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« ce généreux centenaire ; je n'ai qu'un roi, qui est « Philippe V, auquel j'ai prêté serment de fidélité. Je << reconnois l'archiduc pour un grand prince, mais « non pas pour mon souverain. J'ai vécu cent ans sans << avoir rien fait contre mes devoirs; et, pour le peu «< de jours qui me restent à vivre, je ne veux pas me « déshonorer. »

4. Du temps de la Ligue, Nicolas Potier de Novion de Blancménil, président à mortier, fut sur le point d'être condamné à être pendu par les Seize. Comme on alloit le juger, le duc de Mayenne revint à Paris. Ce prince avoit toujours eu pour Blancménil une vénération qu'on ne pouvoit refuser à la vertu. Il alla luimême le tirer de prison. Le président se jeta aux pieds du prince, et lui dit : « Monseigneur, je vous ai obli<<< gation de la vie ; mais j'ose vous demander une plus « grande grace : c'est de me permettre de me retirer auprès de Henri IV, mon légitime souverain. Je << vous reconnoîtrai toute ma vie pour mon bienfai<«<teur, mais je ne puis vous servir comme mon maî<< tre. » Le duc de Mayenne, touché de ce discours, le releva, l'embrassa, et le renvoya à Henri IV.

5. Le duc de Guise, ayant soulevé le peuple de Paris, le roi Henri III fut obligé de se retirer à Chartres, et le duc resta seul maître de la capitale. Après avoir appaisé le tumulte, il alla rendre visite au premier président, Achilles de Harlai. Il le trouva qui se promenoit dans son jardin. Le magistrat s'étonna si peu de sa venue, qu'il ne daigna pas seulement tourner la tête, ni discontinuer sa promenade commencée, laquelle achevée qu'elle fut, et étant au bout de son allée, il retourna, et, en retournant, il vit le duc de Guise qui venoit à lui. Alors il lui dit : « C'est grand'pitié que le << valet chasse le maître! Au reste, mon ame est à Dieu, « mon cœur est à mon roi, et mon corps est entre les << mains des méchans : qu'on en fasse ce qu'on voudra. » 6. L'orateur Marc-Antoine étant cité en justice pour un crime capital dont on le chargeoit, ses accusateurs demandèrent qu'il livrât, pour être appliqué à la tion, un jeune esclave qu'ils prétendoient être complice

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de son maître. Cette circonstance rendit l'instruction du procès fort délicate pour l'accusé. L'esclave étoit extrêmement jeune : Antoine craignoit beaucoup de la foiblesse de l'âge et de la violence des tourmens; mais le généreux serviteur exhorta lui-même son maître à le livrer sans crainte, l'assurant que sa fidélité étoit au-dessus des douleurs les plus cruelles. Il tint parole; et la question, qui étoit très-rigoureuse chez les Romains, les fouets, le chevalet, les lames ardentes ne purent vaincre sa constance, ni le faire parler d'une manière qui nuisît à l'accusé exemple qui prouve que la vraie noblesse est de tous les états.

7. L'empereur Frédéric Barberousse assiégeoit et pressoit vivement, en 1174, la ville d'Alexandrie-dela-Paille, en Italie; et, plein de colère contre les habitans, il faisoit mettre à mort tous ceux qui tomboient en son pouvoir. Un jour on conduisit à ses pieds trois malheureux captifs qu'il condamna sur l'heure à perdre les yeux. Deux de ces infortunés subirent d'abord le supplice; mais lorsqu'on vint au troisième, Frédéric, touché de sa grande jeunesse, lui demanda ce qui l'avoit engagé à se soulever contre son souverain: «Seigneur, << répondit le jeune homme, j'ai suivi les ordres du << maître que je sers dans la ville. Quelque parti qu'il << prenne, jamais je ne l'abandonnerai; et, quoique << ma fidélité me coûte bien cher aujourd'hui, je tâ« cherai encore de lui rendre tous les services dontje << serai capable. » Tant de générosité toucha l'implacable empereur. Il fit grace à ce valet si digne d'éloges, et le chargea de reconduire dans la ville les compagnons de sa captivité.

