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VAR ICE. commandeur répondit:,, Je vois bien que vous n'êtes pas content; tenez, voilà donc encore un ,, petit écu." Le médecin ne put s'empêcher de rire, & de refufer les trois louis & le petit écu.

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L'Avare Cuttler, dont parle Pope, dans fes Epitres morales, croyant donner un excellent avis au prodigue Viuiers, duc de Buckingham, lui difoit: Que ne vivez vous comme moi"? - Vivre comme vous, chevalier Cuttler! j'en ferai toujours le maître, répondit Villiers, quand je n'aurai plus

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rien.

Ce Cuttler, homme très riche & très-avaricieux, voyageoit ordinairement à cheval, & feul, pour éviter toute dépenfe. Le foir, en arrivant à l'auberge, il feignoit d'être indifpofé, afin qu'on ne lui fervît point à fouper. Il ordonnoit au valet d'écurie d'apporter, dans fa chambre, un peu de paille pour mettre dans fes bottes, faifoit baffiner fon lit, & fe couchoit. Lorfque le domeftique s'étoit retiré, il fe relevoit, & avec la paille de fes bottes & la chandelle qu'on lui avoit laiffée, il faifoit un petit feu, où il grilloit un hareng, qu'il tiroit de fa poche. Il avoit toujours la précaution de fe munir d'un morceau de pain, & de faire monter une bouteille d'eau ; & il foupoit ainfi à peu de frais.

Un homme, dont l'avarice étoit connue, fe vantoit d'avoir fait une perte confidérable au jeu, fans dire un feul mot.,, Je ne m'en étonne point, répartit un plaifant, les grandes douleurs font

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L'abbé Regnier, fecrétaire de l'académie Françoife, y faifoit un jour, dans fon chapeau, la collecte d'une piftole, que chaque membre devoit fournir pour quelque dépenfe commune. Cet abbé

ne s'étant point apperçu qu'un des quarante (le président Rofe) qui étoit fort avare, eût mis dans le chapeau, il le lui préfenta une feconde fois. Celui-ci, comme on s'y attend bien, affura qu'il avoit donné. Je le crois, dit l'abbé Regnier; mais je ne l'ai point vû. Et moi, ajouta M. de Fontenelle, qui étoit à côté, je l'ai vû; mais je ne le crois pas.

Un noble débonnaire, & qui n'avoit point la réputation d'être brave, demandoit à un avare, quel plaifir il avoit d'amaffer des écus, & de ne pas s'en fervir?,, J'y trouve autant d'appas, répondit l'ava,, re, que vous à porter l'épée".

AVEUGLE.

LE Es aveugles étant moins diftraits par la quantité d'objets que le fens de la vûe nous préfente à la fois, doivent avoir ceux de l'ouie, de l'odorat, du toucher, plus fins, plus exquis. C'eft auffi ce que plufieurs faits nous confirment. Ajoutons que l'habitude d'exercer un fens au défaut de l'autre, rend le premier en quelque forte plus favant. L'Aveugle né de Puifeaux en Gâtinois, eftimoit la proximité du feu au degré de la chaleur; la plénitude des vaiffeaux, au bruit que font en tombant les liqueurs tranfvafées, & le voifinage des corps, à l'action de l'air fur fon vifage. Il s'étoit fait de fes bras, des balances fort juftes, & de fes doigts, des compas prefque infaillibles. Le poli des corps n'avoit guères moins de nuances pour lui, que le fon de la voix. Il jugeoit de la beauté, par le toucher, & faifoit entrer dans ce jugement la prononciation & le fon de la voix. Il adreffoit au bruit & à la voix très-fûrement. On rapporte qu'il eut, dans fa jeu

neffe, une querelle avec un de fes frères, qui s'en trouva fort mal. Impatienté des propos défagréables qu'il effuyoit, il faifit le premier objet qui lui tomba fous la main, le lui lança, l'atteignit au milieu du front, & l'étendit par terre. Cette avanture & quelques autres, le firent appeller devant le tribunal du lieutenant de police de Paris, où il demeuroit pour lors. Les fignes extérieurs de la puiffance qui nous affectent fi vivement, n'en impofent point aux Aveugles. Le nôtre comparut devant le magistrat, comme devant fon femblable; les menaces ne l'intimidèrent point.,, Que me ferezvous? dit-il à M. Herault. Je vous jetterai dans un cul de baffe-foffe, lui répondit le magiftrat.—,, Eh! monsieur, lui répliqua l'Aveugle, ,, il y a vingt-cinq ans que j'y fuis."

