301 Tout cela suffisait-il? J'en doute... Nécessité, dit-on, n'a pas de loi! E.-G. P. M. Amédée Pichot (lettre 78 de son Voyage littéraire en Angleterre) avertit de se méfier des fenêtres d'Edimbourg. «< .... ruelles latérales et petites allées étroites, où, d'une maison à l'autre, les Pyrames et les Thisbés d'Edimbourg peuvent se donner la main. Hâtons-nous de les franchir; car de ces trous aux murailles, qui usurpent le nom de fenêtres, tombent quelquefois de ces fatales rosées, qu'on appelle des Passa res à Marseille, et ici des Gardez lo. Cette expression, jadis française, est un cri d'avertissement, qui suit, plus souvent qu'il ne précède, la chute du liquide! On nous menace du même danger, non-seulement dans le demi-jour de ces ruelles, mais encore dans les larges rues de la ville neuve. Dans les couloirs des maisons et le long des murs extérieurs, vous apercevez aussi des parfums sous forme solide.... Je vous avais annoncé que nous allions marcher sur un terrain prosaïque. » Ce cri dérisoire, Gare l'eau! a dû être aussi parisien qu'édimbourgeois consulter Scarron, D. Japhet d'Arménie,acte IV,sc. 12. Mais c'est surtout ce Passa res qui fournit à M. Pichot, Provençal lui-même, une note qui le ramène presque à l'origine de notre question: Passa res? Ne passe-t-il personne ? et c'est un fatal signal. Vous l'entendez quelquefois lorsqu'il n'en est plus temps. Les habitants de la belle Marseille font aussi entre eux de singuliers échanges. On voit, chaque soir et chaque matin, la servante aller déposer le contenu de sa cassolette de l'autre côté du ruisseau. La servante de la maison vis-à-vis vient payer cette dette, un moment après. Au sujet des immondices qui, dans nos villes du Midi, rendent si dangereuses les approches des monuments les plus magnifiques, on se rappelle le mot de l'empereur Joseph II, visitant les arènes de Nîmes: << Monsieur le Consul, est-ce encore ici un ouvrage des Romains? » O. D. Être en nage (X, 130, 184). Age, aage, aaige, aé, aez, aie, aige, aive, eage, eaige: eau, aqua; d'où est venu je suis tout en age, et non pas tout en nage, pour exprimer qu'on a très-chaud. -Eau, aqua. Pour répondre aux observations que plusieurs personnes m'ont faites sur ce que j'admettais qu'il fallait dire de quelqu'un en sueur, il est tout en âge, et non, comme on le dit et l'écrit communément, tout en aage; pour répondre, dis-je, à cette objection, je rapporte ici les différentes orthographes dont on s'est servi anciennement, et qui toutes dérivent d'aqua, étymologie reconnue et qui convient parfaitement à l'expression que j'ai citée comme étant la véritable; car, sans cela, Cette question, soulevée dans une heure de jovialités intimes, a fourni l'occasion d'une joute lexicographique locale fort récréative dont la Revue le Bas-Berry (avril et mai 1875) et l'Echo du Blanc (18 et 25 fév. 1877) ont recueilli les témoignages. L'Intermédiaire est venu, sans le savoir, mettre son no du 25 mars dans un des plateaux de la balance, et celui des jouteurs à qui il donnait raison ne l'a pas trouvé mauvais. J'ai sous les yeux la 2e éd. d'une brochure: « Simple question d'orthographe, par Ch. de Chergé, de la Soc. des Antiquaires de l'Ouest, etc. » (Le Blanc, St-Thibault, 1877, in-8 de 15 p.), où l'auteur et M. Bonsergent, de Poitiers, soutiennent savamment et spirituellement la thèse que l'n de nage, dans la locution en nage, est tout bonnement le fruit illégitime d'un rapprochement inévitable: fruit adultérin, qui ne peut être que désavoué au nom de la grammaire et de la saine prononciation. Un tiers sceptique intervient et dit : A tort vous vous mettez en age, C'est possible, et même probable; mais la chose n'en est pas moins tirée au clair, et l'on aura beau persister à « offenser la grand'mère », ce ne sera toujours pas avec la complicité des principes et de leurs fidèles gardiens, les Intermédiairistes et leurs aimables alliés de l'Indre et de la Vienne! I. N. T. Miss Williams (X, 166, 218).