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timides ou téméraires qui, prodiguant les lueurs vacillantes du doute où ils devraient faire briller la lumière du jour, tirent un vain honneur de tout brouiller et de tout confondre, au lieu de simplifier et d'éclaircir. Pensent-ils être sages, lorsqu'ils échappent à cette évidence intime, source première de toute certitude, et s'en vont chercher, aux extrémités de la terre ou dans les tristes asiles des aliénés, des argumens contre les lois de la conscience? Que nous font leurs recherches incertaines, suivies de conclusions forcées! Que nous font les Cafres, les Caraïbes, les Patagons, les infirmes d'intelligence? «Si quis piorum ma» nibus locus, si ut, sapientibus placet, non cum corpore exs» tinguntur magnæ animæ ; » « Si, pour parler avec Tacite, >>> quelque asile est réservé aux manes pieux, si, comme il plaît >> aux sages de le croire, les grandes ames ne s'éteignent pas » avec le corps, » ce ne sera point de la conscience des sauvages ni de celle des fous, que vous aurez à répondre, mais de la vôtre. Au surplus, les faits accidentels ne vous autorisent pas, et les faits réguliers vous démentent. Généralement se révèle, dans l'homme, le sentiment moral; il perce à travers les plus grossières enveloppes, et souvent palpite encore dans les esprits les plus désorganisés. Nous avons connu, dans notre enfance, un paysan frappé d'imbécillité notoire, un de ces hommes que peuple raille et respecte tout ensemble, par une notion confuse de la vérité. Cet homme, dont l'intellect borné suffisait à peine à ses besoins physiques, manifestait une perception fort claire de la divinité comme du devoir. Il mourut, et peu s'en fallut que la contrée n'invoquât son nom comme celui d'un être chéri du ciel. Or, si la conscience parle à de tels êtres, que ne dit-elle pas, sur les obligations sacrées, à ceux que la nature et la société ont favorisés? Il nous semblerait, en vérité, plus aisé d'indiquer les bornes des sphères célestes, que la mesure des clartés que la conscience répand dans le cœur humain. Témoin rigide, vigilant conseiller, elle éclaire ceux mêmes qui nient sa présence, et toujours assez savant sur la morale est celui qui la consulte avec sincérité. Quant à réglementer ce qui ne peut être prévu ni connu, ni apprécié hors de soi, ce ne sera jamais une entreprise sensée. Posez des millions d'hypothèses, multipliez à l'infini vos cas réservés ou non, jamais vous n'atteindrez l'ame qui se dérobe; et celle qui s'offre au Dieu qui lui dit d'aimer et de pardonner, seule, sans votre formidable appareil, dépassera, de bien loin, vos prévisions et vos rigueurs.

Que d'avantages n'a pas, sur cette théologie obscure des cas de conscience, celle qui marque avec une simplicité précise le

but où nous devons tendre et les écueils qu'il nous faut éviter? Tel est l'objet de la théologie catéchétique, laquelle nous ramène au livre de l'archevêque de Sens. Son catéchisme du mariage, qui est suivi de trois autres sur la confession, la communion et la confirmation, excita, dit-on, de vives réclamations dans le temps, au point que des curés, des maîtres d'école, et jusqu'à des religieuses, le rejetèrent. La raison en est difficile à comprendre. S'il eût ressemblé à certain examen de conscience moderne usité dans le diocèse d'Amiens, ce serait tout le contraire; mais notre archevêque était encore plus modeste que casuiste. Ses quatre catéchismes ont toute sorte de mérites évidens: ils sont clairs, ils sont courts, substantiels, et d'une pureté qui ne prête à aucun mauvais sens. Le premier, qui touchait un sujet délicat, nous a particulièrement frappés. Onze brèves instructions seulement le composent et embrassent toute la matière, depuis la définition du mariage en général, et de l'union chrétienne en particulier, les empêchemens de toute nature, tant sacrés que civils, et les formes cérémoniales, jusqu'aux devoirs des époux, soit entre eux, soit à l'égard de leurs enfans et de leurs inférieurs, soit enfin dans les cas malheureux de viduité. Nous n'y avons trouvé à redire qu'une seule réponse à une question indiscrète; la voici : « N'y a-t-il pas d'autres avis à donner » aux nouveaux mariés le jour de leurs noces? >> - << Il y en a, >> sans doute, surtout pour ce qui regarde l'usage du mariage; >> mais il est plus à propos que chacun les prenne auparavant » de son confesseur. >>>>

Il nous a paru que ce dont il s'agit ne regardait pas d'avance les confesseurs, et que l'abus seulement pouvait les concerner. Certains avis seront toujours mieux, placés dans la bouche des parens que dans celle d'un prêtre. Nous ne reprendrons point, d'ailleurs, la simplicité un peu rustique de quelques passages, tels que celui où il est conseillé aux femmes de ne point précher leurs maris quand ils ont du vin. Les catéchismes sont faits pour tous les rangs sociaux, et l'avis est excellent. On peut le traduire ainsi dans le style du beau monde : Ne préchez vos maris que lorsqu'ils pourront vous comprendre.

LE LIVRE DE TAILLEVENT,

GRAND CUISINIER DE FRANCE,

Contenant l'art et science d'appareiller viandes ; à sçavoir : Bouilly, Rousty, Poisson de mer et d'eau douce; Sauces, Epices, etc. A Lyon, chez Pierre Rigaud, en rue Mercière, au coing de rue Ferrandière, M.DC.IIII.

