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Nous ne quitterons pas Meliadus sans donner sa génération, en renvoyant, pour ses ancêtres, à M. Dutens, qui les a rapportés (1); car, grâce à lui, nous avons la généalogie historique de ces héros fabuleux, pour compléter la généalogie fabuleuse de bien des personnages historiques. Meliadus fut donc père de l'immortel Tristan de Leonnoys, lequel fut père d'Isaïe le Triste, lequel a aussi son roman (2). Quant aux armoiries de Meliadus, on les trouve gravées dans le livre très rare de la Devise des armes des chevaliers de la Table ronde, imprimé à Lyon, in-16, par Benoît Rigaud, en 1590. C'est là que nous avons appris que messire Palamedes portait Echiqueté d'argent et de sable, de six pièces; armoiries des anciens Beaumont du Vivarais, éteints en 1435, chez les Beauvoir du Roure. Rien n'empêche donc (au cas que messire Palamedes ait existé) que celui qui écrit ces lignes n'en descende par les femmes ; et pour peu que ce Palamedes descendit, à son tour, du Palamède qui inventa les échecs au siége de Troie, cela nous ferait une lignée fort passable: ce sont de belles choses que les origines!

(1) Tables généalogiques des héros de romans, avec un catalogue des principaux ouvrages en ce genre, par Dutens. Londres, 1796, in-4, 2e édition, augmentée.

(2) Voir dans la Croix du Maine, Isaïe le Triste, imprimé à Lyon, in-4, par Olivier Arnouillet.

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BEUFVES DE HANTONNE.

L'Histoire du noble tres preux et vaillant chevalier Beufves de Hantonne et de la Belle Iosienne sa Mie, comprenant les faicts chevalereux et diverses fortunes par lui mises à fin à la louange et honneur de tous nobles chevaliers, comme pourrez veoir puis apres. Nouuellement imprimé à Paris. On les vend à Paris, en la rue Neufve-Nostre-Dame, à l'enseigne Saint-Nicolas, par Jean Bonfons (1 vol. goth., in-4, s. d., vers 1530) (1).

lui

Le début de ce curieux roman, éérit avec beaucoup de naturel, n'est pas fait pour engager les vieux chevaliers, tout vaillans qu'ils sont, à épouser de jeunes et belles filles, quelque nobles qu'elles soient. Huy de Hantonue, en son vieil âge, vit la fille d'un noble homme et de grant lignage, et tant belle la vit, qu'il l'Espousa, voire coucha avec elle, et luy engendra ung beau fils, lequel sur fonds de baptême fut appelé Beufves. Iceluy enfant fut bien venu, bien pansé et nourri; mais le père n'en put avoir d'autre de sa dame tant belle, jeune, et amoureuse et frisque. Cette belle dame voyant son seigneur vieil, afféti, débile, au regard qu'elle ne querroit que esbattemens et joyeusetez par sa monition de jeunesse qui la gouvernoit, se leva un matin d'auprès de son seigneur pour ce que sembloit que son temps y perdoit, tout ainsi que cellui que on faict coucher sans souper; elle se laça gentement, en maniant son sein, qui gentement estoit fait, prit un miroir, y admira sa beauté, et puis faisant venir un escuyer de confiance, le pria, ainsi qu'il estoit loyal et affectionné, de mettre en la viande du comte Huy aucuns poisons, ce qu'il fit, et le comte Huy mort, la belle et frisque dame se trouva libre d'espouser un moult vaillant et jeune chevalier, nommé Doon de Mayence. Le jeune Beufves, bien qu'encore enfant, fit de grands reproches à sa mère, qui le voulut occire tôt; elle se résolut toutefois à l'envoyer tant seulement en estranges pays. Voilà donc Beufves transplanté en Arménie. Josienne, la fille du roy, tant belle et généreuse, l'arma chevalier et en devint éprise; elle refusa pour lui la main du roy Dannebus. Une guerre s'ensuivit. Beufves, vainqueur du roy Dannebus, tomba pris dans les fers de Brandimont de Damas, où il resta sept ans. Pendant cette captivité,

(1) La première édition de ce livre, également gothique (s d.), 1 vol. in-fol., Antoine Vérard, n'est pas plus rare que celle-ci de Jean Bonfons.

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Josienne fut mariée, malgré elle, à un roy sarrazin nommé Pygnorin de Montbrant (ce qui est un joli nom d'Arabe); mais Beufves, conduit miraculeusement par le romancier et par l'amour, n'est pas plutôt sorti des prisons de Brandimont de Damas, après l'avoir tué, qu'il retrouve sa chère Josienne, l'emmene, malgré son accident avec le seigneur sarrazin, passe la mer avec elle, et arrive avec elle à Cologne, pour y tirer vengeance du successeur de son père, Doon de Mayence (1). Il laisse, un petit, Josienne seule pour vaquer à ses affaires de vengeance; mais, pendant ce temps, le bruit de sa mort s'étant faussement répandu, ne voilà t-il pas que l'évêque de Cologne s'ingère de forcer le mariage de Josienne avec un sien neveu; c'est comme une fatalité. Cependant Beufves de Hantonne triomphe de Doon de Mayence, cela va sans dire. Il lui coupe le chef, très bien; il met sa vilaine mère en religion, encore mieux; enfin il épouse une troisième fois Josienne, sa mie. Si ce n'est pas là de la coustance, je le donne en dix à d'autres. Le roman devrait finir ici, en bonne règle; mais l'unité d'action n'est pas le faible ou le fort de nos vieux romanciers. Il faut encore que le lecteur essuie mille aventures, un voyage en Angleterre, une séparation nouvelle et fortuite de Josienne et de son époux, un mariage fortuit de cet époux avec la reine de Cynesse, une merveillense réunion de Beufves et de Josienne. Finalement Beufves de Hantonne marie son fils Thierry avec la reine de Cynesse pour se débarrasser d'elle, retourne en Arménie, y trône avec sa mie, se bat avec les Sarrazins, abdique en faveur de Thierry, son fils très cher, et se fait ermite; après quoi le roman s'arrête avec le 75 chapitre.