-Voici quelques autres renseignements biographiques sur cette femme-auteur : Elle avait inspiré une assez vive passion à Bancal des Issarts, membre de la Convention. Il avait même été question d'un mariage entre eux. Mme Roland, pour laquelle Bancal avait précédemment brûlé d'un feu auquel elle n'avait pas été tout à fait insensible, s'était généreusement entremise pour seconder ces projets (V. Lettres autographes de madame Roland, adressées à Bancal des Issarts, Paris, Eug. Renduel, 1835, in-8, p. 351). Ils n'aboutirent pas. Il semble que miss Williams fût elle-même tourmentée par le souvenir d'une affection malheureuse. Bancal fut un des quatre députés de la Convention livrés par Dumouriez aux Autrichiens le 1er avril 1793. Miss Williams, liée avec les Girondins, faillit périr avec eux. Elle fut emprisonnée au Luxembourg, « parvint à s'échapper » 303 (porte l'ouvrage auquel nous empruntons ces détails), se réfugia en Suisse et ne rentra à Paris qu'après la tourmente révolutionnaire. Elle y resta jusqu'à la fin de sa vie. (Etude sur madame Roland et son temps, par Dauban, Paris, Plon, 1864, in-8, p. CVIII). M. Dauban la fait naître à Londres en 1759 (Quérard avait dit le 27 juin 1769), et mourir le 15 déc. 1827. L. DE LA S. - Dans le Bibliographer's Manual (by Lowndes, new edition, col. 2,932), on donne les titres en anglais des ouvrages de cette dame, qui, suivant Lowndes, aurait été renfermée au Temple sous Robespierre. Quérard, dans sa France Littéraire, donne les titres des ouvrages traduits en français. UN EX-BOUQUINEUR. Curtius (X, 167, 219, 242). Il vint exhiber au Congrès de Rastadt son cabinet et les portraits en cire des principaux révolutionnaires. Picart, le futur académicien, était acteur, à Rastadt, dans la troupe du cit. Demery, directeur du Théâtre national de Strasbourg. On joua plusieurs fois sa comédie en trois actes, les Amis de collége (Handbuch d. Cong. zu Rast. Basel. 1799, in-8). A. B. -La Bibliothèque de la Ville de Paris (hôtel Carnavalet), qui est déjà redevenue si importante dans sa spécialité, grâce à son bibliothécaire-restaurateur, possède sur Curtius une pièce fort curieuse. C'est une lettre écrite par lui à la municipalité, à la fin de 1789, et proposant en bons termes certaines mesures de police urbaine, auxquelles il avait d'ailleurs un intérêt personnel. Elle est signée: CURTIUS, un des vainqueurs de la Bastille. Qui n'avait vaincu la Bastille, au 14 juillet? Qui n'a pris le Louvre, en 1830? Emporté l'Hôtel de Ville, en 1848? Sauvé la France, comme chacun sait, en 1851, en 1870, en 1871? Trop de Curtius dans notre cher pays... du haut en bas de l'échelle sociale et pas assez de Marcus! Amour des figures de cire, tu perdis Troie, et tu as plus d'une fois perdu Paris! S. H. Les Sens, poëme en cinq parties (X, 167). Mon exemplaire présente des indications sensiblement différentes, pour ne pas dire en tout dissemblables de celles qui font l'objet de la question : le titre gravé, sans lacune, est ainsi « Les Sens, conçu: poëme en six chants, par M. de Rozoi. Seconde édition, revue et corrigée par l'auteur à Londres, 1767. » Il n'y a donc ni 5 parties, ni 5 actes, mais bien 6 chants. Le nom de l'auteur est écrit de Rozoi, et nom du Rozoy; au lieu de Genève et Paris, s. d., il porte: Londres, 1767. Enfin les artistes qui ont signé le frontispice, les sept figures allégoriques (le pre 304 mier chant en a deux), les vignettes et les culs-de-lampe, sont: pour le dessin, Eisen et Wille, et non Marillier; pour la gravure, de Longueil, et non de Gendt. Å la suite du poëme on a imprimé la pièce : Epître à mon verrou. CH. L. (Nîmes.) Dans l'Almanach des Muses de 1767 et dans la notice des poésies parues en 1766, je lis : « Les Sens, poëme en 6 << chants (par M. Du Rosoy, Paris, Kolman) in-8, avec des gravures. 6 livres. Des in« décences qui n'ont rien de séduisant, « des vers durs, du faux esprit, point d'i«<magination. » — En 1768: « Les Sens, << poëme en six chants par M. de Rozoy. << Paris, Coissart, pet. in-8, 4 1. 