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moyens de l'attaquer. Lorfqu'il fortit de fon confeil, fon bouffon lui dit que fes confeillers étoient des fous. Pourquoi, demanda François ? C'eft, répondit Triboulet, qu'ils ont feulement délibéré comment vous entreriez en Italie, & qu'ils n'ont pas pensé à voir comment vous en fortiriez. C'eft ce même bouffon qui avoit mis fur fes tablettes, Charles-quint au nombre des fous, parce que ce prince, fur l'invitation du monarque François, fe propofoit de paffer par la France, pour fe rendre dans les Pays-Bas. Mais, lui dit François I, fi je le laiffe paffer? - En ce cas, dit Triboulet, j'effacerai fon nom de mes tablettes, & j'y mettrai le vôtre. Cependant Charles-quint avoit raifon de fe fier à un prince qui, après la bataille de Pavie, mandoit à la ducheffe d'Angoulême: Tout eft perdu, hormis l'honneur.

L'Angely, qui eft le dernier fou dont notre hiftoire falle mention, appartenoit à Louis XIV. M. le prince l'amena des Pays-Bas, & le donna à ce monarque. L'Angely étoit un fou fpirituel, mais malin. Voici un trait de lui. M. de *** fe difoit d'une maifon très-illuftre, quoiqu'il tirât fon origine d'un fou. L'Angely fe trouvant dans la chambre du roi, après lui avoir parlé debout pendant quelque temps,» afféyons-nous, monfieur, lui dit-il, on ne prendra pas garde à nous, & vous favez que nous ne tirons pas à conféquence". L'Angely n'étoit nullement dévot; il difoit qu'il n'alloit pas au fermon, parce qu'il n'aimoit pas le brailler, & qu'il n'entendoit pas le raifonner. Son talent d'amufer lui procura une fortune confidérable. On a rapporté ce mot de Marigny qui, étant un jour au diner du roi, dit à quelqu'un, en lui montrant l'Angely qui amusoit Louis XIV

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faillies:,, De tous nous autres fous qui avons fuivi ,, M. le prince, il n'y a que l'Angely qui ait fait fortune.

FRANÇOIS.

Le plus bel éloge que l'on puisse faire des Fran

çois, eft d'expofer avec fimplicité quelques traits de bravoure & de courage qui leur font particuliers. Nous ajouterons à ces traits rapportés, quelques réparties vives & fpirituelles qui caractérifent cette humeur vive & enjouée que le François conferve dans les occafions même les plus périlleufes, lorfque l'honneur l'appelle. Ce mot honneur frappe les oreilles du François avec une efpèce d'enchantement, & va jufqu'au cœur. Un foldat de cette nation, fous le maréchal de Saxe, difoit, dans la dernière guerre : J'ai l'honneur d'ê tre François.

Les François qui, fous les ordres du maréchal de Toiras, en 1629, défendoient Cafal, affiégé par les Efpagnols, y firent un de ces traits de fauffe bravoure, qui forment une partie de leur caractère. Un grand nombre des officiers de la garnison foupant un jour chez le commandeur de Souvré, Baradas, qui avoit été autrefois favori de Louis XIII, propofa d'aller danfer fur une demi-lune, d'y boire à la fanté de tous les princes chrétiens, & de finir par celle de Spinola chef des affaillans. L'invitation fut reçue avec acclamation par tous les convives; on partit dans l'inftant. Un trompette & un aveugle avec fa vielle, fervirent au lieu de violon. Pendant que ces étourdis fe divertiffoient fi bien, les Efpagnols mirent le feu à un fourneau préparé fous la demi-lune. Douze danfeurs fautè

rent en l'air; quelques autres furent enterrés; tous perdirent la vie. On rapporte que l'aveugle s'enfuit fans guide, & paffa lui feul fur une planche mife fur le foffé, que les plus clairvoyans ne paffoient pas fans crainte. Hift. du maréchal de Toi

ras.

Les François ne juftifient-ils pas encore aujourd'hui ce reproche que leur fit autrefois un hiftorien Italien? En 1952, le maréchal de Briffac, commandant pout Henri II dans la partie du Piémont que les François occupoient depuis long-temps, étoient venu à bout d'emporter d'un coup de main la ville de Quiers, dont il avoit cru ne fe rendre maître que par un fiège régulier. Les vainqueurs fe flattèrent ouvertement que ce premier avantage feroit fuivi des plus grands fuccès. L'hiftorien Davila qui fe trouvoit parmi les troupes Efpagnoles qui défendoient la place, dit à l'un d'eux:,, Vous ,, avez bien fu, Meffieurs les François, commen,, cer la guerre avec avantage, mais j'espère que l'impatience & la légèreté avec lefquelles vous ,, conduifez vos affaires, rétabliront les nôtres". Ce trait ayant été rapporté au maréchal, il répondit auffi-tôt Cet étranger nous connoît de longue main. Hommes Illuftres de la France.

