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mille talens à quiconque tueroit le roi de Macédoine. Philippe, un des médecins d'Alexandre, qui, l'ayant toujours servi dès son bas âge, l'aimoit tendrement, non-seulement comme son souverain, mais comme son nourrisson, s'élevant, par affection pour son maître, au dessus de toutes les considérations d'une prudence timide, offrit de lui donner un remède qui, sans être fort violent, opéreroit un prompt effet. Il demanda trois jours pour le préparer. Cependant le monarque recut une lettre de Parménion, par laquelle cet of ficier, en qui il avoit beaucoup de confiance, lui mandoit de se garder de Philippe, parce que Darius l'avoit corrompu par ses promesses. Cette lettre jeta le prince dans une grande perplexité; mais enfin la confiance en un médecin dont il avoit connu et éprouvé, dès sa première enfance, le tendre et fidèle attachement, l'emporta bientôt, et dissipa tous ses doutes. S'armant d'une héroïque fermeté, il referma la lettre, et la mit sous son chevet, sans la communiquer à personne. Le jour venu, Philippe entra avec son remède. Alexandre, tirant la lettre de Parménion, la donne à lire au médecin en même temps, il prend la coupe; et, les yeux attachés sur lui, il l'avale sans hésiter, et sans témoi gner ni le moindre soupçon, ni la moindre inquiétude. Philippe, en lisant la lettre, avoit montré plus d'indignation que de surprise et de crainte; et la jetant sur le lit du roi : « Seigneur, lui dit-il d'un ton ferme << et assuré votre guérison me justifiera bientôt du << parricide dont on m'accuse. La seule grace que je << vous demande est que vous mettiez votre esprit en « repos, et que vous laissiez opérer le remède, sans << songer à cet avis que vous ont donné des serviteurs << pleins de zèle, à la vérité, mais d'un zèle indiscret, » et tout à fait hors de saison. » Ces paroles ne rassurèrent pas seulement le roi, mais remplirent son ame de joie et d'espérance; et prenant Philippe par la main: «Soyez vous-même en repos, lui dit-il; car je << vous crois doublement inquiet, sur ma guérison <«< d'abord, puis sur votre justification. » La médecine fut heureuse. Le monarque recouvra ses forces et sa

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première vigueur; et bientôt il se fit voir à ses soldats, qui adorèrent presque comme un dieu l'habile homme qui leur avoit rendu ce prince chéri.

7. Louis XIV ne fut pas toujours heureux; mais sa constance, l'égalité d'ame, l'héroïque fermeté, avec lesquelles il soutnt ses disgraces, prouvèrent qu'il avoit mérité de l'être. Il perdit son fils unique en 1711; et, quoique très - sensible à cette perte, il sut la supporter en roi. Voyant une princesse qui poussoit des soupirs et des cris, et marquoit une douleur extraordinaire, il lui dit : « Eh! madame, modérez«<vous; j'y perds encore plus que vous à quoi ser<<< vent ces cris? « L'année suivante, il vit périr, dans l'espace de moins d'un mois, le duc de Bourgogne son petit-fils, la duchesse de Bourgogne, et le duc de Bretagne, l'aîné de ses arrière-petits-fils. Ce grand monarque, la gloire de son peuple et de son siècle, la gloire de la religion et de l'état, vit passer comme l'ombre sa nombreuse postérité. Seul dans ses immenses palais, il sembloit se survivre à lui-même. A la place, de tant de fleurs moissonnées dans leur printemps, ses yeux, prêts à se fermer pour toujours, n'apercevoient plus qu'une fleur à peine éclose, foible, chancelante, presque dévorée par le souffle qui avoit séché, consumé tant de tiges florissantes. À la vue de ce nouveau Joas, unique reste du sang de David, arraché aux débris de son auguste maison, ayant peine à se faire jour à travers les ruines sous lesquelles il avoit paru enseveli, tout ce que Louis XIV dit, pour exprimer tant de pertes accumulées, furent ces paroles remplies tout à la fois de sensibilité et de constance : « Voilà donc M. le dauphin!» Cette magnanime constance, il la fit briller avec plus d'éclat encore dans les maladies cruelles qui consumèrent sa vieillesse. On lui fit, en 1686, l'opération de la fistule. Tout le monde trembloit pour ses jours. Ses amis, ses ministres, sa famille, fondoient en larmes. Le médecin, le chirurgien étoient saisis de frayeur, lors-même qu'ils arrachoient, d'une main impitoyable, jusqu'aux dernières racines du mal. Louis seul étoit

