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avoit de criminel. «Levez-vous, ma fille, lui dit-il; vous << sortirez de chez le chevalier Bayard aussi sage et << plus heureuse que vous n'y êtes entrée. » En même temps il la conduisit chez une dame de ses parentes, à qui il recommanda le secret. Le chevalier envoya, le lendemain de bonne heure, chercher la mère de cette fille, qui fut consternée, quand, au lieu de la récompense qu'on lui avoit promise, elle se vit exposée aux reproches de Bayard. Cette femme allégua la misère, excuse valable pour le peuple, et l'impuissance où elle s'étoit trouvée de marier sa fille. « Com<< bien vous demande-t-on pour cela? dit Bayard. « Six cents francs, répondit-elle. » Le généreux che<< valier les donna sur-le-champ, et ajouta deux cents autres livres pour les habits de la fille; puis il la congédia, satisfait de s'être épargné un crime en domptant sa passion, et d'avoir contribué au bonheur d'une infortunée. 8. Le célèbre Camille assiégeoit la ville de Faléries, dont les habitans, par les secours qu'ils avoient donnés aux Véiens, avoient provoqué le courroux de la république romaine. Pendant que ce grand homme hâtoit ses travaux, la fortune lui offrit une occasion de prendre la place, qu'une ame moins belle, moins généreuse que la sienne, auroit sans doute saisie. Le maître, qui instruisoit les enfans des principaux citoyens, sous prétexte de les mener promener, les fit sortir de la ville, et les conduisit au camp du général romain. « Ces enfans que je vous livre, lui dit-il, vous assurent << la prise de Faléries. » Camille, plein d'horreur pour cette noire perfidie, jeta sur le traître un regard menaçant. «Scélérat, lui dit-il, va faire ton infame présent à un peuple, à un général qui te ressemblent : tu t'es trompé, en t'adressant aux Romains. Nous n'a« vons, il est vrai, avec les Falisques, aucune union << politique; mais la nature a mis entre eux et nous << un commun intérêt que nous respecterons toujours. « La guerre a ses droits, ainsi que la paix ; et nous << savons les observer avec autant de justice que <«< courage. Nous sommes armés, non point contre cet « âge, que l'on épargne dans le saccagement même des

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<<<< villes, mais contre des hommes armés eux-mêmes, « qui, sans être offensés, sans être provoqués par << nous, ont osé nous bloquer dans notre camp devant << Véies. Aujourd'hui ton crime a surpassé le leur : tu << triomphes de tes concitoyens en scélératesse. J'en << triompherai, moi, par les vertus romaines, la pru«dence, l'activité, le courage; et bientôt Faléries « aura le sort de Véies. » Après ce terrible discours, Camille fait arrêter le traître, ordonne qu'on le dépouille; puis armant les mains de ses jeunes élèves de fouets et de verges, il leur commande de reconduire à grands coups, dans la ville, leur perfide pédagogue. Les enfans obéirent avec joie, et leur retour frappa singulièrement tous les citoyens. Quand ils eurent appris le sujet de cette espèce de comédie pleins d'admiration pour la vertu romaine, ils envoyèrent au sénat des ambassadeurs qui s'exprimèrent de la sorte:« Auguste compagnie, vaincus par vos soldats et votre << général, nous venons mettre le comble à votre glo<< rieux triomphe, en nous soumettant à vous, persia

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« dés que nous vivrons plus heureusement sous votre

<< empire, qu'en continuant d'obéir à nos lois. L'issue << de cette guerre offre un bel exemple au genre <«< humain : vous l'instruisez, vous, en préférant dans <«< la guerre, la bonne foi à la victoire; nous, en nous << donnant sans réserve à des vainqueurs si généreux. << Maintenant nous sommes à vous, illustres sénateurs: « envoyez à Faléries des guerriers qui prennent pos<< session de la ville; les portes sont ouvertes, les << otages préparés. Nous vous serons toujours fidèles: << nous vous obéirons toujours avec reconnoissance. >>

9. Pendant la guerre des Romains contre Pyrrhus, roi d'Epire, un inconnu vint trouver Fabricius, général de l'armée, dans son camp, et lui rendit une lettre du médecin du roi, qui lui offroit d'empoisonner Pyrrhus, si les Romains lui promettoient une récompense proportionnée au grand service qu'il leur rendroit, en terminant une guerre si importante, sans aucun danger pour eux. Fabricius, sachant qu'il y a des droits inviolables à l'égard même des ennemis, fut

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frappé d'une juste horreur à cette proposition. Comme il ne s'étoit point laissé vaincre par l'or que le monarque lui avoit offert dans une autre circonstance, il crut qu'il seroit honteux de vaincre ce prince par le poison. Après en avoir conféré avec son collégue Emilius, il écrivit promptement à Pyrrhus, pour l'avertir de se précautionner contre cette noire perfidie. Sa lettre étoit conçue en ces termes :

CAIUS-FABRICIUS et QUINTUS-EMILIUS, consuls au roi PYRRHUS : salut.

