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dénombrement qu'on en fit, que l'armée des ennemis montait à deux cent mille hommes de pied et soixante mille chevaux, et que les Mèdes et les Perses joints ensemble avaient à peine la moitié autant d'infanterie, et qu'il s'en fallait plus des deux tiers qu'ils n'eussent autant de cavalerie. Une si grande inégalité jeta Cyaxare dans un grand embarras et dans une grande crainte. Il n'imaginait point d'autre expédient que de faire venir de nouvelles troupes de Perse, en plus grand nombre encore que les premières. Mais, outre que le remède aurait été fort lent, il paraissait impraticable. Cyrus, sur-le-champ, proposa un moyen plus sûr et plus court: ce fut de faire changer d'armes aux Perses, et au lieu que la plupart ne se servaient presque que de l'arc et du javelot, et ne combattaient par conséquent que de loin, genre de combat où le grand nombre l'emporte facilement sur le petit, il fut d'avis de les armer de telle sorte, qu'ils pussent tout d'un coup combattre de près et en venir aux mains avec les ennemis, et rendre ainsi inutile la multitude de leurs troupes. On goûta fort cet avis, et il fut exécuté surle-champ.

Il établit un ordre merveilleux dans les troupes, et y jeta une émulation étonnante par les récompenses qu'il proposait, et par ses manières honnêtes et prévenantes à l'égard de tout le monde. Il ne faisait aucun cas de l'argent que pour le donner. Il distribuait avec largesse des présents à chacun selon son mérite et sa condition. A l'un, c'était un bouclier, à l'autre une épée ou quelque chose de pareil. C'était par cette grandeur d'ame, cette générosité, et ce penchant à faire du bien, qu'il croyait qu'un général devait se dis

Tome II. Hist. anc.

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Pag. 44.

pag. 207.

tinguer, et non par le luxe de la table ou la magnifiCyrop. 1. 8, cence des habits, et encore moins par la hauteur et la fierté. Il ne pouvait pas, disait-il, faire du bien à tous; et c'est par cette raison-là même qu'il se croyait obligé de marquer de la bonne volonté à tous, parce que les présents que distribue un prince peuvent l'épuiser, non les honnêtetés qu'il fait, en s'intéressant sincèrement au bien ou au mal qui arrive aux autres, et en le leur témoignant.

Lib. 2, pag. 56.

Un jour que Cyrus faisait la revue de son armée, il lui vint un courrier de la part de Cyaxare l'avertir qu'il était arrivé des ambassadeurs du roi des Indes, et qu'il le priait de le venir trouver promptement. Pour ce sujet, lui dit-il, je vous apporte un riche vêtement; car il souhaite que vous paraissiez superbement vêtu devant les Indiens, afin de faire honneur à la nation. Cyrus ne perdit point de temps: il partit sur-le-champ avec ses troupes pour aller trouver le roi, sans avoir d'autre habit que le sien, fort simple, à la manière des Perses, et qui n'était point, porte le texte grec1, souillé ni gâté par aucun ornement étranger. Comme Cyaxare en parut d'abord un peu mécontent : « Vous « aurais-je fait plus d'honneur, reprit Cyrus, si je « m'étais habillé de pourpre, si je m'étais chargé de <«< bracelets et de chaînes d'or, et qu'avec tout cela j'eusse tardé plus long-temps à venir, que je ne vous « en fais maintenant par la sueur de mon visage et par <«ma diligence, en montrant à tout le monde avec quelle promptitude on exécute vos ordres? »

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Cyaxare, content de ces raisons, commanda qu'on

· ἐν τῇ Περσικῇ στολῇ οὐδέν τι 6piopévn. Belle expression, mais

que nulle autre langue ne peut rendre avec la même vivacité.

