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<< les devoirs d'un honnête homme, je sois moins consi « déré parce que je ne suis pas du nombre des riches, < permettez-moi de vous dire que l'idée que vous avez <de moi n'est pas juste et vous trompe, soit qu'on vous << ait inspiré ces sentimens, soit que vous en jugiez par « vous-même. Si je ne possède pas de grands biens, « je n'ai jamais cru, et ne crois point encore que mon <«< indigence m'ait jamais fait aucun tort, soit que je me << considère comme peronne publique, ou comme sim «ple particulier. Ma patrie, à cause de ma pauvreté, m'a t-elle jamais éloigné de ces glorieux emplois qui << sont le plus noble objet de l'émulation de tous les « grands cœurs? Je suis revêtu des plus hautes digni«tés.Onme metà la tête des plus illustres ambassadeurs. "J'assiste aux plus augustes cérémonies. On me confie « les plus saintes fonctions du culte divin. Quand il « s'agit de délibérer sur les affaires les plus importan«tes, je tiens mon rang dans les conseils, et j'y donne << mon avis. Je vais de pair avec les plus riches et les plus « puissans ; et si j'ai à me plaindre, c'est d'être trop << loué et trop honoré par mes concitoyens. Pour rem<< plir tous ces emplois, je ne dépense rien du mien, << non plus que les autres Romains. Rome ne ruine «point ses citoyens en les élevant à la magistrature, « C'est elle qui donne tous les secours nécessaires à ceux qui sont dans les charges, et qui les leur four« nit avec libéralité et magnificence: car, il n'en est << pas de notre ville comme de beaucoup d'autres, où « le public est très-pauvre, tandis que les particuliers « possèdent de grandes richesses. Nous sommes tous « riches, dès que la république l'est, parce qu'elle l'est « pour nous. En admettant également aux emplois pu<«<blics le riche et le pauvre, selon qu'elle les en juge << dignes, elle égale tous ses citoyens, et ne reconnoît << entre eux d'autre différence et d'autre distinction que « celle du mérite et de la vertu, Pour ce qui regarde << mes affaires particulières, loin de plaindre mon sort, « je m'estime le plus heureux de tous les hommes, lors« que je me compare aux riches; et je sens en moi<< même, dans cet état, une sorte de complaisance et Tome II. F

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<< même de fierté. Mon petit champ, quoique très-mé«diocre, me fournit tout ce qui m'est nécessaire, << pourvu que j'aie soin de le bien cultiver, et d'en «< conserver les fruits. M'en faut-il davantage? Tout aliment m'est agréable, quand il est assaisonné par la <«< faim: je bois avec les délices quand j'ai grande soif; je <«< goûte les douceurs du sommeil quand j'ai bien fatigué. « Je me contente d'un habit qui me metà couvert des ri<«<gueurs de l'hiver; et entre tous les meubles qui peu<< vent servir à un même usage, le plus simple est celui << qui m'accommode le mieux. Je serois déraisonnable <«<et injuste si j'accusois la fortune: elle me fournit << tout ce que demande la nature. Quant au superflu, <<< elle ne me l'a point donné; mais en même temps ellene m'en a pas inspiré le désir. De quoi puis-je donc me <<< plaindre? Il est vrai que, faute de cette abondance, « je me vois hors d'état de soulager ceux qui sont dans le besoin avantage unique qu'on pourroit envier aux riches. Mais, du moment que je fais part à la répu«blique et à mes amis du peu que je possède, que je <«<rends à mes concitoyens tous les services dont je suis <«< capable, et qu'enfin je fais tout ce qui dépend de « moi, que dois-je me reprocher? Jamais la pensée de «m'enrichir ne m'est venu dans l'esprit. Employé de<< puis long-temps dans l'administration de la républi« que, j'ai eu mille occasions d'amasser de grandes som<< mes d'argent sans aucun reproche. En peut-on désirer <«< une plus favorable que celle qui se présenta il y a << quelques années? Revêtu de la dignité consulaire, je « fus envoyé contre les Samnites, les Lucaniens, les <«Brutiens, à la tête d'une nombreuse armée. Je rava« geai une grande étendue de pays; je vainquis l'en<< nemidans plusieurs batailles; j'emportai d'assaut plu«<sieurs villes pleines de butin et d'opulence; j'enrichis «toute l'armée de leurs dépouilles : je dédommageai «< chaque citoyen de ce qu'il avoit fourni pour les frais « de la guerre ; et ayant recu les honneurs du triom<< phe, je mis encore quatre cent mille écus dans le << trésor public. Après avoir négligé un butin si consi«dérable, dont je pouvois prendre tout ce que j'aurois

« voulu; après avoir méprisé des richesses si juste<«<ment acquises, et sacrifié à l'amour de la gloire les << dépouilles de l'ennemi, me conviendroit-il d'ac<<< cepter l'or et l'argent que vous m'offrez? Quelle <«< idée auroit-on de moi? quel exemple donnerois-je « à mes concitoyens? De retour à Rome, comment << soutiendrois-je leurs reproches, et leurs regards mille fois plus terribles encore? Nos censeurs, ces << magistrats préposés à veiller sur la discipline et sur <«<les mœurs, ne m'obligeroient-ils pas de rendre compte devant tout le monde des présens que vous « voulez me faire accepter? Non, prince; vous garderez, s'il vous plaît, vos richesses; et moi, ma « pauvreté et ma réputation. >>

