591 - Mgr Darboy, le spirituel inventeur du comparatif et du superlatif du mot lupus, a pu avoir connaissance d'un ouvrage, en 2 vol. in-8, publié à Bruxelles, en 1868, par Dom des Pilliers, sous ce titre : Les Bénédictins de la congrégation de France. Il a pu y voir (t. 1, p. 178) ce charmant lapsus calami: « Vous qui lisez assiduement l'Ecriture-Sainte, ignorez-vous ce précepte formel du Décalogue : « Non monachaberis. » OL. B. Langue carthaginoise (X, 418, 466, 552). - J'apporte peu de chose à l'auteur de la question; mais le mot punique indiqué ciaprès n'est pas douteux, puisqu'il se trouve dans le discours ou l'énarration de saint Augustin, évêque d'Hippone, sur le 123e psaume de David, au no 8. Voici le texte: « Primo quid est : forsitan pertran<< siit anima nostra? Quomodo potuerunt << enim, Latini expresserunt quod Græci « dicunt: apa. Sic enim græca habent << exemplaria apa; quia dubitantis verbum « est, expressum est quidem dubitationis « verbo, quod est fortassè. Sed non om« nino hoc est. Possumus illud verso dicere « minus quidam latino, sed apte ad intelligentias vestras. Quod Punici dicunt iar, « non lignum, sed quando dubitant hoc « Græci apa. » (Et que veut dire d'abord : « peut-être notre âme a-t-elle passé ? » Les traducteurs latins ont rendu, comme ils l'ont pu, le mot grec apa. En effet, les exemplaires grecs portent le mot apa, qui exprime le doute et que l'on a rendu par le mot fortassè, qui l'exprime également. Toutefois ces deux expressions ne sont pas identiques. Nous pouvons traduire le grec par un mot qui, à la vérité, n'est pas latin, mais qui est parfaitement à votre portée. Le mot punique iar, employé, non dans le sens de bois lignum), mais comme expression du doute, revient au mot grec apa.) De ce curieux passage, il résulte : 1o que le mot punique iar avait deux sens bien différents celui de bois et celui de peutêtre. 2° Que les habitants d'Hippone et des environs parlaient encore probablement et certainement comprenaient la langue punique. Une étude philologique trèsattentive du latin de S. Augustin, surtout dans les Enarrations sur les Psaumes, qui s'adressaient au peuple, ferait connaître, par analogie, quelque chose de la langue punique. En effet, il est impossible de n'y pas reconnaître une sorte de patois. A la suite du passage que j'ai cité, S. Augustin dit à ses auditeurs : «Putas evasi hoc?... « quod dixi Putas, usitato dicitur; latine << non ita dicitur. Et possumus illud dicere <«< cum tracto vobis, sæpe enim et verba <«< non latina dico, ut vos intelligatis. >> (Putas evasi hoc ? Pensez-vous, en suis-je 592 quitte?... L'expression Putas, que je viens de citer, bien qu'admise par l'usage, n'est pas latine. J'ai bien pu m'en servir en vous parlant; car souvent j'emploie des mots qui ne sont pas latins, pour être mieux compris de vous.) Je regrette de borner mes citations; mais il faudrait trop d'espace pour tout rappeler et donner le sens entier du discours de S. Augustin, et j'ai dû rapporter succinctement ce qui se rapporte à la langue punique. Ceux qui voudront se rendre un compte plus complet, pourront recourir aux œuvres de l'évêque d'Hippone, publiées par M. Vivès (t. XV, p. 60). E.