صور الصفحة
PDF
النشر الإلكتروني

faire moins d'ouvrage, pour prendre un repos qui n'est ni nécessaire ni convenu, vole. Le patron, de son côté, s'il chicane sur la besogne faite et exige plus qu'on ne lui doit, s'il est incxact dans le paiement des salaires, vole. Le braconnier vole, le contrebandier vole; on vole toutes les fois qu'on prend à un autre ce qui lui appartient, ou qu'on ne lui paic pas intégralement ce qu'on lui doit.

Un genre de vol pour lequel on est plus indulgent encore, c'est celui qui consiste à garder les objets. trouvés. Beaucoup de gens ne rendent par volontiers ce que le hasard fait tomber entre leurs mains. « Ce qui est trouvé est trouvé, » disent-ils, prenant cette grossière et impudente formule pour une raison- « Ce qui est trouvé et n'est pas rendu est volé», faut-il leur répondre sans pitié. Le récit suivant montrera où en est sur ce point la moralité publique. Un paysan, travaillant dans un champ près d'une route, voit passer une calèche et de cette calèche tomber un portefeuille. Il se hâte de le ramasser et, au lieu d'appeler les voyageurs pour le leur rendre, ou d'aller simplement le déposer à la mairie du village, il se met à en examiner le contenu. C'étaient des valeurs, quelques bijoux, environ quatre cents francs en argent, et des lettres qui, s'il l'avait voulu, lui auraient permis de retrouver bien vite le propriétaire. Mais notre homme n'avait garde de le chercher. Enchanté de sa trouvaille, il retourne chez lui et remet le portefeuille à sa femme, qui, sans plus de scrupules le cacha dans la paillasse du lit. A plusieurs jours de là, un dimanche, le garde champêtre annonce sur la place publique que le général *** a perdu sur la route un portefeuille contenant diverses valeurs, et que prière est faite à la personne qui l'aurait trouvé de le rapporter au propriétaire. Le paysan continue à ne dire mot, et même, au retour, raconte tranquillement à ses maîtres ce qui fait l'objet de toutes les conversations du village. Après quelques heures, cependant, certaines paroles peu flatteuses à l'adresse des gens qui s'approprient ce qu'ils trouvent, le mot de voleur prononcé dans la conversation éveillèrent sinon sa conscience, du moins ses craintes. Il se décida

le soir à venir avouer à sa maîtresse que c'était lui qui avait trouvé le portefeuille. « Si je l'avais remis, disaitil pour s'excuser, tout le monde se serait moqué de moi!» Et de fait, on n'oserait pas affirmer que la conscience générale fût, sur ce chapitre, beaucoup plus délicate que la sienne.

Conclusion.

[ocr errors]

Tout larcin oblige à restitution, tout dommage demande réparation. Il est donc nécessaire de répéter bien haut et partout que ceux qui détiennent, le sachant, le bien d'autrui, sont des voleurs, que le vol est infâme, quel qu'en soit le prétexte ou l'objet, et qu'il n'y a pas de petits vols, parce que le sentiment qui fait qu'on se les permet est toujours bas. On n'excusera donc au point de vue moral aucune espèce d'indélicatesse tout retard dans le paiement d'une dette, toute négligence à rendre un objet prêté, toute inexactitude dans les comptes, tout abus de confiance, tout dommage, si petit qu'il soit, causé sciemment à autrui doit être flétri comme une faute sans excuse. Cette faute une seule chose peut, sinon la réparer, du moins l'atténuer, c'est la restitution volontaire, à la fois prompte et intégrale, c'est la réparation exacte et empressée du préjudice qu'on a causé. Nous reviendrons plus loin sur les vols publics (c'est-à-dire accomplis aux dépens du fisc), pour lesquels on accorde généralement à soi-même et aux autres l'indulgence la plus honteuse.

[ocr errors]

XXIV LEÇON

Respect de la parole donnée (les contrats,
les engagements, les promesses).

Formes secondaires de l'injustice et du mépri
des personnes. L'envie.

Respect de la parole donnée.

Trois sortes d'engagements: engagements écrits ou contrats; enga

gements oraux; engagements tacites,

Promesses.

[ocr errors]
[ocr errors]

Importance extrême, en pédagogie*, du respect de la _parole donnée Devoir d'exactitude et de ponctualité. Forme secondaire de la justice : la justice distributive, l'équité. Formes secondaires de l'injustice et du mépris des personnes; trahison et la délation; l'ingratitude; - l'indiscrétion;

flatterie. L'envie.

[ocr errors]
[ocr errors]

la

la

Respect de la parole donnée. Les principes exposés dans les précédentes leçons suffisent, croyons-nous, à tous les cas qui peuvent se présenter. Néanmoins il nous paraît nécessaire d'insister encore sur certaines prescriptions de la justice trop facilement oubliées, sur certaines violations, aussi graves que fréquentes, du droit des personnes.

