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butive. — Enfin, pour être entièrement juste, il faut avoir le continuel souci de rendre à chacun ce qui lui est dû. Qu'on ait sous ses ordres des ouvriers, des employés, des fonctionnaires, ou simplement des enfants, il faut se faire une loi absolue de traiter chacun selon son mérite, de distribuer avec une religieuse impartialité les récompenses et les peines, les faveurs et les rigueurs. Qu'il n'y ait pour tous qu'un seul poids et une seule mesure. Soyons en tout d'une scrupuleuse équité.

Formes secondaires de l'injustice. Il s'en faut bien d'ailleurs, que nous ayons énuméré toutes les formes que l'injustice peut prendre; mais si elles ne sont pas toutes désignées par leur nom dans les leçons précédentes, toutes y sont dénoncées implicitement et condamnées en principe. Pour en citer quelques-unes encore, montrons rapidement comment la trahison, même dans les plus petites choses, la délation, l'ingratitude, l'indiscrétion, l'envie, violent les principes posés plus

haut.

La trahison et la délation. La trahison et la délation ne sont autre chose que la violation d'un engagement tacite; car elles consistent essentiellement à divulguer ce que nous étions censés devoir taire, à parler, quand les autres étaient en droit de compter sur notre silence. Les enfants ont mille fois raisons de considérer la délation comme honteuse, et de la flétrir comme mortelle aux relations de camaraderie. Elle rompt, en effet, le pacte qui unit les camarades entre eux. N'ont-ils pas tous le droit de compter a priori sur la bonne foi les uns des autres, sur l'esprit de solidarité et de concorde? On ne saurait assez déplorer l'aveuglement de certains maîtres, qui ne rougissent pas d'employer la délation comme moyen de discipline. Comment ne comprennentils pas qu'ils font prendre une habitude funeste aux enfants, qu'ils tuent en eux la confiance, la franchise et le courage, qu'ils sèment dans leur cœur des germes de dissimulation et de lâcheté?

L'ingratitude. — - L'ingratitude consiste à ne pas re

connaître volontiers un service reçu. Par l'ingratitude nous frustrons donc ceux qui nous ont rendu service de l'estime qu'ils méritent, et c'est ainsi que ce défaut confine à l'injustice, puisqu'il dénote une âme basse, peu disposée à rendre aux autres ce qui leur est dû.

Celui qui a le cœur bon et bien placé ne craint pas de proclamer très haut le bien qu'on lui a fait, disposé qu'il est à le rendre au centuple si l'occasion lui en est offerte. Il reconnaît et loue avec joic la générosité de son bien faiteur, en attendant qu'il puisse le payer de retour. L'ingrat, au contraire, n'ayant aucune noblesse de cœur, se sent humilié par le bienfait reçu: il le tait ou le déprécie; il va parfois jusqu'à le nier. Recevant donc sans rien donner en retour, ou, ce qui pis est, en rendant le mal pour le bien, n'est-il pas évident qu'il se sert des autres comme de simples moyens pour arriver à ses fins égoïstes? Un tel homme est indigue de vivre en société.

L'indiscrétion. L'indiscrétion, quand elle consiste à dire les secrets des autres, surtout ceux qui nous ont été directement confiés, est une véritable violation d'un engagement tacite. Par cela seul qu'on reçoit confidence d'un secret, ne s'engage-t-on pas à le garder?

Mais, il est une autre forme de l'indiscrétion, non moins grave: elle consiste dans une curiosité malsaine, qui nous fait chercher à savoir ce qui ne nous regarde pas, qui nous fait lire, par exemple, une lettre trouvée par hasard. Cela paraît être sans conséquence: c'est là pourtant à la fois une imprudence et une injustice. Une imprudence est-on sûr, en effet, de ne rien trouver dans cette lettre qu'on eut dû toujours ignorer? N'y lira-ton pas quelque chose qui peut-être changera pour jamais nos sentiments envers une personne qui ne peut se défendre ? Mais c'est surtout une injustice; car n'est-il pas admis, n'est-il pas impliqué dans la nature des choses, que le contenu d'une lettre est secret, excepté pour celui à qui elle est destinée? La lettre dont nous violons ainsi le secret contient peut-être la pensée la plus intime de la

personne qui l'a écrite; et nous nous glissons traîtreusement entre cette personne et celle à qui elle se confie. La faute est la même, si elle n'est pire, que d'écouter aux portes ou de regarder par les serrures, indiscrétions si grossières, qu'elles n'inspirent que du dégoût à tout homme qui se respecte.

La flatterie. La flatterie est encore une injustice, parce qu'elle consiste à tromper une personne en lui témoignant des sentiments outrés, que nous n'éprouvons pas. « La flatterie est un commerce honteux qui n'est utile qu'au flatteur, » a dit, Théophraste*. Et Rollin* de même: « La flatterie n'est autre chose qu'un commerce de mensonge, fondé d'un côté sur l'intérêt et de l'autre sur la vanité.» (Histoire ancienne, II, p. 120.) Pour Bossuet*: «Tout flatteur, quel qu'il soit, est un animal traître et odieux. » Ce rude jugement, remarquons-le, ne fait pas même d'exception pour ceux qui flattent par une sorte de bienveillance banale, par le désir d'être aimables et de plaire à tout prix.

