XII. mort:... foit que ce foit une bête de fervice, ou un homme, il perdra la vie : & ce qui fuit, CHA P. jufqu'aux Commandemens de Dieu. Ce fut après de tels préparatifs, & au milieu de l'appareil le plus effrayant, que Dieu publia fa Loì, montrant par toutes ces circonftances quel étoit le caractére du peuple avec qui il traitoit. C'étoit une multitude d'efclaves, peu fenfibles aux bienfaits, & qui ne pouvoient être remués que par la crainte des châtimens & de la mort. C'eft pour cela que Dieu, près de leur faire entendre fes volontés, ne fe contente pas des motifs qu'il leur a propofés d'abord, motifs bien capables de toucher des enfans, mais trop foibles pour des efclaves. Il frappe leurs fens, par des objets de terreur, jufqu'à faire trem bler Moïfe même, le médiateur de l'alliance. Que ce fpectacle eft différent de celui qu'offre à notre foi la Loi de grace, & la nouvelle alliance dont Jefus - Chrift eft le médiateur ! Confidérez, difoit S. Paul aux Hébreux devenus Heb, 12, 18. Chrétiens, que vous ne vous êtes pas maintenant approchez,comme autrefois vos peres, d'une montagne fenfible & terreftre, d'un feu brûlant, d'un nuage obfcur & ténébreux, des tempêtes & des éclairs, du fon d'une trompette, & du bruit d'une voix qui étoit telle, que ceux qui l'oisirent, fuppliérent qu'on ne leur parlát plus. Car ils ne pouvoient porter la rigueur de cette menace, Que fi une bête même touchoit la montagne, elle feroit Lapidée. Et Moife dit lui-même, Je fuis tout tremblant & effrayé tant ce qu'on voyoit étoit terrible. Mais vous vous êtes approchés de la vraie montagne de Sion, où Dieu fait fentir la pré fence non par des tonnerres & des éclairs mais par une abondante effufion de grace; de cité du Dieu vivant, dont celle que vous Tome II ". G XII. appellez ici la cité du grand Roi, n'eft qu'une CHAP. foible image; de la Jerufalem céleste, qui étoit la matiére des defcriptions fi magnifiques des prophétes, le fujet de leurs louanges & de leurs bénédictions, & l'objet des voeux & des defirs de tous les juftes d'une troupe innombrable d'Anges, qui font les anciens habitans de cette cité célefte, aufquels vous êtes affociés, & dont vous êtes les concitoyens ; de l'affemblée des premiers-nés qui font écrits dans le Ciel; des Saints choifis, par une prédilection éternelle, de toutes les nations, de tous les fiécles, de tous les âges, & de toutes les conditions, qui ont déja pris poffeffion de l'héritage immortel dans le ciel, où vos noms font écrits avec les leurs; de Dieu qui est le juge de tous, & qui fera lui-même votre récompenfe ; des efprits des Juftes, qui, après avoir faintement confommé leur courfe, font dans la gloire, & vous y attendent; de Jefus qui eft le Médiateur de la nouvelle alliance qui vous a fait enfans de Dieu par la charité; de se fang adorable dont lafperfion a été faite fur vous dans votre baptême; fang précieux, qui parle bien mieux que celui d'Abel, puifqu'il demande à Dieu miséricorde pour nous, & qu'il l'obtient; au lieu que celui d'Abel demandoit vengeance. Ainfi au lieu que la Loi ancienne, dans toutes les circonftances de fa publication, n'avoit rien que d'effrayant, & qui ne femblát porter l'homme à s'éloigner de Dieu par crainte, comme d'un maître févére & inéxorable; tout eft aimable au contraire dans la Loi nouvelle; tout raffure l'homme; tout l'invite à s'approcher de Dieu avec confiance comme d'un Pere plein de 15b onté & de tendresse. Vous n'avez point reçû, nous dit le même Apôtre, l'efprit de fervitude, Romis , > pour vous