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«< nemi de tous côtés, on les voit, au moindre signal, « faire tous les mouvements et toutes les évolutions de «l'art militaire. Et, afin que vous ne croyiez pas que « ce soit l'or ou l'argent qui les mène1, cette discipline « jusqu'ici n'a subsisté qu'à l'aide et par les leçons de « la pauvreté. Ont - ils faim, toute nourriture leur est <«<bonne. Sont-ils fatigués, ils couchent sur la terre, et a jamais le jour ne les trouve que debout. Pensez-vous que la cavalerie thessalienne, et celle des Acarna« niens et des Étoliens, peuples invincibles, armés de « toutes pièces, soient gens à être repoussés à coups a de frondes et avec des bâtons brûlés par le bout? « Il faut des forces pareilles aux leurs pour les arrêter; « et c'est dans leurs pays qu'il faut chercher du secours <«< contre eux. Faites-y passer tout cet or et cet argent « inutile que je vois ici, et achetez-en de bonnes troupes.» Darius était par lui-même d'un caractère doux et traitable 2. Mais quel naturel la fortune ne corromptelle point? Il y a peu de rois assez fermes et assez courageux pour résister à leur propre puissance, pour rejeter la flatterie de tant de gens qui excitent toutes leurs passions, et pour faire cas d'un homme qui les aime assez pour les contredire et leur déplaire en leur représentant la vérité. Darius, ne pouvant la souffrir, fait traîner au supplice un homme qui s'était mis sous sa protection, qui était devenu son hôte, et qui lui donnait alors le meilleur conseil qu'il eût pu prendre. Charidème, ne rabattant rien pour cela de sa liberté

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accoutumée, s'écria : « J'ai un vengeur tout prêt dans << la personne de celui-là même contre qui je vous ai «< donné conseil, qui vous punira bientôt du mépris <«< que vous en faites. Pour vous, en qui la puissance « souveraine a fait un si prompt changement, vous << apprendrez à la postérité que, quand les hommes << s'abandonnent une fois à la fortune, elle étouffe en <<< eux toutes les bonnes semences de la nature. » Darius se repentit bientôt d'avoir fait mourir un tel homme, et reconnut, mais trop tard, la vérité de tout ce qu'il lui avait dit.

Le roi fit avancer ses troupes vers l'Euphrate. C'était une ancienne coutume des Perses, de ne faire marcher leur armée qu'après que le soleil était levé; et alors on donnait, de la tente du roi, le signal avec la trompette. Au-dessus de cette tente on exposait à la vue de tout le monde l'image du soleil enchâssée dans du cristal. Voici en quel ordre ils marchaient.

Premièrement on portait des autels d'argent, sur lesquels il y avait du feu qu'ils appelaient éternel et sacré; et les mages suivaient, chantant des hymnes à la façon du pays. Ils étaient accompagnés de trois cent soixante-cinq jeunes garçons, selon le nombre des jours de l'année, vêtus de robes de pourpre. Après venait un char consacré à Jupiter 2, traîné par des chevaux blancs, et suivi d'un coursier d'une grandeur extraordinaire qu'ils appelaient le cheval du soleil; et

1 « Tu quidem, licentiâ regni subitò mutatus documentum eris posteris, homines, quum se permisere fortunæ, etiam naturam dediscere, » (Q. CURT.)

2 Jupiter était un dieu inconnu aux Perses. Quinte-Curce appelle ainsi apparemment le premier et le plus grand de leurs dieux.

les écuyers étaient habillés de blanc, avec une baguette d'or à la main.'

Dix chariots ornés de gravures d'or et d'argent suivaient; puis marchait un corps de cavalerie, tiré de douze nations différentes d'armes et de mœurs; ensuite ceux que les Perses appellent immortels, au nombre de dix mille, passant en somptuosité tout le reste des Barbares. Ils avaient des colliers d'or, des robes de drap d'or frisé, avec des casaques à manches ornées de pierreries.

A trente pas de là suivaient ceux qu'ils appellent les cousins ou parents du roi 1, jusqu'au nombre de quinze mille, parés à peu près comme des femmes, et plus remarquables par le luxe des habits que par l'éclat des

armes.