On a mille fois dénoncé le danger de la flatterie:

Détestables flatteurs, présent le plus funeste
Que puisse faire aux rois la colère céleste!

s'écrie un personnage de Racine*. (Phèdre, acte IV, sc. 6.) Mais les rois ne sont pas seuls à être objets et par conséquent dupes de la flatterie. Elle peut s'adresser également à toutes les puissances; et celle qui s'adresse au peuple n'est pas la moins dangereuse. Il y a un souci misérable de la popularité, qui ne diffère de la flatterie qu'en ce qu'il est plus funeste encore. On veut obtenir à n'importe quel prix la faveur populaire, et l'on trompe par de basses flatterics ceux à qui l'on devrait avant tout la vérité: Tromperie d'autant plus condamnable qu'elle s'adresse à des esprits plus simples et plus faciles à abuser. Et de quelle gravité ne peuvent pas être les erreurs dans lesquelles on jette ainsi ceux de qui dépend le sort même de la patrie! Flatter le peu

ple, lui parler sans cesse de ses droits et jamais de ses devoirs, c'est vraiment lui manquer de respect; c'est en même temps manquer de fierté personnelle et de patrio

tisme.

L'envie.Disons enfin quelques mots de l'envie. On s'accorde à la dénoncer comme très laide; mais peut-on voir en elle, à proprement parler, une forme de l'injustice? L'envie est, on le sait, une disposition secrète à se réjouir du mal des autres et à s'affliger de tout ce qui leur arrive d'heureux à ce titre, semble-t-il, elle est moins une injustice proprement dite que la source habituelle de l'injustice.

Nous accorderons, en effet, que ce sentiment, tout intime, ne devient une injustice positive que lorsqu'il se traduit par des actes; mais aux yeux d'une morale pure, n'y a-t-il vraiment d'injustice que dans les actions? L'envie, c'est l'injustice dans les sentiments; et, par là, c'est peut-être la source la plus profonde de toutes les injustices. Elle choque tous les principes de la morale. C'est d'abord un manque de fierté personnelle, de désintéressement et de courage. Celui-là, en effet, qui est animé d'une émulation généreuse, qui est homme à se faire lui-même sa destinée à force d'intelligence et d'énergie, n'a pas de peine à accepter, à proclamer hautement la supériorité d'autrui. Il sait à quoi elle tient et ce qu'elle coûte. Si elle provient de dons naturels éclatants, ces dons font honneur à la nature humaine, et tout homme doit s'en réjouir. Si elle est le fruit du travail et de l'énergie, quel homme digne de ce nom ne se sentira prêt à la saluer avec respect?

En tous cas, s'affliger de la supériorité d'autrui, quelle qu'en soit la nature et la cause, ce n'est pas seulement faire preuve d'un petit esprit et d'un pauvre cœur, c'est se rendre malheureux de la façon la plus honteuse. Rien

1. Voir dans nos Leçons de Psychologie le développement de cette pensée, que les natures envieuses sont ordinairement les natures apathiques et lâches, incapable de rien faire de grand ou de fort par elles-mêmes (page 108),

de plus misérable, en effet, que l'envieux, puisque la prospérité des autres gâte toutes ses joies, et ajoute à ses maux réels une souffrance cuisante autant qu'inavouable. « L'homme qui dit qu'il n'est pas heureux, s'écrie avec pitié. La Bruyère*, pourrait au moins le devenir par le bonheur de ses proches; l'envie lui ôte cette der

nière ressource ! »

L'envieux est donc à plaindre presque autant qu'à blâmer; et de la sorte l'injustice, dans ce qu'elle a de plus bas et de plus caché, porte en elle-même son propre châtiment 1.

XXVE LEÇON

La charité.

La charité sa nature et ses préceptes généraux.

Retour sur les

Le dévouement et le sacrifice.

rapports de la charité et de la justice. (Dante*).- Le respect, condition fondamentale de la charité.

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Objection.

Réponse.
Devoir de

Enumération des principaux devoirs de charité : devoir de porter secours à ceux qui sont en danger. Devoir de protéger la liberté de nos semblables. répandre toute vérité utile: le prosélytisme et ses dangers; l'instruction. Devoir de soulager les souffrances et de travailler au bonheur d'autrui. - Devoir de défendre les absents contre la calomnie et la médisance. Devoir de venir en aide aux indigents: l'aumône et la bienfaisance, (mot de Pythagore*).- L'esprit chevaleresque dans la fidélité aux engagements. — La charité dans les sentiments.

Conclusion: La charité et l'ingratitude.

La charité : sa nature et ses préceptes généraux. Nous avons terminé l'énumération des devoirs de justice

1. Dans le langage populaire on confond assez souvent l'envie et la jalousie ces mots ne sont pourtant pas synonymes. D'abord, dans bien des cas le jaloux n'est jaloux que de ce qu'il posséde; la jalousie est alors un amour ombrageux, qui ne veut pas se laisser ravir son

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