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les peuples dont il parle. Ce n'est que par la ressemblance des noms des lieux que nous connaissons, avec les noms des peuples qu'il cite, et par quelques inductions et quelques rapprochemens plus ou moins heureux, qu'en général on a désigné les endroits que tels ou tels peuples habitaient. Ainsi Vannes indique le pays des Venettes, Nantes celui des Nannettes, Rennes celui des Rennois, etc.

Le mot Abrincatui, qui désignerait fort bien les habitans de l'Avranchin, ne se trouve pas dans les Commentaires de César. Je l'ai inutilement cherché aussi dans l'Histoire des Gaulois par M. Thierry, et dans le premier volume de l'Histoire de France par Anquetil, en entier consacré aux Gaulois. Je ne crois pas même avoir vu, dans ces deux derniers auteurs, le nom d'Ambiliates.

Pline l'Ancien, qui écrivait environ cent ans après César, semble être le premier qui parle des Abrincatui. Dans l'énumération qu'il fait des peuples qui habitaient la Gaule Lyonnaise, il dit : « Lugdonensis Gallia habet Lexovios, » Velocasses, Calettas, Venetos, Abrincatuos, Ossimios, etc. »

Si Ambiliates était le nom des peuples qui habitaient l'Avranchin au temps de César, ils avaient donc changé de nom du temps de Pline '?

M. Lefranc, de Coutances, qui a fait un mémoire historique sur le camp de Sabinus et sur les peuples que ce lieutenant de César eut à combattre (mémoire que j'ai entre les mains), et dont le but est de prouver que ce camp était

'M. de La Fontenelle de Vaudori établit, dans ses Recherches sur les peuples qui habitaient le nord de l'ancien Poitou (les bords de la Loire et de la mer), que les Ambiliates (Ambiliatri) habitaient le Bas-Poitou. Son autorité principale est ce même Pline, et il argumente fortement pour réfuter tous les historiens d'une opinion contraire.

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dans la commune de Champrépus, recherche avec beaucoup de soin quel pays habitaient les Unelliens, ce qu'il lui importe de trouver, puisque César dit, dans ses Commentaires, que Sabinus vint camper in fines Unellorum, sur les confins des Unelliens; et il ne peut le trouver d'une manière positive, quelque peine qu'il se soit donnée. Il croit cependant, après beaucoup de raisonnemens et de rapprochemens, que le pays des Unelliens était le Cotentin, opinion assez généralement reçue ce fait d'ailleurs lui convient beaucoup, dans la conviction où il est que Champrépus est le lieu où Sabinus avait placé son camp; et encore son principal argument, pour affirmer que là étaient les Unelliens, est l'existence de ce camp qu'il croit fermement trouver là. Ainsi son argumentation est à peu près celle-ci : Le pays des Unelliens est dans le Cotentin, parce que le camp de Sabinus était évidemment à Champrépus.

Mais si rien n'est moins prouvé que l'existence d'un camp romain à Champrépus, ainsi que nous essaierons de le dél'omontrer lorsque nous parlerons du canton de Villedieu, pinion de M. Lefranc, relativement au pays qu'habitaient les Unelliens, perdrait beaucoup de son autorité et se réduirait à une simple conjecture, qui peut n'être pas mieux fondée que celle de Ortellius et de plusieurs autres auteurs, qui les mettent dans l'Anjou, entre le Maine et la Touraine; que celle de Robert Cenalis, évêque d'Avranches, qui les place dans le Perche; que celle de M. Roujoux, auteur d'une moderne histoire des ducs de Bretagne, qui les croit dans le pays de Dinan; que celle enfin de M. Daru, qui les fait habitans de Quimper.

Mais quand il serait vrai que les Unelliens fussent habitans du Cotentin, cela ne nous dit pas quels étaient ceux de l'Avranchin, qui était évidemment une contrée distincte et indépendante, partagée du Cotentin très-vraisem

blablement par le cours de la petite rivière du Thar, qui fixe aussi les limites des évêchés de Coutances et d'Avranches, parce que lorsque la religion chrétienne s'établit dans les Gaules, elle adopta les divisions que les Romains avaient données au territoire.

N'ayant donc rien de certain à dire sur ce qu'étaient Avranches et l'Avranchin lors de la conquête de César et antérieurement, je m'abstiendrai de parler de ces temps reculés.

Mais que fut ce pays sous l'empire romain, qui le posséda jusqu'en 420, époque où les Francs s'y établirent définitivement sous Pharamond, leur premier roi'?

M. de Gerville dit, dans les Mémoires de la Société des Antiquaires de Normandie : « Si nous avions à nous occuper » des temps romains, il me serait facile de prouver que, sous l'empire, Avranches fut une station militaire assez consi» dérable, puisque c'était la résidence du commandant des › auxiliaires Dalmates. Præfectus militum Dalmatorum Abrin» catis. »

»

Il indique qu'il a puisé ce renseignement dans Pline le Naturaliste, et dans D. Bouquet.

