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resteroit caution de son retour. Ce généreux ami se rendit volontiers dans la prison publique. Tout le monde, et le tyran sur-tout, attendoient avec impatience le dénouement de cette scène intéressante. Le jour approchoit ; et Damon ne revenoit point. On blàmoit la folie du garant téméraire on plaignoit son aveugle tendresse. Cependant on apprêtoit les instrumens du supplice. Déjà le peuple s'assembloit en foule; déjà l'on se préparoit à conduire l'innocent Pythias à la mort. Tout-à-coup Damon arrive: Damon délivre son ami. Tout Syracuse étonné pousse des cris, et demande la grace du criminel. Le tyran la lui donne sans peine ; et touché d'une union si grande, il les prie de le recevoir en tiers d'une union si belle. Sainte amitié! c'est ici ton triomphe. Le cœur le plus dur, l'ame la plus barbare rend hommage à tes ineffables douceurs, et veut aussi les goûter.

3. Eudamidas de Corinthe touchoit à sa dernière heure, et laissoit sa mère et sa fille exposées à la plus cruelle indigence. Il n'en fut point alarmé. Il jugea des cœurs d'Aréthus et de Carixène, ses fidèles amis, par le sien propre. Il fit ce testament qui ne doit jamais être oublié : « Je lègue à Aréthus de nourrir << ma mère, et de l'entretenir dans sa vieillesse ; à « Carixène de marier ma fille, et de lui donner la plus << grande dot qu'il pourra ; et au cas que l'un des deux << vienne à mourir, je substitue en sa part celui qui << survivra.»> Ces deux citoyens généreux se montrèrent les dignes amis du vertueux Eudamidas, en remplissant, avec un noble scrupule, ses dernières intentions.

4. Trois Arabes étoient unis par les liens d'une amitié si étroite, qu'ils paroissoient n'avoir qu'une seule ame. L'un deux, nommé Vaked, étoit dans la dernière indigence, lorsqu'une des fêtes les plus solennelles du musulmanisme approchant, sa femme lui dit : « Je ne << murmure point contre la Providence de ce qu'elle « nous a réduits dans une situation si déplorable, et je << supporte avec résignation toutes nos disgraces. Mais << voici la fête qui arrive, et je vous avoue que j'aurai << beaucoup de peine à voir mes enfans avec des habits « déchirés,

« déchirés, tandis que ceux de nos plus proches parens << seront vêtus avec magnificence. Trouvez, je vous << prie, s'il est possible, quelque expédient qui nous <«< mette à couvert de cette honte. » Vaked, après avoir long-temps réfléchi sur la demande de sa femme, résolut d'écrire à l'un de ses deux amis ces paroles: «Je «suis dans une extrême nécessité, et la fête approche. >> Aussitôt que ce généreux ami ent reçu la lettre de Vaked, il lui envoya, pour toute réponse, une bourse remplie d'or. Vaked, surpris de ce présent, se rendit dans le moment chez son ami, pour apprendre de luimême s'il n'y avoit point de méprise. Mais dès que cet homme généreux l'eut aperçu, il fit apeler leur troisième ami, et leur dit à tous deux : « Voici tout <«<l'argent que je possède; trouvez bon que nous le << partagions entre nous, pour subvenir à nos besoins

<< communs. »

5. Le célèbre Voiture, l'un des beaux esprits du siècle de Louis XIII, ayant perdu tout son argent au jeu, eut besoin de deux cents pistoles. Il écrivit en conséquence, à l'abbé Costar, son fidelle ami. Cette lettre admirable nous présente un trait de cette confiance et de cette franchise qu'inspire la sincère amitié. La voici :

<«< Je perdis hier tout mon argent, et deux cents pis« toles au-delà, que j'ai promis de rendre dès aujour« d'hui. Si vous les avez, ne manquez pas de me les « envoyer : si vous ne les avez pas empruntez-les. De << quelque facon que ce soit, il faut que vous me les << prêtiez ; et gardez-vous bien de souffrir qu'un autre << vous enlève sur la moustache cette occasion de me <«< faire plaisir : j'en serois fàché pour l'amour de vous. << Comme je vous connois, vous auriez de la peine à « vous en consoler. Afin d'éviter ce malheur, vendez « plutôt ce que vous avez..... Vous voyez comme l'a<<mour est impérieux. Je prends un certain plaisir à en << user de la sorte avec vous, et je sens bien que j'en <«< aurois encore un plus grand, si vous en usiez ainsi <«< avec moi; mais vous êtes un poltron: jugez s'il ne << faut pas que je m'assure bien de vous.... Je donnerai Tome I. G

«

« ma promesse à celui qui m'apportera votre argent. << Bon jour. »

L'abbé Costar lui fit cette réponse: «J'ai une extrême « joie d'être en état de vous rendre le petit service que << vous exigez de moi. Jamais je n'eusse pensé qu'on << eût tant de plaisir pour deux cents pistoles. Après «<l'avoir éprouvé, je vous donne ma parole que j'aurai << toute ma vie un petit fonds tout prêt aux occasions <«< où vous en aurez affaire..... Ordonnez-moi donc har<«<diment ce qu'il vous plaira: vous ne sauriez prendre «< tant de plaisir à me commander, que j'en aurai à « vous obéir; mais quelque soumis que je sois, je me « révolterai, si vous vouliez m'obliger à prendre une <romesse de vous. »

6. M. S*** perd un ami qui, en mourant, laisse des dettes, et deux enfans en bas âge, sans biens, sans espérances, sans ressources. L'ami qui lui survit retranche son train, son équipage, et va se loger daus un faubourg, d'où tous les jours il venoit suivi d'un laquais au palais, et y remplissoit les devoirs de sa charge. Il est aussitôt soupconné d'avarice, de mauvaise conduite; il est en butte à toutes les calomnies. Enfin, au bout de deux ans, M. S*** reparoît dans le monde. Il avoit accumulé une somme de vingt mille livres, qu'il plaça au profit des enfans de son ami.

