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d'un concert unanime ils proclamèrent Serv. Sulpicius Galba empereur. Mais il ne voulut point s'attribuer de son autorité propre le caractère de la souveraine puissance, et il se contenta du titre modeste de lieutenant du sénat et du peuple romain. Il paroît par Dion Cassius que cette déclaration de Serv. Sulpicius Galba, se fit le 3 avril, l'an de Rome 818, et de l'ère chrétienne 68.

Il prit ensuite les arrange mens convenables à la démarche qu'il venoit de faire. Il leva des milices dans les provinces; il composa comme un sénat de tout ce qu'il avoit autour de lui de personnes plus recommandables par leur rang, par leur prudence, et par leur âge, et il se forma une garde de jeunes chevaliers romains.

La révolte de Serv. Sulpicius Galba fut un coup de foudre pour Néron. Il avoit été insensible à celle de C. Julius Vindex, et il en avoit reçu la nouvelle à Naples avec tant d'indifférence et de sécurité, que l'on crut même qu'il en étoit bien aise, et qu'il se félicitoit intérieurement d'avoir acquis un prétexte de piller par le droit de la guerre les riches provinces des Gaules: il n'en fut pas de même lorsqu'il apprit le soulèvement de Serv. Sulpicius Galba. Sa réputation étoit telle, que dès que Néron le sut déclaré contre lui, il se crut perdu. Il en reçut la nouvelle pendant son repas, et sur-le-champ il renversa la table Tome XXXVII.

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d'un coup de pied et brisa deux vases de cristal d'un trèsgrand prix. Ayant bientôt fait déclarer Serv. Sulpicius Galba ennemi public par le sénat, il confisqua et exposa en vente les biens qu'il avoit à Rome et en Italie. Serv. Sulpicius Galba usa de représailles, et fit vendre les domaines de Néron en Espagne, pour lesquels il se présenta une foule d'acheteurs.

Après la mort de C. Julius Vindex, qui se tua lui-même de désespoir d'avoir été défait, Serv. Sulpicius Galba tomba dans une étrange perplexité.Déjà la moitié de sa cavalerie avoit témoigné vouloir l'abandonner, et ne s'étoit laissé persuader qu'à grand' peine de lui demeurer fidele. Il avoit de plus couru risque d'être assassiné par des esclaves, qu'introduisit dans sa maison un affranchi de Néron. Troublé de tant de périls qui l'environnoient, il se retira avec quelques amis à Clunia, où il fut plus occupé du regret de sa tranquillité passée, à laquelle il avoit imprudemment préféré une vaine espérance, que du soin de prendre les mesures convenables pour faire réussir son entreprise. It s'en fallut même peu, si nous en croyons Suétone, qu'il ne prît le parti de renoncer à la vie.

Telle étoit la consternation où se trouvoit Serv. Sulpicius Galba, lorsqu'Icélus, un de ses affranchis, vint de Rome lui annoncer la mort de Néron. Cet affranchi n'étoit resté dans la ville qu'autant de temps qu'il

lui en avoit fallu pour s'assurer de la vérité du fait, et pour voir de ses propres yeux le corps mort de Néron; et tout de suite il étoit parti, faisant une telle diligence, qu'en sept jours il se rendit de Rome à Clunia. Il apprit donc à Serv. Sulpicius Galba, que les cohortes prétoriennes, et à leur exemple le sénat et le peuple, l'avoient proclamé empereur, du vivant même de Néron; et il l'instruisit du sort funeste de ce prince, qui lui laissoit la place

vacante.

Sur ces heureuses nouvelles, Serv. Sulpicius Galba passa en un instant de la tristesse et presque du désespoir, à la joie et à la confiance. Il vit se former surle-champ autour de lui une cour nombreuse de personnes de tous états, qui le félicitoient àl'envi; et deux jours après, ayant reçu le courrier du sénat, qui confirmoit le rapport d'Icélus, il quitta le titre de lieutenant du sénat et du peuple romain, prit le nom de César, qui étoit devenu celui de la souveraine puissance, et se disposa à aller incessamment s'en mettre en possession dans la capitale.

Dans les commencemens, tout lui réussit. Il fut reconnu par les deux armées de Germanie; Clodius Macer, en Afrique, voulut exciter du trouble, mais il fut bientôt tué. Dans les autres provinces, il n'y eut aucun mouvement, et toutes se soumi ent avec docilité à l'obéissance de Serv. Sulpicius Galba. On a dit qu'il avoit pris ombrage de Vespasien,

qui faisoit actuellement la guerre contre les Juifs, et qu'il envoya des assassins pour le tuer. La chose ne paroît pas vraisemblable; et ce qui est certain, c'est que Vespasien n'en fut pas instruit, car il fit partir Tite son fils pour aller rendre son hommage au nouvel empereur.

