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XI.

ne pourrez y fuffire: mais fi vous allez au devant, CHAP. vous en ferez accablé. Dailleurs il arrive fouvent par une fuite de l'infirmité humaine, que ces miniftres fe livrant tout entiers aux œuvres extérieures, oublient qu'en qualité de médiateurs entre Dieu & le peuple, comme Moïse, ils font chargés non-feulement de porter aux fidelles les ordres, les graces, & les bienfaits de Dieu par le miniftére de la parole & des facremens; mais encore plus de préfenter & d'offrir à Dieu par la priere leurs befoins, leurs défirs, & leurs facrifices. Ainfi ils fe confument par des excès de travail, mais fans faire beaucoup de fruit, ni pour eux-mêmes, ni pour les autres; parce qu'ils féparent deux chofes qui, felon que l'enfeignent les Apôtres, doivent être unies dans un miniftre de JesusChrist, l'affiduité à la priere, & la difpenfation A 5. 4. de la parole de Dieu. Pour nous, nous nous appliquerons entiérement à la priere, & au minif tere de la parole.

[Ecoutez le confeil que j'ai à vous donner, &c. Moife fuivit le confeil de fon beau-pere. ] II paroît étonnant qu'un confeil fi fage & fi néceffaire ne foit pas venu dans l'efprit d'un prophête tel que Moïfe; & qu'étant fi plein de la kumiére divine, il ait eu befoin d'être inftruit. de ce qu'il devoit faire, par un homme qui étoit fi fort au deffous de lui. Mais Dieu par cet exemple a préparé à ceux qui font au deffus des autres, foit par les lumiéres, foit par le rang, un remède contre la tentation de l'orgueil, qui eft la plus à craindre pour eux.

1. Ils y apprenent que tout homme, quel qu'il foit, n'a qu'une lumiére bornée: que Dieu qu'il eft la fource de toute fageffe, & l'auteur de tous les bons confeils, les difpenfe à qui il

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lui plaît, & par qui il lui plaît: que non-feulement on peut être fupérieur aux autres en CHA P. autorité, fans l'être en fageffe; mais que fouvent les plus fages & les plus éclairés, les prophétes même comme Moife, ne voient pas ce qu'il plaît à Dieu de découvrir à d'autres moins éclairés qu'eux, & d'un rang fort inférieur : qu'ainfi ils ne doivent jamais oublier cet avis du Saint-Efprit, Ne foyez point fage à vos pro- Prov. 3.7.5. pres yeux, & ne vous appuyez point fur votre prudence; mais être bien convaincus qu'ayant à tout moment befoin d'être éclairés de Dieu pour ne point faire de fautes, ils ne peuvent attendre ce fecours, qu'autant qu'ils fe défieront de leur propre efprit, & qu'ils feront difpofés à écouter les avis des autres. Car l'œil, dit S. Paul, ne peut pas dire à la main, Je n'ai pas befoin de votre fecours; ni la tête dire aux pieds, Vous ne m'étes point néceffaires. Au contraire, les 1. Cor, 126 membres du corps qui paroiffent les plus foibles, 21. fent les plus néceffaires. Dieu, pour former entre les membres du corps de l'Eglife une liaifon plus étroite, & une plus parfaite harmonie, a voulu qu'ils dépendiffent les uns des autres par des befoins réciproques : il a distribué dans ce corps avec une fagefle & une économie admirable l'autorité, les lumiéres, la prudence, le talent de la parole, & tous les autres dons qui font pour l'utilité commune; & par là il a obligé les fupérieurs de s'abaiffer vers les inférieurs, pour chercher en eux ce qui leur manque; comme il a attaché les inférieurs aux fupérieurs par le refpect pour une autorité qui vient de lui: afin qu'il n'y ait point de fchifme ni Ibid. v. 25. de divifion dans le corps, mais que tous les memt bres confpirem également au bien les uns des

Autres,

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2. Ils trouvent dans la conduite de Moïfe un

CHA P. parfait modéle de docilité & d'humilité. Cet: homme par qui Dieu avoit fait tant de merveilles; avec qui il s'entretenoit familiérement, comme un ami avec fon ami; qu'il avoit établi chef d'un peuple innombrable; cet homme, dis-je, écoute le confeil qu'un étranger luidonne pour le gouvernement de ce peuple: il s'y foumet fans peine; fans rien alléguer au contraire; fans fe prévaloir de la fupériorité de fes. lumiéres; fans marquer la moindre attache à fon propre fens; perfuadé, dit S. Auguftin, qu'un confeil fage véritable, par quelque bouche qu'il nous foit donné, ne vient point de Thomme qui n'est que ténébres, mais de Dieu qui eft la vérité même. Exemple d'autant plus admirable, qu'il eft rare. Car entre ceux qui gouvernent, il y en a peu, dit S. Bernard, qui exercent leur authorité utilement, & très-peu qui l'éxercent humblement. Pauci utiliter, pauciores humiliter prafunt..

