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Du Comte de Valmont à fon Père.

NoN, mon père, ne me parlez plus

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de Religion, de vérité, de vertu : je ne veux plus rien entendre. Mon cœur Alétri par la douleur & l'opprobre, se refuse à toutes vos leçons; &, dans l'état où je fuis, tout fecours me devient inutile. Il n'y a plus rien de sûr, rien de vrai...... Emilie m'a trompé. Emilie! TOME III,

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"quelle honte ! quel oubli d'elle-même ! ô noirceur! ô trahison! ô comble d'hor reur!.... Oui, Laufane..... Le perfide Laufane triomphe par-tout de fa conquête; & le feroit-il, fi, par la fagesse de fa conduite, Emilie l'eût toujours forcé à la respecter! Ah! puifqu'il m'enlève mon épouse, l'honneur..... qu'il m'arrache donc la vie, ou qu'il fe prépare à me donner la fienne,

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A l'égard d'Emilie..... Mais hélas! je voudrois pouvoir douter encore, malgré les rapports qu'on m'a faits, Je voudrois, malgré l'évidence, pouvoir conferver d'elle la même idée que vous. Ah! quand je vous ai exposé mes foupçons vous ne m'avez point écouté; trop prévenu en fa faveur, vous m'avez condamné fans ménagement: en lifant votre lettre, je me trouvois avili à mes propres ieux. Mes foupçons fe vérifient cependant.... Ils fe vérifient!... Peut-être me trompé-je encore. On croit trop aifément, me direz-vous, ce que l'on craint vivement : & où font en effet ces preuves si constantes, ces juftes fondemens

de l'accufation la plus odieuse, la plus injufte; fi Emilie eft toujours ce qu'elle nous a paru, l'ame la plus belle & la plus vertueufe? Quoi, de fimples délations pourront flétrir la plus pure vertu!.. O mon père, je crois vous entendre me parler ainfi, & par toutes ces réflexions, j'aime tour à tour à me flatter & à me tourmenter moi-même. Il est des inftans, où, rapprochant toutes les circonftances, toutes les preuves, je crois tout: & alors toutes les paffions me dévorent; je ne refpire que haine, que vengeance, que fureur; la rage, l'enfer eft dans mon cœur. Il en eft d'autres, où, plus tranquille (& je le deviens en m'entretenant avec vous), je m'accuse de trop de précipitation & d'emportement ; je me condamné; j'ai honte des tranfports qui m'agitent, des paffions qui m'aveuglent, du délire où je fuis; je fufpends toute résolution; & je crains autant de faire éclater des foupçons mal fondés, que j'appréhende d'être trop facile à les rejeter. Ainsi, toujours balancé par des fentimens contraires, je ne fais à quoi

m'arrêter...... Ah! du moins puiffé-Je être affez fage pour attendre des lumières plus sûres encore ! Mais auffi, une fois convaincu,... fi Laufane, fi Emilie font coupables, ah ! c'eft dans leur fang..... Mon père ! foyez touché du trifte état de votre malheureux fils. N'infultez point à fa douleur : répandez fur des plaies trop vives pour un cœur fenfible, ce baume falutaire que vos lettres y ont fait couler jufqu'ici. J'efpère que jufqu'à votre réponse j'aurai bien la force de contenir mes craintes & mes tranfports. Quoi que j'aye pu vous dire dans l'ivreffe de ma paffion & l'égarement de mon efprit, ne ceffez de me donner des confeils, qui me deviennent plus que jamais néceffaires; & parlez-moi toujours de cette Religion, dont les caractères font en effet fi frappans, dont le dernier fur-tout me remplit d'étonnement, & que je commence fi vivement à admirer malgré moi, quoique fi peu difpofé encore à la fuivre.

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