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MARGUERITES

DE LA

MARGUERITE DES PRINCESSES,

TRÈS ILLUSTRE ROYNE DE NAVARRE.

A Lyon, par Jean de Tournes, M.D. XLVII. 2 vol. in-8.

(1546-47.)

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Ces perles sont le recueil complet des OEuvres poétiques de la belle, sensible et spirituelle Marguerite de Valois, sœur chérie de François Ier; plus connue dans le monde littéraire et galant, par les contes imités de Boccace, dits l'Heptameron. Cette aimable princesse, née en 1492, veuve du connétable duc d'Alençon, en 1525, peu après la catastrophe de Pavie, alla consoler son auguste frère dans sa prison de Madrid, fut ensuite remariée par lui, eu 1527, à Henri d'Albret, roi de Navarre, et mourut à 57 ans, dans le Bigorre, le 2 décembre 1549, vingt mois et deux jours après ce frère qu'elle avait tant aimé, avec lequel elle avait tant de rapports de caractère, de goûts et de sentimens. Quelque mérite qu'on puisse trouver à ses écrits, il faut conve-nir que son plus bel ouvrage fut cette Jeanne d'Albret, mère de notre Henri IV, à qui la France doit son meilleur roi, et l'humanité, le modèle, peut-être, de tous les rois. Nous rapporterons ici les différentes pièces de son trésor poétique, dans l'ordre selon lequel son écuyer, valet de chambre, Simon Sylvius, dit de la Haye, les a rangées, après avoir obtenu, pour leur publication, un privilége du parlement de Bordeaux, signé du président de Pontac, le 29 mars 1546.

1o. LE MIROIR DE L'AME PÉCHERESSE, poème que la Sorbonne censura d'abord comme contenant des propositions qui se rapprochaient des sentimens des réformateurs. Il faut bien avoir des yeux de docteur pour découvrir des propositions màl sonnantes dans

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ce petit ouvrage où l'on retrouve sainte Thérèse plutôt que Calvin; qui respire la pénitence et le plus tendre amour de Dieu; dans lequel, enfin, la présence réelle n'est pas seulement professée par ces vers :

<< Me consolant par la réception

» De vostre corps très digne et sacré sang ; »

mais encore où le sont, en mille endroits, les dogmes enseignés par l'Eglise, et qui n'est, à proprement parler, qu'une paraphrase de diver's passages de l'Ecriture sainte; témoin ce qui suit :

Pareillement espouse me clamez

En ce lieu-là, montrant que vous m'aimez
Et m'appelez par vraie amour jalouse
Vostre colombe aussi et votre espouse.
Parquoy direz par amoureuse foy
Qu'à vous je suis et vous estes à moy.
Vous me nommez amye, espouse et belle;
Si je le suis, vous m'avez faite telle;
Las! vous plaist-il tels noms me départir?
Dignes ils sont de faire un cœur partir,

Mourir, brusler, par amour importable, etc., etc.

Ce ton d'ascétisme passionné continue jusqu'à la fin; certes il y a loin de là aux emportemens de l'invective luthérienne, aux sarcasmes de l'ironie calviniste; mais quoi! plutôt que de ne pas trouver de matière à disputes, les docteurs en verraient sur le dos d'un antiphonier. Il est bien vrai que Marguerite de Valois avait, dans l'origine, reçu avec faveur les premières semences de la réforme; ainsi l'avait fait presque toute la cour, ainsi la plupart des beaux-esprits du temps. Cette réforme avait alors de si belles paroles à la bouche, tant de justes plaintes à former, tant de science et d'esprit, un style et des discours si clairs, et partant si supérieurs aux arguties de la scolastique expirante, que beaucoup de gens de bonne foi, que les chrétiens le plus orthodoxes pouvaient s'y laisser prendre et qu'un grand nombre y fut pris. La reine de Navarre goûta donc mieux d'abord Clément Marot que Schnarholtzius, Théodore de Bèze que l'abbé de Saint-Victor Lyset, Erasme que Pfeffercorn, André de Hutten que Gratius Ortuinus, etc. Le beau crime! François Ier lui-même en fut dans ce temps-là complice; mais, plus tard, quand le monde s'ébranla au nom de ces pacifiques évangélistes; quand on vit de toutes parts l'Eglise insultée, ses ministres menacés dans leurs biens et dans leurs personnes, le glaive tiré jusque sur la tête des princes et du pontife, et de téméraires novateurs soutenant, au nom de la raison, d'autres dogmes sacrés, avec des bûchers et des brigandages, les ames droites et honnêtes, les esprits sages et prévoyans, pour la plupart, s'arrêtèrent. Marguerite