fit entrer les Indiens. Ces ambassadeurs dirent qu'ils
étaient envoyés de la part de leur maître pour s'infor-
mer du sujet de la guerre entre les Babyloniens et les
Mèdes. Ils ajoutèrent qu'ils avaient ordre, après avoir
entendu les motifs des Mèdes, de passer chez les Ba-
byloniens pour écouter aussi ce qu'ils auraient à allé-
guer,
afin qu'après avoir examiné les raisons de part
et d'autre, le roi leur maître se rangeât du côté de celui
qui aurait pour lui le bon droit et la justice. Noble et
glorieux usage d'une grande puissance, qui n'est con-
duite que par la justice, qui ne cherche point à pro-
fiter de la division des voisins, et qui se déclare
hautement contre l'injuste agresseur en faveur de l'op-
primé! Cyaxare et Cyrus répondirent qu'ils n'avaient
donné aucun sujet de plainte aux Babyloniens, et qu'ils
acceptaient avec joie pour arbitre le roi des Indiens.
La suite fait connaître qu'il se déclara pour les Mèdes.
Le roi d'Arménie, vassal des Mèdes, les regardant
comme près d'être engloutis par la formidable ligue qui
s'était formée contre eux, crut qu'il devait profiter de
l'occasion pour se tirer de leur dépendance. Il cessa
donc de leur payer le tribut ordinaire, et de leur en-
voyer le nombre de troupes qu'il devait fournir en
temps de guerre. Cyaxare était embarrassé, craignant,
dans la conjoncture présente, de s'attirer de nouveaux
ennemis sur les bras, s'il entreprenait de forcer les
Arméniens à l'exécution du traité. Cyrus, après s'être
exactement informé des forces et de la situation du
pays, se chargea de cette commission. L'important
était de la tenir secrète, sans quoi elle ne pouvait
réussir. Pour cela il engage une grande partie de chasse
de ce côté-là; et il avait coutume d'y aller assez sou-

AN. M. 3447 Cyrop. 1. 2, pag. 58-61,

Av.J.C. 557.

et lib. 3, 62-70.

vent, et même d'y chasser avec le fils du roi d'Arménic et les jeunes seigneurs du pays. Au jour marqué il part avec un nombreux équipage. Les troupes suivaient de loin et devaient attendre l'ordre pour se montrer. Après quelques jours de chasse, quand on fut assez près du château où demeurait la cour, Cyrus découvrit son dessein aux officiers. Il détacha Chrysante, l'un d'eux, pour aller se rendre maître d'une hauteur fort escarpée, où il savait que le prince, en cas d'alarme, se retirait ordinairement avec sa famille et tous ses effets.

Cela fait, il envoie un héraut au roi d'Arménie pour le sommer d'accomplir le traité, et dans l'intervalle il fait avancer ses troupes. Jamais surprise ne fut plus grande, et l'embarras ne l'était pas moins. Le roi connaissait son tort: il était sans ressource. Il ne laissa pas d'envoyer de tous côtés pour assembler ses forces; et en même temps il fit passer dans les montagnes le plus jeune de ses fils, nommé Sabaris, avec ses femmes, ses filles, et tout ce qu'il avait de plus précieux; mais quand il eut appris par ceux qu'il avait envoyés à la découverte que Cyrus venait sur leurs pas, alors il perdit entièrement courage, et ne songea plus à se défendre. Les Arméniens, à son exemple, s'enfuirent chacun où ils purent, pour mettre en sûreté ce qu'ils avaient de meilleur. Cyrus, voyant la campagne couverte de gens qui se sauvaient de côté et d'autre, leur envoya dire qu'on ne leur ferait aucun mal, s'ils se tenaient dans leurs maisons; mais qu'on traiterait comme ennemis ceux qu'on trouverait prenant la fuite. Cela fut cause qu'ils demeurèrent, excepté quelques-uns qui suivirent le roi.

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D'un autre côté, ceux qui conduisaient les princesses vers les montagnes donnèrent dans l'embuscade de Chrysante, et furent presque tous faits prisonniers. La reine, le fils du roi, ses filles, sa belle-fille, femme de son aîné, et ses trésors, tombèrent entre les mains des Perses.

Le roi, ayant appris ces tristes nouvelles, et ne sachant que devenir, se sauva sur une petite éminence, où il fut incontinent investi par l'armée, et bientôt après obligé de se rendre. Cyrus le fit avancer au milieu de l'armée avec toute sa famille. Dans l'instant arriva le fils aîné du roi, nommé Tigrane, qui revenait d'un voyage: il ne put retenir ses larmes à un tel spectacle. Prince, vous venez à propos, lui dit Cyrus, pour assister au procès de votre père; et aussitôt il fit assembler les capitaines des Perses et des Mèdes, et manda aussi les grands d'Arménie. Il ne voulut pas même qu'on écartât les dames qui étaient là dans leurs chariots, et leur permit d'écouter et de voir tout en liberté.

Quand tout fut prêt, et que Cyrus eut imposé silence, il commença par exiger du roi que, dans toutes les questions qu'il allait lui faire, il lui répondît avec sincérité, n'y ayant rien de plus indigne d'une personne de son rang que d'user de dissimulation et de mensonge le roi s'y engagea. Alors il lui demanda, mais à différentes reprises, et traitant chaque article séparément, s'il n'était pas vrai qu'il avait fait la guerre à Astyage, roi des Mèdes, son grand-père; s'il n'avait pas été vaincu dans cette guerre; si, en conséquence de sa défaite, il n'avait pas conclu un traité avec Astyage; si, par ce traité, il ne s'était pas engagé à

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