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perdre son temps; que cependant Marthe faisoit tout son possible pour la gagner et l'attirer à Dieu; que, pour cela, faciebat bonam sociam, elle faisoit le bon compagnon avec elle, et entroit en apparence dans ses inclinations mondaines pour ne la pas effaroucher; de sorte que, sachant combien elle aimoit le bon air et le beau langage, elle lui dit des merveilles de la personne et des sermons de Notre-Seigneur, pour l'obliger finement à le venir écouter; que la Magdeleine, poussée de curiosité, y vint en effet mais qu'arrivant tard, comme font les dames de qualité, pour se faire davantage remarquer, elle fit grand bruit; et, passant par-dessus les chaises, se plaça in conspectus Domini, vis-à-vis du prédicateur, et le regarda entre deux yeux avec une hardiesse épouvantable. Le reste de ce pathétique sermon est chargé de passages de poètes et de philosophes cités sans choix et sans goût. 4. Sous le règne précédent, le burlesque étoit si fort à la mode, qu'un docteur osa écrire la passion de Notre-Seigneur en vers burlesques; et un prédicateur extravagant s'avisa de dire que Jésus-Christ, dans le jardin des Olives, avant de boire le calice de sa passion, le porta à la santé du genre humain. Le récit de ce trait ridicule donna lieu à une personne de s'écrier: << Oh! si cela est vrai, avouons de bonne foi que nous << ne faisons guère raison à ce divin Sauveur. »

5. Un jeune abbé, prêchant la passion à une grille, dit que Notre-Seigneur, qui sua du sang de tout son corps dans le jardin des Olives, ne devoit point pleurer autrement, parce que Dieu est tout oil; qu'il garda le silence devant Hérode, parce que l'agneau perd la voix en voyant le loup; qu'il étoit tout nu sur la croix, parce qu'il étoit tombé entre les mains des voleurs; que, pour condamner la vanité des pompes funèbres, il ne voulut point de flambeaux à ses funérailles, pas même les flambeaux du ciel ; et enfin, qu'il voulut être mis dans le sépulcre de pierre, pour nous apprendre que, tout mort qu'il étoit, il avoit horreur de la mollesse.

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6. Un prédicateur, en parlant du relâchement des

prêtres, s'écria : « O pauvre ville! (l'Eglise ) déplo«rable Sion! que tu es aujourd'hui mal gardée! que ta << garnison est poltronne et manchotte ! Tu n'es défen<< due que par une milice qui ne sait manier ni le sabre << de la justice, ni l'épée de la vertu, ni le mousque« ton de la foi, ni l'arquebuse de l'espérance, ni la <<<< carabine de la charité, ni le marteau de la tribulation, << ni les ciseaux de la pénitence, ni le balai de la confes<<sion. Un moment d'attention, chrétienne canaille. »

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7. Un prédicateur, ayant été bien régalé dans une petite ville, dit en chaire en faisant ses adieux : «Vous m'avez bien traité, je veux vous le rendre. « Magdeleine, dont je vais vous faire l'éloge, fera «< le repas ses cheveux seront la nappe ses larmes << l'eau; et pour le Benedicite, nous dirons Ave Maria.»

8. Un prédicateur fort à la mode dans son siècle, commencoit ainsi le panégyrique de S. Paul : « Il y a « un grand différent parmi les théologiens, pour savoir <«< quel nom portoit l'apôtre, que vulgairement on << appelle S. Paul. Les uns veulent qu'il se nomme « Saul, parce qu'on lui donne ce nom dans le chapitre <<< neuvième des Actes des Apôtres : les autres préten«dent qu'il s'appelle Paul, parce qu'on voit ce nom « à la tête de ses Epitres. Quel sentiment croyez<< vous que j'embrasse? ni l'un ni l'autre. Mais quel « nom aura donc ce grand saint? car encore faut-il «< bien qu'il ait un nom. Eh bien ! mes frères , soyez << tranquilles, il en aura un, et vous ferez bien de l'ap» peler avec mot, le Jean de Libor. C'est lui-même qui << se donne ce nom mystérieux: Ego verò jam delibor.»