10 s. M. de « Rozoy a fait des corrections à ce poëme « et y a ajouté une Epître à son verrou. >> En 177! « Les Sens, poëme en cinq « parties, à Mlle de L. par M. Girard« Raigné (Genève, Paris, Lejay, in-8, avec « gravures). Ces cinq parties commencent « par ce vers poétique : « Vous qui constituez mon être... « et elles se soutiennent jusqu'à la fin, où « l'on trouve ces trois lignes remarqua«<< bles : <<< Cette vie est un vrai festin, « Où notre âme, qui nous convie, << Nous sert son plus excellent vin. >> Il y a donc eu deux poëmes; le rédacteur du Catalogue en question, qui n'en connaissait qu'un, les a confondus. E.-G. P. 305 éléments du joyeux volume publié par Quatrelles (Ernest Lépine): La Vie à grand orchestre, pp. 113-121, édit. de 1873. (Nîmes.) CH. L. Le Catéchisme républicain (X, 221, 253, 280). - Il est annoncé en ces termes dans l'Almanach des rimes de l'an III (1795): « Catéchisme républicain, philosophique et « moral, par le C. Lachabeaussière, chef « d'un des bureaux du ministère de l'Intérieur, 20 p. in-8. Petit ouvrage très«< patriotique. Chacune des demandes est « courte et en prose. La réponse est toujours un quatrain, contenant une pensée << vraie et bien exprimée. » Cette annonce, faite en l'an III, prouve que l'ouvrage avait paru en l'an II. Ou Larousse s'est trompé, ou (ce qui n'aurait rien d'étonnant) il y aurait eu en l'an III (1795) une première réimpression, et l'édition de 1796 serait la troisième. Cependant, cette nouvelle publication sous un titre différent n'est pas annoncée dans l'Almanach des Muses de 1797, bien que ce recueil soit en général fort exact à parler des nouveautés. N'y aurait-il pas quelque erreur de date, ou ces différences proviendraient-elles des manières diverses de supputer les années républicaines en les comparant au vieux style? E.-G. P. Almanach royal de France (X, 201). Il y a au moins l'Almanach publié par Laurent d'Houry à partir de 1684, et qui n'a pris le titre de royal qu'avec le volume de 1699, présenté par son auteur au roi Louis XIV, suivant son désir. C'est ce qui résulte d'un Avis au Lecteur, dans le volume de 1780, où Laurent-Charles d'Houry annonce qu'il succède à son grand-père, à sa grand'mère et à son cousin Le Breton dans la propriété et la direction de cet Almanach. Brunet cite, dans son Manuel, les noms de plusieurs Almanachs antérieurs, en prévenant que sa liste est incomplète. C'est, en effet, un genre de littérature qui a dû un des premiers mettre en réquisition l'invention de l'imprimerie." G. G. On dit que l'abbé Roquette... (X, 225, 281). J'ajouterai, comme complément des réponses, un passage de l'excellente édition des Euvres de Boileau, donnée par Berriat de Saint-Prix (Paris, Philippe, 1837, 4 vol. in-8), où il a classé cette épigramme parmi les pièces attribuées à Boileau, mais auxquelles celui-ci lui a paru évidemment devoir être étranger. Elle est précédée de cette remarque: « ...Citée par Brat, éditeur de Molière, qui, n'étant point contemporain (il était né en 1717), ne peut faire autorité, et qui, d'ailleurs, renvoie à un ouvrage (Mémoires de Choisy, où l'on parle, il est vrai (II, 102), beaucoup 306 du prédicateur, mais nullement de l'épigramme. M. H. T. Sainte Joarra (X, 227, 282). Il y aurait à faire une petite Biographie des « personnages qui n'ont pas existé. » Sainte Joarra serait du nombre, car elle ne serait le résultat que d'une erreur de lecture. Entre les meneaux aveugles du mur qui fait face à l'autel de la chapelle Saint-Louis, dans le bas-côté gauche du chœur de NotreDame de Paris, M. Viollet-Leduc a fait peindre, sur ses dessins, quatre saintes. Les deux premières sont deux reines mérovingiennes, sainte Clotilde et sainte Radegonde. La troisième, S. ISABELLA, est en robe de Religieuse : c'est la Bienheureuse Isabelle, la propre sœur de saint Louis et la