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LA GUERRE ET LE DÉBAT

ENTRE LA LANGUE, LES MEMBRES ET LE VENTRE.

C'est assavoir la langue, les yeux, les oreilles, le nez, les mains, les pieds, qui ne veullent plus rien bailler ne administrer au ventre, et cessent chascun de besongner. iii.c. On les vend à Paris, en la rue Nostre-Dame, à l'enseigne Sainct-Nicolas. I vol. pet. in-4 gothique, figures en bois, de 18 feuillets, rarissime. Sans date. (1490 à 1499.).

M. Brunet parle de cette édition sous le no 8765, et en cite une autre également, sans date, in-4 de 18 feuillets. Paris, Jehan Trepperel. Du Verdier qui attribue l'ouvrage à Jehan d'Abundance, dit le bazochien, et quelquefois maistre Tiburce, mort vers 1540, mentionne une troisième édition de ce livre, encore sans date, in-4, sous la rubrique de Lyon, Jacques Moderne. Ces trois éditions peuvent être rapportées à la même époque à peu près, c'est à dire de 1490 à 1499. Notre exemplaire n'est pas ébarbé.

(1499.)

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Le Débat entre la Langue, les Membres et le Ventre n'est autre chose que la fable des Membres et de l'Estomac, fiction ingénieuse qui a subi bien des vicissitudes, comme on voit, depuis Menenius Agrippa jusqu'à notre La Fontaine. Le bazochien Jehan d'Abundance, ou, selon quelques uns, Jehan Molinet, délayé cet apologue dans un flux de vers de dix pieds, dont on va juger par les passages suivans. Dans ce poème, l'initiative de l'insurrection est donnée à la langue : c'est elle qui incite les autres membres et organes à refuser le service. Elle s'évertue à médire du seigneur ventre, qui la tient sous le joug. « Fussions>> nous d'Allemagne ou d'Anjou, dit-elle, de l'endurer ce nous >> est grand reproche, etc., etc., etc. Qu'a-t-il de plus que nous >> pour commander?...

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» Soyez homme de guerre, gentilhomme, ou vilain, ou̟

>> bourgeois, il vous faut travailler à rembourer ce trou, et se

>> aucuns se rendent dedans un monastère :

Ils n'y vont pas pour mener vie austère,

C'est pour remplir ce sac plein de lavailles, etc., etc etc.

» Que de peine ne prenais-je pas pour combler ce lac punais, » pour amasser le plaisir de ce sac!

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Je crie, je jure, la fausseté j'adjuge,

Je happe tout et biffle bœuf et vachè,

....

Je me parjure et je faulse ma foy,
Par fas je fais et par néfas déffais,

Pour acquérir quelque chose à ce trou,

...

Je ne veuil plus faire faicts que j'ay faictz,

Mes compaignons, mes amis en substance,
Laissons tout là! etc., etc., etc.

Ici la langue se tait, et l'acteur (l'auteur) dit quelques mots pour amener le discours des yeux. Il est bon de savoir que l'acteur a entendu toutes ces belles disputes en songe; toujours des songes! Discours des yeulx:

O dame langue! certes vous dites bien,
Ce gouffu sale cy ne nous sert de rien.

........

Il n'y a chair, viande ne poisson,

Lard, fruit, beurre, œufs, saulvaiges, venaison,
Que je ne chasse pour ce maistre pansart.

Pour ce laissons-le, c'est mon opinion, etc.

Discours des oreilles :

Las! mes frères, moi qui suis les oreilles,
J'ay faict pour lui des choses nompareilles,
Je ne puis plus endurer ceste peine.

Se j'oy parler de quelque bon disner,

Incontinent il y faut cheminer.

Pour ce laissons-le, se vous voulez m'en croire, etc.

Discours du nez :

Je n'ay de lui gaiges, prouffits ne rentes,

Fors seulement cette infecte fumée

Que par trahison ay mainte fois humée,

Je luy cherche dons odoriférans

Et il me rend pour tout potaige un vent.

Dieu le mauldie lui et ses adhérens, etc., etc., etc.

Discours des mains:

Eusse cent francs de rente et en domayne
Si faut-il bien que ce grant gouffre ameine,
Tout mon vaillant, tant qu'il soit rembouré,

Rien n'amassons qui n'entre en sa bouticque.

J croy qu'il soit pire qu'un hérétique, etc., etc., etc.

Le discours des pieds est une répétition des mêmes griefs diversement appliqués. A peine est-il fini, que la langue recommence ses imprécations contre le seigneur ventre, et la conjuration est résolue. On vient à l'effet: chacun se tient coy. Le premier jour se passa doulcement, le second jour, la gueule, nullement ne se veult taire;—et au tiers jour furent les membres en tel point pour la famine que, etc., etc. Alors la langue, toujours la première à parler, s'aperçoit qu'elle est dupe, ainsi que ses compaignons :

Tant plus vivons, tant plus décrépitons;

Il nous vault mieux pour savoir la naissance
De nostre mal parler à cette pance

Que de mourir si misérablement.

.............

Or viens çà, ventre, escoute mes complains,

Ne souffre pas que toy, ne ton lignaige

Ton propre sang endure ce brouillage, etc., etc., etc.