<< Il paroît que vous vous connoissez mal en amis et «en ennemis; et vous en tomberez d'accord, quand « vous aurez lu la lettre qu'on nous a écrite; car vous « verrez que vous faites la guerre à des gens de bien << et d'honneur, et que vous donnez toute votre con«fiance à des méchans, à des perfides. Ce n'est pas « seulement pour l'amour de vous que nous vous don«nons cet avis, mais pour l'amour de nous-mêmes, << afin que votre mort ne donne point une occasion de << nous calomnier, et qu'on ne croie pas que nous avons << eu recours à la trahison, parce que nous désespérions « de terminer heureusement cette guerre par notre << courage. >>

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Pyrrhus, ayant reçu cette lettre, s'écria, plein d'admiration : « A ce trait, je reconnois Fabricius; il seroit «plus facile de détourner le soleil de sa route ordi<«<naire, que de détourner ce Romain du sentier de «la justice et de la probité. » Quand il eut bien avéré le fait énoncé dans la lettre, ìl fit punir du dernier supplice son infame médecin ; et pour témoigner au général ennemi sa vive reconnoissance, il lui renvoya tous les prisonniers sans rançon. Le magnanime consul, ne voulant accepter ni une grace de son ennemi, ni une récompense pour n'avoir pas commis la plus abominable de toutes les injustices, ne refusa point les prisonniers, mais il lui renvoya un pareil nombre de Tarentins et de Samnites.

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10. Emilius-Scaurus, général romain accusé par un certain Varius d'avoir reçu de l'argent du ro i

Mithridate, pour trahir la république, plaida ainsi sa cause: «Varius accuse Scaurus de s'être laissé « corrompre par les ennemis de Rome; et Scaurus nie << avoir commis ce crime: lequel devez-vous croire ?>> L'accusation tomba aussitôt.

11. Scipion l'Africain, ayant été accusé par quelques tribuns, n'entreprit point de se justifier des crimes qu'on lui imputoit; il dit seulement : « Romains, ce « jour est le même où j'ai vaincu Annibal_dans les << plaines de Zama : je vais au Capitole en rendre graces « à Jupiter.» Aussitôt il s'avança vers le temple de ce dieu, avec cet air majestueux qu'il avoit dans son triomphe.Le peuple le suivit en faisant de grandes acclamations, et les accusateurs restèrent seuls sur la place.

12. De retour à Thèbes, après avoir remporté plusieurs victoires, Epaminondas fut accusé d'avoir gardé le commandement de l'armée plus long-temps qu'il n'étoit permis par les lois.Ce grand général ne s'amusa point à réfuter ses accusateurs. «Je ne refuse pas, dit«<il, desubirlarigueur des lois ; je demande seulement « qu'après ma mort, on grave sur mon tombeau cette <«< inscription: Epaminondas fut condamné à mort pour <«< avoir, malgré les Thébains, ravagé les terres des << Lacédémoniens leurs ennemis; rebâti la ville de Mes<< sine, établi dans l'Arcadie une paix solide, et rendu « la liberté aux Grecs. » Cette harangue, d'un genre si nouveau, déconcerta les juges qui n'osèrent le condamner. En rentrant dans sa maison, accompagné de ses amis qui le félicitoient, son petit chien vint à lui, et lui fit mille caresses. Epaminondas, attendri, se tourna vers ceux qui l'environnoient: « Ce chien, leur dit-il, << me marque sa reconnoissance des soins que je prends « de lui; et les Thébains, à qui j'ai rendu tant de << services, veulent me condamner à la mort ! »

13. Lycurgue, après la mort de son frère, qui ne laissoit point d'enfant mâle, pouvoit aisément monter sur le trône; et il fut roi, en effet, pendant quelques jours. Mais dès que la grossesse de sa belle-soeur fut connue, il déclara que la royauté appartenoit à l'enfant qui en naîtroit, si c'étoit un fils; et, dès ce moment,

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ladministra le royaume comme son tuteur. Cependant la veuve lui envoya dire sous main qne s'il vouloit lui promettre de l'épouser quand il seroit roi, elle feroit périr son fruit: une proposition si détestable fit horreur à Lycurgue il dissimula néanmoins, et amusant cette fenimme par différens prétextes, il la mena jusqu'à son terme. Quand l'enfant fut venu au monde, il le prit entre ses bras; et adressant la parole à ceux qui étoient présens : «Voici, dit-il, le roi qui nous vient de naître, « seigneurs Spartiates ; » en même temps il le mit dans la place du roi, et le nomma Charilaüs, à cause de la joie que tout le peuple témoigna de sa naissance.

14. A peine Antigonus II fut-il monté sur le trône de Macédoine, que le peuple parut fàché de l'avoir pour souverain. Il le fit assembler; et, détachant son diadême, il dit qu'on n'avoit qu'à le donner à celui qu'on en croiroit le plus digne. Le peuple, frappé de cette offre inattendue, et charmé d'ailleurs des exploits d'Antigonus, le pria de garder la couronne; mais il ne consentit à la reprendre, qu'après que les séditieux eurent été punis.

15. Mævius, centurion de l'armée d'Auguste, fut pris et conduit à Antoine, qui, d'un ton terrible lui demanda quel traitement il vouloit qu'on lui fît : << Fais-moi mourir, répondit-il ; car ni la crainte, ni << la reconnoissance ne pourront jamais m'engager à << quitter le parti d'Auguste pour embrasser le tien. » VoyezCLÉMENCE, CONSTANCE, EGALITÉ, HÉROÏSME, INTREPIDITÉ, MAGNANIMITÉ.

GRAVITÉ.

M. D'ARGENSON, à qui Paris doit, en quelque sorte

la naissance de sa police, savoit quel est le pouvoir d'un magistrat sans armes, et avoit le courage de s'y fier. La cherté étant excessive dans les années 1709 et 1710, le peuple, injuste parce qu'il souffroit, s'en prenoit en partie à M. d'Argenson, qui cependant'

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