fondatrice de l'abbaye de Longchamps, où elle mourut en février 1269, après y avoir demeuré sans en être religieuse; la troisième abbesse, Agnès d'Harcourt, qui avait été à son service, en a écrit une Vie française que Du Cange a imprimée à la suite de son Joinville (Cf. l'abbé Lebeuf, éd. Cocheris, IV, 84-5). La quatrième sainte a l'inscription très-nette: S. IOANNA VALESIA REGINA; c'est la bienheureuse Jeanne de Valois, fille de Louis XI et première femme de Louis XII, qui fit déciarer son mariage nul en 1498; elle mourut en janvier 1505 à Bourges, où elle s'était retirée avec le titre de duchesse de Berry, dont elle ne se servit que pour faire le bien. Son effigie funéraire, longtemps conservée au couvent des Religieuses de l'Annonciade, fondé par elle, existe encore à la cathédrale de Bourges (Cf. Raynal, Hist. du Berry, III, liv. VIII, chap. 1er, 207-40). Comme on voit, la décoration de M.Viollet-Leduc est on ne peut plus juste et plus convenable. En face de la statue du seul roi de France qui ait été canonisé (saint Charlemagne aurait eu quelque peine à l'être), il a mis quatre saintes de la maison de France, dont trois ont été reines, et dont la quatrième était sa sœur. A. DE M. L.-F. Aubry, peintre (X, 227, 283). Cet élève de Vincent et d'Isabey s'est acquis une bonne réputation comme peintre en miniature; mais il doit s'incliner devant Isabey, l'illustre peintre des souverains de l'Europe, du Congrès de Vienne et de toutes les célébrités de son temps. Dessin plus sec que celui du maître, carnations moins rosées. Voir sur lui : Pasquino et Scapin au Muséum, 1804; Lettres impartiales sur les expositions de l'an XIII (1804). (Critique sévère.) — Annuaire hist. de Lesur, 1819, 1822, 1824, 1827. (Simples citations.) - Dictionn, des artistes de l'Ecole franç., de Cabet, Paris, 1831. Guide théor. et prat. de l'Ama 307 teur de tableaux, par Lejeune, Paris, 1863, 3 vol. - Notice des dessins, cartons, pastels, miniatures et émaux exposés... au Louvre par Fr. Reiset, Paris, 1869, 2o part. (Notice biographique.) Će dernier ouvrage est bien précieux pour les collectionneurs, et notamment pour ceux qui s'occupent de dessins, miniatures et émaux (émaux opaques, genre Petitot, et non pas émaux de Limoges). ALPH. M. Henri IV et le Canada (X, 228). Sans se mettre en grands frais d'érudition, c'està-dire en consultant de vieux atlas antérieurs à Henri IV, on constate que la désignation de Nouvelle-France donnée au Canada est plus ancienne que ce prince, comme le fait remarquer M. J. de M. Mais on y apprend aussi que ce n'est pas à Jacques Cartier que cette appellation est due: ce fut un Florentin, Jean Verazzani, qui, envoyé par François Ier pour trouver un passage par le nord de l'Amérique, aborda en 1525 sur cette côte, déjà reconnue en 1504 et 1508 par des pêcheurs bretons et dieppois, et lui donna le nom de NouvelleFrance. Verazzani fut mangé par les sauvages, et c'est pour tirer profit de la découverte de l'infortuné navigateur que Jacques Cartier fut envoyé dix ans plus tard. Qu'il me soit permis d'ajouter une seconde rectification à la phrase citée de M. A. Mazières : c'est que, sans faire tort au patriotisme d'Henri IV, il faut reconnaître qu'aucun autre roi de France n'a poussé plus loin que son petit-fils Louis XIV l'amour-propre, on pourrait même dire la susceptibilité nationale. - A. ST. - M. de M. a raison dans le 3e volume de sa collection de voyages, publiée en 1550-1559, Ramusio donne la «Prima relatione di Jaques Carthier della terra nuova detta la nuova Francia », relation qui fut traduite en anglais et imprimée à Londres en 1580 sous ce titre : « A short and briefe narration of the two Navigations and Discoveries to the Northweast partes culled Newe France. PIERRE CLAUER. Boulainvilliers (X, 229). M. Bernard de Boulainvilliers, gendre du comte de Boulainvilliers, avait formé une collection des ouvrages de son beau-père et des recueils de tout genre formés