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une suite d'aphorismes qui n'éclaircissent rien. On doit lui en vouloir, surtout, pour avoir défini la femme un mal nécessaire; la mère, l'épouse, la fille, un mal nécessaire! Il y a là de quoi faire balayer nos maisons avec les robes de tous les sophistes du monde; et, comme si cela était trop peu, Secundus ajoute: «C'estle >> naufrage de l'homme, la tempête du logis, l'empêchement du >> repos, l'esclavage de la vie, le dommage quotidieu, le combat » volontaire, la guerre somptueuse, la bête fauve en cohabi>>tation, l'écueil paré, l'animal malicieux. » Quelle pitié !

Disons, pour terminer cette analyse, que Démophile a été publié sur un manuscrit du Vatican; Démocrate, sur un autre, de la bibliothèque Barberini; et Secundus, sur un troisième, de la bibliothèque du roi, à Paris,

C. PEDONIS ALBINOVANI,

ELEGIE III.

Et fragmenta, cum interpretatione et notis Jos. Scaligeri, Frid. Lindenbrucchii, Nic. Heinsii, Theod. Goralli (Jean Le Clerc), et aliorum. C. Cornelii Severi Etna accessit et Bembi Etna. (2 tomes en I vol. pet. in-8.) Amstelædami, apud Davidem Mortier.

M.DCC.XV.

(30 ans environ avant J.-C., et années 1484-1517-1617-1703 et 1715 de notre ère.)

Albinovanus (C. Pedo) vivait sous Auguste et sous Tibère. Il ne reste de lui que trois Elégies et le fragment d'un poème sur la navigation périlleuse de Germanicus dans l'Océan septentrional, qui nous a été conservé par Sénèque le Philosophe, grand appréciateur de cet ouvrage, et en général de ce poète. Les anciens estimaient surtout, dans Albinovanus, l'énergie et la concision du style. On en peut voir des témoignages honorables dans Martial et dans Quintilien; mais principalement dans la 10 épitre de Ponto, livre iv, qui est adressée à ce poète par Ovide, son ami, et dans laquelle ce dernier le porte aux nues, en l'appelant Sidereus. Après ces grands suffrages, il est comme superflu de citer ceux de Sidoine Apollinaire, de Grégoire Giraud, dans son Histoire des Poètes, et de tant d'autres modernes; mais il ne l'est pas de mentionner le service que Jean Le Clerc, sous le nom de Théodore Goral, a rendu à C. Pedo Albinovanus, ainsi qu'à C. Cornelius Severus, soit, comme il ⚫le dit dans la Préface de son édition, en dégageant leurs textes épurés sur les éditions de 1484 et de 1517, des Catalecta Virgilii réunis et annotés par Scaliger, où ces deux poètes remarquables gisaient ensevelis parmi beaucoup de pièces obscènes, soit en les éclaircissant par une interprétation en prose latine, et par des notes excellentes, enrichies encore du Commentaire de Lindenbruch pour l'édition hollandaise de 1617.

La première des trois Élégies d'Albinovanus, celle où le poète déplore la mort de Drusus, est de beaucoup la meilleure, et tellement, que Gérard Vossius a douté que les deux autres, sur la mort de Mécènes et sur ses dernières paroles, fussent de la même main, doute que nous partageons, bien que Scaliger et Goral ne le permettent pas. C'est pourquoi nous n'extrairons ici que cette première Elégie, nous bornant à rappeler les dernières aux curieux de l'antique latinité, ainsi que le Fragmentsur Germanicus, lequel n'a que 22 vers.