Ceux qu'ils appelaient les doryphores 2 venaient après; ils portaient le manteau du roi et marchaient devant son char, dans lequel il paraissait assis comme sur un trône élevé. Ce char était enrichi, des deux côtés, d'images de dieux d'or et d'argent; et du milieu du joug, qui était tout semé de pierreries, s'élevaient deux statues de la hauteur d'une coudée, dont l'une représentait la Guerre, et l'autre la Paix 3, avec un aigle d'or entre deux, qui déployait les ailes comme pour prendre son vol.

Mais rien n'égalait la magnificence du roi. Il était vêtu d'une casaque de pourpre rayée d'argent; et pardessus il avait une longue robe, toute brillante d'or et

'C'était un titre de dignité; il pouvait s'y trouver un grand nombre des parents du roi,

C'étaient des gardes qui por

taient des demi-piques.

3 D'autres éditions de QuinteCurce portent Ninus et Bélus.

de pierreries, où deux éperviers semblaient fondre des nues et s'entre-becqueter. Il portait une ceinture d'or à la façon des femmes, d'où pendait son cimeterre qui avait un fourreau tout couvert de pierres précieuses. Il avait sur la tête une tiare', ceinte d'un bandeau de couleur bleue mêlée de blanc.

A ses côtés marchaient deux cents de ses plus proches parents; et dix mille piquiers le suivaient, ayant leurs piques enrichies d'argent, avec la pointe garnie d'or; et enfin trente mille hommes de pied, qui faisaient l'arrière - garde. Ils étaient suivis des chevaux du roi, au nombre de quatre cents, qu'on menait à la main.

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A cent ou six-vingts pas de là, venaient Sysigambis mère de Darius, sur un char, et sa femme sur un autre, et toutes les femmes des deux reines suivaient à cheval. y avait ensuite quinze grands chariots où étaient les enfants du roi et ceux qui avaient soin de leur éducation, avec une troupe d'eunuques qui ne sont pas en petite considération parmi ces peuples. Puis marchaient les concubines, jusqu'au nombre de trois cent soixante, en équipage de reines, suivies de six cents mulets et de trois cents chameaux qui portaient l'argent du roi et qui étaient escortés d'une nombreuse garde d'archers.

Après venaient les femmes des officiers de la couronne et des plus grands seigneurs de la cour; puis les vivandiers et les valets d'armée, montés aussi sur des chariots.

A la queue étaient quelques compagnies armées à la légère, avec leurs chefs, qui fermaient toute la marche.

1 Cidaris.

Ne croirait-on pas que c'est ici une description de tournoi, et non d'une marche d'armée ? Conçoit - on que des princes sensés aient été capables d'une telle folie, de mener avec leurs troupes un attirail si incommode de femmes, de princesses, de concubines, d'eunuques, de serviteurs et de servantes? La coutume du pays l'exigeait, c'en était assez. Darius à la tête de six cent mille hommes, et au milieu de ce superbe appareil, qui était pour lui seul, se jugeait grand, et enflait par toute cette vaine pompe extérieure l'idée qu'il avait de lui-même. Réduit à sa juste mesure et à son mérite personnel, qu'il était petit! Il n'est pas le seul qui ait pensé de la sorte, et de qui l'on puisse porter le même jugement. Mais il est temps de mettre aux mains les deux rois.

§V.
§ V. Célèbre victoire remportée par Alexandre
sur Darius, près de la ville d'Issus. Suites de

cette victoire.

Pour bien entendre ici la marche d'Alexandre et celle de Darius, et pour mieux fixer la situation du lieu où se donna la seconde bataille, il est nécessaire de distinguer trois défilés ou trois passages, que j'appellerai quelquefois du nom de pas. Le premier défilé se rencontre d'abord en descendant du mont Taurus pour aller à la ville de Tarse, par lequel nous avons vu qu'Alexandre passa de Cappadoce en Cilicie. Le second est le pas de Cilicie ou de Syrie, par lequel on entre de la Cilicie dans la Syrie. Le troisième est le pas Amanique, ainsi appelé du mont Amanus. Ce dé

AN. M. 3671.
Diod. 1. 17,
P-512-518.

Av. J.C. 333.

Arrian. 1. 2,

plat. in Alex. p. 675,676.

66-8.

Q. Curt. 1.3, cap. 4-12. Justin. 1. 11,

cap. 9 et 19.

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