De la nature de l'état de l'Homme par raport à l'Univers. R EVEILLEZ-VOUS, mon cher BOLINGBROKE; laissez toutes les petites choses à la basse ambition & à l'orgueil des Rois. Puifque tout ce que la vie peut nous donner, se borne prefque à regarder autour de nous & à mourir, parcourons donc au moins cette Scene de l'HOMME: Prodigieux labirinthe, mais qui a fa régularité; campagne où la fleur croît confondue avec le chardon; jardin qui tente par des fruits défendus. Nous ne pouvons l'homme notre pro pre fifte lation gé Allons enfemble, battons ce vafte champ ; & foit couvert QUE pouvons-nous dire de Dieu ou de l'Homme, juger de qu'en raisonnant en conféquence de ce que nous connoifque relati- fons? Et que connoiffons nous de l'Homme? feulement vement à fa demeure ici - bas: c'eft d'où partent, c'est à quoi se rapme, igno. portent tous nos raisonnemens. Quoique Dieu se manifeste rant la re- par des Mondes innombrables, c'eft à nous de le rechernérale des cher dans celui où il nous a placés. Celui qui pourroit perfiftemes & des choses. cer au travers de la vafte immenfité, voir des Mondes entaffés fur d'autres Mondes former la totalité de l'Univers, obferver le raport des regles fiftematiques d'une partie aux regles sistematiques d'une autre, reconnoître d'autres planetes, d'autres foleils; quels font les différens êtres qui habitent chaque étoile celui-là pourroit dire pourquoi Dieu a fait toutes chofes telles qu'elles font. Notre ame transcendante a-t-elle pénétré les fupports & les liens des différentes parties de l'Univers, leurs fortes connexions, leurs fubtiles dépendances, & leurs juftes gradations? Petites parties de ce tout, pouvons-nous le comprendre ? CETTE grande chaîne qui attire & réunit toutes les parties, & qui par cette harmonie conferve le tout, est Together let us beat this ample field, SAY firft; of God above, or Man below, What can we reason, but from what we know? Of Man, what fee we but his Station here, ΤΟ From which to reafon, or to which refer? 20 Thro' Worlds unnumber'd tho' the God be known, 'Tis ours to trace him, only in our own. 25 What vary'd Being peoples ev'ry Star? May tell, why Heav'n made all things as they are. But of this frame the bearings, and the ties 30 Gradations juft, has thy pervading foul Look'd thro'? or can a Part contain the Whole? Is the great Chain that draws all to agree, And drawn fupports, upheld by God, or thee? PRESUMPTUOUS Man! the Reason wouldst thou find Why form'd fo weak, fo little, and fo blind? First, if thou can'ft, the harder reason guess OF Systems poffible, if 'tis confest 36 40 45 Then, in the Scale of life and fenfe, 'tis plain There must be, fome where, fuch a rank as Man; Is only this, if God has plac'd him wrong ? RESPECTING Man whatever wrong we call, May, must be right, as relative to All. In human works, though labour'd on with pain A thousand movements fcarce one purpofe gain, бо រ elle entre les mains de Dieu, ou entre celles de l'Homme ? HOMME présomptueux, prétens - tu découvrir la raison d'où vient que tu as été formé fi foible, fi petit, fi aveugle? Premiérement, fi tu le peux, trouve la raison encore plus incompréhenfible, d'où vient que tu n'as pas été formé plus foible, plus petit, & encore moins éclairé. Fils de la terre, demande - lui pourquoi les chênes font plus hauts & plus forts que les ronces auxquelles ils donnent de l'ombrage: ou demande aux plaines azurées pourquoi les fatellites de Jupiter font moindres que Jupiter? Si l'on convient que de tous les fyftemes poffibles, la fageffe infinie doit préférer le meilleur, où tout doit être rempli, parce que s'il ne l'étoit pas, il n'y auroit point de cohérence, & où tout ce qui eft, eft dans le dégré où il doit être; il eft évident que dans la progreffion des êtres qui vivent & qui fentent, il doit y avoir un être tel que l'Homme: & toute la queftion (que l'on difpute tant que l'on voudra) se réduit à ce point; fi Dieu l'a mal place? eft propor occupe dans la création, & à des re lui font in lations qui CE que nous apellons injuftice par raport à l'Homme, L'Homme étant confidéré comme relatif au tout, non feulement peut tionné au être jufte, mais doit l'être. Dans les ouvrages humains, tang qu'il quoique pourfuivis avec un travail pénible, mille mouvemens produisent à peine une seule fin. Dans les ouvrages de DIEU, un fimple mouvement non- feulement produit fa fin, mais encore feconde une autre opération. Ainfi l'Hom me qui paroît ici le principal Etre, ne joue peut-être que le rôle de fecond par raport à une fphere inconnue, n'eft que le mobile de quelque roue, le moyen de quelque fin: car nous ne voyons qu'une partie, & non le tout. connues. |