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les épaules trente coups de baguette. On entra en capitulation pour adoucir le supplice. L'exécuteur demanda une somme beaucoup plus forte que celle qu'offroit le criminel; et comme il le voyoit incertain, il lui donna un coup si rudement appliqué, que le marché fut conclu au prix qu'il avoit mis d'abord. La sentence n'en fut pas moins exécutée; les trente coups furent administrés, mais si légèrement, que la baguette touchoit à peine les habits. L'exécution faite, le coupable se mêla tranquillement parmi les spectateurs, entendre les jugemens de quelques autres causes.

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12.Julien l'Apostat aimoit à rendre la justice: il se piquoit d'ensuivre scrupuleusement les règles dans sa conduite, et ne s'en écartoit jamais dans les jugemens.Sévère sans être cruel, il usoit plus souvent de menaces que de punitions. Très-instruit des lois et des usages, il balancoit sans aucune faveur le droit des parties. Le premier de ses officiers n'avoit nul avantage sur le dernier de ses sujets. Il abrégeoit la longueur des procédures, et les regardoit comme une fièvre lente qui ruine et consume le bon droit. Dès que l'injustice lui étoit dénoncée, il s'en croyoit chargé, tant qu'il la laisseroit subsister. Le foible et l'innocent trouvoient toujours auprès du prince un accès facile. Comme il paroissoit souvent en public pour des fêtes et pour des sacrifices, rien n'étoit si aisé que de l'aborder: il étoit toujours prêt à recevoir les requêtes et à écouter les plaintes. Il laissoit toute liberté aux avocats: ils étoient les maîtres d'épargner la flatterie; mais le règne précédent les y avoit trop accou tumés. Un jour qu'ils applaudissoient avec une sorte d'enthousiasme à une sentence qu'il venoit de prononcer: « Je serois flatté de ces éloges, dit-il, si je croyois <<< que ceux qui me les adressent, osassent me censurer « en face, dans le cas où j'aurois jugé le contraire. »

13.M. dela Faluère, premier président du parlement de Bretagne, n'étant encore que conseiller, avoit été nommé rapporteur d'une affaire. Il en laissa l'examen à des personnes qu'il croyoit d'aussi bonne foi que lui, et, sur l'extrait qui lui en fut remis, il rapporta le procès. Quelques mois après le jugement, il reconnut

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que sa trop grande confiance et sa précipitation avoient dépouillé une famille honnête et pauvre des seuls biens qui lui restoient. Il ne se dissimula point sa faute; mais, ne pouvant faire rétracter l'arrêt, qui avoit été signifié et exécuté, il se donna les plus grands mouvemens pour retrouver les malheureuses victimes de sa négligence. Il y réussit, et les forca d'accepter, de ses propres deniers, la somme qu'il leur avoit fait perdre involontairement.

14. Auguste avoit porté une loi qui marquoit la manière d'examiner et de juger les crimes d'adultère, et les peines qu'il falloit infliger à ceux qui en étoient convaincus. Quelque temps après, on accusa à son tribunal un jeune homme d'avoir eu commerce avec sa fille Livie.Dans le premier mouvement de sa colère, le prince saute sur l'accusé et le frappe rudement : << Souvenez-vous de votre loi, César !» lui cria le jeune homme. Auguste s'arrête aussitôt, et rentre en luimême. Il fut si confus de cet emportement, qui blessoit la justice, qu'il ne prit, ce jour-là, aucune nourriture.

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15. Une vieille femme, injustement condamnée, alla trouver Philippe, roi de Macédoine, et le pria de prendre connoissance de sa cause. «Je n'ai pas le temps, ma << bonne, lui dit le monarque. Pourquoi donc êtes<< vous roi, lui repartit la suppliante, si vous n'avez pas << le temps de rendre la justice à vos sujets? « Philippe admira la généreuse liberté de cette vieille, et l'écouta.