de Valois, des premières, fut de ce nombre, et dans tout état de cause, à quelque date de sa vie qu'il faille rapporter son Miroir de l'ame pécheresse, on ne saurait rien voir dans ce poème que de religieux et d'édifiant.

2o. DISCORD ESTANT EN L'HOMME PAR LA CONTRARIÉTÉ DE L'ESPRIT ET DE LA CHAIR, ET PAIX PAR VIE SPIRITUELLE. Plus dévotieux que poétique.

3o. ORAISON DE L'ame fidèle a son sEIGNEUR DIEU. Elle est beaucoup trop longue. En général la diffusion est le défaut de la Marguerite des Marguerites. Cependant le début de son' oraison a de la majesté :

Seigneur duquel le siége sont les cieux,
Le marchepied, la terre et ces bas lieux,
Qui, en tes bras, enclos le firmament,
Qui est toujours nouveau, antique et vieux,
Rien n'est caché au regard de tes yeux;
Au fond du roc tu vois le diamant,
Au fond d'enfer ton juste jugement,

Au fond du ciel ta majesté reluire,

Au fond du cœur le couvert pensement, etc., etc., etc.

Le dernier vers est plein de passion :

<< Las! viens Jésus! car je languis d'amours! »>

4°. ORAISON DE NOSTRE Seigneur JÉSUS-CHRIST. On voit que, dans l'ordonnance de son édition, La Haye a fait passer toutes les œuvres spirituelles avant toute pièce profane. Cette marche est probablement contraire en général à l'ordre chronologique.

5o. COMÉDIE DE La nativité de Jésus-CHRIST. Joseph et Marie, pour obéir à l'ordre d'Hérode, se rendent à Jérusalem. Arrivés à Bethleem, Marie se sent prise du mal d'enfant. Elle reçoit l'hospitalité dans une étable. Joseph va chercher à la ville ce qui est nécessaire. Pendant ce temps-là, Marie, assistée de Dieu et des anges, accouche d'un fils au milieu d'un concert céleste de louanges et de bénédictions. Joseph revient, trouve Marie mère d'un enfant adorable; il l'adore. Viennent trois bergers et trois bergères qui en font autant. Satan, attiré par ces adorations et ces cantiques, vient voir de quoi il s'agit et entre en grande fureur. Il fait de la métaphysique pour détourner les bergers de leur adoration; mais Dieu paraît, toujours avec un choeur d'anges, qui fait taire Satan, et la comédie finit.

6o. Comédie de l'adoration des trois rois a JÉSUS-CHRIST. Dieu le père ouvre la scène : il commande à Philosophie, Tribulation, Inspiration et Intelligence divine d'aller chercher les trois rois

Balthasar, Melchior et Gaspard pour qu'ils viennent adorer l'enfant Jésus nouveau-né. Il ordonne aussi à ses anges d'envoyer aux trois princes une étoile pour les guider. Aussitôt dit, aussitôt fait. Les trois rois paraissent, cherchent l'enfant, sont quelque peu détournés par Hérode qui cherche aussi l'enfant avec ses docteurs pour le faire mourir ; mais Dieu pare à tout inconvénient. Les trois rois trouvent celui qu'ils cherchaient et l'adorent pendant que les anges font chorus. Tout cela est d'une naïveté de diction presque ridicule. Il y a des choses qu'il faut laisser où elles sont, de peur de les gâter en les touchant.

