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à dire, pour venir au jeu du pèlerin, qui sert comme de prologue au jeu de Robin et de Marion, en faisant connaître les particularités de la vie de notre trouvère. Le Bossu d'Arras entra donc d'abord dans les ordres sacrés; puis il se maria par amour; puis, s'étant séparé de sa femme, il reprit l'habit ecclésiastique, s'attacha au duc d'Alençon, que Philippe le Hardi envoyait au secours du duc d'Anjou, roi de Naples; et enfin mourut, en 1282, dans cette ville, où il composa le jeu de Robin et de Marion, pour réjouir cette cour française. PersonNAGES DU JEU. Marions ou Marotte; li chevaliers Gautiers, Baudons, Péronelle, Huars; li Kois, Perrette, Warniers et Rogans. Quoique le grand d'Aussy ait donné une traduction de ce jeu dans ses Fabliaux, on ne sera peut-être pas fâché d'en lire ici une courte analyse; la voici donc. Marions est aux champs seulette, et chante:

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Survient un chevalier qui tâche de la séduire, en lui promettant, tour à tour, des oiseaux, un âne, un héron, etc., etc. Marions le repousse au nom de Robins et se gausse de lui. Le chevalier s'en va; Robins arrive; Marions lui conte tout. Les deux amans se mettent à manger côte à côte; mais l'idée du chevalier empêche Robins de manger; il cherche à se distraire en amusant son amie, saute, court, danse devant elle et va chercher des voisins pour les mieux égayer, gros Bourdon, par exemple, le joueur de musette, Baudon et Gautiers. Par malencontre, avant que la compagnie soit venue, le chevalier revient; il est plus pressant. Marions lui dit : « Sire! vous me feriez surprendre; alez vous ent, etc., etc., j'oy Robins flagoler au flagol d'argent. » Robins, sur ces entrefaites, a blessé le. faucon du chevalier. Le chevalier rosse Robins. Marotte` se précipite au secours de son ami. Le chevalier enleve Marotte en croupe sur son cheval. Robins pleure et n'ose courir. Cependant les voisins sont arrivés; mais comme ils ont peur, ils se cachent derrière un buisson, d'où ils voient Marion se débattre. Le chevalier la presse et lui promet encore un bel oiseau de rivière. La fidèle Marion préfère le fromage cras de Ro

bins. Alors le chevalier la laisse ; et elle appelle aussitôt Robins, qui sort de sa cachette pour l'accoler devant Baudon. Surviennent d'autres amis de Robins, suivis de Péronele. La troupe se prend à folâtrer. On joue au jeu de Saint-Coines: puis Marion trouve ce jeu trop lais. Gautiers propose de faire un pet pour s'esbatre. Fi! Gautiers! dit Robins, que devant Marotte ma mie, avez dict si grant vilenie. Tout balancé, on joue au jeu des rois; on compte jusqu'à dix à la main chaude : Baudon est roi. Le roi fait diverses questions; il demande à Robins quant une wake naist, à quoi il sçai qu'ele est femele. Robin a honte, et se résout à conseiller au roi de lui regarder au cul. Sur quoi le roi lui commande de baiser Marion, ce que celui-ci fait si lourdement, que Marion lui dit qu'il pese autant qu'un blos. Le roi demande à Huart quelle viande il aime le mieux, Huard dit que c'est bons fons de porc pesant et gras. Le roi demande à Perete qu'elle est la plus grande joie qu'elle ait goûtée d'amour? Perete répond que c'est quand ses amis lui tiennent compagnie aux champs, avee ses brebis ; et Gautiers lui dit qu'ele ment: il a raison. Le roi demande à Marotte combien ele aime Robins; Marotte répond qu'ele l'aime d'amour si vraie, qu'ele n'aima jamais tant brebis qui ait agnelė; la compagnie trouve que c'est beaucoup dire. Gautiers s'offre en mariage à Perete, et lui fait l'énumération de ses richesses. Il a ronchi traiant, bon harnas, et herche et carue, houche et sercot, tout d'un drap, avec une rente qu'on lui doit de grain sur un moulin à vent, et une vake. Perete refuse, car, dit-elle, il y aurait bataille entre lui et mon frères Guiot, vu qu'ils sont deux sots. Là dessus, gros rire, et on se fouille les poches pour en tirer victuailles à manger ensemble. Robin veut aller querir un gros et gras capon, qu'il mangera avec Marotte et la compaignie, bec à bec. Survient le berger Warniers, tout triste de ce que Mehales, sa mie, s'est déchute avec un prêtre, on dit, à quoi Rogans répond en nom Dieu! Warniers, bien puet estre, car ele i aloit trop sovent. Warniers se console; on mange, on danse, et Robin touche dans la main de Marion, qui lui donne sa foi. C'est ainsi que le jeu finit ou commence.

