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un monastère sous l'invocation de S. Servais, son patron de prédilection'). Il voulut être enterré dans cette église, ainsi que plus tard son épouse, sainte Mathilde). Les chroniques de Maestricht disent même que la sainte reine, voyant que, par la vénération de S. Servais, son fils Otton, surnommé le Grand, était arrivé à l'empire, et la couronne impériale transférée des Francs aux Germains, obtint de lui la translation du corps de S. Servais dans le monastère de Quedlimbourg. Il y resta trois ans. Ce furent pour les Maestrichtois trois années d'une tristesse inconsolable, car ils avaient, avec leur saint Patron, perdu, dit le vieux poète, « la joie de leur cœur et la lumière de leurs yeux »). Aussi épièrent-ils l'occasion de reprendre leur trésor. Quelques-uns d'entre eux s'étaient rendus à Quedlimbourg pour la fête de S. Servais. La joie des Saxons n'était pas moins vive que la douleur des Maestrichtois. Les habitants de Quedlimbourg célébrèrent la fête, <«< comme on fait aux jours solennels », observe notre vieux poète, en invitant leurs amis à table. Ces festivités avaient duré deux jours et une nuit. La deuxième nuit, tous, fatigués de joie, dormaient d'un profond sommeil. Les Maestrichtois, voyant leur heure arrivée, coupent les cordes des cloches, descendent la châsse de l'autel, et reprennent leur route, chargés de ce doux fardeau. Ils sont déjà loin quand les Saxons réveillés envoient des gens à la recherche du trésor: même, dit-on, comme autrefois pour les Israélites, une nuée les cacha aux yeux de leurs persécuteurs, et bientôt, le 7 Juin, «le grand Seigneur de Maestricht », rentre « dans sa propre maison » aux acclamations de toute la ville). Il est vrai que cet enlèvement de la châsse par l'empereur Otton n'est pas rapporté dans la vie de sainte Mathilde, aux prières de laquelle il se fit; mais ce silence ne doit pas beaucoup nous émouvoir le biographe

') HEYNRIJCK VAN VELDEKEN, Sinte Servatius Legende, l. 2 v. 1133.

2) Acta SS., Maii t. III p. 219 n. 35.

5) VAN VELDIKEN, loc. cit. v. 776.

*) Déjà au 12 siècle, on célébrait à Maestricht, le 7 Juin, cette Translation de

S. Servais avec celle qui eut lieu sous Charles Martel. VAN VELDEKEN, loc. cit. v. 944 et 1474-1483.

aura volontiers omis ce détail, croyant qu'il ne contribuait pas à la gloire de la Sainte.

L'année 1001 voit expirer près du tombeau de S. Servais le dernier rejeton de la seconde maison royale de France'). Une plaque sépulcrale en plomb, trouvée en 1666 dans la petite crypte de l'église, portait en latin cette inscription: «Charles, comte de noble race, fils de Louis, frère de Lothaire, roi des Francs, an du Seigneur MI ». Ainsi S. Servais a consolé les derniers jours de cette illustre race, dont il avait protégé, comme nous l'avons vu sous Charles Martel, la grandeur naissante. La mémoire de ce dernier roi Carolingien était tellement tombée en oubli, que la plupart des historiens rapportent sa mort à l'an 991, à Orléans. Ainsi finit la gloire des grands selon le monde, « leur gloire périt comme s'ils n'avaient jamais été ; il en est tout autrement des serviteurs de Jésus-Christ: les fidèles connaissent et célèbrent le jour de leur mort, « leur gloire ne finira point; leur corps sont ensevelis en paix, et leur nom vivra dans la succession de tous les siècles; les peuples publient leur sagesse et l'Eglise chante leurs louanges. »*)

Ces paroles du Prophète se réalisent encore dans S. Servais. A la place de cette famille royale qui s'éteint"), viennent les empereurs germaniques, chez lesquels la vénération envers S. Servais va devenir héréditaire.

A peine S. Henri a-t-il ceint la couronne à Aix-la-Chapelle, qu'apprenant les miracles et la grande sainteté de S. Servais, il se rend à Maestricht, pour y implorer, dit Adelbold son biographe), les suffrages des Saints qui y reposent.

