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d'armes, et le roi alla coucher à Magdelan le 7. Mercredi 8, à Florensole, où l'on fut rejoint par M. de Bresse et sa bande, qui venaient de Sienne. Le 9, à Salmedon. Il fallut faire un long détour et passer sous les murs de Plaisance, à tous risques, parce que les ponts étaient rompus. Le 10, aux faubourgs du Châtel -Saint-Juan. De là le roy envoya un héraut à Tortone, place forte dans laquelle s'était renfermé le seigneur Fercasse, neveu du duc de Milan. Ce seigneur se conduisit avec générosité, jusqu'à fournir des vivres à l'armée. Dimanche 12, à Capriate; le 13, on campa à six mille de Nice, près d'Asti, sur les terres du marquis de Montferrat. Le 14, à Nice; le 15 à Asti, où l'on séjourna jusqu'au 27 pour reposer l'armée, qui se refit entièrement dans ce pays plantureux. On apprit dans ce lieu comment les Napolitains avaient rappelé le roi Ferrant (Ferdinand), et toutes les peines qu'essuyait le duc d'Orléans dans Novare. Le roi se rendit alors à Turin et y arriva heureusement le 30 juillet; il avait logé la veille à Quiers, chez un bon gentilhomme piémontais, nommé Jehan du Solier, dont la fille lui adressa une longue et moult belle harangue, sans fléchir, tousser, cracher, ne varier en aucutnes manières. Cette aimable pucelle y parlait de ses regrets de n'être pas la Pucelle d'Orléans, formait le vœu qué le vaillant roi renversåt bientôt le More, et finissait par supplier Charles VIII de prendre toute sa famille à son service. Sorti des terres lombardes et vénitiennes, le roi se trouvait en pays ami, mais il avait près de lui l'armée des confédérés qu'il fallait vaincre pour délivrer le duc d'Orléans captif dans Novare. Il campa donc près des ennemis, entre Quiers et Versay (Verceil), sur le Pô, recruta son armée d'Allemands, disposa tout pour une nouvelle bataille, et cependant ouvrit des négociations qui occupèrent les mois d'août et de septembre entiers, plus vingt jours d'octobre. Ce fut dans le camp de Verceil que le roi, après bien des pourparlers, fut rejoint par le duc d'Orléans, que le bâtard de Bourbon, fait prisonnier à Fornoue, lui fut rendu, et qu'il perdit de la dysenterie, à son grand regret, son bon parent et ami, François comte de Vendôme, l'escarboucle des princes, en beauté, bonté, sagesse, doulceur et bénignite, auquel il voulut faire des obsèques comme s'il eût été son frère.

Enfin la paix fut signée, grâce aux bons soins de Comines, qui fut ensuite envoyé à Venise pour la faire ratifier des Vénitiens. Le seigneur d'Argenton eut le beau rôle dans tout le cours de cette triste affaire; il avait blâmé l'entreprise ; il avait signalé la ligue, partagé les dangers et la gloire de Fornoue; il contri

bua plus que personne à la paix; c'était avoir du bonheur et le mériter.

Le roi leva son camp le 21 octobre et repartit pour Lyon en très bel ordre, passant par Suze, Briançon, la Mure, Grenoble, où la fatigue le retint quelques jours, Morain et Chantonay. Le 7 novembre, un samedi, Charles VIII rentra dans Lyon, dont la population le reçut avec des acclamations incroyables; il logea à l'archevêché. La reine, madame de Bourbon, et toute la cour, l'y attendaient. Il y eut alors de joyeux momens, et André de la Vigne en profita pour offrir l'ouvrage dont nous venons de faire l'analyse (1).

Ce récit, dit le Vergier d'Honneur, est suivi d'une énorme quantité de ballades, rondeaux, complaintes, épitaphes et autres poésies, tant du sieur de la Vigne que de messire Octavien de Saint-Gelais, évêque d'Angoulême. Ces pièces, la plupart médiocres, même pour le temps, méritent peu d'être lues: les amateurs en trouveront de nombreuses citations dans la bibliothèque française de l'abbé Goujet; nous n'en citerons qu'un rondeau qui ne doit pas être de l'évêque d'Angoulême :

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(1) Jean Marot a fait, à l'imitation du Vergier d'Honneur, le récit en vers des deux voyages de Louis XII à Gênes et à Venise. Ses vers sont meilleurs que ceux d'André de la Vígue; mais, en somme, son ouvrage est bien moins intéressant, pauvre qu'il est de circonstances et de traits de moeurs on en peut lire l'analyse dans les mémoires de littérature de Thémiseul Saint-Hyacinthe.

SYDRACH LE GRANT PHILOSOPHE,

FONTAINE DE TOUTES SCIENCES;

Contenant mil quatre-vingt et quattre demandes et les solutions d'icelles comme il appert en la table séquente. Nouvellement imprimé à Paris par Alain Lotrian et Denys Janot, imprimeurs et libraires, demourant en la rue Neufve-Nostre-Dame, à l'enseigne de l'Escu de France. I vol. in-4 gothique, non chiffré, avec frontispice et figures en bois, contenant 162 feuillets. Edition rare, sans date. (1519 environ.)