8. Sanci, maître des requêtes, voulant engager les Suisses au service de Henri III, en 1589, envoya secrétement son valet-de-chambre, pour lui apporter le fameux diamant, connu sous le nom de Sanci, qui fait aujourd'hui l'ornement de la couronne de nos rois, et lui recommanda de prendre garde aux voleurs. «Ils << m'arracheroient la vie, dit le fidelle domestique, << qu'ils ne m'enlèveroient pas le diamant. » Il fit entendre à son maître qu'il l'avaleroit, quelle qu'en fût la

grosseur. Ce qu'avoit craint Sanci, arriva. A son retour de Paris, le valet-de-chambre aperçut une bande de brigands qui l'attendoient au passage. Aussitôt il avale le diamant, sans être remarqué, et continue sa route. Il est arrêté, fouillé, et mis à mort par les voleurs : c'étoit dans la forêt de Dole. Sanci, ne voyant pas revenir son domestique, et connoissant sa droiture, se douta de son malheur. Il fit faire les plus grandes perquisitions: enfin, on lui rapporta qu'un homme avoit été assassiné dans la forêt de Dole, et que les paysans l'avoient enterré. Il se transporte sur les lieux, reconnoît son valet-de-chambre, le fait ouvrir, et retrouve son diamant. Il pleura sincèrement un domestique si fidelle, et admira une générosité qui lui devoit coûter la vie, quand même les voleurs la lui auroient laissée, à cause de la grosseur du diamant. Sanci ne le vouloit avoir qu'afin de le mettre en gage pour une somme très-modique, dont le roi avoit un pressant besoin.

9. Pertharit, roides Lombards, dépouillé de son trône par Grimoald, duc de Bénevent, excitoit la jalousie de l'usurpateur, qui lui conseilla de donner à ses amis un magnifique repas: il vouloit profiter de cette fête. pour lui arracher la vie. Le monarque dépouillé, averti des funestes desseins de son ennemi, feignit de suivre son avis, et parut se livrer à toute la joie du festin. On le crut même ivre, quoiqu'il n'eût bu que de l'eau. A peine se fut-il mis au hit, que son palais fut investi. Alors le fidelle Unulf, son valet-de-chambre, le déguise sousles habits d'un esclave, le charge de quelques meubles, et le fait marcher devant lui, en lui disant des injures, et lui donnant même quelques coups de bâton. Les gardes, trompés par ce stratagême, ne s'opposent point à l'évasion du prince, qui se rend en France. Grimoald, qui croyoit l'avoir entre ses mains, ordonne qu'on le lui amène. Unulf, qui étoit revenu dans l'appartement de son maître, répond à ceux qui viennent le chercher que Pertharitrepose. On réitère les instances; nouveaux refus d'ouvrir. On enfonce la porte; on ne trouve que le seul Unulf, qui déclare enfin la fuite du prince. On le conduit devant le duc de Bénevent, qui demande à

ses courtisans ce qu'ils pensent qu'on doit faire de cet homme? Tous prononcent qu'il mérite la mort. << Vous vous trompez, répond Grimoald; il mérite << plutôt une récompense, pour avoir été fidelle à son <«< maître, aux dépens même de sa vie. »

10. Kollikoffer, l'un des ambassadeurs suisses auprès de Henri III, en 1582, avoit expressément recommandé, en partant pour Paris, qu'on prît le plus grand soin d'un gros chien qu'il aimoit beaucoup. On renferma cet animal pendant cinq à six jours, après lesquels il trompa la vigilance des domestiques, et s'évada. Kollikoffer fut bien étonné, lorsqu'au milieu de l'audience solennelle que le monarque français donnoit aux députés helvétiques, son chien s'élança à son cou, et l'accabla de caresses, Dès qu'il avoit pu ravoir sa liberté, il avoit pris le chemin de Paris sans guide, et avoit suivi jusqu'au Louvre les traces de son maître.