LE RENONCEMENT D'AMOURS.

I vol. pet. in-4, goth., avec fig. et vignettes historiées en bois, imprimé à Paris, par Jehan Trepperel, demeurant en la rue NeufveNostre-Dame, à l'enseigne de l'Escu de France (S. d.), mais de peu antérieur à 1500. (Très rare.) Notre exemplaire est dans toute sa marge, non rognée.

(1370-1499.)

Ce Poème, en vers croisés de huit pieds, sans succession régulière de rimes masculines et féminines, contient vingt-neuf feuillets; le reste du livre est consacré à une déclamation et à des oraisons en l'honneur de la Vierge, au nom de l'amoureux qui a renoncé à l'amour. Cette seconde partie a treize feuillets, dont le dernier ne présente autre chose qu'une gravure en bois où l'on voit les armes de France supportées par deux anges. Plus bas, le monogramme I T, de Jehan Trepperel, est soutenu par deux lions; le tout est entouré de ces mots : Octroye nous charité et concorde, en provolant ta grant miséricorde. La date de ces poésies doit remonter au moins à 1370. Leur auteur est inconnu. C'est un des nombreux imitateurs de Guillaume de. Lorris et de Jehan de Meung, le fameux Misogyne; mais il n'a ni leur verve, ni leur imagination. Au lieu des peintures vives et animées, des traits mordans du Roman de la Rose, on trouve dans ce débat (car c'est encore un débat) defroides dissertations sur l'amour, ses bienfaits et ses méfaits, des idées communes, à peine rachetées de loin en loin par quelques images gracieuses et quelques mots de sentiment ou de satire; mais surtout beaucoup de verbiage.

L'auteur, ou l'acteur, pour parler le langage du temps, raconte comment,

« Dans le beau plaisant moys de may
>>Que tous cueurs s'efforcent d'amer

>> Pour mettre le sien hors d'esmoy, etc., etc., etc. »

Il le mena promener sur les bords de la mer, et que, chemin faisant, lui ayant demandé pourquoi il estoit toujours battant' que à peine il pouvoit plus vivre, etc., etc., etc., une querelle s'était engagée entre son cueur battant et lui, à la suite de laquelle ils s'étaient séparés brouillés; mais comme on ne saurait demeurer long-temps séparé de son cœur, la réconciliation s'était faite bientôt sur la foi du serment, une

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paille étant en deux parties. La suite du récit nous apprend que le poète et son cœur, de nouveau bons amis, s'allèrent de nouveau promener; voilà qui est inventif! et qu'ayant avisé, dans un bosquet, un coquardeau de France, c'est à dire un galantin, un muguet, un conteur de fleurettes, tout vestu de vert, qui faisoit le joyeux, ils se tapirent derrière un buisson pour apprendre le sujet de cette joie. Or, ce qui faisait la joie du coquardeau, c'étaient les grants biens d'amours qu'il ne se lassait de vanter. L'acteur, ou le renonceur d'amours, réfute cet hymne assez plat en vers satiriques tout aussi plats, et puis survient un autre galant, vêtu de jaune doublé de noir, dont le cueur est plein de dueil, du malheur d'amer. Le renonceur d'amours ne contredit pas cette fois; loin de là, il s'évertue à médire des femmes et des galans. Une dame intervient alors qui plaide pour l'amour, très pertinemment à ce qu'il semble, et qui donne aux amoureux la recette suivante pour n'avoir point à s'en plaindre :

