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chement accoutrée et belle qu'elle est, ou si elle ne l'est, si pense elle l'être, se fait violenter soir et matin par sa mère, ou par sa cousine, ou par sa commère, ou par le cousin de sa commère, pour aller en assemblées, fêtes et pèlerinages, et, en telle compagnie, se rit du benoît homme, écoute les galans; reçoit et donne de beaux gages, tant que son mari use sa vie en languissant toujours, pour être venu en jalousie et d'icelle en cocuage. La tierce Joie est quand la femme, qui est jeune, après avoir pris des dilectations, devient grosse, à l'adventure, non pas du fait de son mari, et qu'icelui poure mari entre en souci, de crainte qu'elle ne soit malade, et prend mille soins de la grossesse, de l'accouchement, du baptême, du festoyement des commères, qui mettent sa cave en désarroi, et se moquent de lui, des relevailles, des nourrices, des autres cadeaux, et autres peines èsquelles il use misérablement sa vie en languissant toujours, pour être père putatif.

La quatrième Joie si est quand celui qui est marié, tantôt neuf ou dix ans passés, plus ou moins, est père de cinq ou six enfans, ou plus, et, après avoir eu tant de males nuits, de labeurs, soucis et maleuretés, qu'il en est mat et endurci comme un vieil âne, il entend jà ses filles lui criant: mariage! mariage! et sa dame le tance verdement qu'il n'est point actif à faire valoir son bien pour préparer les dots, et lui reproche une vieille valise du temps qu'il servait à la bataille de Flandres, il y a trente-cinq ans (la bataille de Rosebecque, en 1382). Alors le pauvre homme va à trente lieues à une assise ou en parlement, pour une vieille cause qu'il a, venant de son bisayoul, et est bien déplicé d'avocats, sergens et greffiers, puis retourne en sa maison, percé en sa chair par la pluie du ciel. Ores, sa dame le réprimande, dont il ne trouve valets qui osent lui obéir, et s'il se fàche, sa dame crie. Alors, son dernier né, Favori pleure, et la mère bat de verges le poure petit. Lors le prudhomme lui dira : «Pour Dieu! madame, ne le battez pas! » Mais la chambrière lui répliquera : « Pour Dieu! monsieur, c'est grand'honte à vous que votre venue en » la maison ne cause que noise.» Ainsi use sa vie, en languissant toujours, le prud'homme.

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La cinquième Joie si est quand le bon-homme qui est marié à femme de plus grand'lignée, ou plus jeune que lui, se tient pour honoré de ce que Dieu lui fit la grâce qu'il la put avoir; et si la dame ne le lairra mie approcher qu'elle ne lui die: «Mes parens ne m'ont point donnée à vous pour me paillarder. Elle ne lui fera bon visage que pour en tirer

aile ou pied, et si, aura un bon ami à qui elle fera montre des secrets d'amour, et plusieurs petites mélancolies, dont sa mère et Jeanne, sa chambrière, auront le secret; et, à la fin, le bon-homme saura tout, de quoi il usera sa vie en languissant toujours, et finira ses jours miserablement.

La sixième Joie est quand la dame de l'homme qui est marié a des caprices, et que, faute de vouloir manger seule avec son mari, elle fait la malade. Alors le mari se met en quête de convier quatre hommes d'état, et eux venus au dîner la dame n'a rien fait préparer, et a envoyé ses valets qui d'un côté, qui d'un autre. Il demande du linge de table pour le couvert. On lui répond qu'on n'a pas les clefs, et que le linge de hier suffit. « Vraiment m'amie, fait-il, je ne saurais me gouverner avec vous. » — « Ave Maria, fait-elle, vous gâtez tout, et encore ne puis-je avoir une heure de patience. » Ainsi demeure le mari en tourmens, et finit misérablement ses jours.

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La septième Joie si est quand le marié d'une très bonne femme et bonne galoise (réjouie) lui a donné grand contentement, et a vécu heureusement avec elle, jusqu'à temps que veigne à s'appercevoir le bon-homme que tout son bien s'en va en dépens, au confesseur, aux moines d'abbayes, aux voisins, aux commères. Un sien confident l'avertit du train; mais la dame trouve moyen de donner le confident pour un traître suborneur qui l'a voulu paillarder, dont le bonhomme continue à se ruiner en confiance, et finit misérablement ses jours.

La huitième Joie si est quand le marié, ayant pris tous plaisirs et solaciemens avec sa dame, commence à réfroidir sa jeunesse, et veut entendre à ses autres affaires, vû qu'on ne peut courre et corner à la fois, et à l'adventure, sa dame étant accouchée de son quatrième ou cinquième, plus ou moins, craignant mourir, ou que son petit ne meure, s'est vouée à Notre-Dame-du-Puy, en Auvergne, ou à NotreDame-de-Roquemadour, en Quercy, et le bon-homme a belle de soupirer et remontrances faire, faut qu'il achète chevaux, bâts, selles, robes de voyage, quitte ses besognes, et accompagne sa dame au pèlerinage, sans cesse arrètant sur le chemin, pour un étrier cassé, pour un gant tombé à terre, pour acheter anneaux et joyaux d'ambre, et patenôtres de corail; après quoi, revenu en sa maison, il est bien empêché que la dame a prins goût au chevaucher, et que lui faudra péleriner toujours et finir ses jours misérablement.

