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entièrement substitué au plein cintre; la voûte de l'abside porte tout à fait l'empreinte de ce style gothique du xy° siècle, qui touche presqu'à la décadence et qui, malgré sa simplicité, tient à ce qu'on appelle le gothique fleuri. Plusieurs de nos églises d'Avignon, tout au moins dans leurs chapelles, ont à peu près ce caractère.

Ces dates qui, avant la conférence de M. Revoil, semblaient aux yeux de chacun de nous empreintes irrévocablement sur les pierres de l'édifice, l'histoire ne vientelle pas les confirmer? Lorsque dans les années 1177 et suivantes, selon les documents historiques, le pont s'élevait sous l'inspiration de saint Bénézet, c'était précisément l'époque où cette même achitecture romane régnait seule sur nos bords du Rhône et où l'architecture gothique n'y était pas encore arrivée. Le pont, la chapelle et cet art roman sont donc contemporains, et on peut dire qu'ils se rendent mutuellement témoignage. Après le siège de 1410, lorsque les consuls d'Avignon faisaient restaurer et exhausser cette même chapelle, qui avait été profanée par les Catalans et gravement endommagée par l'explosion de la mine, c'était l'époque où l'art gothique s'était substitué à l'art roman et où les chapelles de nos églises paroissiales avaient leurs voûtes supportées par des arcades ogivales pareilles. Ici encore l'architecture et les documents historiques échangent également leurs témoignages.

Pour l'exhaussement et le dédoublement de la chapelle, il y a eu encore d'autres causes que les dommages résultant de l'explosion. On avait reconnu que son sol était trop bas et exposé aux grandes inondations. Et, en effet, dans notre temps n'a-t-on pas vu les inondations de 1840 et de 1856 le recouvrir d'environ 0m60? Il importait donc aux Avignonais de soustraire à tant de

dangers les précieuses reliques de saint Bénézet. D'autre part, l'exhaussement du tablier du pont sous le pontificat de Clément VI, obligeait de descendre un grand nombre de marches pour arriver à la chapelle; on voulut avoir une nef où l'on entrerait de plein pied. Il paraît évident que la chapelle primitive avait eu aussi son entrée de plein pied sur l'ancien pont; mais l'exhaussement ayant muré cette entrée, il avait fallu ouvrir la porte latérale qui existe encore aujourd'hui et à cet effet remanier une fenêtre dont une partie du cadre est encore apparente.

Il importe peu que le mur du pont ne soit que juxtaposé contre la nef romane, selon les remarques de M. Revoil, et ne fasse point corps avec elle. Pouvait-il en être autrement, dès qu'il est constaté que cette partie du pont a été reconstruite sous le pontificat de Clément VI, c'est-à-dire longtemps après l'édification de la chapelle omane par saint Bénézet.

Quant aux signes des tailleurs de pierres, rares et peu définis, ils ne sauraient fournir aucune indication certaine.

Ainsi donc je crois avoir prouvé que les données et les documents abondent pour maintenir l'autorité de l'histoire, telle que depuis le temps de saint Bénézet elle est parvenue jusqu'à nous.

Cependant, pour un moment, fermons les yeux, s'il le faut, à l'évidence de la vérité historique, et entrons dans le domaine de l'hypothèse. La chapelle, dans sa nef inférieure, sera carlovingienne, et elle attestera l'existence d'un pont carlovingien dont elle dépendait. Mais alors comment avait-t-elle subsisté intacte, tandis que le pont carlovingien disparaissait sans qu'il en restât rien? Se trouvait-elle par hasard édifiée sur un îlot

de roches qui lui aurait assuré une existence indépendante? Nullement. La culée et l'avant-bec sur lesquels elle repose, ont été fondés en plein lit du fleuve, et elle était une partie intégrante du pont. Voilà donc que la population aurait perdu absolument le souvenir du pont carlovingien qui aurait disparu, tandis que cette chapelle n'aurait cessé de se montrer à ses yeux comme un restant authentique de ce même pont.

Cette discussion paraîtra peut-être trop longue, et je crains toujours d'être accusé de témérité. Mais j'abrite mon opinion sous l'autorité du président du Congrès, qui s'en est formellement expliqué. Je l'abrite aussi sous l'opinion commune dans notre pays, et surtout sous l'opinion raisonnée d'hommes parfaitement compétents; parmi eux, M. Achard, M. Lefort, M. Jules Courtet (1). Enfin, je ne crois pas pouvoir mieux faire que de rapporter textuellement l'opinion de M. Chaix, architecte et archéologue justement estimé dans le monde savant. Il avait remarqué «< que les quatre premières arches du pont ont été reconstruites à une époque bien postérieure à celle de 1177, c'est-à-dire vers le milieu du XIVe siècle; que les arches primitives étaient beaucoup moins élevées que celles d'aujourd'hui ; et il en avait pour preuve l'élévation de la chapelle inférieure qui se trouvait de niveau avec la hauteur des arches, ensuite les restes de la naissance des voussoirs qu'on aperçoit encore contre les piles du pont, à côté des arches de constructions Loins anciennes ; que lorsqu'on voulut réédifier les nouvelles arches, on fut obligé, pour bâtir une chapelle à

(1) Achard, Annuaire 1850, passim. Lefort, la Légende de saint Bénezet. Courtet, Dictionnaire des communes de Vaucluse, vo Avignon.

l'usage des voyageurs, de partager la hauteur de l'ancienne par une voûte dont les nervures non prismatiques s'harmonisent avec le caractère de l'architecture primitive, et reposent sur quatre chapitaux encore romans, de la chapelle inférieure (1). »

Et maintenant je dirai pour conclure qu'on peut sans danger admettre l'exactitude des constatations matérielles de M. Revoil. Ces vestiges qui l'ont si fort impressionné, ont une explication toute simple, toute naturelle; ils sont, je le répète, les restes qu'on a laissé subsister quand on a reconstruit les quatre arches sous le pontificat de Clément VI. Cette interprétation est en tout conforme à l'histoire, et l'histoire n'est autre chose que la vérité.

(1) Joudon, Histoire d'Avignon, p. 367.

A. SAGNIER.

L'ARC-DE-TRIOMPHE D'ORANGE

Pour rappeler la physionomie de l'arc-de-triomphe d'Orange, nous donnerons l'esquisse à grands traits qu'en a faite l'architecte A. Caristie, dans la partie descriptive de son magnifique ouvrage sur la restauration de cet arc (1). La rareté de cet ouvrage, d'un prix assez élevé, ne le met malheureusement pas à la portée de tous les lecteurs, privés aussi de l'examen des planches qui donnent, avec une admirable précision, les détails de l'architecture et de la décoration de l'édifice. En raison de cette rareté, nous ferons les emprunts suivants au texte de l'œuvre en question.

« L'arc-de-triomphe élevé à Orange par les Romains est presque égal en grandeur à ceux de Septime Sévère et de Constantin qui se voient à Rome. Comme ces derniers, il est percé d'une grande et de deux petites ouvertures. Sa longueur est de 1948 sur 8m50 de profondeur, mesuré sur le nu du stylobate, et sa hauteur de 1880. La hauteur de la grande arcade est de 850; son

(1) Monuments antiques à Orange, arc de triomphe et théâtre 1 vol. grand in-folio de 55 pl., avec texte..., 1856.

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