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On penferoit peut-être qu'un Aveugle-né n'a aucune idée nette de la vifion. Que l'on en juge par cette réponse. On demandoit à l'Aveugle de Puifeaux, ce que c'étoit que des yeux?,,C'eft, répondit-il, un organe fur lequel l'air fait l'effet de ,, mon bâton fur ma main. Cela eft fi vrai, ajouta-t-il. que quand je place ma main entre vos », yeux & un objet, ma main vous eft préfente, mais l'objet vous eft abfent. La même chofe m'arrive, quand je cherche une chose avec mon bâton, & que j'en rencontre une autre.

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Il définiffoit un miroir, une machine qui met les chofes en relief loin d'elles-mêmes, fi elles fe trouvent placées convenablement par rapport à elles.,, C'est comme ma main, ajoutoit-il, qu'il ne faut pas que je pofe à côté d'un objet pour le fentir. "Combien de philofophes renommés, dit un auteur moderne, ont employé moins de fubtilités pour arriver à des notions auffi fauffes?

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Saunderfon, mort il y a quelques années en Angleterre, avoit perdu la vûe dès fa plus tendre enfance. Malgré cette privation, il fit des progrès fi furprenans dans les mathématiques, qu'on lui donna la chaire de profeffeur de ces fciences dans l'univerfité de Cambridge. Ses leçons étoient d'une clarté extrême: & cela devoit être, puifqu'il parloit à fes élèves comme s'ils euffent été privés de la vûe. Ce qui paroîtra plus fingulier, c'eft qu'il faifoit des leçons d'optique. Saunderfon n'avoit befoin que de parcourir avec les mains, une fuite de médailles, pour difcerner les fauffes, même lorfqu'elles étoient affez bien contrefaites pour tromper les yeux d'un connoiffeur. Il jugeoit de l'exactitude d'un inftrument de mathématique, en faifant pafler fes doigts fur les divifions. Les moindres viciffitudes de l'atmosphère l'affectoient; & il s'appercevoit furtout, dans les temps calmes, de la prefence des objets peu éloignés de lui. Un jour qu'il affiftoit, dans un jardin, à des obfervations aftronomiques, il diftingua, par l'impulfion de l'air fur fon vilage, le temps où le foleil étoit couvert de nuages; ce qui eft d'autant plus fingulier, qu'il étoit totalement privé,non feulement de la vûe, mais de l'or

gane.

On a vû avec plaifir, dans la Gazette Littéraire de l'Europe, du 21 mars 1764, les circonftances les plus intéreffantes qui ont accompagné l'opération de la cataracte faite à un aveugle-né de vingt ans. Ces circonftances ont été rapportées d'après une feuille périodique intitulée: The Weekly amusement. Un chirurgien ( M. Grant) ayant affuré les parens du jeune Aveugle, qu'il détruiroit l'obstacle qui le privoit de la vue, plufieurs perfonnes s'affemblèrent pour être témoins de cette opération.

Tous les fpectateurs avoient promis de garder le filence, fi l'opération réuffiffoit, afin de mieux obferver les mouvemens qu'occafionneroient dans l'ame du jeune homme les nouvelles fenfations qu'il éprouveroit. L'opération eut tout le fuccès qu'on en attendoit. Lorfque les yeux du jeune Aveugle furent frappés des premiers rayons de la lumiére, on vit fur toute fa perfonne l'expreffion d'un raviffement extraordinaire; il parut prêt à s'évanouir de joye & d'étonnement. L'opérateur étoit devant lui avec fes inftrumens à la main. Le jeune homme l'examina depuis la tête jufqu'aux pieds; il s'examinoit enfuite avec la même attention, & fembloit comparer fa figure avec celle qu'il voyoit. Tout lui paroiffoit exactement femblable, excepté les mains; parcequ'il prenoit les inftrumens du chirurgien pour des parties de fes mains. Pendant qu'il étoit occupé à cet examen, sa mère, qui ne pouvoit plus contenir les tendres mouvemens dont fon cœur étoit agité, fe jetta à fon cou en s'écriant: Mon fils! mon cher fils! Le jeune homme reconnut la voix de fa mère, & ne put prononcer que ces mots: Eft-ce vous? eft-ce ma mere? & il s'évanouit Il y avoit dans la chambre une jeune fille avec qui le jeune homme avoit été élevé, qu'il aimoit tendrement, & dont il étoit tendrement aimé,tout aveugle qu'il étoit. Lorfqu'elle le vit fans mouvement & fans connoiffance, elle laiffa échapper quelques cris de douleur qui parurent ranimer la fenfibilité du jeune homme. En revenant à lui, fes yeux fe fixoient fur l'objet chéri, dont il reconnoiffoit la voix. Après quelques momens de filence, il s'écria: Qu'est-ce qu'on m'a donc fait? où m'a-t-on tranfporté? Ce que je fens autour de moi, est-ce la lumiére dont on m'a fi fouvent parlé? le fenti

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