C'est un devoir de simple justice, un devoir strict, de tenir fidèlement la parole qu'on a une fois donnée, de respecter à la lettre et sans faux-fuyants tout contrat qu'on a signé, tout engagement pris, toute promesse faite. Il n'y a pas de convention qui ne suppose, en effet, la bonne foi, la parfaite sincérité de chacune des parties. Un contrat, par nature et par définition, lie également les deux personnes qui le font chacune est en droit de compter absolument sur l'autre. Quel nom donner à l'engagement que nous contracterions avec l'intention secrète de manquer à notre parole, de ne point accorder ce que nous promettons, dès que nous aurons obtenu ce que nous voulons? Si, des deux personnes qui s'engagent, l'une tient sa parole et l'autre la viole, n'est-il pas évident que la première sera grossièrement dupe de la seconde? Elle ne sera plus traitée comme une personne, une fin en elle-même, mais seulement comme un moyen pour la satisfaction et l'avantage de l'autre. Et si aucune des deux ne tient parole, cela n'est-il pas absurde, contradictoire à l'essence même et à la définition du contrat, à la nature de la société ?

Il ne saurait exister de société, en effet, qui ne repose sur ce principe fermement établi : que toute parole donnée est sacrée. Cette vérité est si évidente, qu'elle a

été comprise de tous temps, et qu'on en trouve déjà l'expression dans les plus vieux documents que nous ayons de la sagesse civile et politique de nos ancêtres. Dans le vieux droit d'Irlande, dont plusieurs livres très curieux ont été retrouvés et publiés récemment, nous lisons: « Le monde se désorganiserait, si les contrats verbaux n'étaient pas obligatoires. » Et encore : « Il est trois circonstances dans lesquelles le monde agonise: la peste, une guerre générale et la violation des

contrats. »

Mais laissons de côté l'intérêt social et ne considérons que la dignité individuelle: que penser d'un homme qui a plusieurs paroles, ou qui n'a pas de parole, car c'est tout un ? Il prodigue en vain sa parole d'honneur, elle n'a de valeur aux yeux de personne. Peut-on imaginer un signe plus certain de déchéance morale?

Et en effet, quelles sont les causes de ce manque de fidélité aux engagements? La plupart du temps il vient du manque de courage; il trahit donc l'absence d'une vertu que nous avons reconnu être fondamentale.

Tout homme de courage est homme de parole,

a dit Corneille*. Cela est vrai à la lettre: le manque de parole est une lâcheté de deux manières? Souvent, nous nous engageons à la légère parce que nous n'avons pas le courage de refuser de le faire, alors même que nous savons fort bien d'avance ne pas pouvoir ou ne pas vouloir tenir notre engagement. D'autre fois, nous avons été sincères en promettant, mais nous manquons ensuite de l'énergie qu'il faudrait pour être fidèles à notreparole.

Puis, manquer à sa parole n'implique pas seulement lâcheté, mais encore mensonge et imprudence. C'est mentir, en effet, que d'affirmer ostensiblement* qu'on fera telle close, alors qu'on se promet de ne pas le faire. Ce mensonge par réticence se manifeste le plus souvent par des actes positifs d'hypocrisie, de fourberie, d'as

[ocr errors]

tuce; car on est conduit naturellement à tous ces vices par l'habitude de prendre des engagements et de ne les point tenir. Et si l'on est de bonne foi en les prenant, n'est-ce pas un devoir de prudence élémentaire de s'assurer avant tout qu'on sera en état d'y faire honneur? Trois sortes d'engagements. Les engagements sont de trois sortes : écrits, verbaux ou tacites.

[ocr errors]
[ocr errors]

Les engage

Engagements écrits, ou contrats. ments écrits forment les contrats proprement dits. Il est relativement difficile de violer un contrat; la loi même veille à l'exécution des promesses de ce genre. Ce n'est pas à dire, cependant, que tout contrat soit respecté nécessairement et que la morale n'ait sur ce point rien à prescrire. Souvent il n'est que trop facile à un homme habile et sans scrupules de trouver dans la loi même, le moyen de se soustraire à ses engagements. Est-il besoin de flétrir cet esprit de chicane, cette forme savante et particulièrement honteuse de la mauvaise foi? Tromper avec préméditation, tromper en s'abritant sous le texte même de la loi, n'est-ce pas tromper doublement ? et le nom de crime est-il trop fort pour qualifier une pareille

action?

Engagements oraux. Il est plus facile et la tentation s'offre plus souvent, de manquer aux engagements oraux. << Les paroles volent, en effet, au lieu que les écrits restent.» N'y a-t-il pas d'ailleurs, pourrait-on dire, une sévérité exces sive, à exiger que tout homme respecte sa parole au point de ne jamais violer un engagement verbal? Toutes les conven tions vraiment sérieuses ne sont-elles pas écrites; et ne savons-nous pas avec quelle légèreté sont contractées la plupart du temps les conventions orales?

Vaine excuse. La parole d'un honnête homme vaut un écrit.« Tel mot, prononcé par lui, dit Mme Necker de Saussure, répond de sa conduite à jamais, ce mot est lui, il saura le soutenir quoi qu'il en coûte. »

Certes, il en coûte souvent. La bonne foi absolue de l'honnête homme peut être pour lui la cause de bien des

« السابقةمتابعة »