-G. P. Le propriétaire du château d'Hénonville (X, 487). Gabriel Jérôme de Bullion, fils de Marie-Anne Rouillé de Meslay et de Charles Denys de Bullion, prévôt de la vicomté de Paris, gouverneur du Maine, du Perche, etc., porta le titre de comte d'Esclimont, nom d'une grande terre, située près de Rambouillet, qu'il habitait ordinairement, de préférence au beau château de Wideville, à quelques lieues de Maule, construit par son arrièregrand-père Claude de Bullion, surintendant des finances sous Louis XIII. - Le comte d'Esclimont, chevalier de Malte depuis son enfance, quitta la croix, devint colonel du régiment de Provence et prit ensuite la charge de prévôt de Paris, qu'il exerça de 1723 à 1755. A sa mort, Wideville passa à son frère Léon de Bullion, marquis de Bonnelles, qui le légua à sa sœur la duchesse d'Uzès. Il appartient actuellement à madame E. de Crussol d'Uzès, qui a fait magnifiquement restaurer le domaine de ses ancêtres. UN BIBLIOPHILE. Barbier, dans son Journal, consacre les lignes suivantes au comte d'Esclimont: « Il ne se contente pas d'être bailli d'épée, il veut aussi se mêler de la justice. Samedi, 30 janvier 1723, il a été reçu prévôt de Paris au Parlement, et M. le président de Lamoignon, avec 4 conseillers de grand'chambre, sont venus l'installer au Châtelet. A l'égard de la cérémonie, le président à 593 mortier, les 4 conseillers et le prévôt de Paris sont venus du Palais à pied àu Châtelet, et la marche était fermée par M. Le Brun, prévôt de l'Ile, à cheval, à la tête de la maréchaussée. Comme tous ces gens-là, dépendant du prévôt de Paris, il y avait nombre de personnes de distinction à sa réception, et il eut à dîner, ce jour-là, chez lui cent couverts. » Le château d'Hénonville est inconnu; quant à Wideville (sic) que le comte d'Esclimont n'habitait que rarement, c'est une belle construction près de Saint-Germain, au milieu d'un vaste parc, élevée en 1620, entourée de fossés pleins d'eau et défendue par des murs et des casemates encore en bon état. Le marquis de Galard en est propriétaire et y a réuni une curieuse collection de meubles rares et de tableaux du temps. Le rétable qui orne la chapelle est un magnifique ouvrage du XVe siècle, et les anciennes cheminées des grands appartements sont des chefs-d'œuvre de richesse et de goût. Les poutrelles des plafonds ont été en partie peintes par Simon Vouët. UN ANTIQUAIRE. L'Apôtre Jean Journet (X, 489, 541). La date de la mort de Jean Journet, donnée par Vapereau, est la bonne. Cette mort est très formellement annoncée dans la Revue anecdotique des excentricités contemporaines (Paris, 1861, no 20, p. 185). Jean Journet est décédé à Toulouse, en 1861, dans une maison de santé. Son fils, représentant de commerce, habite encore cette ville, et c'est ce dernier qui serait le père fécond dont plusieurs journaux ont parlé. Mais l'histoire de cette fécondité n'est qu'un canard, éclos dans les bureaux du Messager de Toulouse. Sur la foi d'un reporter trop crédule ou peut-être légèrement mystificateur, cette feuille est la première qui, dans sa chronique locale, ait raconté que madame Journet, femme du fils de Jean Journet, le fameux apôtre socialiste, avait accouché de cinq enfants. Le cas était rare et curieux. Il fit le tour de la presse de province. Seulement, en voyageant, il devint méconnaissable, si bien que l'Echo du Blanc attribua à Jean Journet, mort depuis quinze ans, ce que le Messager de Toulouse, probablement en veine de gaieté, avait, mais à tort, attribué à la bru du célèbre apôtre. Voilà le vrai mot d'une énigme qui a tant intrigué cer tains lecteurs de l'Intermediaire. FIRMIN BOISSIN. Que l'Europe nous envie (X, 513). Voilà longtemps, en effet, que ce joli cliché traîne dans les gazettes (vieux style). Il vient d'être appliqué avec une vérité comique dans la pièce nouvelle de T. Barrière, les Demoiselles de Montfermeil. Il est question de l'escalier de l'Opéra : « Ce 594 fameux escalier que toute l'Europe nous envie! » B. B. Ploratur lacrymis... (X, 513, 569). - On a traduit le vers aussi bien que Denys Challine, mais pas mieux Comme il est le plus ancien, il me semble mériter la palme. Je ne sais pas pourquoi l'abbé Goujet, Viollet-le-Duc, la