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tranquille. Le calme de son ame fut sans nuage: il ne poussa pas la moindre plainte. Le lendemain, il donna. audience aux ambassadeurs, et tint conseil avec ses ministres. L'homme souffroit: le roi se portoit bien. Madame de Maintenon lui dit : « Avouez, sire, que vous << avez bien souffert. Oui, répondit le prince, de « vous voir souffrir. » Malgré les douleurs vives dont il fut attaqué le 24 d'Août 1715, et la foiblesse extrême qui leur avoit succédé, il ne laissa pas de se préparer le lendemain à dîner en public; mais on fut obligé de faire sortir tous ceux qui étoient entrés dans sa chambre, et il ne retint que le maréchal de Villeroi, avec lequel il resta seul plus de deux heures. « Je vois, lui dit-il, que mon heure approche il << faut penser sérieusement à mourir.» Pendant qu'on lui faisoit des incisions qu'on avoit jugé à propos de lui faire à la jambe, pour retarder, s'il se pouvoit les effets de la gangrène dont elle étoit attaquée, son premier médecin lui tenoit le bras, et n'y remarqua aucune émotion considérable. Ces incisions furent inutiles. On délibéra si on lui couperoit la cuisse; et il parut que c'étoit l'exposer à des douleurs qui ne pouvoient rien produire d'avantageux Il se résolut alors à la mort; et comme quelqu'un vouloit le consoler « Il a plus de dix ans dit-il, , que je pense « à mourir en roi très-chrétien. » Le 25 d'Août, jour de St. Louis, il demanda pourquoi ses musiciens ne lui avoient pas donné le bouquet ordinaire. On lui répondit qu'on les en avoit empêchés. « Eh! « non, dit-il; l'état où je suis ne doit rien empêcher. » Ils vinrent; ils lui donnèrent le concert préparé; il témoigna y prendre quelque plaisir. Il fit appeler le lendemain les princes et les princesses de son sang. Tous fondoient en larmes. Il parla sans trouble, sans émotion, avec une constance qu'on ne pouvoit trop admirer dans un prince qu'un instant va dépouiller de tout ce que le monde offre de plus brillant. Après avoir dit à chacun de ceux qui étoient présens ce qu'il convenoit, il tint à son successeur un discours proportionné à l'âge de ce prince encore enfant, et le

finit par ces paroles, qui ne devroient jamais s'effacer du souvenir des monarques : «J'ai chargé mon peuple; <«< les longues guerres m'y ont forcé. Aimez la paix, <<< et ne vous engagez jamais dans une guerre, qu'au<«< tant que l'intérêt de l'état et le bien des peuples << l'exigeront. » Puis, adressant la parole aux princes et à ses premiers officiers : « Vous avez pu voir, leur « dit-il, quelques personnes qui, pendant mon règne, <«< se sont écartées de leur devoir pour un temps, et << s'en sont repenties toute leur vie ; profitez de leur « exemple, et ne le suivez pas. Voyez CONSTANCE, FERMETÉ.

ÉGARDS.

1. ST. ARSÈNE, dans le long cours de sa pénitence, fut souvent affligé de maladies cruelles ; et comme il étoit aussi docile à faire en cet état ce qu'on lui prescrivoit, qu'il l'avoit toujours été à se corriger des moindres défauts dont on l'avertissoit, cette docilité le fit un jour consentir qu'on mît sous lui un matelas et un oreiller, par ordre du prêtre qui avoit soin de lui. Un solitaire, des plus anciens du désert, l'étant venu visiter alors, en fut scandalisé. Le prêtre qui s'en aperçut, le prit en particulier, et le pria de lui dire ce qu'il étoit dans le monde, avant qu'il se fit religieux. J'étois berger, lui dit ce solitaire, et je n'avois pas <«< de quoi vivre. Cela étant, reprit le prêtre, vous << avez donc trouvé plus de commodité dans la vie re<«<ligieuse, que votre premier état ne vous en auroit << donné. Il n'en est pas de même du père Arsène que << vous voyez ; il étoit autrefois le père et le maître des << empereurs; il avoit tout en abondance; il vivoit << dans les délices; il couchoit sur de bons lits: pouvez<< vous donc trouver mauvais que, pour lui procurer << quelque soulagement dans sa vieillesse, et dans une << si grande maladie, nous lui donnions un oreiller << et un matelas, un peu moins durs que la pierre ? »

2. Louis XIV faisoit un conte à ses courtisans. Il avoit promis qu'il les divertiroit berucoup il ne divertit personne, quoiqu'il fût du roi. M. le prince d'Armagnac, qu'on appeloit M. le Grand, sortit alors de la chambre; et le roi dit à ceux qui restoient Messieurs vous avez trouvé mon conte << fort insipide et vous avez raison; mais en vous le << rapportant, je me suis aperçu qu'il y avoit un trait. « qui regarde de loin M. le Grand, et qui auroit pu << l'embarrasser. J'ai mieux aimé le supprimer que « de le chagriner maintenant qu'il est sorti, voici << mon conte. » Il l'acheva, et l'on rit beaucoup.

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3. Quelques seigneurs français s'expliquoient d'une façon trop libre sur les malheurs du roi d'Angleterre. << Henri est mon frère, leur dit St. Louis; c'est un « grand roi si dans ma cour son nom ne le met pas <«< à couvert des langues satiriques, je deviens cou«<pable de le souffrir. Il est à plaindre d'écouter de << mauvais conseils. Après tout, sa piété et ses au<< mônes le rendent estimable, et ne sauroient man« quer d'avoir leur récompense. >>

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ÉLOGES.

1.JE vis, dit le philosophe Sadi, chez un grand sei

gneur fort riche, plusieurs mollaks qui lui donnoient des louanges fort exagérées : « Vous lonez, leur dit-il, <<< celui qui se connoît, et vous l'affligez; vous vantez <«<les plumes du paon, mais il voit ses pieds et sou«pire. Tencz, ajouta-t-il, en leur donnant une somme <«< considérable, recevez cet argent; et je vous en << donnerai davantage, si vous ne me louez plus. » Ils prirent l'argent, et ne louèrent plus le grand seigneur. 2. Archidame, roi de Lacédémone, entendant un homme donner les plus grands éloges à un musicien, et porter jusqu'au ciel sa science et ses talens : « Mon <«<ami, lui dit-il, quels honneurs réservez-vous done

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