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CONTEMPLATION.

UNE fille en réputation de sainteté, passoit lés journées entières en oraison: Son évêque l'apprend; il va la voir. « Quelles sont donc les longues prières « auxquelles vous consacrez vos journées?— Je récite *mon Pater. Le Pater est sans doute une excellente « prière; mais enfin un Pater est bientôt dit. - Oh ! « monseigneur, quelles idées de la grandeur, de la < puissance, de la bonté de Dieu, renfermées dans « ces deux seuls mots Pater noster! en voilà pour « une semaine de méditation. »

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2. S. Jean l'Aumônier, voulant se préparer à la mort, par la pensée de la mort même commanda qu'on travaillat à lui dresser un tombeau; mais il défendit qu'on l'achevât avant qu'il eût rendu le dernier soupir, afin que cet ouvrage, demeurant ainsi imparfait, ceux qu'il en avoit chargés lui vinsent dire tous les ans, au jour d'une fête solennelle, et en présence de tout son clergé : « Votre tombeau, saint «père, demeure imparfait; commandez donc, s'il « vous plaît, qu'on l'achève, puisque vous ne savež « pas, comme dit Jésus-Christ, à quelle heure les voleurs doivent venir. » Une grande mortalitě régnant dans Alexandrie, le saint patriarche alloit voir passer les enterremens : « Il est utile, disoit-il, de contempler les tombeaux et les cercueils des morts. »

3. M. de Monmort passoit la plus grande partie de l'année dans sa maison de campagne, pour s'y livrer tout entier à ses savantes méditations. La vie de Paris. lui paroissoit trop distraite pour des études aussi suivies que les siennes. Du reste, il ne craignoit pas les distractions en détail. Dans la même chambre où il travailloit aux problêmes les plus embarrassans, on jouoit du clavecin, son fils couroit et le lutinoit, et les problêmes ne laissoient pas de se résoudre. Le P. Malebranche en fut plusieurs fois témoin avec étonnement. Il

par

y a bien de la force dans un esprit qui n'est pas maîtrisé les impressions du dehors, même les plus legères. 4. Le savant M. Renau, géomètre illustre, ne s'instruisoit pas par une grande lecture, mais par une profonde méditation. Un peu de lecture jetoit dans son esprit des germes de pensées que la contemplation faisoit ensuite éclore, et qui rapportoient au centuple. Il cherchoit les livres dans sa tête, et les y trouvoit. Ce qu'il y a de plus singulier, c'est qu'il pensoit beaucoup, et passoit peu de temps dans son cabinet et dans la retraite. Il pensoit d'ordinaire au milieu d'une conversation, dans une chambre pleine de monde, même chez les dames. On se moquoit de sa rêverie et de ses distractions, et on ne laissoit même temps, de les respecter. Il faisoit naturellement et sans affectation, ce qu'avoit fait pour une épreuve ou pour une ostentation de ses forces, ce philosophe qui se retiroit dans un bain public pour y méditer.

pas, en

5. Le grand Colbert étant à sa belle maison de Seaux, un de ses amis le surprit à sa fenêtre dans ane profonde rêverie, et considérant attentivement les campagnes qui l'environnoient. Celui-ci prit la liberté de lui demander quel étoit l'objet de cette sérieuse méditation. « En contemplant, lui répondit << Colbert, ces campagnes fertiles qui sont devant « mes yeux, je me rappelois le souvenir de celles << que j'ai vues ailleurs. Quel riche pays que la France! << Ah! si les ennemis du roi vouloient le laisser jouir << de la paix, on pourroit, en peu d'années, procurer << à ses peuples cette aisance que leur promettoit le « grand Henri, son aïeul. »

CONTENTEMENT.'"

1. Des pauvres vinrent dans un monastère d'Oxi

rinque, ville de la basse Thébaïde, pour y recevoir la charité des mains des solitaires. Il y en avoit un entre autres qui, malgré la rigueur du froid, n'avoit n'avoit pour

toute couverture qu'une petite natte de jonc, dont il mit la moitié sons lui, et se couvrit avec l'autre comme il put. Le froid le faisant trembler, il paroissoit toutefois content, et se consoloit lui-même, en disant: Je vous rends graces, mon Dieu! de ce que je suis << réduit en cet état; car combien y a-t-il de riches « qui dans ce moment sont en prison, et qui ont les << fers aux pieds, sans pouvoir jouir de la liberté! au << lieu que je suis heureux comme un roi, pouvant << aller où bon me semble. »

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2. Je rencontrai au bord de la mer, dit le poète Sadi, un religieux qu'un tigre avoit à demi dévoré : il étoit prêt d'expirer, et souffroit des maux inouis. Cependant son visage étoit calme et serein, et l'on voyoit sur son front les traits de la douleur vaincus par ceux de la joie intérieure de son ame: «< Grand « Dieu, s'écrioit-il, je te rends graces de n'être ac<< cablé que de douleur et non de remords ! »

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CONVERSATION.