Biographie Didot et Ce affectent tant de mépris pour la traduction de Challine, qui ne manque pas de verve et d'originalité. P. BLANCHEMAIN. La traduction la plus littérale est la 10° (Bouzique, 1854), mais je donne la préférence à la re (de Denys Challine, 1653). Dr NEPHÉTER. Pour bien juger la traduction en vers d'un passage, il faut commencer par le traduire en prose. Voici la traduction de Dussaulx : « Celles (les larmes) que l'or fait couler sont des larmes sincères. » Le sens général est exact; mais le mot amissa n'est pas rendu. Il fallait dire : celles que fait couler l'or perdu sont des larmes sincères. Mais j'aimerais encore mieux, en prose l'argent, la richesse ou le bien, parce que ces termes généraux rendent plus complétement l'idée de Juvénal. En vers, à cause des nécessités de la mesure et de la concision, j'admets sans difficulté le motor. Cela posé, je donnerais l'avan tage à la traduction de Silvecane (« ... Le bien que l'on perd sans art fait soupirer »), si soupirer équivalait au latin lacrymis. Soupirer ne dit pas assez, surtout si l'on se reporte au vers précédent, puisque Vexare oculos humore coacto (tourmenter les yeux par des larmes contraintes) supposait une douleur amère. Tout est rendu dans le vers de Denys Challine: «< L'argent perdu se pleure avec des pleurs sans feinte. » Mais les mots sans feinte me semblent inélégants. Il est fâcheux que la nécessité de la rime ne lui ait pas permis de dire des plus sincères. J'aime assez le vers de M. L. V. Raoul: « La perte de l'argent fait couler de vrais pleurs. » Mais je crois que sincères exprime mieux le contraste avec les pleurs contraints. Je ne suis donc parfaitement satisfait d'aucune de ces traductions. Mais, parmi les traductions citées, je donnerais le prix à celle de M. L. V. Raoul. Si H. Kerdaniel avait dit : « L'or perdu fait couler des larmes bien sincères, ou fort sincères», ce serait, à mon sens, la meilleure traduction. Au surplus, des goûts et des couleurs, on ne peut disputer. Ce qui plaît à l'oreille de l'un choque l'oreille de l'autre. C'est affaire de sentiment plutôt que de règle. J'accepte donc d'avance toute sentence différente de la mienne, si la traduction préférée rend, non-seulement le 595 sens général de l'auteur, mais tous les mots E.-G. P. du texte latin. Un mot de l'Ecriture (X, 513, 570). La comparaison ultra-réaliste du chien qui revient à son vomissement se trouve deux fois dans la Bible. Prov. ch. 26, v. 11: «< Sicut canis qui revertitur ad suum vomitum; et épître de St Pierre, 2, 21: « Canis reversus ad suum vomitum. » Les gueux du XVIe siècle, qui étaient, comme bons protestants, ferrés sur l'Ecriture, répondaient aux avances de Philippe II par cette gracieuse image, gravée sur leurs médailles. Ce fut un de mes ancêtres, graveur de la Monnaie de Dordrecht, qui exécuta cette médaille, dont un exemplaire en or est conservé dans ma famille. Baron P. I. O. T. DE Vorst. Madame de Montespan à Saumur (X, 517). La maison qu'habita souvent, après sa disgrâce, Mme de Montespan, s'appelle le Jagueneau. Elle joint l'enclos de la Providence et est proche de l'église de Notre-Dame des Ardilliers, construite, ou plutôt reconstruite, pour les Oratoriens, dont le P. de Sainte-Marthe était le supérieur, par le célèbre architecte et sculpteur Pierre Biardeau. (Voir ce nom dans le Diction. hist. de Maine-et-Loire, par Célestin Port, t. I, p. 341.) Mme de Montespan avait sa sœur, abbesse de Fontevrault, près Saumur. Elle a laissé des témoignages de sa dévotion en Anjou : ainsi dans l'église de Beaufort, on voit encore un tableau de l'Annonciation aux armes des Rochechouart, dû à un peintre beaufortais, et où Mme de Montespan a posé pour