Le ventre se rend aux supplications de l'ingrate, non sans la gourmander vertement. La leçon profite aux autres conjurés qui reprennent chacun leur office, et la santé revient au corps expirant. L'acteur termine la pièce par ces mots :

O vous lysans! corrigez ce volume;
Des mots y a mal couchez ung minot
Et pardonnez à moy pour Jehannot.

On doit pardonner au poure Jehannot; mais comment se pardonner à soi-même d'avoir payé son Débat cent francs?

VOLUMEN

ERUDITISSIMI VIRI ANTONII CODRI URCÆI,

Emendate accurateq; impressum Bononiæ per Joannem Antonium Platonidem Benedictorum Bibliopolam, nec non civem bononiensem. Sub anno Domini M.CCCCC., die vero VII Martii, Joanne Bentivolo II, patre patriæ, feliciter administrante.

Edition primaria, due aux soins de Philippe Béroald, qui la dédia à Galéas Bentivoglio, protonotaire apostolique, en reconnaissance de ce que ce prélat lui a fourni les Mss. 1 vol. in-fol. en 2 parties, dont la première contient 106 feuillets, et la deuxième 65; sans autre titre que l'index suivant, la rubrique précédente de l'imprimeur se trouvant à la fin de la 2° partie; immédiatement avant, 10 la Lettre de Bartolomée Bianchini à Mino Roscio, sénateur; 2o la Vie de Codrus, par le même; 3o les Sept poésies laudatives de Virgile Portus; 40 la Lettre laudative du savant Jean Pin, de Toulouse au savant Jean Mourolet, de Tours; 5° une Epigramme du même et son Epitaphe de Codrus; toutes pièces latines qui terminent le volume. Voici l'index qui sert de titre à notre première édition, laquelle est fort rare et renferme exactement les mêmes choses que la seconde, de Venise 1506; la troisième, de Paris, Jean Petit, 1515, in-4; et la quatrième, de Bâle, 1540, in-4; sauf que cette dernière offre, en plus, une table générale des matières, ainsi que le dit M. Brunet.

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Hyacinthe, cordonnier, dit Bélair, dit Saint-Hyacinthe, dit le chevalier de Thémiseul, auteur du Chef-d'œuvre d'un Inconnu, l'un des hommes qui ont eu le plus d'esprit, a fait, sur l'édition de 1515 (car il n'avait jamais vu la première), une analyse exacte et détaillée des ouvrages de Codrus Urcæus, principalement des xv discours en prose qui en sont la partie la plus curieuse et la plus étendue. Cet excellent morceau, le meilleur, peut-être, de

ses mémoires littéraires, aujourd'hui trop peu lus, servira de base au présent extrait, dont il nous eût dispensés, si nous n'avions, d'ailleurs, jugé convenable d'y joindre quelques additions, et de parler de plusieurs notes autographes de Bernard de la Monnoye, dont notre exemplaire de l'édition de 1502 est enrichi.

Le premier discours de Codrus est donc, ainsi que l'expose fort nettement Thémiseul, une revue satirique des divers états et des diverses conditions de la vie, dans laquelle le professeur se plaît à montrer la vanité de l'esprit humain, pour conclure que tout ce qu'ont dit et fait les hommes, dans tous les temps, n'est que fables, fabulæ. Il s'y moque des dialecticiens qui enseignent qu'une syllabe mange un fromage, parce qu'un rat mange un fromage, et qu'un rat est une syllabe. Il se moque des médecins, des femmes mariées, des politiques, des prédicateurs, des théologiens même comme des autres, d'une façon très claire et très hardie, et finit par dire que tout est fable dans la philosophie, hormis le principe d'aimer Dieu par dessus toute chose, et son prochain comme soi-même. Au sujet des vaines disputes des philosophes, sur la nature de l'ame, nous remarquerons ces sages paroles : « Quid autem sit anima nondum inter philosophos con» venit,nec unquam fortasse conveniet. O divina sapientia! 6 Deus » immortalis! hoc non est hominis, sed tuum officium. Hæ par» tes tuæ sunt quid anima patefacere mortalibus! Les philo>>sophes ne s'accordent pas et ne s'accorderont peut-être jamais >> sur la nature de l'ame. O divine sagesse! Dieu immortel! ceci » n'est point du ressort de l'homme, mais du tien! c'est à toi » de révéler aux mortels ce que c'est que l'ame humaine.»>

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La deuxième oraison est un discours d'ouverture pour un cours sur Homère et Lucain, où l'orateur se perd en éloges de la rhétorique, dont il ne laisse pas pourtant de se moquer aussi (ear il est très moqueur), par la mention qu'il fait du fameux procès entre un écolier d'Athènes et son maître, au sujet du salaire promis, que le premier refusait en s'obstinant à ne point plaider, et que le second réclamait; l'un et l'autre s'appuyant sur cette clause du contrat : Je vous paierai tant, lorsque j'aurai gagne ma première cause; procès qui fournit à M. de La Harpe, dans son Cours de Littérature, une occasion de plus de prouver excellemment la lumière, en réfutant un sophisme ridicule.

Le troisième discours est une véritable apothéose d'Homère, terminée par cette hyperbole : «Si vous consultez bien votre » Homère, vous possédereez tous les arts, toutes les sciences; » et vous étancherez votre soif dans une source inépuisable;

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