Aug. de Doct. Chrift. in Prologo.

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[Choififfez des hommes pleins de fermeté & de courage, qui craignent Dieu, qui aiment la vérité, qui foient ennemis de l'avarice. } Jethro dans ce peu de paroles trace le portrait d'un bon juge. Arrêtons-nous un moment à en éxaminer tous les traits.

1. Choififfez des hommes fermes, & pleins de courage. La fermeté eft une des qualités effentielles à un juge; parce que pour rendre une éxacte juftice, il eft fouvent obligé de s'oppofer à des hommes puiffans, & de s'en faire par conféquent des ennemis. C'eft pourquoi le SaEcli 7. 6. ge dit: Ne cherchez point à devenir juge, fi vous n'avez affez de force pour rompre tous les efforts de l'injustice; de peur que vous ne foyez. intimidé par la confidération des hommes puif

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fans, & que vous ne mettiez votre droiture au bazard de fe corrompre. Il ne faut pas croire CHA P. qu'il fuffife de plaindre le malheur de ceux qui ont une bonne caufe, mais qui ont de puissans ennemis. De tels fentimens conviennent à des particuliers fans autorité. Mais un juge n'en eft pas quitte pour déplorer l'oppreffion de l'inno-cent. Son devoir eft de l'empêcher, en s'expo-. pofant lui-même au péril, s'il eft nécessaire.

2. Qui craignent Dieu : c'eft-à-dire, qui foient, perfuadés par une foi vive, qu'ils ont un Juge au-deffus d'eux, à qui ils rendront compte de leur conduite, & qui jugera leurs jugemens ; qui fe fouviennent que ce fouverain Juge, en leur communiquant une partie de fon autorité, a prétendu les mettre à fa place, & les donner pour peres & pour défenfeurs à la veuve & à l'orphelin qui n'en ont point; qui fçachent que toute injuftice l'attaque & l'offenfe perfonellement, parce qu'il eft la juftice même; mais qu'aucune ne le bleffe comme celle

qui tombe fur le pauvre, dont il fe déclare par- Voyez le Pf. tout le protecteur, & dont il fera un jour 71. où cela le vengeur. Il n'y a qu'un tel motif qui eft répeté jufpuiffe inspirer à un juge un courage invinci- qu'à sept fois, ble, & une fermeté inébranlable. Pour être fi

,"

.

delle dans des occafions décifives; il faut ne craindre que Dieu, & ne compter que fur fa protection.

3. Qui aiment la vérité & la justice. La marque la plus certaine que le cœur eft pénétré de la crainte de Dieu, eft quand il aime fincérerement la vérité & la juftice, & qu'il les regarde comme l'unique tréfor qu'il foit réfolu de conferver aux dépens de tout. Une telle difpofi.tion l'éleve au-deffus de la crainte, de la complaisance, & de tous les refpects humains. Maïs.

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cet amour de la vérité, s'il eft fincére, ne peut CHAP. s'allier avec l'attache aux objets de la cupidité. Quiconque n'eft point réfolu de facrifier tout à la droiture du cœur, & à l'éxacte vérité, les facrifiera à tout ce qu'il ne pourra conferver qu'en les abandonnant.

4. Qui foient ennemis de l'avarice. 11 fuffit à un particulier de n'être pas avare. Mais il faut qu'un juge foit tellement ennemi de l'avarice, que non content d'être incorruptible à tout inEccli. 20.31. térêt, il haiffe même & ait en horreur les préfens, dont l'Ecriture dit qu'ils aveuglent les yeux des juges les plus éclairés, & qu'ils font comme un mords dans leur bouche, qui les empêche de faire justice.

[Vous ne craindrez point les hommes, parce que le jugement appartient à Dieu. L'autorité dont vous êtes revêtus, eft à Dieu, & non pas à 2. Par. 19. 6. vous. Ce n'est pas la juftice des hommes

que vous

exercez, difoit le faint roi Jofaphat aux Juges
qu'il avoit établis; c'eft celle du Seigneur : &
vous demeurez responsables envers lui de tous les
jugemens que vous aurez rendus. Que la crainte
du Seigneur foit donc avec vous; & ayez atten-
tion à faire votre devoir. Jugez, non felon vos
idées, votre inclination, votre intérêt, ou fe-
lon la volonté, & fur la recommandation des
hommes puiffans; mais felon les loix immua
bles de fa juftice. Jugez comme il jugeroit lui-
même, s'il prenoit votre place. Vous devenez à
fes yeux des prévaricateurs, fi par refpect hu-
main, par lâcheté,
› par ignorance, ou par né-
gligence, vous donnez gain de cause à celui
qu'il condamne, ou fi vous condamnez celui
qu'il abfout. Le jugement appartient à Dieu.
Miniftres du Seigneur, qui êtes affis dans l'au-
gufte tribunal de la pénitence, tremblez, à cet-

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