par lui, collection manuscrite pour la plus grande partie et qui passait pour complète. Elle fut cataloguée en 1756 par le libraire Barrois et acquise par Nouveau de Chennevières, conseiller au Parlement. La bibliothèque de celui-ci fut vendue du 21 février au 7 mars 1774 par les soins de Debure fils jeune; les manuscrits, réunis en un lot, 308 furent adjugés au prix de 28,000 livres; j'ignore le nom de l'acquéreur. Dans le catalogue Nouveau, je trouve seulement sous le numéro 766: « Journal de la vie de Saint Louis, Roi de France, neuvième du nom, par Antoine Aubery, avocat au Parlement. 2 vol. in-4. Mss. veau marbré, filets d'or. » Pas d'autre indication; mais il est probable qu'en tête de cette copie se trouvait la préface de Boulainvilliers. Le numéro précédent mérite aussi d'attirer l'attention; il avait pour titre : « Journal du règne des Rois de France, depuis l'an 1224 jusqu'en 1475, par M. le comte de Boulainvilliers, 12 vol. in-4. » Le catalogue ajoute: « Les deux premiers vol. manquent. » N'était-ce pas plutôt le Journal d'Aubery qui devait former les deux premiers volumes de ce recueil? La reliure indiquée est exactement la même. G. I. -(( Il serait Armes à feu, armes de lâches (X, 256). A l'appui des observations de M. Jacques D., je trouve l'opinion d'un maître d'armes du XVIIe siècle, Charles Besnard. Dans son livre : le Maistre d'armes libéral (Rennes, 1653, petit in-4o, fig.), il a consacré deux chapitres pour faire voir les inconvéniens du combat (duel) du Pistolet. » Dans le premier, il montre « comme le combat du pistolet préjudicie au Roy et à son Estat »; dans le second, « il se void que le démon est auteur du combat de pistolet. trop long d'analyser ces discours, dont le style diffus, et souvent quelque peu mystique, cache néanmoins des considérations judicieuses et quelquefois même très-élevées. En voici, à titre d'échantillon, un extrait caractéristique : « Ne m'avouera-ton pas que c'est une très-pernicieuse, meschante et malheureuse invention de combat qui apporte et qui apportera dans la France infinité de mal-heurs et désordres, et qui dépouillera le Roy (si Dieu ne luy fait la grâce d'y remédier) de toute l'adresse de ses sujets, en quoy consiste sa plus grande force et puissance, et avec laquelle tout un Estat s'est tousiours rendu rédoutable à toutes les autres nations estrangères, et principalement dans les batailles, lorsqu'ils alloient au combat contre elles, tant la cavalerie que les gens de pied, lesquels, après les premières décharges de leurs mousquets, donnoient teste baissée l'espée à la main, avec lesquelles ils faisoient littière des corps de leurs adversaires, qu'ils perçoient et abattoient en si grande quantité, qu'enfin rien ne leur pouvoit échapper ni résister à cette manière de combattre. Je croy que nos pistolettiers à pied n'auroient garde d'entreprendre de faire et remporter telles victoires avec leurs pistolets comme ont fait ceux-là avec leurs espées seules, lesquels avec icelles ont passé sur le ventre à un nombre infini 309 de mousquetaires et canonniers, et demeurez maistres du champ de bataille et de toutes leurs artilleries. » Ne peut-on pas dire, après cela, que notre grand état-major de 1870, qui accordait une si complète confiance à ses armes à feu perfectionnées, aurait gagné à s'inspirer des observations du pauvre maître d'armes breton? Faut-il rappeler que tous nos échecs, pendant la Guerre de Sept ans, furent dus à la même confiance malheureuse? Faut-il dire enfin que nous avons perdu la bataille décisive de Forbach et des trois journées devant Metz, parce que nous nous en sommes tenus aux feux derrière les tranchées-abris, tandis que les Allemands, avec leurs méchants fusils à aiguilles, se portaient constamment en avant « à la française »? A. ST. Il est Un huitain de l'an II (X, 257). dans l'Almanach des Muses de l'an III (1795), p. 182, mais sans nom d'auteur. En l'y cherchant, j'en ai trouvé un autre signé du C. Pillet, sous le titre d'Epigramme, à la page 162, qui a du rapport avec le premier : Plus Robespierre et ses deux Acolites, Tant les coquins me sembloient hypocrites. << Il est un Dieu!... vous aviez bien raison! »> Ce second huitain est une paraphrase, assez faible, du vers fameux de Claudien: Abstulit hunc tandem Rufini pœna tumultum Absolvitque Deos. (Enfin le châtiment de Rufin mit fin à ce trouble de mes pensées, et les dieux furent absous.) E.