Le lendemain, le roi d'Epire voulut surprendre l'ambassadeur romain et l'étonner. Jamais il n'avoit vu d'éléphant armé et prêt à combattre. Le prince commanda au capitaine qui conduisoit les exercices de ces animaux guerriers, de placer le plus grand derrière une tapisserie, dans le lieu où il seroit en conversation avec Fabricius, et de le faire paroître tout-à-coup quand il l'ordonneroit. L'officier obéit. On donne le signal; la tapisserie tombe; l'énorme animal se prosterne, se retourne, levant sa trompe sur la tête du Romain, et jetant un cri horrible et épouvantable. Fabricius, tranquillement et sans témoigner ni surprise ni crainte, dit à Pyrrhus en souriant : « Ni votre or ne m'é<< muthier, ni votre éléphant ne m'étonne aujourd'hui. » Le monarque admirant la grandeur d'ame de ce héros; et charmé de sa prudence et de sa sagesse, désira encore avec plus de passion de faire alliance et amitié avec sa ville, au lieu de lui faire la guerre ; il le prit en particulier, il le conjura encore une fois de vouloir bien, après qu'il auroit moyenné un accommodement entre les deux états, s'attacher à lui et vivre dans sa cour, où il auroit la première place parmi tous ses amis et tous ses capitaines. « Je ne vous le conseille<< rois pas, repartit Fabricius en lui parlant à l'oreille et << en souriant, et vous entendez peu vos intérêts; car "ceux qui vous honorent et qui vous admirent présen

<< tement, s'ils m'avoient une fois connu, m'aimeroient << mieux pour leur roi que vous-même. »

2. Les Lacédémoniens résolurent de faire présent à Philopémen, l'un des plus grands hommes de son siècle, d'une somme de cent mille écus, en récompense des services qu'il leur avoit rendus. Il parut en cette occasion, que la vertu de ce fameux personnage étoit bien pure et bien désintéressée; car il ne se trouva pas un seul Spartiate qui osât se charger d'aller lui offrir ce présent; de sorte qu'ils prirent le parti de lui en envoyer faire la proposition par un de ses hôtes, nommé Timolaus. Cet homme étant arrivé à Mégalopolis, logea chez Philopémen, qui le reçut avec toutes les marques de l'amitié la plus sincère. Là, l'envoyé de Sparte eut le temps de considérer la gravité de sa conversation, la frugalité de sa vie, et la sévérité de ses mœurs qui le rendoient inacessible à l'intérêt et à la passion des richesses. Il fut si étonné de ce qu'il vit, qu'il n'osa jamais lui parler du présent qu'il étoit chargé de lui offrir, et qu'il s'en retourna comme il étoit venu. Il fut envoyé une seconde fois, et ne fut pas plus hardi. Enfin, au troisième voyage, il se hasarda quoiqu'avec peine, à déclarer à Philopémen la bonne volonté des Lacédémoniens. Philopémen, après l'avoir écouté tranquillement, partit aussitôt pour Lacédémone. Dès qu'il y fut arrivé, il fit assembler le peuple, et lui parla de la sorte: « Je vous conseille, Lacé« démoniens, de ne pas dépenser votre argent à <«< corrompre les gens de bien, qui sont vos amis; <«<leurs services vous sont acquis, sans que vous leur << en donniez aucune récompense. Gardez plutôt vos << trésors pour gagner et acheter les méchans, et » pour fermer la bouche à ceux qui troublent l'état << par leurs discours séditieux. >>

3. Le roi de Babylone, voulant témoigner par des effets au philosophe Apollonius de Tyane, la grande considération qu'il avoit pour lui, envoya un eunuque chargé de lui dire qu'il pouvoit faire dix demandes à son gré, qui toutes lui seroient accordées. Apollonius se rendit donc à la cour; et tous les seigneurs

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Et vous,

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S'étant assemblés pour le voir et pour l'entendre il éleva la voix et dit au monarque : « Prince au «lieu de dix graces, je ne vous en demanderai qu'une << qui me tiendra lieu de toutes. Vous avez, non loin « d'ici, une colonie de Grecs, qui n'ont qu'un petit « espace de terre qu'ils cultivent avec soin; mais aux « approches de la récolte, des Barbares, leurs voisins, << viennent tout ravager, et les privent du fruit de leurs « travaux. Je vous supplie de les mettre à l'ombre de « votre protection. » Le roi lui répondit : « Les Grecs << dont vous me parlez, étoient regardés comme mes << ennemis, et les ennemis de mes pères ; mais désor<< mais ils seront traités comme mes amis. Au reste « pourquoi refusez-vous neuf dons que je suis disposé « à vous faire ? C'est que je n'ai point encore << acquis d'amis dans ce pays-ci. n'avez« vous donc besoin de rien? Il me faut des fruits << et du pain avec ces mets je fais bonne chère. » 4. Périclès avoit tant d'éloignement pour les présens, il méprisoit si fort les richesses, il étoit tellement au-dessus de toute cupidité et de toute avarice, que, quoiqu'il eût rendu Athènes l'une des plus opulentes cités de l'univers, et qu'il eût manié longtemps avec un souverain pouvoir les finances de la Grèce, il n'augmenta pas d'une seule dragme le bien que son père lui avoit laissé. Telle fut la source et la cause véritable du crédit suprême de Périclès dans la république, digne fruit de sa droiture et de son parfait désintéressement. Il employoit ses richesses à servir utilement l'état en s'attachant d'habiles coopérateurs dans son ministère, en aidant de bons officiers dépourvus souvent des biens de la fortune, en faisant du bien à tout le monde.

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5. Dans le temps que le célèbre Lysandre commandoit la flotte des Lacédémoniens, il sut, par sa souplesse et par ses manières flatteuses, gagner les bonnes graces de Cyrus, fils du roi de Perse. « Je veux vous << prouver mon amitié, lui dit un jour ce jeune prince: demandez, je ne vous refuserai rien. » Lysandre uşa en digne Spartiate de la permission qu'on lui donnoit.

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