représenter la Vierge Marie! (Voir Monographie de Notre-Dame de Beaufort, par M. Joseph Denais, p. 214; voir aussi Bodin: Recherches sur Saumur et le haut Anjou, et presque toutes les histoires locales.) UN BIBLIOPHILE ANGEVIN. Mac Mahon (X, 533,etc.). - A une citation par à peu près, je substitue un texte précis: Cette auberge est à mon gré : C'est ce que répond, avec une persistance désolante, Jean de Paris, sommé par l'hôtelier de céder la place à la princesse de Navarre, pour qui le Sénéchal à retenu les locaux où le prétendu bourgeois s'est installé. (Jean de Paris, opéra-comique de Saint-Just pour les paroles, et de Boïeldieu pour la musique.) (Nimes.) CH. L. 596 question de mon excellent ami T. de L· Les trois quatrains sur (ou plutôt contre) la Sepmaine de Du Bartas, ainsi que la chanson faite par Lancelot Carles (et non Carses), evesque de Riès, etc., ont été imprimés: 1o dans les œuvres inédites de Ronsard (Paris, Aubry, 1855, pet. in-8o), pages 158 et 168; 2° dans les œuvres de Ronsard (Paris: Jannet, Pagnerre et Franck, 18..-1867, 8 vol. in-16), t. VIII, pages 130 et 133. Je n'ai d'autre raison pour les attribuer à Ronsard, etc., que l'autorité du manuscrit de la Bibliothèque nationale, qui portait alors le no 7653. 3. 3. A. Les trois quatrains sur Du Bartas, étant satiriques, n'ont aucun rapport avec les vers élogieux qui précèdent les œuvres du poëte gascon, jeune alors, et, de plus, protestant, dont Ronsard, vieux et catholique, ne voyait pas sans dépit la gloire naissante. PROSPER BLANCHEMAIN. -Les trois quatrains de Ronsard, de Baïf et de Du Perron (no 60) et la chanson (no 68) sont connus et imprimés dans les œuvres de Ronsard, édition Blanchemain, t. VIII, p. 131 et 133. Ces quatrains, loin d'être en l'honneur de Du Bartas, sont au contraire des épigrammes; comme il est facile de se les procurer, je ne les reproduis pas. - Je signalerai à T. de L. deux autres pièces de vers contre Du Bartas, adressées par Ronsard à Jean d'Aurat, son maître, et qui se trouvent, t. V, p. 348 et 349 de la même édition. A. D. Ci-gît ma femme... (X, 547). — Est-ce le doute, ne serait-ce pas plutôt l'attribution, qu'il s'agirait de justifier? Elle est de tradition, et elle est vraisemblable: c'est, je crois, tout ce qu'on en peut dire. Du Lorens, dans une de ses satires, se plaint trèsamèrement de l'humeur tracassière de sa femme, tout en concluant par ce mot, qui est d'un bon homme: Mais, néanmoins, que le mal que je lui veux [m'advienne. G. I. C'est la tradition seule qui attribue à Jacques du Lorens la fameuse épitaphe. Est-elle bien de lui? Quoique Normand, je n'ose pas même dire: : — « J'en jurerais; mais je ne le parierais point! » Au reste, les Satyres du Président du Chasteauneuf ne manquent point de vers parfaitement frappés. Lisez seulement trente vers de la première satyre de 1646 jusqu'à ce vers: Gardez-vous bien de lui, les jours qu'il com[munie! et vous me direz s'il n'avait pas deviné le Tartuffe. Quant au caractère de Geneviève Langlois, sa femme, peut-être n'était-il pas aussi mauvais qu'on l'a dit. Du Lorens était hargneux, tracassier, processif, et sa vertueuse moitié n'était peut 597 être qu'une femme de tête, qui refrénait les humeurs de son époux. Celui-ci l'aimait, au fond, et laisse échapper cet aveu: La femme que j'ai prise est une des meilleures. Puisque je suis en train de parler de Du Lorens, il sera peut-être opportun de mentionner ici quelques rectifications à la bibliographie de ses Satyres, un peu confuse dans le Manuel du Libraire. Les trois recueils qu'il a publiés en ce genre sont: 1o Les Satyres du sr Du Lorens, divisées en deux livres (Paris, J. Villery, 1624, in-8° de 4 et 203 pages). Le premier livre contient XI Satires, le 2o XIV. 2o Les Satyres du sr Du Laurens. Difficile est satyram non scribere (Paris, Gervais-Alliot, 1633, in-8°). Ce volume qui contient XVI Satyres diffère entièrement du précédent; il a été réimprimé en 1868, petit in-8°, à Genève, chez Gay, avec une notice de ma façon et tiré à 100 exemplaires. 