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se servir contre ce dernier, dit-il, qui ne soit d'usage contre les deux autres? » Comme si les merveilles de la civilisation du monde étaient soustraites à ses regards. De nombreuses citations de l'Ancien Testament servent de textes à autant de syllogismes construits pour la ruine de toute doctrine révélée, et le livre finit par l'exclamation tantum! eh quoi tant! à laquelle nous répondrons par celle-ci : tantillulum! eh quoi! si peu!

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IL CATECHISMO,

Overo institutione christiana di M. Bernardino Ochino da Siena, in forma di dialogo. Interlocutori, il ministro, el'illuminato, non mai piu per l'adietro stampato, insieme xix Prediche di M. B. Ochino senese, nomate laberinti del libero, over servo Arbitrio, Prescienza, Predestinatione et liberta divina, et del modo per Uscirne. (2 tom. en 1 vol. pet. in-8 rare, de 317 pages l'un, et de 266 l'autre.) In Basilea. M.DLXI.

(1555-61.)

On ne s'attend guère à trouver, dans un moine apostat du 15° siècle, aujourd'hui absolument oublié, un des plus profonds métaphysiciens qui aient jamais paru. Tel fut pourtant Bernard Ochin, né à Sienne, en 1487, d'abord cordelier, puis capucin, et alors aussi célèbre dans toute l'Italie par ses vertus austères que par ses éloquens sermons; puis tout d'un coup, à 55 ans, esclave de l'amour, qui lui fit épouser, à Genève, une jeune fille de 18 ans, quitter sa religion pour le calvinisme, dépasser les plus hardis novateurs jusqu'à prêcher la polygamie; égarement funeste, qui le força successivement à sortir de Suisse et de Pologne, et enfin à s'en aller mourir, misérable, en Moravie, dans sa 78° année, non sans avoir jeté un grand éclat dans le monde et sans avoir influé sur les affaires de son temps, puisqu'il aida, sur sa demande, le fameux Crammer dans la réforme de l'Ëglise anglicane. Le sort d'avoir joui de toute la célébrité du génie, pour s'ensevelir ensuite tout entier dans l'oubli des hommes, lui est commun avec son compatriote et son ami Pierre Martyr, dont le public ignore ou dédaigne les savantes histoires et les précieuses lettres.

Les écrits de Bernard Ochin sont très nombreux, sans compter les trente dialogues qui le firent bannir de Genève. Nous ne parlerons que des seuls ouvrages que nous connaissions de lui, en témoignant, dès à présent, notre surprise de ce que M. Tabaraud, son biographe, lui refuse toute instruction, même dans sa propre langue; car, dans notre ignorance, nous soupçonnons qu'il écrit l'italien-toscan avec un nerf et une clarté

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remarquables, dignes de servir de modèles dans toutes les langues.

Son Catéchisme est dédié à l'église de Lucerne : c'est, ou du moins cela veut être un code, complet et raisonné, de tout ce qui est exclusivement nécessaire pour mener une vie chrétienne. L'auteur remonte on ne peut plus haut, et commence ainsi son dia logue avec l'Illuminé: «Penses-tu être? - Il me semble que je » suis, mais je n'en suis pas certain, vu que mes seus peuvent >> me tromper.-S'il te semble que tu es, il est impossible que >> tu ne sois pas; car à qui n'est pas, rien ne semble. » Ceci est excellent et montre tout d'abord à qui nous avons affaire. De ces prémisses découle, avec la nécessité d'un commencement de toutes choses, celle d'une intelligence créatrice et suprême : les fins de l'ame humaine, en un mot, les premières bases de la morale. L'enchaînement philosophique est interrompu par la foi, qui le conduit au péché originel; et là il se renoue par dix paraphrases des articles du Décalogue. Celle sur le commandement, tu ne déroberas pas, fournit un texte solide à la réfutation du système aujourd'hui ressuscité de la communauté des biens. Plusieurs autres paraphrases ont pour objet de ruiner l'enseignement de l'Eglise, touchant le culte des saints, celui des reliques et des images, et la multiplicité des fêtes comme des cérémonies sacrées. Ce n'est pas ici le Catéchisme de Trente. L'examen du Symbole des Apôtres succède à celui du Décalogue. « Crois-tu, » dit le ministre, que le Symbole soit l'ouvrage des Apôtres? » Oui, répond l'Illuminé (c'est à dire, dans son langage, l'É>> clairé). Crois-tu que ce Symbole contienne tout ce qu'il est >> nécessaire de croire? Oui, car des êtres inspirés par l'Es» prit saint ne pouvaient laisser leur œuvre incomplète. >> Combien contient-il d'articles de foi? Les uns disent 12, » d'autres 14, d'autres 24; mais peu importe, puisqu'il ren>> ferme tout le nécessaire. »

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Il n'entre pas dans notre plan de suivre Bernard Ochin dans ses sorties contre le purgatoire, contre la cène des papistes, non plus que dans ses longues explications sur le baptême et la justification. Le ministre, sur ces divers points capitaux, a le tort de tous ses confrères les réformateurs, celui de s'appuyer fièrement de la raison quand bon leur semble, et de s'en jouer au nom de la foi quand cela leur plaît, suivant les caprices de leur antipathie pour l'église romaine, infiniment plus conséquente qu'eux : c'est ainsi qu'il assigne des bornes très étroites à la prière, non seulement en ne voulant, pas plus que Calvin, de prières pour les morts, mais encore en ne permettant que six matières d'oraison, Analectabiblion. 1.