QUELQU'UN

1. UELQU'UN demandoit au philosophe Anacharsis ce que l'homme avoit de meilleur. « La langue, » répondit-il.

2. « On juge d'un homme par les paroles, disoit « Romulus, comme d'un vase de terre par le son qu'il end. »

3. Voulons-nous plaire dans la conversation? efforcons-nous d'y paroître moins occupés de nous-mêmes que du mérite des autres. Faisons taire notre amourpropre, et laissons briller celui de nos voisins. C'est le sens de cette belle instruction que l'illustre Racine donnoit à son fils aîné, qu'il songeoit à produire dans le monde. << Ne croyez pas, lui dit-il, que ce soient mes << vers qui m'attirent toutes les caresses de la cour. « Corneille fait des vers cent fois plus beaux que les << miens, et cependant personne ne le regarde : on ne l'aime que dans la bouche de ses acteurs; au lieu que,

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sans fatiguer les gens du récit de mes ouvrages, dont je << ne leur parle jamais, je me contente de leur tenir des << propos amusans, et de les entretenir de choses qui << leur plaisent. Mon talent, avec eux, n'est pas de leur

faire sentir que j'ai de l'esprit, mais de leur apprendre << qu'ils en ont. Ainsi, quand vous voyez monsieur le << duc passer souvent des heures entières avec moi, << vous seriez étonné, si vous étiez présent, de voir que << souvent il en sort sans que j'aie dit quatre paroles; << mais peu à peu je le mets en humeur de causer; et il « me quitte encore plus satisfait de lui que de moi. >>

4. Ce ne sont pas toujours les plus grands génies qui brillent le plus dans la conversation. Il faut penser promptement et nettement, pour parler sur mille matières souvent différentes. Les têtes contemplatives n'ont pas ce talent. L'ordre de leurs idées est trop géométrique pour fournir aux dépenses de cette légèreté aimable, qui vole avec rapidité d'objets en objets, qui les effleure tous, et qui paroît tout connoître. M. Nicole, un des premiers écrivains du siècle dernier, ne parloit presque jamais en compagnie ; et quand il lui arrivoit de vouloir dire quelque chose, il cherchoit ses mots, s'exprimoit mal, et fatiguoit même ceux qui l'écoutoient. Il sentoit lui-même ce défaut; mais il ne pouvoit s'en corriger. Aussi disoit-il, au sujet de M. de Tréville, dont la langue secondoit admirablement la promptitude de son imagination: Il me bat dans la chambre; mais il n'est pas plutôt « au bas de l'escalier, que je l'ai confondu. »

CORRECTION.

1. UNE dame irritée contre une personne qui l'avoit

offensée, jura qu'elle s'en vengeroit. Un homme, qui se croyoit raisonnable, mais qui ne le prouvoit pas alors, entreprit de lui démontrer qu'elle avoit tort de se venger. Cette remontrance mal placée la jeta dans une espèce de fureur. Elle jura qu'elle brûleroit

plutôt la maison, et qu'elle poignarderoit son ennemie. Dans ce moment arrive un de ses parens qu'elle considéroit beaucoup. Il s'informe du sujet de sa colère, et dit froidement qu'il n'y avoit pas moyen de souffrir une telle injure. En un mot, il entre dans le ressentiment de la personne offensée. A mesure qu'il parloit, la colère de celle-ci s'appaisoit, et elle parvint à se tranquilliser entiérement. « Comment donc ? « lui dit sou parent, vous voilà toute appaisée! Avez« vous oublié qu'il nous reste une maison à brûler et « une femme à poignarder? Pour moi, je vous assure << que je n'en rabattrois pas un ïota.» La dame, qui avoit été si irritée, se mit à rire ; et l'homme raisonnable à contre-temps apprit qu'il ne faut jamais s'opposer à un torrent; mais, au contraire, lui faciliter un passage, à moins qu'on ne veuille s'exposer à lui voir faire les plus grands ravages.

2. Louis XIV avoit donné au marquis de Barbezieux la place de secrétaire d'état de la guerre, qu'avoit occupée le marquis de Louvois son père. Mécontent de la conduite de ce nouveau ministre, il voulut le corriger, sans le mortifier. Dans cette vue, il s'adresse à son oncle, l'archevêque de Reims, et le prie d'avertir son neveu. C'est un maître instruit de tout; c'est un père qui parle : « Je sais, dit-il, ce que je dois à la mé«moire de M. de Louvois; mais si votre neveu ne << change de conduite, je serai forcé de prendre un << parti : j'en serai fàché; mais il en faudra prendre un. Il a des talens; mais il n'en fait pas bon usage: « il néglige les affaires pour ses plaisirs; il fait attendre trop long-tsmps les officiers dans son anticham« bre; il leur parle avec hauteur, et quelquefois avec « dureté. » Peut-on donner une plus sévère leçon en termes plus doux ?

3. Un grand roi demandant à quelques-uns de ses courtisans les plus intimes, à quoi ils s'étoient occupés dans les prisons où des égarémens de jeunesse les avoient autrefois détenus; l'un répondit qu'il y avoit appris les mathématiques; l'autre, le dessin; un troisièmé, à jouer du luth: «Et vous, reprit le monarque,

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