L'empereur Henri III, surnommé le Noir, inaugure son règne en assistant à l'élévation des corps des SS. Monulphe et Gondulphe, faite, en 1039, le 10 Août, par les évêques Nithard de Liége et Gérard de Cambrai ). Il paraît que vers ce temps

') GHESQUIERUS, Acta SS. Belgii, t. I pp. 216 et 651, et DEwEZ, Histoire générale de la Belgique, t. II p. 129.

*) Eccli. LXIV, 9—15.

*) En Allemagne, le dernier roi Carolingien, Louis III, était mort en 911.

*) Cité dans BROWERUS et MASENIUS, Antiquitates et Annales Trevirenses, p. 496.

t. 1,

5) BALDERICUS, Chronicon Cameracense et Atrebatense, lib. 3, cap. 56. V. l'Appendice n. 14 et GHESQUIERUS, 1. c. t. II, p. 205.

l'église de S. Servais avait été agrandie, car on en fit, à cette occasion, une nouvelle dédicace, le 9 Septembre. La première, par S. Monulphe, avait eu lieu le 7 Juillet.

Cet empereur, si éminent sous plusieurs rapports, se distinguait également par une piété tendre et inaltérable envers S. Servais, qu'il avait choisi, de préférence à tous les saints Evêques, comme seigneur et patron '); et qui, à son tour, le protégeait en toute occasion. Par reconnaissance pour ces bienfaits, éprouvés dans la guerre et dans la paix, Henri fonda à Goslar, un monastère en l'honneur des SS. Apôtres Jude et Simon et de son Patron S. Servais. Ayant à deux reprises, mais chaque fois en vain, envoyé des ambassadeurs à Maestricht, pour demander des Reliques du Saint, le pieux empereur vint enfin lui-même, et cette fois sa demande ne put être refusée. Le Chapitre de S. Servais lui donna une partie de la mâchoire du Saint). Tout joyeux de posséder ce trésor, l'empereur fait venir les orfèvres les plus habiles et leur commande un buste en or, dont la magnificence puisse donner à tout le monde une idée de la gloire du Saint bien-aimé. Les artistes se mettent à l'œuvre, mais quand le buste est achevé, il se trouve que les deux pierres précieuses, qui devaient figurer les yeux, étaient disposées d'une manière inégale. A cette vue, l'empereur en courroux fait jeter les orfèvres en prison. Cependant, la nuit, S. Servais lui apparaît et lui dit : « Reconnais-tu, mon fils, le visage que tu aimes tant? N'est-ce pas le même, qui est représenté en or? La main des artistes a fait mon portrait comme Dieu l'a voulu ». Tout joyeux alors, l'empereur fait relâcher, sur l'ordre du Saint, les prisonniers, les comble de présents, et lui-même, entouré d'une foule de clercs et de chevaliers, porte dans ses mains impériales le buste sur l'autel du monastère de Goslar.

Un jour, Henri s'était rendu à Maestricht pour la fête de S. Servais. Quarante personnes se trouvaient en prison, et tous les efforts pour obtenir leur grâce, avaient échoué. Même, à

') VAN VELDEKEN, 1. c. v. 2065.

" VAN VELDEKEN, 1. c. v. 2118 et DE RAM, Notice sur S. Servais, p. 20. Cet auteur nomme abusivement S. Henri, au lieu de Henri III. Cf. Acta SS., Maii t. III, p. 221 n. 42 et p. 223 la note c.

l'approche du grand jour, le gardien avait doublé la garde, à cause de l'énorme affluence de pèlerins. Voilà que, la nuit précédant la fête, un ange apparaît aux prisonniers et rompt leurs chaînes. En même temps un messager céleste apparaît à l'empereur et lui dit : « Seigneur Empereur, il faut aujourd'hui être miséricordieux en l'honneur de votre bien-aimé Servais ». Dès que le jour est venu, les coupables sont convoqués à l'église de S. Servais, et là l'empereur les conduit au sanctuaire et les donne à S. Servais). C'est à ce fait qu'un ancien auteur anonyme) d'une Vie de S. Servais rattache le droit, que possédait le Chapitre et qu'il a encore exercé au 17 siècle, de délivrer les prisonniers, lorsque, en temps de calamité publique, la châsse de S. Servais était portée en procession par la ville. Coûtume bien touchante! On était miséricordieux envers les hommes afin d'obtenir plus sûrement la miséricorde divine.