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Le François furieux lorfqu'on lui réfifte, eft plein de douceur & de générofité pour un ennemi défarmé. C'eft ce que le comte de Somls, général de l'infanterie ennemie, & qui avoit été fait prifonnier par les François à la bataille de Nerwinde en 1693, ne put s'empêcher de reconnoître, Quelle nation eft la vôtre, s'écria le comte de Solms, en parlant au chevalier du Rozel, un des officiers généraux de l'armée Françoife? Vous vous battez comme des lions, & vous traitez les vaincus comme

s'ils étoient vos meilleurs amis. Lettres de Racine. Durant les profpérités de Louis XIV, les François en général ne trouvoient rien d'impoffible à la guerre. Un officier néanmoins s'excufoit devant le marquis de Feuquieres de n'avoir pas attaqué un certain pofte, parce qu'il l'avoit jugé inattaquable. Monfieur, lui dit le marquis, ce mot-là n'eft pas François.

Le fort de Fécamp venoit d'être pris fur la ligue en 1593, par le maréchal de Biron. Le poids de cette perte parut accabler les Calvinistes, excepté Bois-Rofe, officier de cœur & de tête, qui, en forrant de la place même, conçut le hardi projet de la rendre à fon parti. Voici comme les Mémoires de Sully rapportent cet acte de bravoure, comparable à tout ce que l'antiquité nous offre de plus extraordinaire. Le côté du fort qui donne fur la mer eft un rocher de fix cens pieds de haut, coupé en précipices. La mer en lave continuellement le pied à la hauteur d'environ douze pieds, excepté quatre ou cinq jours de l'année, où la mer le laiffe à fec l'efpace de trois ou quatre heures. Bois-Rofé, à qui toute autre voie étoit fermée pour furprendre une garnifon attentive à la garde d'une place nouvellement prife, ne douta point que s'il pouvoit aborder par cet endroit regardé comme inacceffible, il ne vînt à bout de fon deffein; il ne s'agiffoit plus que de rendre la chofe poffible. Il avoit gagné pour cet effet deux foldats de la garnifon, & l'un d'eux fe tenoit tout le temps de la baffe marée fur le haut du rocher où il attendoit le fignal convenu. Bois-Rofé ayant pris le temps d'une nuit fort obfcure, aborde avec cinquante hommes choifis & deux chaloupes au pied du rocher. Il s'étoit muni d'un gros cable, égal en longueur à la hau

teur du roc, & il y avoit fait de diftance en diftance des nœuds & paffé de courts bâtons pour appuyer les pieds & les mains. Le foldat, qui fe tient enfaction, n'a pas plutôt reçu le fignal, qu'il jette du haut du précipice un cordeau, auquel ceux d'enbas lient le cable qui eft guindé en haut par ce moyen & attaché à l'entre-deux d'une embrasure avec un fort lévier paffé par une agraffe de fer faite à ce deffein. Bois-Rofé fait prendre les devants à deux fergens dont il connoît la réfolution, & ordonne aux cinquante foldats de s'attacher de même à cette espèce d'échelle, les armes liées autour de leurs corps, & de fuivre à la file, fe mettant luimême le dernier de tous, pour ôter à ceux qui pourroient être tentés d'être lâches, tout espoir de retour. La chofe devient d'ailleurs bientôt impoffible; car avant qu'ils foient feulement à moitié chemin, la marée, qui a monté de plus de fix pieds a emporté les chaloupes, & fait Hotter le cable. Qu'on s'arrête ici un moment pour fe représenter ces cinquante hommes fufpendus entre le ciel & la terre au milieu des ténèbres, ne tenant qu'à une machine fi peu sûre, qu'un léger défaut de précaution, la trahifon d'un foldat mercenaire, ou la moindre peur pouvoit les précipiter dans les abymes de la mer, ou les écrafer fur les rochers : qu'on y joigne le bruit des vagues, la hauteur du rocher, la laflitude & l'épuifement; il y avoit dans tout cela de quoi faire tourner la tête au plus affuré de la troupe; comme elle commença en effet à tourner à celui-là même qui la conduifoit. Ce fergent dit à ceux qui le fuivoient, qu'il ne pouvoit plus monter, & que le cœur lui défailloit. BoisRofé, à qui ce difcours étoit paffé de bouche en bouche, & qui s'en appercevoit, parce qu'on n'a

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