SUIVI DU

LIVRE DE HONNESTE VOLUPTÉ,

Contenant la manière d'habiller toute sorte de viandes, etc., etc., avec un Mémoire pour faire escriteau pour un banquet : extrait de plusieurs forts experts, et le tout reveu nouuellement, contenant cinq chapitres (petit texte). A Lyon, pour Pierre Rigaud, 1602. Deux parties en 1 vol. in-16.

FESTIN JOYEUX,

OU

LA CUISINE EN MUSIQUE,

En vers libres. 2 parties en 1 vol. in-12, avec la musique. A Paris, chez Lesclapart, rue Saint-André-des-Arcs, vis à vis la rue Pavée. A l'Espérance couronnée. 1738.

(1460-1602-1604-1738.)

Le viandier, pour appareiller toutes manières de viandes que Taillevent gueux du roy nostre sire, fist, et dont la première edition, imprimée in-4, gothique, paraît à M. Brunet l'avoir été à Vienne, en Dauphiné, par Pierre Schenck, vers 1490, ne peut être d'une composition antérieure à l'an 1455, puisque, dans la réimpression fidèle que nous en avons de Lyon, 1604, se trouve le menu du chapelet (service) faict au Boys-sur-Mer, le xvio jour de juin mil quatre cent cinquante-cinq, pour monseigneur du

Maine. Dans ce chapelet figurait une forêt de plumes blanches couvertes de violettes, d'où partait une montagne étagée de pâtés et de tours pleines de lapins, avec couronnement de bouquets, et les armes dudit seigneur, ainsi que celles de mademoiselle de Chasteaubriant. Dans chaque pâté gissaient, au sein d'une farce de graisse, de girofle et de veau haché, un chevreau, un oison, trois chapons, six poulailles, six pigeons, et un lapereau. Les hérons, les hérissons, les cochons de lait, l'esturgeon cuit au persil et au vinaigre, avec du gingembre par dessus, les sangliers simulés en crème frite, les darioles, les prunes confites en eau rose, les épices, les figues, le vin, le claire et l'hypocras, tout y abondait. Je vois à la suite un banquet plus modeste; c'est celui de monseigneur de Foix. Des poussins au sucre, de la crème d'amandes froide, des cailles au sucre, des dauphins de crème, des oranges frites; par-ci par là quelques épaules de chevreaux farcies, et quelques pâtés de levreaux c'est tout. Le banquet de monseigneur de la Marche se relève: c'est d'abord du brouet de cannelle, de la venaison à clou ; puis des paons, des cygnes et des perdrix au sucre ; puis des chapons farcis de crème, des aigles, des poires à l'hypocras et de la gelée de cresson. Quant au banquet de monseigneur d'Estampes, ce n'est guère la peine d'en parler, si l'on en excepte les poules aux herbes, les paons au scelereau (sans doute céleri), et les levreaux au vinaigre rosat. Il y a, d'ailleurs, de quoi se perdre dans la multitude de recettes que donne le vieux Taillevent: je n'en citerai qu'une pour se procurer des œufs à la broche: Faites deux trous opposés à chaque coque de vos œufs; videz ces coques; battez bien ce qui en sort avec de la sauge, de la marjolaine, du pouliot, de la menthe hachés bien menu; faites frire le mélange au beurre ; saupoudrez-le, puis après, de gingembre, de safran et de sucre; remplissez alors vos coques de cette farce: embrochez une douzaine de ces coques ainsi remplies; faites rôtir à petit feu; ce fait, vous aurez des œufs rôtis qui ressembleront toujours plus à des œufs que les grives grasses de Pétrone cuites dans des œufs de plâtre.

Le Livre des Honnestes voluptés est encore plus splendide que celui de Taillevent: aussi paraît-il plus moderne. J'y trouve un menu ou écriteau de 180 mets divers, et la table générale en présente 378. On voit que, dès le temps de notre Charles VII le Victorieux, nous pouvions rivaliser avec Cœlius Apicius touchant les obsones et condimens.

Maintenant, franchissons près de trois siècles, et suivons M. le Bas à son festin joyeux. M. le Bas, anonyme ou pseudo

nyme, n'importe, dédie sa cuisine en vers et en musique, aux dames de la cour. Son ouvrage, divisé en deux parties, est bien conçu : la première renferme le plan d'un repas de quatorze couverts servi de trois services à treize, sans le dessert; et la seconde offre, dans un ambigu, une suite de plusieurs centaines de mets choisis, ou la variété le dispute à la richesse; mais, ce qu'il y a de merveilleux, c'est qu'ici, descriptions, préceptes, conseils, narrations, tout est en vers chantans. Ainsi, pour des perdreaux à l'espagnole, M. le Bas chantera, sur l'air : petits oi

seaux, rassurez-vous:

Du vin, de l'huile et du citron,
Coriandre, la rocambole,

Dans ce ragoût à l'espagnole,

Le tout ensemble sera bon, etc., etc., etc.

Pour le coulis d'écrevisse, chantez sur l'air : petits moutons, qui dans la plaine:

Les écrevisses étant pilées,
Mitonnez-les dans du bouillon;
Joignez-y du pain qui soit bon;

Que toutes soient passées, etc., etc., etc.

Le Festin joyeux est imprimé avec permission de monseigneur le chancelier de France. Les connaisseurs accorderont le privilége à la gastronomie de M. Berchoux et à la Physiologie du Goût de M. Brillat-Savarin.

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