mais mon << fils savoit qu'il auroit besoin des hommes ; je n'ai pu <cacher au tien que les hommesauroient besoindelui. »

10.

10. La manière dont les Perses élevoient le futur maître de l'empire, est admirée de Platon, et proposée aux Grecs comme un modèle parfait en ce genre.

Il n'étoit point livré totalement au pouvoir de la nourrice, qui, pour l'ordinaire, étoit une femme d'une basse et obscure condition. On choisissoit parmi les eunuques, c'est-à-dire, parmi les premiers officiers du palais, ceux qui avoient le plus de mérite et de probité, pour prendre soin du corps et de la santé du jeune prince, jusqu'à l'àge`de sept ans, et pour commencer à former ses mœurs. Alors on le tiroit d'entre leurs mains, et on le confioit à d'autres maîtres, pour continuer de veiller à son éducation, pour lui apprendre à monter à cheval dès que ses forces pouvoient le permettre, et pour l'exercer à la chasse. A l'age de quatorze ans, lorsque l'esprit commence à avoir plus de maturité, on lui donnoit pour son instruction quatre hommes des plus vertueux et des plus sages de l'état. Le premier, dit Platon, lui apprenoit la magie, c'est-à-dire, le culte des dieux, selon les anciennes maximes, et selon les lois de Zoroastre, fils d'Oromase; et il lui donnoit en même temps les principes du gouvernement. Le second l'accoutumoit à dire la vérité et à rendre la justice. Le troisième lui enseignoit à ne jamais se laisser vaincre par les voluptés, afin d'être vraiment roi, maître de lui-même et de ses désirs. Le quatrième fortifioit son courage contre la crainte, qui en eût fait un esclave, etlui inspiroit cette sage et noble assurance, si nécessaire pour le commandement. Chacun de ces gouverneurs excelloit éminemment dans la partie de l'éducation qui lui étoit confiée. L'un étoit recommandable sur-tout par la connaissance de la religion et de l'art de régner; l'autre, par l'amour de la vérité et de la justice; celui-là, par la tempérance et l'éloignement des plaisirs; le dernier enfin, par une force et une intrépidité d'ame non communes. 11. Chez les Perses, l'éducation des enfans étoit regardée comme le devoir le plus important, et la partie la plus essentielle du gouvernement. On ne s'en reposoit pas sur l'attention des pères et des mères, qu'une Tome II. H

aveugle et molle tendresse rend souvent incapables de ce soin. L'Etat s'en chargeoit.

Ils étoient élevés en commun d'une manière uniforme. Tout y étoit réglé; le lieu, la durée des exercices, le temps des repas, la qualité du boire et du manger, le nombre des maîtres, les différentes sortes de châtimens. Toute leur nourriture, aussi-bien pour les enfans que pour les jeunes gens, étoit du pain, du cresson et de l'eau; car on vouloit de bonne heure les accoutumer à la tempérance et à la sobriété. D'ailleurs, ces alimens simples et naturels leur fortifioieut le corps, et leur préparoient un fonds de santé capable de soutenir les plus dures fatigues de la guerre, jusques dans l'âge le plus avancé.

Ils alloient aux écoles pour y apprendre la justice, comme ailleurs on y va pour apprendre les lettres et les sciences; et le crime qu'on y punissoit le plus sévèrement, étoit l'ingratitude.

La vue des Perses, dans tous ces sages établissemens, étoit d'aller au devant du mal, persuadés qu'il vaut bien mieux s'appliquer à prévenir les fautes, qu'à les punir. Ils tâchoient de faire en sorte que parmi eux il n'y eût point de méchans.

On étoit dans la classe des enfans jusqu'à seize ou dix-sept ans ; et c'est-là qu'ils apprenoient à tirer de l'arc et à lancer le javelot. Après cela, on entroit dans . celle des jeunes gens c'est alors qu'on les veilloit avec plus de soin, parce que cet âge a plus besoin que tout autre, d'une éducation scrupuleuse. Pendant

années qu'ils restoient dans ce second ordre, ils passoient toutes les nuits aux corps-de-garde, tant pour la sureté de la ville, que pour les accoutumer à la fatigue. Durant le jour, ils venoient recevoir les ordres de leurs gouverneurs, accompagnoient le roi lorsqu'il alloit à la chasse, ou se perfectionnoient dans les exercices.

La troisième classe étoit composée des hommes faits. On y demeuroit vingt-cinq ans. C'est de là qu'on tiroit tous les officiers qui devoient commander dans les troupes, et remplir les différens postes du royaume,

les charges, les dignités. On ne les forcoit point à porter les armes hors du pays, quand ils avoient passé einquante ans.

Enfin, ils passoient dans le dernier ordre où l'on choisissoit les plus sages et les plus expérimentés pour former le conseil public, et les compagnies des juges. Par là tous les citoyens pouvoient aspirer aux premières chages de l'Etat; mais on n'y pouvoit arriver qu'après avoir passé par ces différentes classes, et s'en être rendu capable par tous ces exercices. Ces classes étoient ouvertes à tous; mais il n'y avoit ordinairement que ceux qui étoient assez riches pour entretenir leurs enfans sans travailler, qui les y envoyassent.

12. A Sparte, sitôt qu'un enfant étoit né, les anciens de chaque tribu le visitoient; et, s'ils le trouvoient bien formé, fort et vigoureux, ils ordonnoient qu'il fût nourri, et lui assignoient un héritage. Si, au contraire, ils le trouvoient mal fait, délicat et foible, et s'ils jugeoient qu'il n'auroit ni assez de force, ni assez de santé pour remplir les devoirs pénibles de la vie spartaine, ils le condamnoient à périr, par une cous tume inhumaine, et le faisoient exposer.

Dès la plns tendre enfance, on accoutumoit les citoyens à n'être pas difficiles ni délicats pour le manger, à n'avoir point de peur dans les ténèbres, à ne s'épouvanter pas quand on les laissoit seuls; à ne point se livrer à la mauvaise humeur, aux cris pleurs, aux emportemens ; à marcher nu-pieds pour se faire à la fatigue; à coucher durement, et souvent sur la terre; à porter le même habit en hiver et en été , pour s'endurcir contre le froid et le chaud.

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A l'âge de sept ans, on les distribuoit dans les classes où ils étoient élevés tous ensemble sous la même discipline. Leur éducation n'étoit, à proprement parler, qu'un apprentissage d'obéissance; le législateur ayant bien compris que le moyen le plus sûr d'avoir des citoyens soumis aux lois et aux magistrats, étoit d'apprendre aux enfans, dès leurs premières années, à être parfaitement soumis aux maîtres: Pendant qu'on étoit à table, le maître proposoit des

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