16. Satibarzane, favori d'Artaxerxès-Mnémon, demandoit un jour à ce prince quelque chose d'injuste.Le monarque apprit qu'on lui avoit promis trente mille dariques, s'il obtenoit ce qu'il demandoit. Il fait aussitôt venir son trésorier, et lui commande de donner au courtisan la somme qu'on lui avoit fait espérer : « Je n'en « serai pas plus pauvre, quand je vous aurai fait ce pré<«< sent; mais je serois moins juste et moins équitable, <«< si je vous accordois ce que vous me demandez. »

17. Marsias, frère d'Antigonus, roi d'une partie de l'Asie, ayant un procès considérable, pria ce prince de vouloir bien juger l'affaire chez lui, et non pas en public. << Si nous ne faisons rien de contraire au droit, répondit

<«<le monarque, il sera mieux de plaider au tribunal, « en présence du peuple. » Pendant qu'il faisoit la guerre, un sophiste lui présenta un traité de la justice: «N'es-tu pas fou, lui dit-il, de me venir parler de << justice, quand je m'empare du bien d'autrui ? »

18. On demandoit à Alexandridas, l'un des plus illus tres citoyens de Sparte, pourquoi les sénateurs de Lacédémone employoient plusieurs jours à l'instruction des affaires criminelles qui pouvoient conduire à la mort, et pourquoi celui que l'on renvoyoit absous restoit sous la puissance de la loi ? « Plusieurs jours, répondit-il, << sont employés à l'instruction du procès, parce que si << l'on se trompoit en prononcant une sentence de mort, <«< il ne resteroit aucun moyen de la réformer: et celui << qu'on décharge de l'accusation reste soumis à la loi, << parce qu'il se peut ensuite trouver contre lui de nou«velles charges, qui le rendent digne de la peine que <<< la loi prononce. >>

19. Unchevalier, quine l'étoit pas moins d'industrie que de nom, faisoit une dépense considérable, ne songeoit qu'au jeu et au plaisir, et sans cesse accumuloit de nouvelles dettes, sans s'embarrasser du payement. Ses créanciers le firent enfin arrêter et mettre en prison. Ses amis se rendirent aussitôt à la cour, et s'inté ressèrent vivement pour lui auprès d'Alfonse V, roi d'Aragon, leur souverain: ils supplioient ce monarque d'ordonner qu'on l'élargît, apportant pour raison qu'il falloit du moins laisser la liberté à cet infortuné qui avoit tout perdu. Alfonse leur répondit : « Cet « homme-là n'a pas dépensé son bien et contracté ces << dettes pour le service du roi ni de la patrie : il n'a <«< cherché uniquement qu'à flatter son corps; il est << juste que son corps en fasse maintenant pénitence.>

28. Théodoric, roi des Goths, ne se croyoit placé sur le trône que pour faire régner avec lui lajustice, qu'ilregardoit comme la fonction la plus sacrée d'un souverain. Il donnoit toute son attention à choisir des magistrats intègres et éclairés ; et s'il arrivoit qu'il se fût trompé dans son choix, il punissoit sévèrement leurs injustices. Rien ne lui paroissoit plus indigne que d'abuser du

pouvoir

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pouvoir pour opprimer les inférieurs, et ce crime étoit irrémissible. Il ne pardonnoit pas plus aux juges qui, soit par négligence, soit par une collusion criminelle différoient de rendre justice aux opprimés,et favorisoient ainsi les injustes prétentions des personnes puissantes. On en rapporte un exemple louable dans le principe mais répréhensible peut-être par l'excès de sévérité. Pendant qu'il étoit à Rome, une veuve vint se plaindre à lui de ce qu'ayant depuis trois ans un procès contre un sénateur nommé Formus, elle n'avoit pu encore obtenir de jugement. Il fit aussitôt appeler les juges. « Si vous ne terminez demain cette affaire, leur dit-il, « je vous jugerai vous-mêmes. » Le lendemain la sentence fut rendue. La veuve étant venue remercier le prince, un ciergeallumé à la main, suivant la coutume de ce temps-là: «Où sont les juges?» dit Théodoric.On les amena devant lui : « Eh! pourquoi, leur dit-il avec << indignation, avez-vous prolongé trois ans une affaire << qui ne vous a coûté qu'un jour de discussion?» Après ce reproche, il leur fit trancher la tête. Cet exemple mit en activité tous les tribunaux.