Çet amour filial porta Henri III à demander au synode national allemand, assemblé à Mayence en 1049 sous la présidence du Pape S. Léon IX, l'approbation de la Biographie de S. Servais. A ce synode se trouvaient plus de quarante évêques d'Allemagne, de Bourgogne et d'Italie, un nombre encore plus grand d'abbés, puis l'empereur lui-même avec plusieurs princes et même des ambassadeurs de l'empereur de Byzance. Le Pape fit examiner cette Biographie, et la canonisa, c'est-à-dire, permit de la lire dans l'Office public ).

Enfin, par diplôme daté de Minden, 14 Juin 1051, Henri III donna à l'autel de S. Servais à Maestricht des biens situés à

) Acta SS., Maii t. III, p. 224 n. 52.

"Het Leven van den heijlighen Servatius, livre 2, chap. 12, § 9, aux Archives de notre église. L'auteur de cette Vic était prêtre, exerçant le saint ministère, probablement à Macstricht. Il écrivit, parait-il, entre les années 1625-1632.

5) MAGNUM CHRONICON BELGICUM 1. c. p. 108, HARTZHEIM, Concilia Germ. t. Ill p. 112. Il est à regretter que cette Biographie ne soit plus connue. Mgr Héfelé dans Son Histoire des Conciles (livre 29 § 542) dit qu'il s'agissait de celle qu'avait composée l'abbé de Lobbes, Hariger (mort en 1007), et qui est imprimée dans CHAPEAUV. Gesta Pontificum t. I p. 28 et suiv. Cependant il se pourrait qu'il eût été question d'un Vie plus ancienne citée par Hariger lui-même et malheureusement perdue. En tout cas le texte de Hariger ne se trouve pas dans le Breuiarium secundum ordinarium ecclesic S. Seruatij imprimé à Cologne en 1503.

Aerweiler et Wadenheim, pour que le Chapitre célébrât tous les ans l'anniversaire de son père, l'empereur Conrad ').

En 1096, la comtesse Ide de Boulogne choisit l'église de S. Servais, pour accomplir l'acte de cession des fiefs de Genappe et Baissy à l'abbaye de St Gertrude de Nivelles. Cette cession se fit avec une grande solennité devant les Reliques de la Sainte, apportées à cet effet, et en présence de Godefroid de Bouillon et de son frère Eustache de Boulogne).

Un fils de cette Aquitaine, qui a donné tant de Saints à l'Eglise, et spécialement à l'église de Maestricht les saints évêques Remacle et Hubert, et S. Hadelin, prêtre, vient clore dignement le onzième siècle. Amour, tel est le nom de ce saint Lévite, avait fait le pélerinage de Rome afin que Dieu daignât lui manifester la manière dont il pût le plus parfaitement le servir. Sur l'ordre de Dieu, il se rend à Maestricht, et passe le reste de ses jours près du tombeau de S. Servais *).

Le douzième siècle n'est pas moins fécond en preuves de vénération pour cet illustre tombeau.

Le 13 Juin 1128, l'empereur Lothaire III, «connu par sa dévotion à S. Servais, donne un diplôme en faveur de l'église de Maestricht. Parmi les évêques et les princes, témoins de cet acte, donné à Aix-la-Chapelle, nous trouvons le grand archevêque de Magdebourg, S. Norbert). Ce fut probablement à cette occasion que Norbert vint en notre ville pour vénérer les Reliques de S. Servais. Sur ses instances réitirées on ouvrit même devant lui la châsse contenant les vêtements du saint Patron, à l'autel duquel S. Norbert célébra ensuite le saint Sacrifice).

') Inventarium omnium chartarum imperialis et liberæ ecclesiæ excathedralis S. Servatij, MS. de l'an 1738, p. 33, aux Archives de S. Servais. Dans le dernier Directorium ad usum perantiquæ et insignis Ecclesiæ Collegiate S. Servatii (pour 1797), nous lisons sous le 11 Mars « Post Sextam, Officium defunctorum cum Missa pro Anniversario Conrardi Imperatoris.

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*) PERREAU, Recherches historiques sur le Chapitre impérial de S. Servais à Maestricht, p. 19.

*) Acta SS., Octobr. t. IV p. 342, n. 40, où il est observé que S. Amour a peut-être vécu au 9me siècle.

* MIRAEUS, Opera diplomatica, t. IV p. 197.

) Acta SS., Junii t. I p. 859, n. 5.

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