3o Les Satyres de M. Dulorens, président de Chasteauneuf (Paris, A. de Sommaville, 1646, in-4° de 8 et 206 pages). Ce volume contient XXVII Satyres, dont une seule, la XIX, a été empruntée en partie à la 10e du livre II de 1624. Il a été réimprimé en 1869, par Jouaust (Paris, un vol. pet. in-8° de 18 et 236 pages, avec un portrait de l'auteur), précédé d'une notice littéraire, par Eug. Villemin. Je ne voudrais pas abuser de l'espace qui m'est accordé, en allongeant outre mesure cette bibliographie qui n'est pas encore complète; mais je tiens à dire combien je suis à la fois confus et fier des compliments immérités que m'adresse M. de Montardif. Je me mets en même temps à sa disposition, pour lui fournir, sur Jacques Du Lorens, tous les renseignements biographiques et bibliographiques que j'ai pu recueillir. PROSPER BLANCHEMAIN. (Ch. de Longefont, par S.-Gaultier, Indre.) Zuentebold, roi de Lorraine (X, 548).Feu Digot (Hist. de Lorr., 1856, 1,151-153) prétend que le nom barbare de ce prince vient d'un roi de Moravie, qui lui avait servi de parrain. A. B. - « Ce prince avoit reçu, au Baptême, ce nom barbare de Zuende bolde, par un roi de Moravie de même nom, que le Roy Arnoû lui avoit donné pour parrein (colonne 803 du t. Ier de l'« Histoire ecclésiastique et civile de Lorraine » (Nancy, 1728, 3 vol. in-fol.). - Dom Calmet consacre les colonnes 803-808 de ce t. I à Zuendebolde, qu'il nomme encore Zuintebole, Zuentibule, Zuentibold et Zuendebold. Voyez 1o Les preuves du même tome, col. 325-329; 20 Mabillon, De re Diplom., 1. 5, p. 412, 2e édit., et t. III Annales Bened., p. 296 et 300; 30 la 2e édition de l'Histoire ecclésiastique et civile de Lorraine... (1745-57, 7 vol. infol.). H. I. 599 2o édit.). Après avoir expliqué, avec des développements trop considérables pour être reproduits dans cette réponse, comment, dans l'origine, le fou qui occupait le coin de l'échiquier, sous le nom de navire (Roka), prit à la fois la place et le nom de I'Eléphant, tandis que l'ancien Eléphant, sous le nom de Roka, occupa le coin qu'avait quitté le fou actuel, l'auteur explique comment le fou, ayant perdu le nom de Roka, fut nommé Hasti (Eléphant), parce qu'il avait pris la place de l'Eléphant dans le jeu; comment les Persans traduisirent le nom sanscrit Hasti en Fil, en y joignant le préfix al (alfil- le fil), comment enfin ce mot fil ou alfil devint alfiere en Italie, puis Alfilus, Aufin, Alfy, fil et enfin fol, origine du mot actuel fou. Il ajoute que chez plusieurs nations du Nord, on l'a nommé Bishop, Biseup (évêque), et qu'on l'a représenté avec une mitre. Or, cette mitre, étant cornue, a une ressemblance lointaine avec la fleur de lis. Dans des armoiries figurées par M. de Basterot, on trouve le roc, c'est-à-dire le fou, tant sous cette forme que sous une autre, assez proche de la première. La première forme est celle des armes de la famille Chabert (France); la 2e des armes de sir R. Walter (Angleterre). Voilà, si je ne me trompe, le fou en forme de fleur de lis, de M. K. P. Du Roch III. Mais quant à l'époque où ce roc aurait pris la forme actuelle du fou dans nos jeux d'échecs, il est assez difficile de la déterminer. Ce fou mitré est actuellement représenté par la tour, qui y ressemble beaucoup, et il me paraît douteux que, du moins chez nous, cette pièce ait représenté celle que nous appelons le fou. (Voir, dans l'ouvrage de M. de Basterot, différentes figures de vieux jeux d'échecs; dans l'un le fou est un éléphant qui porte deux cornes; dans l'autre, il est un évêque en pied et non-seulement une mitre; de plus, la mitre de l'évêque n'est pas cornue). Quant à la forme cornue qui a été donnée à la mitre représentant le fou aux échecs, M. de Basterot l'explique par ce fait que le roc dont le fou portait primitivement le nom était, soit l'oiseau gigantesque dont il est si souvent question dans les Mille et une Nuits, soit un animal fabuleux à deux têtes. E.