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LA COLONISATION

A MADAGASCAR

DEPUIS LA CONQUÊTE FRANÇAISE

PAR

CLÉMENT DELHORBE

Mesdames, messieurs,

A notre dernière séance, notre collègue et ami Froidevaux, dans un exposé aussi éloquent que lumineux, vous a retracé les diverses phases par lesquelles a passé la colonisation de la Grande lle africaine depuis le moment où les navigateurs ont abordé pour la première fois sur ses côtes, jusqu'au jour récent où, après deux siècles de persévérants efforts et grâce à la vaillance de nos troupes, Madagascar est définitivement devenu terre française.

M. Froidevaux vous a montré comment nos ancêtres, en commençant par M. de Beaulieu et en passant par les Rigault, les Promis, les Flacourt, les de la Haye, le comte de Mondave et tant d'autres, pour arriver à Sylvain Roux, à Laborde et à Lambert, comment nos ancêtres, souvent peu secondés par la mère-patrie, ont travaillé avec courage et opiniâtreté à planter notre drapeau sur cette terre lointaine; il vous a montré comment ils ont acquis à notre influence des droits indestructibles que, le moment venu, nous avons pu faire valoir sans soulever une trop vive opposition de la part de l'Europe moderne.

A moi incombe maintenant le périlleux honneur de poursuivre devant vous cette étude, honneur d'autant plus périlleux et d'autant plus délicat, que nous allons aborder, que nous aurons à apprécier des faits qui, loin d'être entrés dans le domaine de l'histoire, sont au contraire, tout rapprochés de nous et ont eu pour acteurs des personnalités dont la plupart sont encore vivantes aujourd'hui. Ces faits, il nous sera difficile de ne pas les effleurer tout au moins, car il est nécessaire de les rappeler pour la compréhension d'événements que le plus

MADAGASCAR.

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souvent ils ont provoqués: nous le ferons aussi légèrement que possible, nous souvenant que, de même que notre honorable prédécesseur à cette tribune, nous avons à envisager non pas l'histoire de Madagascar proprement dite, mais seulement les données et la marche en avant de sa colonisation.

Bien que cinq années, à peine, nous séparent du point où s'est

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arrêté M. Froidevaux, notre sujet nous a semblé si touffu, les faits contemporains ne pouvant s'expliquer et se justifier souvent sans nécessiter d'assez longs développements, que nous nous sommes vu dans l'obligation de vous demander deux de nos réunions pour les exposer.

Je voudrais consacrer celle de ce soir à l'examen de la période que j'appellerai préparatoire à la colonisation, cette préparation ayant été rendue nécessaire par l'état du pays et par les événements qui s'y sont produits au moment de notre installation, événements que vous avez tous encore présents à la mémoire et dont le plus considérable est

l'insurrection qui éclata dans la Grande Ile peu après notre arrivée. Quelle était alors la situation respective des diverses tribus entre elles?

Quelles furent, autant que nous pouvons l'apprécier aujourd'hui, avec le faible recul dont nous disposons, les principales causes de l'insurrection dont je viens de vous parler?

Comment et par quels moyens cette insurrection fut-elle réprimée ? Quelles en furent les conséquences?

Quels enseignements en avons-nous tiré pour l'avenir?

Puis, entrant plus au coeur de la question, je m'efforcerai de vous montrer dans la seconde partie de cette étude, comment, après tant de sacrifices consommés, tant de difficultés surmontées, nous nous y sommes pris, pour essayer de tirer parti du pays conquis et nous l'assimiler en le colonisant ;

Dans quelle mesure il est permis de compter, pour mener cette œuvre à bien, sur le concours des indigènes, nos nouveaux sujets;

Ce qui a été fait pour assurer, autant qu'on l'a pu, ce concours à nos émigrants et le leur rendre de jour en jour plus favorable ;

De quelle manière ont été réglés les rapports qui doivent forcément exister entre les colons et les indigènes ;

Comment on a tenté d'attirer le colon en lui assurant le plus de chances possible de succès.

Nous nous demanderons ensuite si nos compatriotes ont répondu à cet appel qui leur a été adressé et de quelle façon ils y ont répondu; à quelles entreprises ils se sont livrés; s'ils ont obtenu des résultats et quels sont ces résultats.

Nous examinerons enfin ce qu'il nous reste à faire pour tirer le parti le plus profitable de tous les efforts, de toutes les bonnes volontés qui se manifestent, et les amener à réaliser le maximum des choses utiles à l'intérêt général d'abord, aux intérêts particuliers ensuite.

Telle est, Mesdames et Messieurs, la tâche, au-dessus de mes forces évidemment, que j'ai assumée, n'ayant pour suppléer à mon insuffisance qu'une confiance absolue dans la cause que je vais vous présenter et mon ardent désir de la servir.

Il ressort de la situation politique de Madagascar, avant sa conquête par nos armes, comme vous l'a présentée M. Froidevaux, et de

l'étude des différentes peuplades qui l'habitent, que la tribu Hova, ainsi appelée du nom d'une de ses castes, exerçait une autorité nominale sur la plus grande partie de l'ile, et effective sur plusieurs points. Une semblable situation avait déterminé le Gouvernement de la République à se servir de l'autorité établie pour implanter notre influence dans l'intérieur du pays. Aujourd'hui

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Fig. 182.

Ranavalo Manjaka III, dernière reine de Madagascar.

que, par sa politique dite de races, le Gouverneur Général a brisé cette autorité pour y substituer ouvertement la nôtre, il est permis d'étudier de plus près et sans risquer de réveiller des divergences d'opinions complétement éteintes, les éléments et les conditions du problème tel qu'il se posait en 1895, au lendemain de la conquête, au moment de l'entrée du général Duchesne à Tananarive.

Les partisans acharnés de l'hégémonie Hova attribuaient à cette peuplade une organisation administrative, sinon complète, tout au moins douée d'éléments principaux et perfectibles, indispensables pour atteindre le but qu'ils se proposaient. Ses détracteurs, au contraire, prétendaient que les Hovas, en dehors de Tananarive, étaient loin d'être les maîtres et que le gouvernement n'avait ni autorité, ni moyen d'en acquérir. Comme toujours, comme dans la plupart des cas, la vérité était entre ces deux opinions extrêmes.

Nier, en effet, que les Hovas, avec une habileté que nous serions en droit de leur envier dans beaucoup de nos colonies, se contentaient d'occuper les points stratégiques et commerciaux, les centres de ravitaillements, que, par suite, cette petite peuplade, dans un territoire aussi vaste que Madagascar, avait su, sans diminuer ses forces, se mettre aux bons endroits, serait commettre une erreur indiscutable. Tout le monde admet aujourd'hui que partout où l'on faisait quelque commerce, où les ressources locales pouvaient donner lieu à des transac

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Fig. 183.

Rainilaiarivony, le dernier Premier-Ministre du Gouvernement Hova.

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