L'original de ce roman est certainement un poème français, du même titre, dont l'auteur est inconnu, mais, qu'à son style, la Croix du Maine et Bernard de la Monnoye, d'accord avec les rédacteurs du Catalogue de la Vallière, jugent avoir écrit vers l'an 1200 (2). Ce poème, de 10,600 vers de 10 pieds, n'existe qu'en manuscrit. Il fut, très anciennement, mis en rimes italiennes, et le roman que nous venons d'extraire en est une traduction plus ou moins fidèle, probablement faite, vers

(1) Le président Bonhier possédait, en manuscrit, un poème sur Doolin de Maïence, qu'il attribuait à li roi Adenès. Peut-être le sujet de ce poème rentre-t-il dans celui de Beufves de Hantonne, ou même ne fait-il qu'un avec lui, sous un autre titre.

(2) Voici un échantillon de la poésie de l'original français, d'après deux citations insérées dans le catalogue de la Vallière, 1 partie, tome 2

l'an 1500, sur l'italien. Les deux poètes et le prosateur sont restés sous le voile de l'anonyme jusqu'ici.

pages 158-603 el suivantes. Ces citations sont prises du début et de l'épilogue:

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Oies signor por Dieu le Creatour
Boines cauchons ains noistes millor
Cest de Guion a la fiere vigour

Qui de Anstone tient la terre et l'onour
Viens fu li dus si sist moult grant Foulour
Car bele dame prist et iouvene a oisour
Puis en morut à deul e a doulour
Beuves ses fiez qui tan ot grant valour
En fu menes en tere paienos
Car de sa mere fu pris en tel haour
Sa mort jura coirent li plus sour
Ele voloit prendre autre signour
En ame ot un felon traitour

Do de Maïenche i meauvais boiseour, etc., etc., etc.

Quant Beuves ot ses III fieus corones

Et dans sabaut richement asenes
Beuves entra sor la mer en ses nes
Et esra tant que il fu arives

En cele tere ou Ihesus Crist fu nes
Dont il etoit rois et sire clames
Grant joie
en fit et ses riches barnes
Et yosiane dont il estoit ames
La tere tint et vesqui plus asses
Tant par fu preus vaillans et alosses
Qui sor païen conquist IIII chites
Toute la tere environ et en les
Quant il morut et il fu trespasses
Beuves ses feus en fu roi corones
Dieus l'ama moult si voir qu'il fu nes

Et en la crois travelles et penes
Nous otroit il par ses saintes bontes
Qui en paradis puissions estres boutes

Amen amen de par Dieus en dires, etc., etc.,

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MILLES ET AMYS.

L'Histoire des nobles et vaillans chevaliers nommez Milles et Amys, lesquels en leur vivant furent plains de grandes proesses. On les vend à Paris, en la rue Neufve-Nostre-Dame, à l'enseigne SainctNicolas, par Jean Bonfons (1 vol. goth., s. d. (vers 1530), in-4, très rare, ainsi que la première édition de ce livre, également gothique, s. d., in-fol. Paris, Antoine Vérard.)

(1200-1500-1530.)

Ce Roman est un constant hommage rendu à l'amitié, dans la personne de deux chevaliers, nés le même jour, dans le même pays, avec des traits et des formes semblables, des sentimens, des caractères pareils, sous une étoile commune. L'auteur commence d'un style édifiant. « Pour l'honneur et ré» vérence de la Trinité et de la court célestielle de paradis, >> moi confiant l'infusion du benoît Saint-Esprit, lequel donne » et influe sa grâce où il lui plait, ay entrepris d'escrire une >> histoire des faicts advenus à la louange de deux vaillans che>> valiers nommez Milles et Amys. » S'ensuivent 114 chapitres surchargés d'aventures, dont voici l'aperçu plutôt que le précis. Anceaume, comte de Clermont en Auvergne, au temps du roi Pépin, n'ayant point d'abord d'enfans de sa belle et saincte dame et chère épouse, a formé le vœu d'aller avec elle en Terre-Sainte au cas qu'elle engendrât d'un fils, ce qui advient, et ce fils est nommé Milles. En même temps un garçon, tout pareil, naissait au sénéchal d'Auvergne, qui lui donne le nom d'Amys. Le comte Anceaume, heureux de sa géniture, songe à satisfaire son vou, non toutefois sans consulter premier un nécromancien sur les destinées de son fils, à cause de certain signe que l'enfant avait apporté sur une main. Le nécromancien ayant prédit prospérité, gloire, conquête, etc., le comte Anceaume et sa femme s'embarquent pour la TerreSainte, laissant aux soins dévoués de quelques serviteurs la garde et l'éducation première du petit comte Milles. Tempêtes, isle déserte, la comtesse Anceaume, séparée de son mari par cas fortuit, griffon vaincu, arrivée du comte tout seul en Syrie, baptême du roi d'Antioche, amour subit de la reine d'Antioche pour le comte Anceaume, le roi d'Antioche aussitôt après son baptême ayant disparu, ce qui advient fort à propos Cependant qu'advenait-il au petit comte Milles? Il lui

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