Le Drusus dont il est question, père du grand Germanicus, surnommé Germanicus lui-même, à cause de ses victoires sur les Germains, qu'il poursuivit jusqu'à l'Elbe, était le second fils de Tibère Neron et de Livie, qui devint la seconde femme d'Auguste, après un divorce consenti par son premier mari. Drusus était donc le frère cadet de Tibère, depuis empereur. Ce fut un héros, un sage et un vrai citoyen romain. Désigné secrètement par Auguste pour lui succéder, il eût probablement, dit-on, rétabli la république, s'il eût régné; mais le sort était prononcé ; ce héros mourut à 30 ans, de maladie, sur les bords du Weser, amèrement pleuré des soldats, presque déifié par les regrets de l'empereur, livrant ainsi l'empire à un monstre voluptueux, dans la personne de son frère Tibère. Disons pourtant, avec son poète, que ce frère, qui recueillit ses derniers soupirs, parut désespéré de sa mort. Tibère valait-il donc mieux dans sa jeunesse, comme l'assure Tacite? ou ṣavait-il déjà feindre? Quoi qu'il en soit, venons à la première Elégie d'Albinovanus. Cette pièce réunit, en effet, éminemment les conditions exigées dans ce genre de poème, un sentiment de douleur véritable, des mouvemens variés, une marche rapide, une versification noble et pathétique. On n'y saurait reprendre qu'un peu de diffusion et d'enflure dans l'éloge; mais ce défaut tient au temps. Quand les Romains faisaient d'Auguste un dieu, il était pardonnable aux poètes de dire que le Tibre, à la vue des funérailles de Drusus, sortit de son lit, tout échevelė, pour éteindre les flammes du bûcher prêtes à consumer son héros, et ne put se contenir qu'à la prière du dieu Mars descendu de l'Olympe tout exprès pour empêcher ce flux de désespoir. En fait d'adulation pour les empereurs, n'y regardons pas de si près, Du reste, l'élégie entière est aussi belle que touchante. En voici une idée imparfaite et succincte :

Long-temps vous fûtes heureuse ô Livie! digne mère de Tibère et de Drusus!... Votre amour embrassait deux fils...; un seul aujourd'hui vous reste à nommer de ce doux nom de fils !... La foudre vous a frappée, comme pour montrer que votre courage est supérieur à ses coups..... Jeune, et déjà vénérable par ses vertus, orné des talens qui brillent dans la paix et dans la guerre, Drusus est tombé!... lui le compagnon de son frère, son émule dans la conduite des armées, il est tombé vainqueur des Suèves, des Sicambres et de toutes ces fières nations germaines, qu'il a contraintes de fuir dans leurs forêts!... Hélas! pendant qu'il triomphait ainsi pour mourir, tendre mère! vous décoriez les temples de Jupiter, de Minerve et de Mars pour son retour,

pour la grande ovation que Rome lui préparait, pour les honneurs consulaires décernés à son nom!... vous disiez : « Bientôt >> il reviendra; le peuple ira lui rendre grâce; je volerai au » devant de lui; je reverrai ses traits aimés; il m'embrassera; >> il me racontera ses exploits; mais moi, je lui parlerai, je le » saluerai la première!... » Malheureuse Livie, qui mériticz si peu ce grand revers! vous, la vertueuse épouse du premier des hommes! De quoi vous ont servi tant de qualités éclatantes, puisque vous n'avez pu fléchir les dieux ?... Oui, la fortune à craint, en vous épargnant, de faire douter de sa fata'e puissance, alors que rien ne vous manquait, ni le comble des biens, ni le comble des mérites... Ainsi, naguère, avait-elle moissonné Marcellus, le cher enfant d'Octavie... Parques homicides! assez, assez de funérailles! fermez ces tombeaux!... Drusus, tu n'es plus!... vainement nous t'avons nommé consul!... les licteurs sont là, tes ordres sacrés manquent... Du moins, vous, Tibère, son frère et son ami, vous avez pu recueillir son haleine expirante! mais sa mère n'a pu l'embrasser, ni réchauffer, sur sa poitrine les membres glacés d'un fils!... Et, maintenant, elle pleure; elle se résout en larmes, ainsi qu'on voit les neiges devenir fleuves au premier souffle des vents furieux du midi... Je l'entends; elle s'est écriée : « O mon fils! tu m'es ravi pour tou» jours!... Gloire de ton père, où es-tu? Gloire de ta mère, où >> es-tu?