Ce livre a eté réimprimé en lettres rondes par Galliot du Pré, à Paris, en 1531, I vol. pet. in-8 de 271 feuillets chiffrés. Il n'est pas commun non plus de rencontrer cette 2o édition, d'ailleurs très nette et très jolie, qui s'associe parfaitement au Roman de la Rose et au Champion des Dames, du même imprimeur. Nous possédons un bel exemplaire de chacune des deux éditions; celui de 1531 vient de la bibliothèque de Marie-Joseph Chénier.

(1496-1519-1531.)

L'histoire fabuleuse de ce livre singulier se lit dans le prologue du traducteur français, qui dédie son œuvre, translatée du latin, au roi Charles VIII. A l'en croire, le sage Sydrach composa son Recueil philosophique pour amener la conversion d'un roi d'Inde mécréaut, nommé Boétus, lequel vivait justement 847 ans après Noé. L'écrit passa de main en main dans celles de plusieurs docteurs et clercs de l'église de Tolède, qui le traduisirent du grec en latin vers l'an 1243 de notre ère. Voilà, certes, une belle généalogie. Nous pensons que le lecteur fera mieux de rapporter la source de la Fontaine de toutes sciences aux rêveries de quelque médecin arabe de Cordoue converti au christianisme. Le fond et la forme de l'ouvrage répondent au récit du translateur. C'est le roi Boétus qui questionne le saige Sydrach, lequel ne demeure court sur rien, pas même sur la nature et l'excellence des anges. Nous ne rapporterons pas les 1084 réponses du sage; autrement, le public deviendrait aussi savant que nous, et cela ne serait pas juste; nous étant donné la peine de lire toutes ces réponses, pendant qu'il n'a pas pris la peine d'en lire une seule ;

mais nous lui en donnerons plusieurs, seulement pour l'amorcer, en observant que, partout, les hommes ont débuté par résoudre les difficultés avant de les apercevoir. La raison humaine affirme d'abord; ensuite elle doute; puis elle nie, et c'est là son triste terme, après lequel vous la voyez recommencer à parcourir le même cercle.

Q.- La femme peut-elle porter plus de deux enfans en une portée au ventre?— R. La femme peut porter à une ventrée sept enfans; car la marris (matrice) de la femme a sept chambres. (Que diront nos anatomistes de cet appartement complet?)

Q. Qui vit plus que chose que soit? —R. L'aigle et le serpent... Le serpent vit plus de mille ans, et chascun cent ans lui naist une goutte en la teste du grand d'une lentille; et, quant il a accompli les mille ans, il devient ung fier dragon. (Qu'on prouve le contraire! donc cela est vrai.)

Q.-Ceux qui ont mal de goutte, comment peuvent-ils guérir? -R. Qu'ils se facent saigner du bras dextre et usent de médecines qui font vuider.

Q.- Où habite l'ame?-R. L'ame habite là où il y a sang, et non en la peau, les ongles et les dents. (Il est assez naturel de penser que ce qui écorche et qui mord n'a point d'ame.)

Q.

Qui donne plus grande science à l'homme, la froide vianlde ou la chaulde?— R. La chaulde... qui amollit les nerfs, les veines et eschauffe le cueur. (Comment le roi Boétus ne se serait-il pas converti à entendre de telles réponses?)

Q.-Doibt l'homme chastier sa femme quand elle forfaict?— R. Quant la bonne femme faict quelque forfaict, sou forfaict est réputé moult petit forfaict; mais quant la maulvaise femme forfaict, elle se doibt chastier par humbles parolles, deux, trois, quatre et cinq fois, jusqu'à la neufvième..., et se à tant ne s'amende, l'on la doibt laisser et du tout déguerpir. (Il est impossible d'insinuer plus doucement que la méchante femme est incorrigible.)

Q.-Pourquoi ne fist Dieu l'homme qu'il ne peust pescher?— R. Si Dieu eust faict l'homme qu'il n'eust pu pescher, l'homme n'eust desservy à mal bien avoir, et ainsi le bien fust retourné à Dieu dont il estoit venu.

Q. Pourquoi les hommes regardent entre les jambes des femmes?- R. Les fols y regardent, mais les saiges non...; car aussitôt..., par convoitise, les yeulx tresbuchent en pesché.

Q.-Lequel est le plus beau membre du corps?-R. Si est le nez lequel est au corps comme le soleil au ciel. (Avis aux poètes ! voilà de quoi renouveler leurs images.)

Q. Qui fut avant faist, le corps ou l'ame? R. Dieu fist toutes choses dès le commencement du monde........; quant l'homme engendre en la femme, les sept planettes forment la semence par la voulunté de Dieu...; saturnus la fait prendre...; jupiter lui forme la teste et la chière...; mars lui forme le corps...; vénus lui forme les membres...; mercurius lui forme la langue; et.... luna lui forme les ongles et le poil, etc., etc., etc.

Le saige Sydrach résout encore beaucoup d'étranges questions; mais c'est assez : il ne faut jamais épuiser les fontaines.

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