-G. P. « Nom La Sublime Porte (X, 257). officiel par lequel les Turcs Ottomans désignent la cour du sultan. Mostasem, dernier calife abbasside, avait fait, dit-on, enchâsser sur le seuil de la principale porte de son palais un morceau de la pierre noire vénérée dans la Caba: ce serait là l'origine du respect dont la Porte du souverain est l'objet. Il paraît cependant qu'au IVe siècle après J.-C. on appelait également Porte la cour du roi des Perses. Porte signifie aussi la résidence du vizir, où tous les bureaux sont rassemblés et où les autres ministres de la Turquie siégent dans le jour pour vaquer aux affaires de leur département. » (Dictionn, de biogr. et d'hist. de Dezobry et Bachelet, vo Porte.) Voir aussi le Bescherelle, même P. c. c.: РЕРН. mot. Voici ce que je lis dans le charmant volume de Charles Rozan, A travers les mots: 310 « Peut-être ne faut-il pas avoir parlé de l'oriental Divan sans rappeler ce qu'on raconte sur la Sublime Porte, nom officiel que les Turcs donnent à la Cour du Sultan et, par extension, à la résidence du Vizir, où se réunissent les ministres pour traiter les affaires de l'Etat. On raconte que le respect dont la Porte du souverain est devenue l'objet a pour cause un morceau de la pierre noire, que Mostazhem Billah, trente-septième et dernier Calife abbasside, aurait fait enchâsser sur le seuil de la principale porte du palais de Bagdad. Čette fameuse pierre noire, révérée par les musulmans au temple de la Mekke, la Kabba (ainsi nommée de sa forme cubique), est celle que la tradition dit avoir été envoyée par Dieu à Abraham, et être devenue noire, de blanche qu'elle était, par les péchés des hommes. Mais il est probable qu'on a pris la cause pour l'effet: un morceau de la pierre noire n'a été placé là sans doute au XIIIe siècle que parce que la Porte était depuis longtemps en honneur. Ce qui donne quelque poids à cette supposition, c'est que, bien des siècles auparavant, la Porte du Roi signifiait, en Asie, le Palais du Roi. Chez les anciens Perses, « les jeunes seigneurs, nous dit Bossuet, étaient élevés à la porte du roi, avec ses enfants. » Le mot porte a, dans les langues sémitiques, des acceptions analogues à celle de notre mot cour: il se dit d'un tribunal, d'un marché, d'un lieu public. Les deux mots jouent exactement le même rôle en ce qui touche le palais du souverain la cour du roi est, en Orient, la porte du roi. « Iris les trouva tous assemblés pour le conseil aux portes du palais de Priam. C'était la coutume des Orientaux. Les assemblées se tenaient aux portes de la ville ou aux portes du palais des rois. Les livres sacrés en fournissent mille exemples. De là est venue cette expression à la Porte, pour dire à la cour du Grand Seigneur.» (Madame Dacier. - Trad, de l'Iliade.) A. S. : - Je ne sais plus où j'ai puisé cette note que je reproduis, S. G.: « Mostasem, fils et successeur de Mostanser (1243-1258) et le dernier des califes abbassides, dynastie qui avait régné à Bagdad pendant 508 ans, ayant fait enchâsser sur le seuil de la principale porte de son palais un morceau de la célèbre pierre noire que les fidèles croyants adorent dans le temple de la Mecque, cette porte rendue vénérable devint la Porte par excellence, la Sublime Porte, et depuis cette dénomination s'est étendue à l'Empire des Ottomans, successeur de la puissance des Califes. » - A. D. La Porte Ottomane et la Cour Ottomane sont deux termes exactement synonymes, et dont le sens dérive de la même |