Gloria confectæ nata parentis, ubi es?

...

Gloria confectæ nunc quoque matris, ubi es?

» Qu'ai-je fait pour m'attirer ce malheur? existe-t-il de justes >> dieux?... O mon fils! je n'ai plus que tes entrailles à honorer >> sur ce bûcher! mais ton corps! mais tes mains, je ne puis les >> baigner de mes pleurs, les couvrir de parfums, les presser de » mes lèvres!... Je t'attendais consul et triomphateur, je te re»çois mort! je ne vois briller tes faisceaux que devant ton cer»cueil !

Sic mihi, sic miseræ nomina tanta refers!
Quos primùm vidi fasces, in funere vidi...

>>....Désormais, quand on viendra me dire: Voici votre fils >> Néron le vainqueur, je ne pourrai plus demander lequel? Ah! >> malheureuse que je suis! je tremble, je frissonne!...

Me miseram, extimui, frigusque per ossa cucurrit!....

» A présent, je crains toujours de voir mourir le second ; j'étais

» si tranquille, quand ils vivaient tous les deux!... Du moins, » Tibère, ne va pas me quitter! me laisser seule sur la terre! et » que je t'aie pour me fermer les yeux!...>>

Ainsi parla Livie, jusqu'à ce que les sanglots eussent étouffé sa voix !

.... Princesse, ne vous abandonnez pas ainsi! Pensez qu'il y a des consolations pour vous...; de précieux restes vous ont été rapportés. L'armée les couvrit de ses regrets; et il fallut que Tibère, pour ainsi dire, les lui arrachât... Toutes les villes de l'empire, par où ils ont passé, ont pris le deuil... Rome entière n'a plus qu'un seul discours, qu'un seul aspect, le deuil... Les lieux publics sont fermés; on sort, on court de tout côté, saisis d'effroi...; la justice est suspendue...; les temples sont déserts... Drusus! l'histoire consacrera ta vie!... ta statue ornera le Forum!... on dira que tu es mort pour la patrie! Et toi, Germanie cruelle, qui nous l'as enlevé, tu périras!... Tes enfans, si fiers de la mort de notre héros, seront traînés, par le bourreau, dans nos prisons... Je les verrai, je les contemplerai, nus, exposés sans honneur sur la voie publique, et je me réjouirai!

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Carnifici in masto carcere dandus erit,
Consistam, lætisque oculis, lentusque videbo
Strata per obcœnas corpora nuda vias, etc., etc.

Mais, que dirai-je de vous, Antonie? digne épouse de Drusus, digne belle-fille de Livie! Hélas! vous étiez faits l'un pour l'autre, égaux en naissance, en biens, en vertus...; vous fûtes son unique amour, le charme de sa vie, le repos de ses travaux!... il ne vous racontera plus ses dangers et ses victoires!...; dans votre désespoir, vous arrachez votre belle chevelure, vous cherchez vainement cet époux absent à jamais...; vous interrogez vainement votre couehe silencieuse et déserte... Telle fut Andromaque, telle Evadné... Mais, pourquoi désirer la mort! quand il vous reste, dans vos enfans, de précieux gages de Drusus?... Calmez ces fureurs insensées !... Drusus a rejoint ses glorieux aucêtres : il triomphe maintenant chez les dieux pour ne plus mourir... Songez, veuve infortunée, et vous aussi, mère illustre, à ne rien faire d'indigne de vous! La barque de Caron nous attend tous à peine suffit-elle à la foule qui s'y précipite. Fata manent omnes, omnes exspectat avarus Portitor, et turbæ vix satis unà ratis...

Que dis-je ? le ciel, la terre et la mer passeront...; comment vouliez-vous que Drusus échappåt, seul, à la destinée?... Il est mort jeune, il est vrai, mais plein d'honneur et de gloire. Le Rhin,

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