11. Sous le règne de Charles V, roi de France, un nommé Aubri de Montdidier, passant seul dans la forêt de Bondy, fut assassiné et enterré au pied d'un arbre. Son chien resta plusieurs jours sur la fosse, et ne la quitta que quand il fut pressé par la faim. Il vient à Paris, chez un intime ami de son malheureux maître, et parses tristes hurlemens, semble lui annoncer la perte qu'il a faite. Après avoir mangé, il recommence ses cris; va à la porte, tourne la tête, pour voir si on le suit, revient à cet ami de son maître, le tire par l'habit comme pour l'exciter à le suivre. La singularité des mouvemens de ce chien, sa venue sans son maître qu'il ne quittoit jamais, ce maître qui tout d'un coup a disparu, et peut-être cette distribution de justice et d'évé nemens, qui ne permet guère que les crimes restent long.temps cachés, tout cela fit que l'on suivit ce chien. Dès qu'il fut au pied de l'arbre, il redoubla ses cris en grattant la terre, comme pour faire signe de chercher en cet endroit. On y fouilla, et l'on y trouva le corps de l'infortuné Aubri. Quelque temps après, ce chien apercut par hasard l'assassin, que tous les historiens nomment le chevalier Macaire. Il lui saute à la gorge, et l'on a bien de la peine à lui faire làcher prise. Chaque

fois qu'il le rencontre, il l'attaque et le poursuit avec la même fureur. L'acharnement de ce chien, qui n'en veut qu'à cet homme, commence à paroître extraordinaire. On se rappelle l'affection qu'il avoit marquée pour son maître, et en même temps plusieurs occasions où ce chevalier Macaire avoit donné des preuves de sa haine contre Aubri de Montdidier. Quelques autres. circonstances augmentèrent les soupçons. Le roi, instruit de tous les discours que l'on tenoit, fait venir ce chien qui paroît tranquille jusqu'au moment où apercevant Macaire au milieu d'une vingtaine d'autres cour tisans, il tourne, aboie, et cherche à se jeter sur lui.

Dans ce temps-là, on ordonnoit le combat entre l'accusateur et l'accusé, lorsque les preuves du crime n'étoient pas convaincantes. On nommoit ces sortes de combats jugemens de Dieu, parce qu'on étoit persuadé que le Ciel auroit plutôt fait un miracle, que de laisser succomber l'innocence. Le roi, frappé de tous les indices qui se réunissoient contre Macaire jugea qu'il échéoit gage de bataille, c'est-à-dire, qu'il ordonna le duel entre le chevalier et le chien. Le champ clos fut marqué dans l'île Notre-Dame, qui n'étoit alors qu'un terrain vide et inhabité. Macaire étoit armé d'un gros bâton : le chien avoit un tonneau percé pour sa retraite et ses relancemens. On le lâche. Aussitôt il court, tourne autour de son adversaire, évite ses coups, le menace tantôt d'un côté, tantôt d'un autre, le fatigue, et enfin s'élance, le saisit à lạ gorge, et l'oblige à faire l'aveu de son crime en présence du roi et de toute sa cour. La mémoire de ce chien mérita d'être conservée à la postérité par un monument qui subsiste encore sur la cheminée de la grande salle du château de Montargis.

12. A la surprise de Crémone, en 1702, un capitaine des troupes impériales, nommé Magdonel, tira le maréchal de Villeroi d'entre les mains de plusieurs soldats qui venoient de l'arrêter, et qui se disputoient ses dépouilles. Le maréchal se courba pour parler à l'oreille de Magdonel. « Ecoutez, lui dit-il; je suis le « maréchal de Villeroi, je puis faire votre fortune. Si

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