9. Un panégyriste de S. Pierre prit pour texte : Tu es Petrus: vous êtes Pierre. « Il y a, ajouta-t-il, << trois sortes de pierre pierres à bâtir, pierres à fu<< sil, pierre à cautère. Notre saint est une pierre à <«< bâtir, puisque c'est sur elle que Jésus-Christ a bâti << son Eglise il a été une pierre à fusil, qui a pro<< duit au monde la lumière de la foi: il a été une << pierre à cautère, par le zèle et l'ardeur avec la« quelle il a détruit tout ce que les hommes avoient << de corrompu et d'impur. »

10. Un cordelier, prêchant le jour de S. Nicolas

dans un village, fit le parallèle de ce grand saint avec la Vierge, et dit, entre autres choses: « Elle étoit <«< chaste, il étoit pur. Coupons-lui la barbe, c'est la << Vierge Marie toute pure. »

11. On se rappelle encore les facéties et le goût comique du petit père André, fameux prédicateur du dernier siècle, et religieux du couvent des PP. Augustins à Paris. C'étoit un homme d'un vie trèssainte et très-austère, mais d'une éloquence entièrement ridicule. Quelques traits en feront juger.

Un évêque l'avoit appelé le petit fallot. Pour s'en venger, ce religieux prêchant en présence du prélat, prit pour texte: Vos estis lux mundi. «Vous êtes, mon« seigneur, dit-il en s'adressant à l'évêque, vous êtes <«<le grand fallot de l'Eglise ; mais pour nous, pauvres « diables, nous ne sommes que de petits fallots. »

Un jour, la reine Anne d'Autriche arrivant à son sermon lorsqu'il étoit commencé, il lui dit pour tout compliment: << Soyez la bien-venue, madame : nous « n'en mettrons pas plus grand pot au feu ; » puis il poursuivit son discours sans le reprendre dès le commencement, selon la coutume.

Une autre fois, il compara les quatre docteurs de P'Eglise latine aux quatre rois du jeu de cartes. «< S. Augustin, dit-il, est le roi de coeur par sa grande <«< charité; S. Ambroise est le roi de trèfle par les << fleurs de son éloquence, S. Jérôme est le roi de pi« que par son style mordant; S. Grégoire est le roi « de carreau par son peu d'élévation. »

Il prêchoit devant un évêque; le prélat s'endormit. Pour l'éveiller, le P. André s'avisa de dire au Suisse de l'Eglise : « Fermez les portes ; le pasteur dort, les << brebis s'en iront à qui annoncerai-je la parole de « Dieu ? 4 Cette saillie causa tant de rumeur dans << l'auditoire, que le pontife n'eut plus envie de dormir. On l'avoit chargé d'annoncer une quête pour former la dot d'une demoiselle qui désiroit se faire religieuse. Il dit, avant de commencer son sermon: «Messieurs << on recommande à vos charités une demoiselle qui « n'a pas assez de bien pour faire vœu de pauvreté. »

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Il avoit prêché tout le carême dans une ville où personne ne l'avoit invité à dîner. Il dit dans son adieu « J'ai prêché contre tous les vices, excepté <«< contre la bonne chère; car je ne sais pas comment <«<l'on traite en ce pays-ci. >>

Il prêchoit dans un couvent, et vouloit exciter la charité de ses auditeurs envers les religieux. «Un grand << motif, dit-il, vous y engage: le feu du ciel est tombé << sur leur maison; mais, graces vous soient rendues, ô << mon Dieu ! le tonnerre est tombé sur la bibliothèque << où il n'y avoit point de religieux. Ah! si, par malheur, <«< il fut tombé sur la cuisine, ils seroient tous péris. »