21. Justin II, voulant rétablir la justice, nomma préfet de Constantinople, un magistrat intègre, plein de fermeté et de vigueur, qu'il revêtit de toute son autorité, pour punir les coupables sans distinction d'état ni de rang: il déclara que les sentences du préfet étoient exécutées sans appel, et que le souverain ne feroit grace à personne.Cette déclaration si terrible effraya tous ceux que l'iniquité soutenoit, hormis un seul qui se crut audessus de toutes les lois. Une pauvre veuve vint se jeter aux pieds du préfet, se plaignant d'un officier général, qui l'avoit dépouillée de tous ses biens. Le magistrat, par ménagement pour ce seigneur, qui étoit parent du prince, lui écrivit pour le prier de rendre justice, et lui fit présenter sa lettre par la personne offensée. Pour toute satisfaction, elle ne reçut que des outrages et de mauvais traitemens. Indigné de cette insulte, le préfet cite l'accusé devant son tribunal : celui-ci ne répond que par des railleries et des injures contre le juge et le juge ment. Au lieu de comparoître, il va diner au palais, où Tome II

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il étoit invité avec un grand nombre de courtisans. Le préfet, ayant appris qu'il étoit à table avec l'empereur, entre dans la salle du festin; et, adressant la parole au prince: «Seigneur, lui dit-il, si vous persistez dans la « résolution que vous avez annoncée, de châtier les << violences, je continuerai d'exécuter vos ordres; mais, << si vous renoncez à ce dessein si digne de vous, s'il faut << que les plus méchans des hommes soient honorés de << votre faveur et recus à votre table, acceptez la dé<< mission d'une charge inutile à vos sujets, et qui ne peut << que vous déplaire. » Justin,frappé d'une remontrance si hardie: « Je n'ai point changé, répondit-il; poursuivez << par-tout l'injustice je vous l'abandonne, fût-elle as<< sise avec moi sur le trône, j'en descendrois pour la << livrer au châtiment. » Armé de cette réponse, le magistrat fait saisir le coupable au milieu des convives, le traine au tribunal, écoute la plainte de la veuve ; et comme cet homme, auparavant si superbe, alors interdit et tremblant, ne pouvoit alléguer aucun moyen de défense, il le fait dépouiller, battre de verges, et promener sur un âne, la face tournée en arrière, par toutes les places de la ville. Ses biens furent saisis au profit de la veuve, et cet exemple arrêta pour quelque temps l'usurpation et la violence. L'empereur récompensa la fermeté du préfet, en le créant patrice, et lui assurant sa charge pour tout le temps de sa vie.

22. Un des domestiques du prince Henri, fils aîné de Henri IV, roi d'Angleterre, avoit été accusé au banc du roi, et saisi par ordre de ce tribunal. Le jeune prince, qui aimoit beaucoup cet homme, regarda cette entreprise comme un manque de respect pour sa personne ; et n'ayant que trop de flatteurs autour de lui, qui enflammèrent son ressentiment par leurs conseils, il se rendit lui-même au siége de la justice, où, se présentant d'un air furieux, il donne ordre aux officiers de rendre sur-lechamp la liberté à son domestique. La crainte fit baisser les yeux à tous ceux qui l'entendirent, et leurôta l'envie de répondre. Il n'y eut que le lord, chef de justice, nommé sir William Gascoigne, qui se leva sans aucune marque d'étonnement, et qui exhorta le prince à se

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