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<< Servez-moi soir et matinée,
« Et je ferai que vostre peine

«Sera si bien reguerdonnée

il

Que joye vous sera prochaine, etc., etc. » "Le renonceur réfute la dame aussi bien qu'il a fait le coquardeau; mais celui-ci, mal-content, prend de nouveau la parole, et cette fois plus vivement. Il se cite pour exemple; n'a aimé qu'une seule femme au moins d'une amour ferme et pure, et s'en étant bien trouvé, il met les maux de la galanterie sur le compte de ces amoureux si bestes

« Qui amusent et rompent leurs testes

>> Pour aymer ce qui d'eux n'a cure, etc., etc., etc.»

Le galant jaune ramasse la balle du coquardeau ou galant vert, et la lui renvoie au visage, en lui prédisant que son cueur ne tardera pas à estre noirci de deuil, en despit de ses discours amoureux, aspre comme moutarde; la dispute s'échauffant, le renonceur d'amours est pris pour juge. Autre plaidoyer contradictoire devant le renonceur. Le galant jaune devient très impertinent pour l'amour.

«Je scay bien ce que peut en estre, dit-il,

» Car je l'ai servi longuement

» Et congnois tout au long son estre

» Sa fin et son commencement.

» Mais, pour en parler pleinement,

>> Qui plus le sert, plus hait sa vie..... »

Là dessus il étale avec complaisance les suites funestes de la

galanterie, les trahisons, les soucis, le temps perdu, la ruine, etc. Ce tableau rend le coquardeau tout écumant de fureur; mais sa fureur le fait raisonner si mal que le jaune en est tout esjoui. Pourquoi, s'est écrié le pauvre coquardeau, pourquoi exagérer les faiblesses des femmes?

« Et encore il est tout commun

» Se disent les docteurs des femmes
>> Que quant elles ont aimé ung

» Tout seul, on les tient pour bigames

»» Et que la droitte loy des dames

>> Est d'en aymer après ung cent, etc., etc. »

Il faut enfin mettre un terme à la kyrielle de lieux commuus et d'invectives dont se compose le débat, et s'en référer au jugement du renonceur, lequel a renié l'amour définitivement, et pour toujours icelui désavoué, sous peine d'être maudit de Dieu; le vert et le jaune souscrivent à ce bel arrêt, et la partie est faite de ne plus aimer; d'où le livre prendra son titre de Renoncement d'Amours. Le poète finit par dire qu'il ne se nomme pas de peur d'être assommé; allusion qu'il fait sans doute au danger que courut Jehan de Meung à la cour de Philippe le Bel, d'être à nu flagellé par les dames de la reine et en sa présence, pour un crime pareil. A défaut du nom de l'auteur, nous avons son anagramme, qu'il dit renfermée dans ces mots : Plus que toutes. Devine qui voudra et qui pourra; quant à moi, je livre le Renoncement d'Amours, quel qu'il soit, à Martin Franc, qui a si longuement vengé les femmes des attaques du Roman de la Rose, dans son Champion des Dames, poème aussi édifiant qu'ennuyeux, dont l'abbé Goujet nous a laissé une docte et complète analyse. Du reste, ce savant philologue ni aucun autre, que je sache, n'ont parlé du Renoncement d'Amours; c'est une bonne fortune pour nous, si ce n'en est pas une pour l'ouvrage.

Analectabiblion. 1.

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