-G. P. -- Sur un passage de Saint-Simon (X, 551). Voici ce que Elisabeth-Charlotte, duchesse d'Orléans, dit de Catherine-Henriette Bellier, femme de Pierre de Beauvais, dite Cateau la Borgnesse : « J'ai en« core vu la première femme de chambre « de la reine-mère, la Beauvais, cette créa« ture borgne qui a appris au roi à cou« cher chez les femmes. C'est un art qu'elle << connaissait bien, car elle a mené une « vie déréglée..... » Elle en parle encore, à l'occasion du prétendu mariage d'Anne 600 d'Autriche avec Mazarin. Consulter aussi Bussy-Rabutin (Hist. amoureuse des Gaules) et les notes de l'édition elzévirienne. Le cardinal de Retz et l'abbé de Choisy constatent son influence auprès de Louis XIV, mais sans faire allusion à la cause indiquée par Saint-Simon. On sait, du reste, que ce rôle d'institutrice, ou plutôt d'initiatrice, lui valut de grandes faveurs de son royal élève. A. D. Tabarin (X, 551). — Jal, loin de prouver que Mondor et Tabarin étaient frères, établit, au contraire, que le premier s'appelait Philippe Girard et le second Jean Salomon, tout en constatant que Mondor avait pour frère Antoine Girard, maîtreopérateur et mari de Vittoria Bianca, dite Victoire Blanche et Victore Bianche ou Biancque. Jean Salomon et Antoine Girard ne sauraient être le même homme. Pour donner à Tabarin le nom de Salomon, Jal s'appuie sur celui de la femme de Hugues Guéret (Gaultier-Garguille), gendre de Tabarin, laquelle, d'après trois actes de naissance de ses enfants, s'appelait Aliénor ou Eléonore Salomon ; le premier né eut pour marraine, suivant l'usage, Victore Biancque, femme d'Antoine Girard, sa grand'mère, mais cette parenté n'est pas indiquée dans l'acte. Pour concilier ces contradictions, il faut donc admettre que Vittoria Bianca était veuve de Jean Salomon quand elle a épousé Antoine Girard, et que la femme de Gaultier-Garguille était issue de son premier mariage. Alors tout se concilie, tout s'explique, mais cela résulte d'une hypothèse, très-admissible, il est vrai, et non pas des découvertes de Jal, qui ne cite aucune preuve, aucun indice même, des deux mariages de V. Bianca. Une autre conséquence de cette hypothèse est de nous donner, à la date du 29 novembre 1626, l'acte de décès d'Antoine Girard (Tabarin), sur la mort duquel on avait inventé une histoire d'assassinat. Quant à la paternité des différents opuscules publiés sous le nom de Tabarin, elle me paraît impossible à établir. Je crois, comme J. A., qu'on peut attribuer à Tabarin l'Inventaire universel (avril 1622), dont l'épistre dédicatoire à M. De Mondor est signée A. G.; mais, dans l'avis aux lecteurs, l'imprimeur proteste contre l'attribution faite à Tabarin du Recueil Général (mars 1622): « Je sçay bien qu'on « vous a desjà présenté quelque chose de «ses Questions et Demandes; mais, comme << elles ne sont pas toutes espreintes ni << tirées des conceptions de Tabarin, aussi « sont-elles d'autant plus inférieures aux « Fantaisies que je vous offre... >> Comment admettre, en effet, que Tabarin aurait fait paraître deux recueils presque identiques à moins d'un mois d'intervalle ? Le premier doit avoir été publié par un |