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savoir trois relatives à la plus grande gloire de Dieu, et trois afférentes au salut. Quelle folie triste et vaine d'interposer ainsi sa pédanterie réglementaire entre une pauvre ame et son auteur! Qu'a-t-on à redouter de pareils épanchemens, et quel homme peut être assez osé pour les restreindre?

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Les xix Sermons sur le libre arbitre sont dédiés à la reine Élisabeth. C'est la que la forte tête de Bernard Ochin se manifeste. Il en remontrerait à saint Augustin, et Leibnitz n'a rien à lui apprendre. Voici dans quel ordre ces discours sont rangés : 1° quatre sermons sur les embarras dans lesquels s'impliquent les partisans du libre arbitre, et que, pour cette raison, il appelle des labyrinthes; 2° quatre autres labyrinthes, où se perdent les adversaires de la liberté de l'homme; 3° un sermon explicatif de l'opinion qu'il ne convient pas à l'homme de s'engager dans ces doubles labyrinthes : c'est un morceau admirable; 4o un sermon où l'opinion précédente est combattue : ici le métaphysicieu rentre dans la théologie; 5o huit sermons, où l'orateur veut montrer les issues naturelles de chacun des huit labyrinthes, ce qu'il ne fait pas mieux qu'un autre, se confiant trop à la révélation pour un argumentateur, et raisonnant trop pour un croyant, sans cesser, pourtant, de temps à autre, de jeter de grands éclairs, surtout vers la fin, qui est sublime. Tel est le plan de l'œuvre. Maintenant, essayons de retracer la marche des idées.

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PREMIER LABYRINTHE. Mortel, tu te dis libre du premier ordre, et ton orgueil se refuse à la pensée d'agir de nécessité. Prends-y garde, mortel! par là tu dis que tu es Dieu; car, agir de soimême, sans être déterminé par une cause hors de soi, ne saurait convenir qu'à la cause suprême.—Tu agis à volonté ; oui, sans doute, et la bête aussi; mais la volonté qui la fait naître? -Chez la bête, qui n'est pas libre, ce sont les appétits; chez l'homme, c'est la pensée. Et cette pensée, d'où te vient-elle?-Demoi?De toi? comment! ce ne sont ni les besoins qui, dans ta première enfance, l'ont excitée, ni les objets extérieurs qui, plus tard, l'ont fait éclore, ni les exemples qui, par l'imitation, l'ont développée, ni les leçons et les conseils qui, par l'éducation, ont cause son essor? Ne pourrait-il se faire qu'entre la bête et toi il n'y eût que du plus et du moins? Humilions-nous; prions Dieu de nous donner assez de lumières pour lui rendre hommage! E cosi sia.

DEUXIÈME LABYRINTHE. Mais, quand il serait vrai que notre volonté ne fût déterminée par aucune force étrangère, matėrielle, intellectuelle ou morale, que nous eussions la liberté d'indifférence, que l'homme se donnât les idées qui le déterminent,

les partisans du libre arbitre n'en seraient pas plus avancés, puisqu'après tout, l'homme ne pouvant résister à la volonté divine, il faut bien qu'il veuille ce qu'elle veut qu'il veuille, et que la volonté divine étant immuable, il faut que la volonté humaine, toujours conforme à ce que Dieu a déterminé, soit, en ce sens, immuable aussi. Prions Dieu de soutenir notre faiblesse. E cosi sia.

TROISIÈME LABYRINTHE. Et, quand on aurait établi que la volonté de l'homme se meut d'elle-même, et que Dieu, en déterminant toutes choses, n'a pas enchaîné cette volonté humaine de façon qu'elle soit contrainte à tels ou tels actes, les partisans de la liberté du premier ordre n'en seraient pas moins impliqués dans un terrible labyrinthe; car, pour que ces choses se pussent accorder, il faudrait que les contingens dépendissent à la fois et ne dépendissent pas de Dieu; en sorte que sa prescience deviendrait incertaine et purement conjecturale, ce qu'il est impossible de supposer et qui ferait aussitôt tomber toutes les prophéties, toutes les révélations, toutes les écritures. Quand Jésus-Christ prédit à saint Pierre qu'il le renierait trois fois, au chant du coq, peut-on dire qu'une annonce si précise fût une simple conjecture qui laissât à saint Pierre la possibilité de renier deux fois, ou une seule, ou point, de même qu'au coq de ne pas chanter? Quand Jésus-Christ promit, à ses douze apôtres, douze siéges dans la maison de son père, peut-on dire qu'il laissât incertain si les apôtres mériteraient ou non, c'est à dire obtiendraient ou non ces douze siéges? Force est donc de confesser, ou que Dieu prévoit certainement les actes de notre volonté, ce qui la rend nécessaire et non libre du premier ordre, ou enfin que Dieu se trompe ou qu'il ment. Lui seul nous peut tirer de ce troisième labyrinthe. E cosi

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QUATRIÈME LABYRINTHE. Cependant, j'y consens, ni les objets extérieurs, ni les idées, ni les sentimens communiqués, ni les décrets incommutables de la divine puissance, ni l'infaillible et certaine prescience de Dieu n'entravent l'exercice de notre volonté : nous n'en serons pas moins enfermés dans un labyrinthe quatrième, et voici comme: Si nous sommes libres, assurément Jésus-Christ l'était aussi. Dans ce cas, sa passion, sa mort et sa résurrection pouvaient ne pas arriver. Admettez-vous ceci possible? non. Donc l'Homme-Dieu agissant de nécessité, tous les hommes, à plus forte raison, agissent de même. Dieu puissant, sortez-nous de cet abîme! E cosi sia.

CINQUIÈME LABYRINTHE. Si les partisans de la liberté de l'homme sont embarrassés, ses adversaires ne le sont pas moins. En effet,

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