conduire encore par la crainte ; mais [Le Seigneur leur fit entendre les conditions de XII. Dieu est la Vérité même, & la fouveraine XII, ni rompu ce commerce intime de l'ame avec la CHA P. Vérité. Cette divine lumiére luit toujours : mais l'ame devenue charnelle ne la voit plus : ou s'il y a quelques rayons qui percent le nuage épais que les paffions forment autour d'elle, ils font fi foibles, ou ils paffent fi rapidement qu'ils ne peuvent l'éclairer d'une maniere fixe fur les devoirs effentiels, d'où dépend fon unique & véritable bonheur. La rapidité du pro❤ grès de l'idolatrie chez toutes les nations du monde, eft une preuve fenfible du prodigieux aveuglement de l'homme. Qui peut s'étonner qu'il ne connût plus fes devoirs envers Dieu puifqu'il ne connoiffoit plus Dieu même les rapports qu'il avoit à lui? Comme les ténébres croiffoient à mesure que le genre humain s'éloignoit de fon origine, & que les hommes livrés aux objets fenfibles, & dominés par leurs paffions injuftes, devenoient de jour en jour moins capables d'écouter dans le fond de leur cœur la voix de la Vérité & d'y lire à fa lumiére les préceptes de la Loi naturelle; cette Vérité a parlé à leurs fens, elle a fait retentir à leurs oreilles, & expofé fous leurs yeux ces régles éternelles & immuables; & elle les a fait paffer par cette voie jufque dans leur efprit & dans leur mémoire. I. COMMANDE MENT. [Je fuis le Seigneur votre Dieu, qui vous aè tiré de la terre d'Egypte, de la maison de fervitude. ] Dieu repréfente d'abord à l'homme les titres en vertu defquels il lui impofe une Loi. Heft le Seigneur [ Jehovah ] l'Etre fuprême, le Créateur & le Maître du ciel & de la terre. Il eft notre Dieu, & nous sommes le peuple qu'il CHAP. XII. nourrit dans fes pâturages, & les brebis que fa main conduit. Il est notie libérateur; & ce nouveau bienfait nous attache encore plus particuliérement à lui. Car il ne nous a point délivrés de la puiffance de nos ennemis, pour nous rendre indépendans; mais afin que nous le fer- Luc. 1. 74. vions lui feul dans la fainteté & dans la justice, marchant fous fes yeux tous les jours de notre vie. Que j'entende, o mon Dieu, cette vérité, que je n'ai été affranchi du péché & de la mort, que pour devenir votre efclave, & pour vivre dans un parfait affujettiffement à votre Loi. Heureufe & aimable fervitude, qui fait la vraie liberté; dont le fruit eft ma fanctification, & Rom. 6. 24 dont la fin fera la vie éternelle. [Vous n'aurez point de dieux étrangers devant moi.] Ces paroles renferment un commandement, & une défense. Dieu nous commande de l'adorer & de le fervir ; & il nous défend de rendre à aucune créature le culte fouverain qui n'eft dû qu'à lui, felon ce que l'Ecriture dit ailleurs : [Vous adorerez ou vous craindrez] Deut. 6. 1;. le Seigneur votre Dieu, & vous ne fervirez que Mat. 4. 10. lui feul. On comprend aifément qu'il ne s'agit point ici du feul culte extérieur ; mais de l'adodoration intérieure & de ce Jefus-Chrift que appelle adorer Dieu en efprit & en vérité. Et Jean 4. 24. qu'eft-ce qu'adorer Dieu de cette maniére, fi ce n'eft l'aimer? C'eft pourquoi lorfqu'on de- Mat. 22. 36, manda à Jefus-Chrift quel étoit le premier de Mat. 12 .8. tous les commandemens; il répondit par ces paroles du Deutéronome: Ecoutez, Ifraël; le Deut. 6. 4. Seigneur votre Dieu eft le feul Dieu. Vous ai merez le Seigneur votre Dieu de tout votre cœur de toute votre ame de tout votre esprit, de toutes vos forces. C'est-là, ajoûta-t-il, premier commandement. Ainfi adorer Dieu en |