7. M. Freind, premier médecin de la reine d'Angleterre, avoit assisté au parlement en 1722, comme député du bourg de Lanceston, et s'étoit élevé avec force contre le ministère. Cette conduite hardie ayant indisposé la cour, on suscita à Freind un crime de haute-trahison, et il fut enfermé, au mois de Mars, dans la tour de Londres. Environ six mois après, le ministre tomba malade, et envoya chercher Richard Méad, autre médecin anglais, et le plus grand ami de Freind. Après s'être instruit à fond de la maladie du ministre, il lui dit qu'il répondoit de sa guérison; mais qu'il ne lui donneroit pas seulement un verre d'eau, qu'il n'eût rendu la liberté qu'on avoit si injustement ravie à M. Freind. Le ministre, quelques jours après, voyant sa maladie augmentée, fit supplier le roi d'élargir le prisonnier.

L'ordre expédié, le malade crut que Méad alloit or donner ce qui convenoit à son état : mais ce médecin persista dans sa résolution, jusqu'à ce que son ami fùt rendu à sa famille. Alors il traita le ministre, et lui procura bientôt une guérison parfaite. Le soir même il porta à Freind environ cinq mille guinées qu'il avoit recues pour ses honoraires en traitant les malades de son ami pendant sa détention, et le contraignit de recevoir cette somme, quoiqu'il eût pu la retenir légi timement, puisqu'elle étoit le fruit de ses peines.

8. L'historien Polybe se trouvoit souvent avec Fabius et Scipion, fils de Paul Emile. Un jour que Scipion se vit seul avec lui, il lui ouvrit son coeur avec une pleine effusion, et se plaignit, mais d'une manière douce et tendre, de ce que dans les conversations qu'on avoit à table, il adressoit toujours la parole à son frère préférablement à lui. « Je sens bien, lui dit-il, que cette «< indifférence pour moi vient de la pensée où vous êtes, <«< comme tous nos concitoyens, que je suis un jeune « homme inappliqué, et que je n'ai rien du goût qui « règne aujourd'hui dans Rome, parce qu'on ne voit « pas que je m'attache aux exercices du barreau, et « que je cultive le talent de la parole. Mais comment « le ferois-je ? On me dit perpétuellement que ce n'est « point un orateur que l'on attend de la maison des << Scipions, mais un général d'armée. Je vous avoue, << pardonnez-moi la franchise avec laquelle je vous « parle, que votre indifférence pour moi me touche « et m'afflige sensiblement. » Polybe, surpris de cé discours, auquel il n'avoit pas lieu de s'attendre d'un jeune homme de dix-huit ans, le consola du mieux qu'il put; et l'assura que, s'il adressoit ordinairement la parole à son frère, ce c'étoit point du tout faute d'estime ou d'affection pour lui, mais uniquement parce que Fabius étoit l'aîné; et que d'ailleurs, sachant que les deux frères pensoient de même, et étoient fort unis, il avoit cru que parler à l'un, c'étoit parler à l'autre. « Au << reste, ajouta-t-il, je m'offre de tout mon coeur à votre « scrvice; et vous pouvez disposer de moi. Par rapport aux sciences de l'étude desquelles on vous occupe

<< actuellement, vous trouverez assez de secours dans ce << grand nombre de savans qui viennent tous les jours « de Grèce à Rome. Mais pour le métier de la guerre, << qui est proprement votre profession, aussi-bien que << votre passion, je pourrai vous être de quelqu'utilité. » Alors Scipion lui prenant les mains, et les serrant avec les siennes : «Oh! dit-il, quand verrai-je cet heureux « jour, où, libre de tout autre engagement, et vivant << avec moi, vous voudrez bien vous appliquer à me << former l'esprit et le coeur ? C'est alors que je me << croirai véritablement digne de mes ancêtres. » Depuis ce temps-là, Polybe, charmé et attendri de voir dans un jeune homme de si nobles sentimens, s'attacha particulièrement à lui. Scipion, de son côté, ne pouvoit le quitter son grand plaisir étoit de s'entretenir avec lui. Il le respectoit comme un père; et Polybe, de son côté, le chérissoit comme son fils.

9. Philippe, roi de Macédoine, père d'Alexandrele-Grand, faisoit vendre des prisonniers de guerre, et assistoit lui-même à cette enchère, ayant la robe retroussée d'une manière indécente. Un des prisonniers s'en étant aperçu, s'écria : « Excusez-moi, seigneur; << je suis un ancien ami de votre père. » Le monarque surpris, lui demanda comment il avoit fait cette amitié? « Je vais vous l'apprendre, » répondit-il; et s'approchant comme pour lui parler en secret : « Baissez « votre robe, » lui dit-il. Philippe aussitôt donna la liberté à cet homme, ajoutant qu'il venoit de lui faire connoître qu'il étoit en effet son ami.

10. Quelqu'un souffroit impatiemment d'être repris par son ami, et, pour cette raison, vouloit rompre avec lui. « Songez, lui dit Caton l'ancien, qu'on ne « hait pas l'abeille à cause de son aiguillon, et qu'on << la conserve à cause de son miel. »

11. Pisistrate, tyran d'Athènes, abandonné par quelques-uns de ses amis, s'informa du lieu où ils s'étoient retirés; puis, ayant fait un gros paquet des choses les plus nécessaires à la vie, il les chargea sur son dos, et alla les trouver. « Eh! que voulez-vous « donc, lui cria-t-on, dès qu'on l'aperçut? - Je viens,

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