Rome, qui avoit déterminé les vœux des provinces en faveur de Serv. Sulpicius Galba, par un retour inopiné, lui suscita du trouble et des alarmes. La cause du mal fut l'ambition de Nymphidius Sabinus, qui, aspirant au trône, commença par s'emparer de toute l'autorité dans la ville; il méprisoit Serv. Sulpicius Galba comme un vieillard foible et caduc, qui à peine pourroit se faire porter en litière jusqu'à Rome. Au contraire, il s'attribuoit à lui seul la gloire de la ruine de Néron, et il se comptoit puissamment soutenu par les cohortes prétoriennes ; mais quand il se présenta au camp, il en trouva les portes fermées. Effrayé, il demanda à qui les prétoriens en vouloient, et sur quel ordre ils avoient pris les armes. Il lui fut répondu d'un cri unanime, qu'ils reconnoissoient Serv. Sulpicius Galba pour empereur; alors on le laissa entrer dans le camp, mais ce fut pour le percer de mille coups; et, lorsqu'il eut été tué, son corps, environné d'un grillage, demeura pendant tout le jour à la vue de quiconque vouloit repaître ses yeux de ce spectacle.

C'étoit là un heureux événement pour Serv. Sulpicius Galba, qui se trouvoit, sans y avoir rien mis du sien, délivré d'un indigne rival, dont le génie turbulent avoit de quoi se faire craindre. Mais il déshonora ce bienfait de la fortune par la cruauté; il fit tuer Mithridate et Cingonius Varron, comme complices de Nymphidius Sabinus. Pétronius Turpilianus, choisi pour général par Néron, fut aussi mis à mort par les ordres de Serv. Sulpicius Galba; et ces illustres personnages, exécutés militairement et sans aucune forme de justice, passoient presque aux yeux du public pour des innocens oppri

més.

On attendoit toute autre chose

grandeur. Mais bientôt T. Vi nius, dont le crédit sur l'esprit de Serv. Sulpicius Galba prenoit des accroissemens rapides de jour en jour, le fit changer de système et renoncer à cette simplicité du vieux temps, et il lui persuada qu'au lieu de ces façons unies et populaires, qui n'étoient qu'une flatterie peu séante envers la multitude, il devoit soutenir son rang par une magnificence digne du maître de l'univers. Serv. Sulpicius Galba prit donc tous les officiers de Néron, et se monta pour sa maison, pour ses équipages, pour sa table, sur le ton d'un empereur.

Quoique T. Vinius tînt le plus haut rang à la cour de Serv. Sul

préfet du prétoire, avoit aussi un grand crédit; et l'assemblage du plus vicieux, réunissoit contre plus lâche des hommes avec le le gouvernement du prince qu'ils obsédofent la haine et le mépris.

du gouvernement de Serv. Sulpicius Galba, Cornélius Laco, picius Galba, et les violences de sa part révoltèrent d'autant plus qu'elles étoient moins prévues. Il avoit déjà commencé à dégénérer du goût de simplicité avec lequel il s'étoit annoncé. Tout le monde avoit été charmé de la façon dont il reçut les députés du sénat à Narbonne; non-seu

lement il leur fit l'accueil le plus gracieux, sans faste, sans hauteur; mais, dans les repas qu'il leur donna, il ne voulut point se servir des officiers de la boume de Néron qui lui avoient été envoyés, et il se contenta de ses propres domestiques. En conséquence, on le regarda comme un homme qui pensoit supérieurement, et qui se mettoit audessus d'une vaine ostentation, que l'on veut faire passer pour

L'affranchi Icélus ou Martianus

entroit avec eux en part de l'autorité; ils formoient ensemble un triumvirat de pédagogues (ainsi les appeloit-on dans Rome) qui ne quittoient point le foible

vieillard et le menoient à leur gré.

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Ces qualités, si précieuses dans un souverain, devinrent inutiles au bonheur public, par l'aveugle confiance qu'il eut en des ministres qui ne cherchoient que leurs intérêts. Le prince vouloit le bien, et le mal se faisoit avec une licence effrénée. On s'en prit à Serv. Sulpicius Galba; on le rendit responsable de la mauvaise conduite de ceux qui abusoient de son autorité, et avec raison; car, suivant la judicieuse remarque de Dion Cassius, il suffit aux particuliers de ne point faire d'injustices; mais ceux qui commandent doivent même empêcher qu'il ne s'en commette par d'autres. Il importe peu à ceux qui souffrent de qui vienne le mal, dès qu'ils en sont les vic

times.