M. Licquet dit aussi qu'il y avait une garnison romaine à Avranches; il dit également que la Seconde Lyonnaise, comprise dans les limites données depuis à l'ancienne province de Normandie, comptait, sous l'empereur Honorius (qui commença son règne en 395 et le finit en 423), sept cités,

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Grégoire de Tours, et M. Auguste Le Prévost, pensent que c'est à l'année 471 que l'on doit rapporter l'expulsion complète des Romains du pays des Gaules. Rigoureusement, on pourrait la fixer en 476, puisque Augustule, dernier empereur romain, régna jusqu'à cette époque; mais, depuis long-temps déjà, les barbares étaient devenus maîtres de presque toutes les provinces d'occident.

c'est-à-dire sept agglomérations de peuples indépendans les uns des autres ; savoir :

La cité des Vélocasses, dont Rothomagus ou Rouen était la capitale ;

Celle des Baiocasses, capitale Bayeux;

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Il paraît donc vrai qu'Avranches était, sous l'empire romain, un point assez important, puisqu'il était une des sept cités de la Seconde Lyonnaise?

Caen n'existait pas encore.

Voilà tout ce que je dirai de ces temps si reculés, parce que voilà tout ce que j'en sais, et, je pense, tout ce que l'on peut dire de raisonnable sur notre pays, sans annales avant les Commentaires de César, et qui tient une trèspetite place dans toutes les histoires de la Gaule.

Ceci soit dit sans blesser le savant auteur qui vient de publier une Histoire du Mont St-Michel et de l'ancien diocèse d'Avranches, dans laquelle on voit que les anciens habitans de ce pays étaient Celtes; qu'ils s'établirent dans cette contrée peu de siècles après le déluge; qu'ils ne sont peut-être pas étrangers à ces bataillons qui, du temps de la guerre de Troie, 1270 ans avant J.-C., partirent de nos provinces pour défendre la ville de Priam, et que, n'ayant pu la sauver, ils reçurent dans leurs rangs les Troyens fugitifs, et les ramenèrent dans les Gaules; que, vers 624 ans avant J.-C., les barbares du Tanaïs, poussés par les Scythes, s'incorporèrent de force à ceux des côtes de l'Avranchin, ce que l'on peut regarder comme vraisemblable, puisque nous avons une com

mune qui s'appelle Tanis, et un fief qui porte le nom de Tanet'.

Cet auteur, emporté par l'amour de son pays et son désir de lui donner de l'importance, va jusqu'à soutenir que le pays des Venettes n'était point Vannes, mais Vains, et que Saint-Léonard en était la capitale; que Gisors, Genêts, Dragey, Tombelène, Saint-Jean-leThomas, Carolles et Champeaux étaient autant de villes, que César appelle Oppida.

Mais il me semble que l'historien oublie qu'à cette époque le pays de Vains devait être à plusieurs lieues loin de l'Océan, ou plutôt n'existait pas encore, puisque la baie du Mont St-Michel n'était alors qu'une forêt qui s'étendait jusqu'à l'île de Jersey. L'irruption qui séparé cette île du continent n'eut lieu que plusieurs siècles après la conquête.

Comment croire aussi que les Romains aient entassé huit villes ou ports sur un terrain dont les extrémités n'étaient pas à quatre lieues l'une de l'autre ?

Le même auteur dit aussi que les Vénitiens d'Italie sont un peuple d'origine avranchinaise, apparemment parce que ce mot Vénitien a quelque analogie avec Vains, car il n'appuie cette assertion d'aucune preuve.

Nous ne pouvons croire à toutes ces belles choses, que rien ne nous paraît justifier, et qui n'ont d'autre but que de donner de la célébrité à un pays qui, il faut le dire franchement, en a peu. M. l'abbé Desroches nous paraît s'être rangé dans le nombre des braves gens dont parle M. Depping dans son introduction à l'histoire de Normandie par M. Licquet. Il dit, à l'occasion d'un académicien qui avait › proposé d'écrire l'histoire de Normandie, à compter de l'époque de la conquête par Jules-César : « qu'il ne conçoit pas une histoire de Normandie au temps de Jules-César ; mais qu'on doit tenir compte › à l'académicien de ne remonter que là, en considérant que de › braves gens ont entrepris d'écrire nos annales à partir du déluge. Scaliger disait, il y a plus de 300 ans, en parlant de ce goût pour lęs rapprochemens de nom :

• Ubi blanditur aliqua similitudo nominum, statim sine delectu, de › re proposità pronunciare, hoc est divinare, ac fortassé deliraro. ■

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