Il devoit prêcher à Paris le soir du dimanche des Rameaux. Le matin, un abbé qui monta en chaire dit: <«< Il y a des gens oisifs qui agitent sérieusement la « question pour savoir si Notre-Seigneur monta sur un « âne, ou sur une ânesse. Je laisse la décision au pré<«< dicateur du soir. » Le petit P. André, prêchant à son tour, dit: «Messieurs, je suis surpris que le prédicateur << du matin m'ait renvoyé une question si aisée à résou«dre. Lisez l'Ecriture, et vous y trouverez ce passage: « Sedens super pullumasina; et, quoiqu'en dise le pré«dicateur, vous verrez d'abord que c'est un âne. »

Il prononçoit aux capucins le panégyrique de saint Francois; et, parlant des miracles de ce grand patriarche « Jésus-Christ, dit-il, nourrit avec cinq << pains cinq mille personnes. Ah! que S. François en<< chérit bien là-dessus! car, si le Sauveur renouvela <«< ce miracle une autre fois, S. Francois tous les jours << avec deux aunes de toile (c'est-à-dire, avec une be« sace ), nourrit plus de cinquante mille religieux : << n'est-ce pas là un miracle perpétuel de la religion? »

Prêchant devant un grand prince, il prit pour texte : Omnis caro fænum, et commença par dire: « Monseigneur, foin de vous! foin de moi! foin de << vous, mesdames! foin de tous les hommes! Omnis « caro fænum. »

12. Un prédicateur ayant pris pour texte : Paul, apôtre, commenca son sermon par ces paroles : « Grande étoit la Diane des Ephésiens, mais plus

<< grand encore le colosse de Rhodes grands étoient «<les présens d'Abraham, mais plus grands encore << ceux de la reine de Saba: grandes et magnifiques <<< étoient les noces du roi Assuérus, parce que l'on << y voit des rois, des monarques, des princes et des « satrapes ; mais plus grandes encore celles de Cana, << parce qu'on y voyoit Jésus-Christ et ses douze <«< apôtres. C'est de l'un de ses apôtres que nous avons <«< à vous entretenir: Paul, apôtre. »

13. Un capucin, lançant dans son sermon des traits sanglans contre les libertins, leur dit avec véhémence: « Vous vous flattez, malheureux, qu'à l'heure de la << mort un bon peccavi raccommodera tout! Insensés ! « vous vous trompez vous ne pourrez jamais dire « que pec, sans pouvoir prononcer cavi; et voilà une « ame fricassée, dont je ne donnerois pas un zest. »

14. Le P. Bourdaloue, dans son sermon de la fausse conscience, dit : « Souvenez-vous que le chemin du << ciel est étroit, et qu'un chemin étroit ne peut avoir << de proportion avec une conscience large. » Cette pensée est assez semblable à celle d'un autre prédicateur qui disoit : « Le ciel n'a point de porte-co3 chère on n'y entre point en carrosse. »

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15. M. le Camus n'étoit point pour les saints nouveaux; et il disoit un jour en chaire sur ce sujet : << Je donnerois cent de nos saints nouveaux ponr un <«< ancien ; il n'est chasse que de vieux chiens : il «n'est châsse que de vieux saints. « Il se plaisoit fort à faire des allusions. Prononçant un jour le panégyrique de S. Marcel, son texte fut le nom latin de ce saint, Marcellus, qu'il coupa en trois pour les trois parties de son discours. Il dit qu'il trouvoit trois choses cachées dans le nom de ce grand prélat :

1.° Que Mar, vouloit dire qu'il avoit une mer de charité et d'amour envers son prochain;

2.° Que cel montroit qu'il avoit eu au souverain degré le sel de la sagesse des enfans de Dieu;

3.° Que lus prouvoit assez comme il avoit porté la lumière de l'Evangile à un grand peuple, et comme lui-même avoit été une lumière de l'Eglise, et la lampe ardente qui brûloit du feu de l'amour divin.

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