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à se déclarer pour lui, et il punit les unes par des augmentations de tributs, les autres en détruisant leurs murailles. Il fit mourir des intendans et autres officiers, avec leurs femmes et leurs enfans; mais rien ne le rendit plus odieux que le massacre qui souilla et remplit d'horreur son entrée dans Rome. Les soldats de marine, que Néron avoit formés en corps de légion, et qui, par là, avoient acquis un grade de milice plus honorable chez les Romains, vinrent à la rencontre de Serv. Sulpicius Galba à Ponte-Mole, à trois milles de la ville, et ils lui demandèrent à grands cris la confirmation du bienfait de son prédécesseur. Serv. Sulpicius Galba, rigidement attaché à l'ordre de la discipline, les remit à un autre temps. Ils comprirent que ce délai équivaloit à un refus, et ils insistèrent d'une façon peu respectueuse; quelques-uns même tirèrent leurs épées. Cette insolence méritoit d'être punie; mais Serv. Sulpicius Galba passa les bornes, en donnant ordre à la cavalerie qui l'accompagnoit de faire main basse sur ces malheureux. Ils n'étoient point armés en règle, et ne firent aucune résistance; ce qui n'empêcha pas qu'on ne les massacrât inhumainement, et qu'il n'en restât plusieurs milliers sur la place. Quel

Nous avons dit que Serv. Sulpicius Galba avoit aliéné les esprits par divers actes de cruauté contre d'illustres personnages. Il affectoit même un appareil de terreur, ayant pris la casaque militaire, comme s'il eût eu une guerre à entreprendre ou à soutenir, et portant un poignard qui, attaché son cou avec un ruban, lui pendoit sur la poitrine. Il fit presque tout son voyage en cet équipage, qui rendoit plutôt ridicule que terrible un vieillard infirme et goutteux; et il ne revint à l'habit de paix qu'après la mort de Nymphidius Sabinus et de quelques-uns se soumirent, en imques autres. Les faits répondoient à ces annonces menaçantes; il sévit contre les villes d'Espagne et de Gaule qui avoient balancé

plorant la clémence de l'empereur, et ils furent décimés. Cette exécution sanglante excita de justes plaintes, et frappa de ter

reur ceux mêmes qui en avoient été les ministres.

une espèce d'opéra comique, ayant entonné un air fort connu, Gioient Voici le vieil avare ardont les premières paroles signirivé de sa métairie, toute l'assemblée acheva la chanson dont elle

faisoit l'application à Serv. Sulpicius Galba, et on la répéta plusieurs fois.

Les procédés qu'on lui vit tenir ne réformèrent pas l'idée que l'on s'étoit faite de lui, parce que les arrangemens même louables qu'il prenoit étoient mêlés de circonstances qui en diminuoient le prix, et totalement gâtés par l'indigne conduite de ceux qui l'approchoient. Pour remplir le trésor épuisé, il ordonna une recherche des lar

Les traits d'avarice n'étoient pas moins marqués. Les habitans de Tarragone lui ayant offert une couronne d'or pesant quinze livres, il la fit fondre, et exigea trois onces qui manquoient au poids. I cassa une cohorte de Germains que les Césars avoient établie pour leur garde, et dont la fidélité ne s'étoit jamais dé mentie; et il renvoya ces étrangers dans leur pays sans récompense. On faisoit même courir des histoires malignes, qui, sans avoir peut-être beaucoup de fondement, le rendoient tout-à-fait ridicule. On disoit qu'ayant vu qu'on luiservoit un souper, dont la dépense pouvoit être considéesses insensées de son prédécesrable, il avoit gémi de douleur; que pour reconnoître le zèle et les soins de son intendant, qui lui présentoit ses comptes en bon ordre, il lai avoit donné un plat de légumes; et qu'un fameux joueur de flûte, nommé Canus, lui ayant fait grand plaisir en jouant devant lui pendant un repas, il avoit tiré de sa bourse cinq deniers pour l'en gratifier, observant c'étoit de son argent, et non pas de l'argent du public. Ces petitesses firent grand tort à sa réputation, et l'estime universelle qu'on lui portoit au moment de son élection, étoit déjà changée en mépris, lorsqu'il

que

arriva à Rome.

Il en eut tout d'un coup la preuve; car, dans un spectacle, les comédiens qui représentoient

seur elles se montoient à cent

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cinquante millions; et elles débauchés, sur des farceurs, sur avoient été répandues sur des les ministres des plaisirs de Néron. Serv. Sulpicius Galba voulut qu'ils fussent tous assignés, et qu'on ne leur laissât que la dixième partie de ce qui leur avoit été donné; mais à peine ce dixième leur restoit-il. Aussi prodigue du bien d'autrui que du leur, ils ne possédoient ni terres ni rentes. Les plus riches ne conservoient qu'un mobilier, que le luxe, et leur goût pour l'attirail du vice et de la mollesse, leur avoient rendu précieux. Serv. Sulpicius Galba, qui n'étoit pas traitable sur l'article de l'argent, trouvant insolvables ceux qui avoient reçu les gratif cations de Néron, étendit la re

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