La neuvième Joie est quand le marié, homme sage et de prévoyance, a si bien fait que maintenir sa dame en retenue et obéis

sance, ses enfans en respect, qu'établir sa lignée sagement et richement, étant maître chez lui, et que, sur l'âge, le voilà goutteux et perclus pour avoir prins trop de fatigue. Alors la chance tourne: sa dame, se souvenant des riottes qu'il lui a menées, le laisse à l'adventure comme un vieux chien ladre, ses enfans courrent le monde sans de lui souci prendre; et, quand il fait représentation, on lui répond que mieux vaudrait aller d'abord en Paradis que vivre avec lui, tant il est malaisé à servir. Alors le pauvre marié sera en gémissemens et finira misérablement ses jours.

La dixième Joie montre le marié plaidant contre sa dame; et, soit qu'il gagne ou qu'il perde la séparation, perdant sa cause devant le public, perdant son repos, et languissant toujours. La onzième Joie représente le jeune marié pensant avoir trouvé une merveille de beauté et d'innocence, qui se trouve avoir pris, comme on dit, la vache et le veau, par où il use misérablement ses jours, tout aussi bien qu'un autre. La douzième joie semble d'abord mettre le marié à l'abri de malencontre, le peignant tout soumis à sa dame, la plus sage et bien ordonnée qui oncques fut; mais nenni. La plus sage femme, au regard du sens, en a autant qu'un singe a de queue. Les affaires du marié, et son honneur, s'en iront donc à vau-les-champs. Sa dame l'empêchera d'aller en guerre quand il faudra, et comme un gentilhomme doit faire, et comme ne font plus maints gentilhommes qui ne devraient, pour ce, compter pour nobles. Elle lui fera dépendre son bien en fausses besognes, par où l'on voit que celui-là aussi est autorisé à finir misérablement ses jours.

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La treizième Joie fut commune à la plupart des héros grecs, à leur retour de Troie ; c'est à dire qu'ils trouvèrent leurs dames remariées et leurs enfans à l'abandon. C'est bien encore le cas de finir misérablement ses jours, ne fût-on pas occis par Clytemnestre.

La quatorzième Joie. Si est quand un jeune homme marié à une jeune dame qu'il aime, et dont il est aimé, vient à la perdre au plus fort de son soulas, et qu'après deuil, en ayant pris une autre, il paye à Fortune les arrérages des plaisirs passés, en portant un joug pesant qu'il a mérité d'autant.

La quinzième Joie, et dernière, la pire de toutes, est quand le marié ne veut pas, à toute force, ètre cocu, et veut tuer les galans de

sa dame. Alors c'est un enfer véritable, et la plus extrême qu'il y ait, sans mort.

Que doit-on conclure de toutes ces joies? dirons-nous avec Guillaume Alexis?

Faces sont beles :
Poignant's mameles
Valent or fin:
Mais les sequelles
A la par fin.
Or donc, afin
Que le plus fin

Trop ne se fie en ses cautelles,
Je dy: Si le chef est beuin,
Qu'à la queue gît le venin.

Dirons-nous donc avec Crétin?

N'y mettez plus vos appétis:
Et s'aucun y a, qu'il s'en oste:
Je parle à grands et à petits:

Au partir, faut compter à l'hoste.

Non, mais nous dirons que nos vieux Français avaient plus de gaîté que de sentiment, plus d'esprit que de raison, et plus de malice que de méchanceté.

LA

VENGEANCE ET DESTRUCTION

DE HIÉRUSALEM,

Par personnaiges, exécutée par Vespasien et son fils Titus, contenant en soy plusieurs cronicques et histoires romaines tant du regne de Néron empereur que de plusieurs aultres. Imprimé dernierement à Paris. M.CCCCC.xxx.IX. On les vend à Paris en la rue Neufve-Nostre-Dame à l'enseigne de l'Escu-de-France, par Alain Lotrian (goth. à deux colonnes, in-14). 241 feuillets, titre compris, et environ 30,000 vers de 8 pieds.

(1437-1539.)

Ce mystère est un des plus anciens. Ni La Croix du Maine, ni Beauchamps, ni les Frères Parfait, ni le duc de la Vallière n'en connaissent l'auteur; mais sa composition remonte évidemment à l'origine, proprement dite, de ces drames sacrés, c'est à dire au temps du Mystère de la Passion, peu avant l'an 1402, que, sur les lettres-patentes du roi Charles VI, les Confrères établirent leur théâtre à Paris, dans une salle de l'hôpital de la Trinité, hors la ville, près la porte Saint-Denis. Jacques Millet, auteur du Mystère de la Destruction de Troyes, y a-t-il travaillé, ou seul ou en compagnie, comme c'était l'ordinaire, pour la fabrication de ces poèmes grossiers? N'est-ce pas plutôt à Jean Michel, médecin d'Angers, ou à Jean Michel (1), évêque d'Angers, autres fabricateurs de Mystères, qu'il appartient d'en revendiquer la gloire, s'il y a lieu? Convient-il de chercher d'autres noms moins connus?

Le procès pend et pendra de la sorte

Encor long-temps, comme l'on peut en juger.

Ce qu'il y a de certain, c'est que le Mystère de la Vengeance et Destruction de Hierusalem fut un des premiers en date. Une

(1) La Croix du Maine dit que Jean Michel, évêque d'Angers, est l'auteur du Mystère de la Passion, le premier de tous. Les F. Parfait veulent prouver qu'il n'en est rien, et que Jean Michel, le médecin, ne fit que retoucher ce fameux Mystère dont ils assurent que l'auteur ou les auteurs sont inconnus, et qui est de 1380 environ.

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