7°. COMÉDIE DES INNOCENS. On voit du moins une pensée dramatique dans cette pièce et même une pensée de génie. Hérode a commandé le meurtre de tous les enfans nouveau-nés, de peur de laisser vivre celui que les prophètes ont annoncé comme devant régner à Jérusalem. Dieu sait bien garantir son fils en le faisant emporter en Egypte par Joseph son père putatif et Marie sa mère immaculée. Le théâtre se remplit de mères avec leurs petits enfans. La nourrice du fils d'Hérode, par l'effet d'une méprise, obéit à la loi commune, ne se doutant, non plus que personne, de l'objet de cette réunion de tous les petits enfans de la Judée. Arrivent les soldats conduits par un farouche capitaine. Le signal est donné de tuer toutes ces innocentes créatures. Cris, lamentations, supplications des mères. La nourrice du petit Hérode a beau crier que son nourrisson est le fils du roi; la soldatesque a commencé, elle n'écoute rién, et l'enfant d'Hérode est massacré, quand Hérode tout d'un coup paraît triomphant. La nourrice court à lui et l'informe en pleurant de la fatale méprise. Alors le monstre entre dans un furieux désespoir, et Rachel met le comble à sa rage désespérée en lui apprenant que l'enfant Jésus est sauvé. Cependant les anges se réjouissent et chantent des cantiques au plus haut des cieux. Cette comédie est infiniment supérieure aux autres.

8°. COMÉDIE DU DÉSERT. Dieu subvient, dans le désert, aux besoins de Joseph, de Marie et de l'enfant Jésus, en leur envoyant Contemplation, Mémoire et Consolation, escortées d'anges en nombre suffisant. Tout se passe en saints discours, fort ennuyeux, il faut bien le dire: c'est la plus triste comédie de Marguerite.

9. LE TRIOMPHE DE L'AGNEAU. C'est la victoire remportée par le Messie sur le péché originel. L'ouvrage est d'une longueur et d'une fadeur insupportables.

10. COMPLAINTE d'un Prisonnier. On sent que le Prisonnier n'est

autre que François I. La complainte est touchante, mais n'est pas plus poétique pour cela.

11°. CHANSONS SPIRITUELLES. La première fut composée pendant la dernière maladie du roi, Marguerite étant malade de son côté, Elle respire le plus vrai sentiment et une douce piété; elle s'adresse à Dieu :

Las! celui que vous aimez tant
Est détenu par maladie

Qui rend son peuple mal content,
Et moi envers vous si hardie.

Puisqu'il vous plaist lui faire boire
Votre calice de douleur,
Donnez à nature victoire
Sur son mal et nostre malheur!

Je regarde de tous costés

Pour voir s'il n'arrive personne,
Priant sans cesse n'en doutez

Dieu, que santé à mon roi donne, etc., etc.»

La seconde chanson est faite après la mort du roi :

Las! tant malheureuse je suis
Que mon malheur dire ne puis
Sinon qu'il est sans espérance.
Désespoir est déjà à l'huis

Pour me jeter au fond du puits

Où n'a d'en saillir l'espérance, etc., etc.

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12°. L'HISTOIRE DES SATYRES ET NYMPHES DE DIANE. Ce petit poème a de l'agrément. Les faunes et les satires y courent après les nymphes de Diane que le son des hautbois a imprudemment attirées près d'eux. Au moment de les atteindre, ils sont déçus dans leurs amoureux transports, et voient changer en saules cette troupe fugitive, à la prière d'une nymphe aimée de la chaste déesse. Moralité qui enseigne aux jeunes filles à fuir les plaisirs les plus innocens quand ils leur sont offerts par des hommes.

13o. Épistre au roI SON FRÈRE, renfermant des vœux et des prières pour sa prospérité.

14o. Autre Épistre dE LA MESME AU MESME, en lui envoyant un David pour ses étrennes. David y est proposé au roi comme modèle.

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